Aller au contenu
Warhammer Forum
  • advertisement_alt
  • advertisement_alt
  • advertisement_alt

Le Mercenaire


Thomov Le Poussiéreux

Messages recommandés

Et voici la suite du texte.
Merci à toi Charly09 pour cet aimable commentaire  :wink2:

 

Tout en poursuivant mon décompte, je prêtais mon attention aux trois larrons.

Le grand maigre était le meneur, sans erreur possible ; ce qui signifiait que je ne devais pas le tuer, sans quoi les autres livreraient bataille jusqu’au bout par vengeance, quoi qu’il puisse leur en coûter.
Le râblé n’était pas un problème, si toutefois je parvenais à m’en débarrasser ou à m’en éloigner avant qu’il n’abatte sa masse sur moi ou mon cheval… Il était visiblement mal à l’aise et nerveux et ne ferait probablement rien d’efficace le moment venu.

Le troisième drôle par contre… Celui-là avait quelque chose de dangereux ; il était parfaitement calme, n’attendant que la fin du discours du maigrichon pour agir. L’état de sa gorge m’apprenait qu’il n’en était pas à ses premiers méfaits et je suspectais que s’il avait pu parler, c’est lui qui aurait mené le jeu.

Je remerciais silencieusement Ulrich qu’il n’en fut rien quand j’atteignis enfin le « zéro ». Sans un bruit, je mis en branle ma monture et piquai droit sur Corben en tirant ma dague. Rupert fut pris au dépourvu, comme je m’y attendais et Stan réagit en faisant un bond de côté pour se mettre à l’abri ; trop malin sans doute pour risquer de prendre un mauvais coup.

Mon homme souleva son épée avec une belle vivacité et para le coup avec lequel j’avais l’intention d’achever le travail commencé par la corde.

Mon cheval, habitué à la manœuvre, continua sa course et força mon opposant à s’écarter. Je fis volter ma monture avec l’adresse que donne une longue habitude et entreprit de revenir à la charge.

Un long couteau passa en sifflant à quelques pouces de mon visage, lancé par Stan et qui m’aurait atteint à coup sûr si j’avais poursuivi ma route comme il l’avait escompté au lieu de me retourner.

Je rejoignis Corben, qui m’attendait de pied ferme. Nous échangeâmes quelques passes et je pus prendre la mesure de mon adversaire. Il avait une certaine expérience, mais j’étais meilleur que lui. Sans ses deux comparses, je n’aurais fait de cet homme qu’une bouchée.

Du coin de l’œil, je vis Stan qui se préparait à lancer un second poignard. Je réagis d’instinct et sautai à bas de mon cheval, ce qui me permit d’éviter son second trait. Sans perdre un instant, je bondis sur Corben et lui assénai une série de coup rapides destinés à le faire reculer pour que ses amis ne puissent me cerner. Je parvins à enrouler sa lame dans un mouvement tournant et un instant plus tard, elle volait dans les airs pour se perdre dans les fourrés. Je lui portai alors un coup de taille qu’il ne put ni parer, ni esquiver et qui lui entailla méchamment l’abdomen.

Je n’eus hélas pas l’occasion de pousser plus loin mon avantage car le troisième couteau de Stan se ficha à cet instant dans mon bras gauche, me faisant lâcher ma dague de douleur.

Le souffle coupé, je pris un peu de recul pour évaluer la situation ; veillant soigneusement à me placer entre les malandrins et l’épée perdue dans les bois.

Ce n’était certes pas brillant, mais Corben était hors de combat et Stan n’avait plus ces maudits couteaux. Rupert semblait s’être finalement ressaisit et il entreprit de me tourner par la gauche pendant que Stan en faisait autant par la droite, un gourdin sorti de nulle part à la main.

Je savais que rester immobile signerait mon arrêt de mort. Je ne pouvais pas fuir, il ne restait donc qu’à choisir un adversaire et foncer sur lui pour en finir avant que l’autre ne nous rejoigne.

Toujours convaincu que seul Stan pourrait mettre fin au combat, je choisi Rupert et bondit dans sa direction. Visiblement, il s’y attendait et abattit sur moi sa masse avec une force considérable.

Je ne pus que dévier son coup à l’aide de mon épée, mon bras presque complètement engourdit par le choc ; son arme tapa lourdement le sol pavé, faisant voler quelques éclats de pierre.

