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  1. Chevaliers Mon fils, Lorsque vous lirez ces lignes, vous serez chevalier. Vos jours en tant qu’écuyer à la cour du seigneur Crispin sont terminés, vous devez rentrer en toute hâte pour reprendre mes fonctions de seigneur intendant de notre domaine pendant que je serai parti en croisade. Une fin abrupte et sans cérémonie pour votre vie d’écuyer, c’est certain. Le titre de chevalier se gagne généralement par des actes méritoires, mais, parfois, la nécessité prévaut. Je suis certain que votre futur verra moults actes héroïques pour une centaine de chevaliers. J'espère que sa Grâce a veillé à ce que vous suiviez les rites traditionnels : les serments sacrés, la veillée nocturne et le dernier coup. Que ce soit la dernière fois qu'un homme vous frappe sans conséquence, car un chevalier ne souffre point le déshonneur. Je comprend que vous soyez déçu de voir un évènement aussi important de votre vie se dérouler à la hâte dans un petit sanctuaire avant d'être renvoyé sans cérémonie. À mon retour, je vous en dirai plus sur mon ascension au rang de chevalier, comment j'ai été élevé à ce titre par une froide nuit d'hiver dans un champ boueux, entouré de tous côtés par des maraudeurs åsklandais. La plupart des écuyers élevés à mes côtés avaient déjà trouvé la mort avant le coucher du soleil. Être fait chevalier était un honneur pour lequel ils étaient heureux de donner leur vie. Leurs actes n’ont été récompensé de nul éloge, nul festin somptueux. À bien des égards, ils étaient de plus vrais chevaliers que beaucoup de ceux qui portent ce titre aujourd'hui. Rappelez-vous qu'un chevalier n'est pas fait par l'opinion des autres, mais par son cœur et ses actes. Un homme qui aspire à la gloire et à l'adulation sans le mériter par ses actes n'est pas un chevalier, mais un fanfaron. Avec le temps, vous recevrez les honneurs que vous méritez, mais vous devrez d'abord être mis à l'épreuve. Dans les mois à venir, réfléchissez aux serments que vous venez de prêter : agir en accord avec les vertus sacrées de la religion. Efforcez-vous de vivre selon le code du chevalier. Nombreux sont ceux qui peuvent citer les sept principes : excellence, tolérance, générosité, justice, vaillance, honneur et foi. Cependant, comme vous le savez sans doute, il existe de nombreuses listes de ce type, et les véritables qualités du chevalier ne peuvent être prescrites aussi aisément. Après toute une vie d'épreuves et de réflexions, j'en suis venu à comprendre la voie du chevalier de la manière suivante : – Dites toujours la Vérité, car une vie bâtie sur le mensonge ne peut mener qu’à la ruine. Traitez vos compagnons et le monde avec bonté et compassion, comme il sied à un chevalier, et vous gagnerez leur respect et leur amour. Soyez un bouclier pour ceux qui ne peuvent se défendre. Avant tout, soyez fidèle à vous-même, de crainte d’être faux envers autrui. – Être courageux, c'est être fort, mais le vrai Courage exige plus que la force physique. Trouvez la force intérieure pour défendre vos convictions et la volonté de résister aux tribulations de la vie. Opposez-vous aux malfaiteurs où que vous les trouviez. Ne cherchez pas les querelles oisives, mais si vous vous retrouvez dans l'une d'elles, assurez-vous d’être redouté par vos adversaires. Soyez l'épée de la justice qui ne s'abat que sur ceux qui méritent son courroux. – Ne craignez point les Épreuves. Faites preuve de vaillance et de miséricorde dans la guerre, et de magnanimité dans la paix, et maintenez toujours la foi. Défendez notre terre et notre peuple, même jusqu'à la mort. Si vous échouez en cours de route, cherchez à vous racheter par vos bonnes œuvres et vos prières. Personne ne possède les qualités nécessaires pour réussir pleinement dans une telle entreprise. Vous lutterez et vous échouerez : c'est ce qui vous rendra digne. Rachetez-vous aux yeux de la Dame pour devenir plus que ce que vous étiez avant l’épreuve. Certains sont broyés par la défaite, d'autres sont rendus humbles par la victoire. La grandeur réside dans ceux qui peuvent emprunter ces deux voies avec grâce. – L'équilibre entre votre Devoir seigneurial et le respect des principes de la chevalerie est l'un des combats les plus difficiles auxquelles vous serez confronté dans cette vie. Un jour, vous serez peut-être confronté à un choix où vous devrez renoncer à l'honneur du chevalier pour le bien général du Royaume. Veillez à ne pas vous égarer trop loin sur le sentier de l'opportunisme au détriment de l’honneur, comme l'ont fait de nombreux faux chevaliers. Protégez et guidez vos sœurs. Veillez à ce que les plus jeunes soient assidues dans leurs études. Gwenaëlle est toujours aussi zélée et têtue. Elle mettra votre patience à l'épreuve et fera un pied de nez à votre nouvelle autorité. Ne la laissez pas vous décourager dans vos fonctions de seigneur, mais ne la jugez pas trop sévèrement non plus. N'oubliez pas que les liens du sang sont sacro-saints et que la famille est tout. Je prie pour que les lettres que je lui adresse vous épargnent le pire de sa colère. Les bourgeois de Bréval pourraient vous demander le droit de cultiver les terres au nord de notre domaine, espérant ainsi profiter de mon absence. Refusez catégoriquement toute demande de ce genre. Les forêts et les lacs proches du Valpéril sont des lieux sacrés, au même titre que n'importe quel sanctuaire. Piller ces terres sacrées dans un souci de profit égoïste serait un grave péché, porteur de ruine. Une trêve délicate existe avec les fées qui ont élu domicile dans ces bois changeants. Ne sous-estimez pas leurs caprices. Je reviendrai sur ce sujet lorsque j'en aurai le temps. Par la grâce de la Dame, je vous donne ma bénédiction. Puissions-nous nous retrouver après cette guerre, et puissions-nous tous deux être renforcés par nos épreuves dans les mois à venir. Votre père, le seigneur Pelleas des îles. [sceau apposé sur la lettre] – Lettre découverte dans les affaires du seigneur Gawain le Bon, à sa mort à l'âge de 97 ans