Mon élan me permit de le déstabiliser et il chancela en arrière. J’en profitai pour me fendre et lui porter une vive estocade qu’un homme plus expérimenté ou plus vif aurait esquivé sans mal. Mais Rupert, n’étant ni l’un ni l’autre, reçut ma lame en pleine poitrine et je pus sentir l’acier traverser sans peine ses habits, sa peau et sa chair.

Il se figea un instant et j’en profitai pour dégager mon arme et me retourner, presque certain que le gourdin de Stan me cueillerait à la tempe ou au poignet ; quoi qu’il choisisse, il était trop tard pour songer à parer le coup…
Mais rien ne vint.

Je le vis, qui m’observait, à quelques pas de distance. Il tenait toujours son gourdin, mais ne semblait plus si sûr de pouvoir me terrasser avec.

Je respirais avec difficulté, cherchant pitoyablement mon air mais faisant tout pour paraître plus frais que je n’étais en réalité. Mon bras gauche me faisait un mal de chien et la tête commençait à me tourner d’avoir perdu tant de sang.

S’il se décidait, j’étais sûr de faillir ; mais je me fis la promesse de donner mes dernières forces pour l’abîmer autant que possible.
J’ignore si c’est ce qu’il lut dans mon regard, mais il renonça manifestement à tenter l’aventure.

-Et bien et bien, dit-il d’une voix moins fanfaronne que précédemment. Vous ne racontiez pas d’histoires, étranger. Il semble que Rupert aurait mieux fait de m’écouter pour une fois… Mais il est trop tard pour lui à ce qu’il semble, n’est-ce pas ? Quant au pauvre Corben, il aura besoin de moi pour refermer son ventre s’il ne veut pas que les miliciens nous suivent en remontant le fil de ses entrailles jusqu’à notre repaire.

Il marqua une pause et accorda un regard à ses deux compagnons, étalés au sol. Corben émettait un long borborygme inarticulé tout en pressant ses deux mains sur son estomac. Rupert ne bougeait plus du tout.

-Qu’allons-nous faire maintenant, damoiseau ? Vous ne valez plus grand-chose avec mon couteau dans le bras, pas vrai ? Mais vous n’avez pas l’air d’un homme prêt à se rendre non plus…

Je crachai par terre et prit la parole en priant Ulrich d’avoir repris assez de souffle pour ne pas sembler trop faible.

-Ne sois pas stupide, mon garçon ; ton camarade à besoin de toi, comme tu l’as dit. Je pense toujours ce que j’ai annoncé tout à l’heure : vous l’emportez finalement. Mais je crois maintenant qu’aucun de vous trois ne me survivra longtemps. Le gros est mort à l’heure qu’il est et l’autre ne vaudra guère mieux dans quelques heures s’il n’est pas soigné. Quant à toi, je jure que je ne te laisserai pas prendre ma vie sans te percer une ou deux fois auparavant.

Ce disant, je fis un nouveau moulinet de ma lame pour souligner mes paroles. Le mouvement m’arracha un grognement de douleur et mon bras blessé me lança plus que jamais.

-Très bien, grand-père, vous gagnez la partie. Remontez sur ce cheval si vous le pouvez et partez. Je me charge de Corben de mon côté et Rupert peut aussi bien nourrir les loups ou les corneilles…

Il se détourna sans plus de cérémonie et fit quelques pas en direction de son compagnon.
Je devais le retenir à tout prix.

-Attends ! Comme tu le vois je suis blessé, grâce à tes bons soins, et mon sang s’écoule de mon bras. La prochaine ville n’est pas si proche et je ne suis pas certain de tenir encore en selle. Je te propose donc un marché…

Je laissai un instant s’écouler, mi pour reprendre haleine et mi pour attirer son attention.
Il pencha la tête de côté, visiblement intrigué.
J’étais sûr de ne pas pouvoir rejoindre la sécurité des murs de la ville à temps pour me faire soigner. Si je tournais de l’œil avant d’y arriver, c’en serait fait de moi. Je n’avais donc pas grand-chose à perdre.

-Conduits-moi à ton repaire et aide-moi à panser cette plaie. En échange, mon cheval charriera ton Corben jusque là et je te paie même dix pistoles de bon argent pour la peine. Je peux t’aider pour ton ami ; j’ai souvent recousu des blessés, tu peux m’en croire. Pour l’autre par contre, plus rien à faire. Comme tu le disais il aurait dû t’écouter, pour une fois…

Ma proposition le prit au dépourvu, mais pas longtemps. L’idée de laisser mon cheval porter Corben et d’une bourse bien pleine eut raison de sa méfiance.