  2. Castes Mes très chères sœurs bien-aimées, vous qui êtes au plus près de mon cœur, Depuis fort longtemps déjà, notre royaume est gouverné par et pour les trois états qui nous ont été indiqués par Sa volonté, ce précepte sacré étant observé depuis l’époque d’Uther le Sanctifié. Dans sa clairvoyance, le premier vrai roi a énoncé la manière dont les humains devraient vivre et se gouverner. En cela, il suivait les commandements de la Reine des coupes : faites preuve de Courage, parlez en toute Honnêteté, et endurez avec Constance. Ainsi depuis ces jours nous répartissons-nous. D’aucuns sont nés de la terre, pour œuvrer et servir. D’autres sont nés pour la bataille, doivent porter les armes et risquer leur vie. Enfin, il y a ceux et celles qui perçoivent Son appel et qui ressentent en leur cœur l’émoi de la prière et de l’étude. Nous devons être de fiers exemples de ce troisième pilier. Soyez assidues à l’ouvrage, soyez attentives aux leçons de vos enseignants, car votre esprit doit être aussi affûté que la lame d’un chevalier, et aussi vif que la flèche d’un sergeant. Pour vos protégés, vous serez plus qu’une simple protection contre les arts noirs : vous servirez aussi de guide spirituel pour leur conscience sur leur chemin de vie. Une fois votre formation achevée, vous devrez prolonger vos études, où que vous alliez, chaque jour de votre vie. Cette sagesse vous sera indispensable : continuez à la rechercher. Mettez-vous en quête de ce qui est Vrai, car nulle sagesse ne peut venir du mensonge. Vous devez être une lueur dans les ténèbres. Vous devez mettre à jour ce qui est caché. Vous recourez à la Vérité pour guider les clercs qui se tourneront vers votre autorité morale. Nous devons être leur cœur. Nous devons orienter leurs études. Car nonobstant les serments faits envers leur roy, leur duc ou leur seigneur, c’est en nous autres, Damoiselles, qu’ils placent leur foi, et nous devons nous montrer à la hauteur de cette tâche. Les sénéchaux, les clercs, les érudits, les maçons, les soignants… tous se tourneront vers vous, en tant que compagnes de la Dame, afin de connaître Sa volonté. À leur tour, ceux qui prient et ceux qui étudient serviront les manants comme la noblesse. Ils soigneront les blessés, panseront leurs blessures, instruiront les jeunes gens, prodigueront leurs conseils à tous et à toutes. Et tandis qu’ils s’adonnent à ces tâches, il vous reviendra de déceler parmi eux, peu importe la hauteur ou la bassesse de leur naissance, ceux et celles qui vous paraissent dignes de s’élever au-dessus de leur condition pour rejoindre un Ordo. Recrutez ceux et celles se démarquant par la vivacité de leur esprit et la profondeur de leurs réflexions, tout comme vous en avez vous-même fait la preuve. Démarquez-les de leurs pairs en leur offrant une place en nos lieux d’apprentissage, pour peu que leur suzerain en convienne. En outre, n’oubliez pas que c’est à vous qu’il incombe de rendre justice pour les pénitents. Vous devez leur fixer leur peine, trois fois équivalente au poids de leurs péchés, afin qu’ils et elles puissent regagner leur place dans le monde. Ils viendront à vous pour demander l’expiation, et c’est avec une grande résolution que vous accéderez à cette requête. Gardez-vous des sentences trop légères, et souvenez-vous que vous pouvez les employer à vos propres fins, car tant qu’ils vous servent, ils servent la Dame éternelle elle-même. Envoyez-les parcourir des lieux sombres, confiez-leur de terribles missions, soumettez-les à l’épreuve pour faire ressortir leur véritable valeur, qu’ils en reviennent en héros… ou qu’ils n’en reviennent pas. Préserver, c’est gâcher. Gardez ces paroles en mémoire, gravez-les dans votre cœur, et façonnez le monde selon Son bon vouloir. – Damoiselle Alize, de la schola du Triflemont
  3. 4e DE COUVERTURE Protégés par leurs hautes murailles, et plus encore par leurs sévères lois, les maîtres de la chaîne et du fouet émergent des ruines fumantes de la Plaine foudroyée. Du haut de leurs puissantes ziggourats, ces architectes d’un nouvel ordre mondial redoutable et despotique proclament leur détermination d’acier au visage de leurs innombrables ennemis. Tous sont appelés à servir – ou à succomber– face aux Nains infernaux !
  4. p. 112 Épilogue Chère Maman, J’espère que vous avez bien lu toutes mes lettres dans le bon ordre, quand bien même elles vous sont parvenues ensemble, fourrées dans une même lourde enveloppe, couchées sur papier au cours de la même semaine. Je dois dire que ce voyage a été on ne peut plus instructif. J’ai vu bien plus du monde que ce que je ne l’avais jamais rêvé le jour où vous me permîtes de quitter notre domicile pour aller étudier à Friedrichsberg. Je me suis vue assimiler de vastes connaissances en cartographie, histoire, linguistique et ingénierie. La sténographie couturière m’a été d’une valeur inestimable pour me rappeler de la plupart d’entre elles. Je suis à peu près certaine d’avoir doublé ma consommation annuelle de plumes et d’encres en l’espace de ces trois jours passés à retranscrire mes notes et lettres dans un format plus conventionnel. Triplé même, si l’on compte également mes traductions du journal de l’Ambassadeur. Il était plutôt impressionné par la démonstration que je lui ai faite de ma maîtrise du tsouandanais formel, et il estime que nos deux récits sont entrelacés. Mon séjour à Vanekhash touche à sa fin. Son Excellence Bao m’est fort, fort reconnaissant d’avoir sauvé Jou, qui a réclamé que l’on m’affranchisse. Connaissant à présent les coutumes de cette cité, je me suis assurée d’obtenir un acte écrit de cette décision. En échange des services que je lui ai rendus en tant que garde du corps, l’Ambassadeur me propose, en tant que citoyenne libre, de l’accompagner dans sa prochaine mission. Toute plébéienne que je pusse paraître, me voilà donc embauchée ! Je servirai désormais de traductrice officielle à Son Excellence, étant donné que je manie à présent un certain nombre de vocables qu’il ne connaît pas. Il semble penser pouvoir bientôt faire bon usage de mes talents, que ce soit à Long-Tsing tout comme à son prochain lieu d’affectation. Lors de mon séjour à la fonderie, j’ai tiré de nombreux enseignements du mode de production de la technologie infernale. Leur mépris de l’humaine étrangère et ignare que je suis me sera bien profitable : je n’avais jamais pensé au métier d’espionne, mais je chéris ces occasions qui m’ont été données d’en apprendre plus sur les rouages internes, si je puis dire, de leur société. J’ai accepté de retranscrire mes notes et mes mémoires de mon séjour dans cette fabrique pour le compte de l’Ambassadeur. J’ai eu le bonheur de recevoir du papier digne de ce nom afin de pouvoir recopier les modèles que j’ai observés. Je dois dire que je suis impressionnée par l’ingéniosité de Khezek et de Nezira, qui sont parvenues à acquérir le papier en-tête officiel de l’usine. Mes amies naines s’entendent décidément comme larrons en foire avec Son Excellence ; je me demande bien quel peut être l’objet de leur conspiration. En guise de paiement pour cette transaction, je me suis vu offrir une garde-robe entièrement remplie de nouvelles robes. Le style tsouandanais dénoterait certainement à Fuhrberg, mais la soie en est d’une exquise qualité, et après les affreux haillons que j’ai été contrainte de porter depuis mon arrivée en Orient, je me sens positivement rajeunie. J’ai même eu la chance d’afficher mes nouveaux atours en public ! L’Ambassadeur m’a menée, bras dessus bras dessous, au grand bal donné en l’honneur de la divinité locale, Vaumkerutash, afin de fêter la victoire sur Gar-Shakhub. Oh, Maman, vous auriez été si fière ! Ayant enfin levé le nez des pages de tous ces volumes indignes d’une dame, voilà que je me suis retrouvée à séduire tous les prophètes, y compris le vieux diable qui m’avait achetée. Je pense qu’il ne m’a pas reconnue, tant je resplendissais (à moins que ce ne soit en raison de sa myopie !). J’ai même dansé avec le commissaire de police, lequel a paru amusé et charmé par le fait d’avoir trouvé une partenaire bipède à sa taille. En vérité, je n’ai dû ce succès qu’aux « semelles pot-de-fleur » qui sont le dernier cri de la mode tsouandanaise, et même avec cette aide, une plus courte que moi eût échoué. Au final, nous avons donné là un spectacle assez cocasse. C’est chargée de cicatrices que je quitte Vanekhash. Celles que m’ont laissées les fers du vaisseau corsaire, celles que m’ont causées les substances nocives employées dans la fabrique, les marques des coups portés par le gourdin du geôlier… et les cicatrices de l’âme. C’est un pays âpre et cruel. Je me dis que notre Empire est bien plus plaisant, mais je me demande si Marguerite en jurerait de même. Devrais-je juger Vanekhash par l’ambiance de son port et de ses fonderies, ou par celle de sa Grande Ziggourat ? Le palais impérial est-il plus représentatif de la vie sonnstahlienne que le bas-peuple des hameaux de Fuhrberg ? Si je ne regrette pas de quitter cette cité, dame Khezek et Nezira, en revanche, me manqueront. Ce sont des personnes modernes et progressistes, que toute nation devrait envier. Nous avons passé toute la nuit dernière à débattre du meilleur mode de gouvernement, et je n’ai pas l’impression que leur intérêt était purement théorique. Dame Khezek n’a d’ailleurs pas manqué de me questionner abondamment sur le fonctionnement de l’Empire et d’Avras. En fait, je pense que vous l’aurez rencontrée un peu avant de lire cette missive, puisqu’elle m’a promis de vous la délivrer en mains propres. Je lui fais entièrement confiance, même si j’ai la certitude qu’elle ouvrira mes lettres pour les lire chemin faisant. Elle refuse toujours de me révéler le véritable motif de son voyage, mais je suis heureuse d’avoir acquis un facteur aussi sûr pour pouvoir vous transmettre toutes ces nouvelles me concernant. À ce propos, chère Khezek, si je ne me suis trompée, je te prie de bien vouloir apposer ta signature au bas de ce document. Je pense par ailleurs que tu projettes de mener une expédition à Avras une fois de retour de l’Empire. Si tel est bien le cas, pourrais-tu en parler à Maman, en lui offrant quelques renseignements de plus sur ton peuple afin de compléter sa collection ? Elle te repaiera en te fournissant quelques contacts inestimables dans cette ville. Avec tout mon amour, – Olivia von Fuhrberg, traductrice auprès de S. E. l’Ambassadeur du Tsouan-Tan à Vanekhash, Bien joué, Olivia. Bien joué. Baronne Caroline, j’espère que vous apprécierez à sa juste valeur cette mine de renseignements que je vous confie ici au sujet de mon peuple – et de votre enfant unique. – Émissaire Khezek Imar
  5. p.82 Langue On rencontre bien des compagnons intéressants lors des pèlerinages. Peu de temps après que Josette et moi nous fûmes lancés sur le Camino de Santinigo, nous passâmes une soirée autour d’un feu de camp avec un vieil homme à l’air morne, portant d’affreuses marques de brûlure sur tout le côté gauche de son corps, y compris le visage. Lorsque je lui proposai mes services comme à l’accoutumée, il me répondit qu’il n’avait aucune pièce à m’offrir en échange de mes histoires. « Mais peut-être accepteriez-vous ceci à la place ? » dit-il, me tendant une sorte de brochure toute froissée. Une lueur s’entrevoyait dans son regard hagard. « Vous êtes un voyageur. Vous vous intéressez certainement aux langues. » Je feuilletai les pages tachées et usées. « C’est un guide du langage inf– — Ne prononcez pas ce nom », m’interrompit-il, réprimant un frisson. Ses yeux se mirent à inspecter furtivement les ténèbres qui nous enveloppaient. « C’est le dernier souvenir que je garde de ces horribles épreuves. Ce livre m’a été fort utile en son temps. Je prie que vous n’ayez jamais à vous en servir. » Les cicatrices sur sa joue gauche parurent se contorsionner et danser dans la lueur des flammes. – Extrait des Œuvres complètes de Samuel le Pépin, pèlerin et raconteur professionnel ––––– Extrait du Chapitre 1 : Introduction Les nains d’Orient se nommaient autrefois abzhagevish, le « peuple de l’Acier ». Cependant, après qu’ils se soient voués à la Fournaise, ils prirent le nom de vanebevish, le « peuple de la Flamme », que nous appelons « infernal ». Le premier terme reste employé pour décrire les nains et les géants de façon générale, et la langue infernale s’appelle toujours « abzhaghab ». Extrait du Chapitre 2 : Bases Pronoms personnels : anak, je atat, tu (masculin) atti, tu (féminin) ash, il ashi, elle ninak, nous attu, vous (masculin) atta, vous (féminin) shunu, ils shina, elles Nombres : zarat, zéro vanat, un gekh, deux kubash, trois erish, quatre kherub, cinq ghush, six sizam, sept bitak, huit silam, neuf velash, dix Extrait du Chapitre 3 : Commerce Vocabulaire valib, nm. pièce de monnaie vezlib, nm. monnaie, devise tetar, nm. prix idnaz, adj. élevé idzhur, adj. bas bazak, v1 tr.accepter ghebkar, vtr. échanger Phrases Gu atat bodzhvak vu di vezleb ? Quelles devises acceptez-vous ? Gu di atatshe tetarute but ? Quel est votre prix pour cet article ? Gu tetar idzhur ! Ce prix est trop élevé ! Extrait du Chapitre 4 : À l’auberge Vocabulaire amum, nm.couverts dadnush, nf. chèvre kamaum, v5 itr. fêter kekdakh, nm.couteau kerutash, nf. chien kimemi, nf. invité kimum, nm.nourriture nakaum, v5 tr. organiser (un évènement) nekem, nm. hôte nenem, nm. festin otmerub, nm. oiseau segish, nf. serpent zadish, nf. viande Phrases Ribshaudzh anak …, Donnez-moi … Ribshaudzh vu anak am dadnushte zadnish, Donnez-moi de la viande de chèvre Sarapte gekh vashenvab, Deux carafes d’eau Ribshaudzh vu anak am sarapte gekh vashenvab, Donnez-moi deux carafes d’eau Nakaum vu nemem am…, Organiser une fête pour… Gu anak nakdzhan zidalab vu nenem ama kavir ban, Je vais organiser une fête pour l’honorable vizir ce soir. Extrait du Chapitre 8 : Hiérarchie Dans les listes ci-dessous, les membres du clergé sont systématiquement donnés avant les titres civils. Nous le faisons uniquement dans un souci de facilité ; en fait, le dirigeant suprême de toute Citadelle est son ou sa despote, et les autorités civiles sont techniquement distinctes de la hiérarchie religieuse. Cependant, la relation entre les deux n’est pas toujours des plus limpides. Pour éviter d’offenser qui que ce soit, prenez grand soin d’employer le titre et le marqueur honorifique qui conviennent à chaque personne. Titres gurish, prophète vatshak, prêtre kavidnaz, despote dzhabar, vizir (en fait il existe de très nombreux titres pour les personnes que nous appelons « vizirs », mais celui-ci est le plus fréquemment rencontré) Honorifiques Ces marqueurs suivent les noms et les titres. Tout rang social au-delà d’un simple citoyen requiert l’emploi tant d’un titre que d’un marqueur honorifique. aram, pour les hauts membres du clergé, tels que prophètes et les membres du conseil des Mages en, pour le bas clergé shar, pour les despotes ban, pour les vizirs et bureaucrates de rang intermédiaire tur, pour les citoyens lan, pour les nains non-citoyens uk, pour les non-nains non-citoyens ilim, pour les vassaux pi, pour les esclaves Exemples : Khazlub-Tur, monsieur Khazlub (simple citoyen) Shalban-Ilim, monsieur Shalban (un vassal) Vudzhinesh Gurish Aram, Sa Sainteté le prophète Vudzhinesh Kavidnaz Shar, Son Éminence le despote Extrait du Chapitre 15 : Guerre Vocabulaire kazhlauk, v5 atr. escarmoucher (avec) kedikh, nf. épée kednukh, nf. guerrier kevish, nf. bouclier kezhlak, nm. escarmouche nazhlauk, v5 atr. faire la guerre (avec) nezhlek, nm.guerre sheluk, nm.soldat vagaush, nf. protéger vegish, nf. armure zhaluk, nm.arme zhelik, nm. bataille zhilegi, nf. ennemi erutesh, nf. assaut rutash, v2 atr. attaquer turush, nf. fuite, retraite tarush, v2 itr. fuir, battre en retraite ÉCRITURE Extrait d’un Manuel de la langue infernale à l’usage des marchands, par Severina Di Mercurio Caractères étroits Caractères mixtes Caractères larges L’écriture infernale est organisée en unités syllabiques. C’est-à-dire que chaque glyphe dans le système d’écriture représente une syllabe à part entière, et non pas un son unique comme dans notre alphabet avrasien. Comme vous pouvez le remarquer, il n’y a pas moyen d’écrire une consonne sans une voyelle associée. La convention est d’écrire toutes les consonnes isolées au moyen du glyphe « -u ». Ainsi, « X » peut être lu soit « t », soit « tu ». Malheureusement, il n’y a aucune manière de savoir de quelle manière lire ce glyphe sans connaître le mot en question. Mais rassurez-vous : à mesure que vous vous familiariserez avec cette langue, vous serez bientôt à même de comprendre quelle lecture est la plus probable dans un mot donné. Les mots sont séparés les uns des autres par une espace, bien que ces espaces aient considérablement varié en largeur avant l’invention de l’imprimerie moderne. Les phrases sont séparées par un trait vertical : Voici quelques exemples de l’usage de cette écriture : Gu anak sugtshub, Je suis une marchande Am shatvak hannap, Je suis venue en bateau Il est également possible de rencontrer une écriture d’un style plus ancien, à l’air plus compact, dans lequel les traits adjacents sont fondus ensemble en un seul « bloc », les rendant assez dissemblables à l’œil non averti. Ces glyphes sont assez rares ; ils apparaissent surtout sur d’antiques textes gravés sur la pierre. Ne vous laissez pas décourager : il suffit d’imaginer des traits plus fins à la place des « blocs » pour y voir les glyphes sous leur apparence moderne. Par exemple : Comme vous pouvez le voir, ils sont bien distincts, mais n’ayez crainte : vous ne devriez pas rencontrer ces glyphes très souvent, à moins que vous n’ayez pour habitude de fouiller des temples et ruines des temps anciens.
  6. Ils voulaient nous voir trépasser, Mais nos colonies croissaient. Occuper. Purifier. D’Ablan, la jalousie frémit : Terres et maisons, leur vilenie. Diviser. Séparer. Arrogantes troupes étincelantes Avons combattues sans défense. Brûler. Unifier. Ces traîtres sur la mer, se replièrent ; Enfin libres, régnant sur nos terres. Élever. Transcender.
  7. IIII La semaine dernière, mon noble hôte m’a emmené à une partie de chasse au-delà des limites de son domaine. Tout était déjà préparé ; chaque chasseur et esclave connaissait son rôle. Un grand nombre des nobles de la région nous accompagnaient dans cette marche en direction des contrées sauvages, mon cousin et moi-même en tête. Après quelques heures, nous nous sommes arrêtés dans une clairière. Nous avons pris le petit déjeuner servi par les esclaves domestiques, jusqu’à ce qu’un éclaireur revienne : il avait localisé un vieux cerf dont la ramure comptait douze andouillers. Nous avons poursuivi ce gibier et l’avons acculé. Mon hôte m’ayant accordé l’honneur de l’achever, je me suis exécuté d’un coup bien assuré en travers du poitrail. Alors que le soleil se couchait et que nous versions le sang de la bête pour offrir à Cædhren les libations appropriées, un étrange cortège s’est approché. Une demi-douzaine de silhouettes montées étaient soudainement apparues dans l’obscurité, à la limite de la lumière du feu. Tout le monde s’est tourné vers mon cousin. Il a pris un large couteau pour arracher une des pattes du cerf, qu’il a déposée sur un rocher à proximité. Trois esclaves ont chargé le reste sur une charrette et, dans le plus grand silence, notre bande a emprunté le chemin du retour. Une fois sortis de la forêt, l’humeur de mon cousin s’était améliorée. Je lui ai alors demandé ce qu’il s’était passé. Il m’a expliqué ce que j’avais déjà deviné : les personnages que nous avions rencontrés étaient des acolytes de l’une des nombreuses communautés de hors-la-loi qui parcourent les bois sombres de la frontière. Ces elfes sans foi ni loi, à demi civilisés, sont dirigés par des mages aux pouvoirs terribles : les sorciers. Le groupe que nous avions rencontré servait une telle maîtresse : une sorcière blême connue sous le nom de « Dame de l’Ombre ». Puis mon cousin a gardé le silence. Une fois revenus au domaine, j’ai interrogé un garde à ce sujet. Si ce qu’il m’a dit est vrai, mon cousin s’était allié à la Dame de l’Ombre il y a quelques années alors qu’il combattait une grande harde d’hommes-bêtes. Depuis lors, ils étaient convenus de respecter leurs territoires mutuels. S’étant assuré que personne ne nous écoutait, le garde s’est rapproché et m’a confié que son maître, séduit par la sorcière, avait un temps envisagé de l’épouser, avant d’être ramené à la raison juste à temps : les sorciers ont une mauvaise réputation, unanimement honnis par tous les honnêtes Daebs, car ils descendent de mages renégats d’Aldan, qui ont toujours refusé de se soumettre ou de s’associer au peuple supérieur daeb. De retour dans mes quartiers, j’ai réfléchi à tout ce que j’avais entendu sur ces mystérieuses communautés frontalières. On dit de ces parias qu’ils se sont tournés vers les arts sombres il y a bien longtemps, dans le chaos de la guerre civile, mais qu’ils avaient été reniés, d’abord par Aldan, puis par Rathæn, puisque leurs expériences avaient fait la majorité de leurs victimes parmi nos courageux rebelles. Les sorciers avaient quitté les Îles blanches en emportant de nombreux trésors et grimoires magiques qui n’ont jamais été confiés à l’étude des érudits du Dathen. Encore de nos jours, bon nombre d’entre eux demeurent bien plus puissants que les mages des Temples ; néanmoins, ces secrets occultes ont déformé leur appréciation de la société civilisée et de la stratégie militaire, les laissant indifférents aux postes de commandement – postes pour lesquels ils ne pourraient de toute façon jamais être acceptés. Aujourd’hui, il semble que les sorciers ont trouvé une sorte d’équilibre précaire : ils ne sont pas citoyens de la République, mais sont autorisés à habiter les territoires à ses marches. L’État les surveille de près, et est connu pour faire usage de leurs pouvoirs à des fins militaires lorsque cela sert la République. Il arrive que certains épousent les fils ou filles de familles nobles, ou échangent des connaissances théoriques et pratiques avec les Temples de Rathæn ; j’ai d’ailleurs déjà vu des lames forgées par ces sorciers même sur mes propres terres. Pourtant, malgré ces contacts hésitants, le préjugé que j’ai clairement perçu dans les paroles du garde prouve que la plupart des Daebs ne feront jamais plus que tolérer la présence de ces parias.
  8. Transcription de l’interrogatoire – Inquisiteur Première classe Elmar Lorca Sujet : Mlle Annabelle MÜLLER 948 AS, le 1er acrobre Archiprélate Hildeguthe : Pouvez-vous continuer ? Mlle Annabelle Müller : Oui, Révérende Mère, je me sens mieux, pardonnez-moi. Hildeguthe : Nul besoin de demander mon pardon, mon enfant. Peu de gens échappent aux elfes silexiens ; encore moins nombreux sont ceux et celles qui parviennent à regagner leur pays natal, avec la détermination de raconter leur histoire. Elmar, voudriez-vous commencer aujourd’hui ? Inquisiteur Lorca : Très bien. Dans votre position de domestique… Müller : D’esclave, monsieur. J’étais esclave ! Pas besoin d’être poli. Lorca : Tout à fait, mes excuses. En tant qu’esclave personnelle de votre maîtresse et donc témoin de premier plan, avez-vous à rapporter des éléments qui puissent nous permettre d’améliorer notre compréhension de leur culture ? Müller : Ils se soucient les uns des autres. Ils s’aiment et sont aimés, et semblent accorder une grande valeur à la vie. Cela en est même écœurant, compte tenu de la cruauté avec laquelle ils traitent les individus qui ne sont pas des leurs. Je veux dire ceux qui ne sont pas des elfes. J’en veux pour preuve le deuil qui a touché mon maître et ma maîtresse. Lorca : Parlez-nous de ce deuil. À ce point de son témoignage, Mlle Müller est visiblement bouleversée, mais refuse d’ajourner la séance. Müller : C’était lors de la seconde année de ma captivité. Je n’étais déjà plus que l’ombre de moi-même. Je consacrais toute mon énergie à éviter les punitions et à convenir en toutes circonstances à mes maîtres. Il le fallait afin que je puisse rester dans le confort tout relatif du foyer. Les travaux des champs auraient eu raison de moi en un mois à peine. Vous ne pouvez imaginer à quel point ils sont cruels. Je viens d’une famille fière, mais ils m’ont brisée et ont fait de moi un chiot pitoyable dont la seule préoccupation était de constamment leur plaire. C’est à cette période que le fils de mes maîtres est parti combattre les barbares – chasser des indigènes de leurs terres, pour ce que j’en ai compris. Je me souviens qu’il était vêtu d’une armure et qu’il portait un bouclier et une lance. Il y a eu une célébration en son honneur. Le maître et la maîtresse portaient également une armure et avaient les larmes aux yeux. Ils pleurent ! Pouvez-vous le croire ? Je me rappelle qu’ils avaient également versé des larmes lorsque leur fils était revenu de l’Académie, juste après mon arrivée au domaine. Cette fois-ci, ce fut différent. Il avait été tué. C’est son cadavre qui a été ramené au domaine. C’était un spectacle écœurant ; le corps avait été… éviscéré. Pour ma part, j’étais heureuse : le jeune était cruel, même pour un Daeb. Il aimait s’entraîner à l’épée sur les ouvriers blessés, ceux qui étaient trop mal en point pour pouvoir reprendre le travail. S’il ne réussissait pas à les tuer d’un coup vif en dégainant de son fourreau, il laissait exploser sa rage… Même les autres elfes le craignaient. Quand il est mort, le maître et la maîtresse sont devenus inconsolables. Ils donnaient l’impression de ne pouvoir réussir à surmonter leur deuil, s’effondrant constamment dans les bras l’un de l’autre. L’intendant du domaine a dû faire appel à un apothicaire pour leur administrer une concoction afin de les apaiser. Il ne semblait pas inconvenant pour l’homme de la maison de céder ainsi à son chagrin, à l’inverse de ce qui s’observe dans l’Empire. Les Daebs ne semblent pas se soucier de ce genre de détails. Un bûcher a été érigé dans la cour. Divers citoyens ont assisté aux funérailles. Le clergé était lui aussi présent : des prêtresses terrifiantes, l’une vêtue d’une cotte de mailles, l’autre d’une robe pourpre. Les assistants des prêtresses et la maîtresse ont préparé le corps. À peu près tout le monde était en armure ; beaucoup portaient une lance, quelques-uns une arbalète. Ceux qui avaient une arbalète se tenaient à l’écart ; ils semblaient être de rang inférieur. J’ai reconnu certains d’entre eux que j’avais croisés lors de mes corvées quotidiennes. Il semble que la plupart des citoyens du Dathen soient également soldats. Et pas une milice dépareillée, vous comprenez. Ils avaient l’air tout aussi sinistre et aguerri que vos gardes à l’extérieur. Les funérailles ont commencé. La prêtresse en armure a tout d’abord fait une sorte de sermon. Elle a entonné une mélopée à laquelle tout le monde a répondu en criant et en faisant claquer ses armes. Puis la prêtresse en rouge et ses accompagnateurs ont allumé le bûcher. Je trouvais curieux que tous les esclaves de la ferme soient présents ; on les a fait se mettre en rang tandis que les acolytes du temple se tenaient derrière eux. La prêtresse en rouge semblait arriver à un point culminant… Mlle Müller est de nouveau en détresse. Elle prend un peu d’eau-de-vie. Hildeguthe : Prenez votre temps, ma pauvre petite. Müller : D’un seul coup, les acolytes ont sorti des poignards. Ils… Ils ont tranché la gorge des ouvriers agricoles. Ils ont recueilli leur sang. Ils étaient sacrifiés, pour le fils mort. S’étant recueillie, Mlle Müller reprend son récit. Leur sang a été collecté dans des récipients, et leurs corps ont été placés sur le bûcher. Il y a eu d’autres incantations… et toujours le même vacarme des armes. J’ai été la seule adulte épargnée. La maîtresse m’a contrainte à regarder la scène. J’ai tenté de détourner le regard, mais alors, elle a saisi sa cravache en cuir pour me châtier. Elle était en pleurs, tout comme moi. Elle m’a hurlé dessus, m’ordonnant de faire preuve de respect, et que je n’avais qu’à maudire mes parents de m’avoir fait naître pour être témoin de ce drame. Elle a dit qu’il n’y aurait pour moi que souffrance si j’osais à nouveau détourner le regard. Je crois que… cette cruauté était sa façon d’exprimer son chagrin. Ils ont festoyé pendant que le bûcher consumait les corps. Le lendemain matin, les cendres de leur fils ont été recueillies par les assistants du prêtre. Ils les ont placées dans une urne ornée de bijoux et nous sommes allés à un ruisseau voisin où elles ont été dispersées, avec le sang des sacrifiés… Là aussi, il y a eu des prières. Par la suite, j’ai appris que le domaine avait été vendu et que le maître et la maîtresse s’apprêtaient à déménager en ville. Le maître s’agrippait à l’urne vide comme un homme qui se noie s’accroche à une épave. C’est alors que les sombres guerriers sont arrivés… et que nous avons été laissés à nous-mêmes.
  9. III C’est ainsi que nous avons entamé notre voyage vers la maison ancestrale de ma famille, où mon cousin et moi-même avions été élevés et éduqués en tant que fiers citoyens de la République. Les paysages familiers remplissaient mon esprit de souvenirs. De longues décennies s’étaient écoulées depuis la dernière fois où j’avais posé mon regard sur ces collines et ces plaines, mais jamais mon cœur ne les avait oubliées. La brise descendait des collines et faisait onduler les blés où les esclaves peinaient sur de vastes plaines fertiles. Au loin, le large fleuve Tietha tranchait le paysage d’un horizon à l’autre. L’eau s’étendait, large et puissante devant nous, s’écoulant des frontières indomptées du nord et de l’ouest où règnent les bêtes et les sauvages, jusqu’à son estuaire à l’est, foyer de notre civilisation. Poursuivant notre voyage, nous avons traversé plusieurs beaux domaines dominant les champs environnants. Le bruit des lames à l’entraînement et les ordres hurlés par les officiers affirmaient la force du cœur du territoire silexien, tout en offrant un avertissement sinistre aux esclaves. Les souvenirs de ma formation à l’Académie me sont revenus en mémoire. Si je me souviens à peine du jour où le magistrat m’a emmené à la caserne avec les autres enfants, je me rappelle très bien les conditions extrêmes de notre formation. Ce sont là les termes du contrat passé avec l’État : combattre pour la République pour gagner l’honneur de la citoyenneté. En observant les dernières recrues, je me suis remémoré l’un de mes plus grands moments de fierté, ce jour où mon entrée parmi les Lances de la République avait été finalement approuvée par le vote de mes aînés. J’ai été tiré de ma rêverie par mon cousin, qui me demandait où en étaient les vignobles de mon domaine. J’ai répondu que le millésime de cette année serait bon. « J’ai apporté une douzaine de mes meilleures bouteilles pour toi, aussi douces et raffinées que nous autres, Daebs. — Dans ce cas, je préfèrerais boire de l’eau comme les esclaves, a-t-il répondu, et nous nous sommes tous deux mis à rire. Je lui ai posé des questions sur ses propres plantations, et il a entrepris de vanter la prospérité de ses quatre domaines : sa dernière expédition en Taphrie avait été couronnée de succès, ce qui lui avait permis d’étendre ses terres à l’ouest et de renforcer les défenses le long de sa frontière avec l’arrière-pays. Il avait même obtenu une licence d’exploitation pour une mine de charbon à l’est, même si cela nécessiterait encore plus d’esclaves. « Tu vois, a-t-il poursuivi, les esclaves que tu aperçois dans ces champs ne sont pas adaptés aux mines. J’ai besoin de spécimens plus robustes, mais pas trop grands, à même de transporter des pierres dans les tunnels. Des orques pourraient convenir, même des hommes-bêtes si je leur coupe les cornes, mais rien de plus grand. Les vermines sont les meilleurs de tous : ils ne sont guère endurants, mais ils sont habitués à mener une vie difficile loin de la lumière du jour. — Ils ne vivent pas assez longtemps, ai-je répondu, mais il s’est contenté de glousser. — Quand tu auras besoin d’esclaves, viens me voir. Je te ferai un bon prix. Je garde toujours la meilleure qualité pour mes camarades Daebs, pas comme les charognes que je vends à l’étranger. » Quelques heures plus tard, nous étions sur ses terres. Autour de nous, un océan d’or s’étendait sur la plaine. Nous approchions de la seule colline à des kilomètres à la ronde, où se dressait toujours la maison fortifiée de mon enfance. J’ai constaté que les bois sauvages dans son dos étaient plus éloignés aujourd’hui que dans ma jeunesse. Mon cousin m’a dit que la limite avait été repoussée quelques années auparavant, après avoir vaincu une grande harde d’hommes-bêtes descendue des montagnes. Pourtant, une importante garnison s’entraînait toujours dans la cour d’exercice lorsque nous sommes arrivés. La présence de ces hommes, ainsi que les remparts fraîchement rénovés, suggéraient que la paix n’était pas entièrement assurée. « Notre terre se trouve à la frontière même de la République, a dit mon cousin. Ici, le conflit n’est jamais vraiment terminé. Nous devons rester vigilants. Mes contacts auprès des colonies de parias qui vivent dans les bois m’ont récemment averti d’une nouvelle hausse du nombre de barbares. Je crains qu’une guerre n’éclate, telle que n’en avons pas vu depuis l’époque de nos parents. Tu te souviens ? » Mais j’étais déjà perdu dans mes souvenirs, d’une époque que je croyais avoir oubliée.
  10. Panthéon daeb Moïthir La Reine fantôme Naram La Mère Bagheïm La Guerrière Tila La Vieille Æmar Le Père divin Yéma Le Séducteur Cædhren Le Chasseur Umæg Le Roi Goïren Le Maître de la terre Harag La Sorcière des tempêtes Darag Le Forgeron divin Æmrel La Reine de la Sylve Nabh La Corneille de la guerre Madhlis La Grande Maîtresse Feredh La Prophétesse Ceïnran Le Roublard Urlaïn Le Conquérant Les Jumeaux divins Sura Le Faiseur de printemps Cyma La Princesse
  11. Écoute moi, pourriture naine. Nous sommes les héritiers d’Æmbeghen, fondateur de notre république éternelle. Nous n’usons pas de ruse, nous ne trichons pas ; toute notre puissance est dirigée vers nos ennemis, car la terreur est notre arme. Nous sommes des prédateurs qui chassons nos proies avec honneur et sans pitié. Pour vous, l’honneur est d’être chassé par nous. Mais pour nous échapper, vous devrez user de stratagèmes, car votre force n’est rien face aux parfaits tueurs que nous sommes. Plus puissant est le gibier, plus grand sera notre gloire. Pensez-vous que vos menaces de torture m’effraient d’une quelconque manière ? Nous sommes la peur incarnée. Nous ne craignons pas la mort, car la Reine de la mort nous accompagne dès notre naissance. En tant que shethim d’Urlaïn, je prévois en Son nom notre victoire prochaine et vos cadavres pourrissant déjà sur le champ de bataille. Cette terre est nôtre, c’est notre devoir de la reconquérir et de la purifier de votre immonde présence, au nom du pacte conclu avec nos dieux. Les shethims de Nabh éveilleront la soif de sang de nos guerriers en leurs prêchant les saintes paroles. Les shethims de Cædhren sélectionneront nos prochaines proies. Les shethims de Moïthir s’empareront de vos âmes. La Consule des cérémonies elle-même préparera un triomphe, au nom d’Æmar, pour nos commandants victorieux. Nous avons foi en notre domination, car la république du Dathen est consacrée par le Père divin. C’est en son triple nom que nous déclarons les guerres et c’est sa fille, la Corneille écarlate, qui guide nos lames au combat tandis que ses fils jugent les vils et les perfides. L’encens brûle dans nos temples, une multitude d’esclaves est sacrifiée tandis que nos guerriers se rassemblent, de plus en plus nombreux. Les portes du temple de Nabh sont ouvertes : elles ne se refermeront qu’une fois que chacun d’entre vous aura rencontré son destin. Les Trônes d’obsidienne approuvent cette campagne, car elle est sacrée pour tous nos dieux. Les dévots, ainsi que les grands prêtres des Temples, mènent nos troupes sur le champ de bataille, guidant leurs mains, conseillant nos commandants, accomplissant la volonté des dieux de la République. La victoire ou la mort est certaine, car tout Daeb, homme comme femme, sait que le Dathen et les Halles des dieux ne font qu’un. La seule chose que vous devez savoir, est que vous ne serez pas épargné. La Reine fantôme réclamera vos âmes. La Sorcière des tempêtes propulsera nos flottes. Cædhren pourchassera vos espoirs. Nabh écrasera vos ambitions tout comme vos armées. Urlaïn approuvera notre victoire sur vos crânes, vos os et vos bannières. La peur que nous provoquons à nos ennemis accroît la puissance de nos Temples ; les échos de vos souffrances se répandront dans toute la Vétie. Les cités humaines seront renversées, les forteresses naines assiégées par la terreur elle-même. ––––– Prétendue provocation lancée par les forces daèbes aux nains de Nevaz Vanez lors de la grande invasion de Vétie, dans l’espoir de les inciter à livrer bataille dans des conditions défavorables. J’émets de sérieuses réserves quant à la paternité de cette lettre. Nos honteux parents ne sont jamais aussi… verbeux, mais ce que nous connaissons d’eux, de leur religion ou de leur philosophie militaire, suggère que si le format et le style ont pu être contrefaits, le fond, lui, est typiquement daeb. Les observations de nos agents au Dathen confirment qu’il y existe deux formes d’institutions religieuses : les Temples et les cultes. Les Temples sont approuvés par l’État, dirigés par des cadhads, des shethims et desrathims, qui sont les trois principaux grades du clergé. Certains cultes sont déclarés officiellement au sein du système des Temples, tandis que d’autres échappent au contrôle des autorités. Tout comme c’est le cas dans notre propre noble tradition, leurs dieux ont plusieurs attributs et, en général, chaque Temple ou culte ne vénère qu’un unique aspect de ce dieu. C’est ainsi que le Père divin, mentionné dans cette lettre, en possède trois. Chacun de ces aspects revêt à son tour plusieurs facettes ou spécialités. Ainsi, le culte de Yéma le Séducteur présente des croyances et des pratiques différentes de celles de Yéma l’Embellisseur. À titre d’information, j’ai décrit le panthéon daeb ci-dessous. Il est identique à de nombreux égards à celui des elfes sylvestres et au nôtre, bien que la priorité accordée à chaque dieu diffère. Notez que les Jumeaux divins, gardiens de Wyscan, ne sont vénérés que par les Tréwis, tandis qu’Urlaïn le Conquérant (appelé « Olaron » en Orient) jouit d’une adoration particulière au Dathen. – Extrait du Manuel de formation pour les cadets veilleurs gris
  12. L’Âge d’Or, amitiés détériorent ; Notre race attendait l’aurore. Attendre. Suspendre. Archers cachés, des forêts suzerains : Nous nous dressâmes contre nos cousins. Assaillir. Trahir. Des avides nains, la grande guerre vint : Batailles dans montagnes et ravins. Frapper. Hériter. Traversant le grand océan, Les lourdes chaînes de l’Empire brisant. Protester. Révolter.
  13. II Le voyage avait été long depuis ma demeure en Virentie. Lorsque j’ai finalement débarqué dans le port bondé de Cæn Dracin, j’ai voulu faire route en direction des rues anguleuses de la cité. Mais avant même d’avoir fait un pas, j’ai été abordé par une esclave qui m’a conduit à son maître : mon cousin et vieil ami Loræc. Celui-ci m’a réservé un accueil chaleureux, me saluant à la manière des Daebs, le bras droit en travers de la poitrine. Il m’a fait asseoir sur un banc sur une élégante terrasse, d’où nous avons pu profiter de la vue sur le port et de la senteur de l’océan. Je n’étais pas venu ici depuis de nombreuses années, et je n’ai pu m’empêcher de faire remarquer que beaucoup de choses avaient changé. « Je suppose que tu as raison, a-t-il répondu. Cette ville est toujours bondée, et le flux constant de personnes et de marchandises la fait constamment évoluer. — Vos concitoyens sont différents de ceux de mon pays. Il y a ici une variété saisissante de vêtements, de coiffures et de mœurs. Les corsaires et les jeunes qui naviguaient avec moi avaient les cheveux rasés sur les côtés ou entièrement coupés. Dis-moi cousin, est-ce la marque d’un culte ? — Certaines sectes obligent leurs adeptes à se raser, c’est vrai. Mais ceux que tu as vus ne sont que de jeunes idéalistes avides de liberté. Vois-tu, une fois sortis de l’Académie, ils ne sont plus obligés de porter leurs cheveux en une longue tresse ou crinière, comme le veut la vieille tradition chez nos soldats. Ils les coupent alors pour signaler leur indépendance, et entament alors une nouvelle carrière loin du regard de l’État, en tant que corsaires ou esclavagistes. — Il me semble, mon ami, que nous sommes tous deux trop vieux jeu pour comprendre. » Nous avons terminé nos boissons, puis nous sommes promenés du port jusqu’au marché, sis au centre de la ville, près de la fontaine de Harag. Poursuivant notre conversation, comme j’étais toujours intrigué par ces jeunes elfes, je lui ai demandé comment ils étaient traités par l’État. Ce qui nous a fait aborder le sujet de la politique. « Trois grandes factions politiques se partagent le pouvoir dans la République, m’a-t-il expliqué. Nous appelons la première la faction “Terre-Mère”. Il s’agit principalement de descendants d’anciennes familles, ces premiers colons abandonnés et trahis par les dirigeants arandais, il y a bien longtemps, et qui cherchent aujourd’hui à raviver l’ancienne guerre avec les Hautes Lignées et à reconquérir l’Empire elfique par la voie militaire ou diplomatique. D’autre part, les descendants des elfes qui ont fui la Vétie après les guerres de la fin de l’Âge d’Or constituent le noyau de la faction “Mère-Patrie”. Ils considèrent la Vétie comme notre foyer ancestral, et veulent rétablir notre domination sur ce continent. Les puissantes familles qui animent ces deux partis avaient l’habitude de considérer les jeunes que tu as mentionnés comme des parvenus, sans guère leur prêter attention, mais ils ont à présent crû tant en nombre qu’en puissance. Si bien que depuis de nombreux siècles, ces démagogues et chercheurs de fortune forment la troisième faction, les “Esclavagistes”, qui préconise d’oublier les antiques rancunes pour assumer la position de force acquise par le Dathen au fil des siècles afin de le faire prospérer. » En approchant du marché, j’ai admiré les hauts murs de la citadelle intérieure et la célèbre statue de Dræcarion, héros déjà légendaire bien avant l’indépendance du Dathen. Bientôt, nous étions entourés des parfums et des voix du marché. De longues rangées d’esclaves marchaient avec lassitude, fraîchement débarqués du port. « Tu vois, a repris mon cousin, c’est là la vraie richesse du Dathen : le monde entier mis en coupe réglée. À quoi bon les fables et les rêves de terres lointaines, quand nous avons l’océan au bout des doigts, l’abondance de la Silexie qui s’offre à nous ? C’est, du moins, ce que l’on lit dans les pamphlets des Esclavagistes… »
  14. JOURNAL D’UN NOBLE ELFE DE VIRENTIE Extraits présentés à la Société d’exploration océanique par un bienfaiteur anonyme, origine inconnue. I Comme à chaque fois que je navigue sur l’océan, mon cœur s’emplit d’une joie incomparable et d’un sentiment de liberté. C’est peut-être là tout le sens de l’âme daèbe : notre lien fatidique avec l’écume et les embruns. Quoi qu’il en soit, le voyage a été agréable, même s’il a été long. Un cycle lunaire complet s’est écoulé depuis que je me suis embarqué sur ce chemin détourné en direction du grand Dathen, quittant ces rivages lointains de la petite république qui est mon foyer. La première étape du voyage s’est déroulée dans le calme, entre les eaux virentiennes et la Mer brisée. Mais à partir d’ici, la protection de Harag s’est avérée insuffisante pour assurer la sécurité de notre flottille. La tempête a été aussi soudaine que violente. Deux trirèmes et trois galères rapides ont été englouties par les eaux féroces ; leurs coques aux courbes élégantes n’ont pas résisté. Nous avons dérivé loin dans le Grand océan. Une fois l’inventaire fait, j’ai été étonné et soulagé de constater que la majeure partie de ma cargaison était toujours en sécurité : trois cent vingt-deux barils de vin raffiné, trois celliers pleins de poisson salé et d’huîtres, deux cent quatre-vingts esclaves et deux belles manticores qui avaient été promises à un belluaire de Cæn Dracin. Après ce décompte, mon humeur s’est nettement améliorée. Nous n’avions perdu que sept esclaves, devenus fous, et qu’il a fallu abattre. Ce matin, je me suis promené sur le pont du Vent glacial, ma fière trirème. Il bouillonnait d’activité. Les corsaires supervisaient les réparations, en plus de leurs tâches habituelles, lesquelles consistent à s’occuper du gréement et des voiles. La majorité d’entre eux sont de jeunes elfes têtus, dont beaucoup viennent à peine de sortir de l’Académie ; mais on trouve aussi parmi eux des guerriers et guerrières endurcis, ainsi que des marins expérimentés, lecteurs incomparables de l’humeur de Harag dans le ciel, et tout aussi compétents pour étriper leurs ennemis de leurs lames d’acier. Ces vétérans sont craints et respectés par le reste de l’équipage, leurs larges capes en peau de monstre marin symbolisant leur statut. J’observais la trirème la plus proche, le Croc du Serpent. Je pouvais y voir les dresseurs de bêtes que j’avais engagés auprès de l’une de nos meilleures écoles de domptage afin de surveiller les manticores. J’étais inquiet d’avoir à transporter des bêtes aussi puissantes, mais ces experts méritent leur réputation : leur extraordinaire savoir-faire vaut bien chaque barre d’argent déboursée. Remplissant mes poumons de l’odeur salée de l’océan, j’ai contemplé les vagues qui caressaient les coques de notre flottille. Nous avions perdu beaucoup de temps en raison de la tempête, mais les trirèmes naviguent vite grâce à la toile du navire et à la rame de l’esclave. En de tels moments, je me sens pleinement vivant.
  15. À la naissance, grande fut défiance : Les Sauriens régnaient de leurs lances. Étouffer. Enchaîner. Combat s’ensuivit, jour et nuit, Pour briser leur hégémonie. Déchirer. Décapiter. Aux heures sombres, nos ancêtres en nombre Du véritable pouvoir firent montre. Tuer. Écorcher. Nulle pitié ne fut accordée : La violence, nécessité. Prospérer. Perpétuer.
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