Peut-être pensait-il me trancher la gorge à la première occasion, mais je n’avais guère le choix.

De plus, j’ai appris au fil des années et des batailles que les dieux nous poussent parfois sur de biens étranges chemins, en encore plus étrange compagnie, et que les ennemis de la veille sont parfois les compagnons du lendemain.

 

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

  • 1 mois après...

Bon, malgré une certaine absence de commentaires, voici la suite des aventures du Mercenaire.
Bonne lecture:

 

Stan et moi marchions en silence; Corben, étendu en travers de ma monture, gémissait affreusement.
Il ne pouvait pas tenir droit, aussi avais-je pansé sa blessure de mon mieux avant d'aider son comparse à le hisser sur le cheval. Puisqu'il aurait été impossible pour lui de voyager de la sorte sur le dos, nous avions pris la décision de l'étendre sur le ventre. La douleur de sa plaie pressée contre le cuir de la selle devait être insoutenable, mais nous n'avions pas le choix. Du moins ses plaintes nous apprenaient-elles à la fois qu'il était toujours en vie, et qu'il était toujours conscient.

 

J'avais fait pour ma part un rapide bandage humide pour tenter d'arrêter le saignement de mon épaule mais en vain. La lame de Stan s'y était plantée plus profondément que je ne l'avais d'abord cru et le linge était déjà écarlate.
J'implorais Ulrich que ce damné campement fut proche quand l'orage qui menaçait depuis le matin se décida à éclater. La pluie tomba soudain si dru que je ne voyais pratiquement plus où je posais les pieds. Stan fit halte et, sans se départir de son foutu sourire, il sortit une flasque de l'intérieur de sa tunique. Il la déboucha et la porta à ses lèvres. Il but une longue rasade avant de s'essuyer la bouche d'un revers de son habit sale; puis il me tendit le flacon.

 

-Tiens, Damoiseau, ça réchauffera ta vieille carcasse. Tu risquerais bien de rouiller avant demain, sans ça.

 

Je pris la flasque sans prêter attention à ses plaisanteries imbéciles et bu une longue gorgée. Il s'agissait d'un infect breuvage que je le soupçonnais de distiller lui-même tant le goût en était déplaisant, mais il me réchauffa en effet et me donna le coup de fouet dont j'avais grand besoin pour poursuivre notre route.
 

Stan repris son bien et le fit habilement disparaître dans l'une des innombrables poches que semblait receler ses habits dépareillés. Il ne manquait pas d'adresse, comme j'avais pu en juger quand son dernier couteau s'était planté dans mon bras et ses gestes étaient vifs et fluides. Nul doute qu'il devait faire un voleur tout à fait respectable. Je pris note de recompter régulièrement mon argent si je ne voulais pas quitter ce drôle sans un sou vaillant.

 

Nous reprîmes notre marche, Stan ouvrant  le chemin et moi menant ma monture par le licou. Quand il s'arrêta enfin pour annoncer que nous étions arrivés, j'aurais donné cher pour une seconde rasade de son abominable alcool; la tête me tournait et mon bras me lançait plus que jamais. Nous avions marché un long moment et j'étais trop concentré à mettre un pied devant l'autre sans m'écrouler pour tenter de prendre le moindre repère. Désormais, j'étais tout à fait perdu et devrais m'en remettre à la bonne volonté de Stan pour retrouver mon chemin; sans ses indications, je pourrais tourner des jours entiers en vain dans les immenses forêts de l'Empire...

 

Après avoir attaché mon cheval, nous fîmes descendre Corben aussi délicatement que faire se pouvait et le transportâmes à l'abri. Nous pénétrâmes dans une grotte habilement dissimulée par la végétation. L'intérieur était assez grand pour loger trois personnes et entreposer un peu de matériel là où le plafond était trop bas pour se tenir debout. Manifestement, ils occupaient les lieux depuis plusieurs semaines au bas mot. De minces paillasses trainaient dans un coin, presque entièrement couvertes de petits objets de toutes sortes, sans doute le produit de leurs récentes rapines.

 

Au centre de la grotte avait été aménagé un espace pour le feu et je vis qu'une mince fissure dans la pierre permettait à la fumée de s'échapper librement. Une fois que nous eûmes déposé Corben sur sa couche, Stan s'approcha du feu et entreprit de l'attiser tout en lui remettant du combustible pour que les braises reprennent.

 

-Allons, venez par ici Grand-père, nous allons voir s'il est possible de nous sécher un peu. Ce n'est pas le palais de Wolfram, mais ça devra bien suffire, même pour une personne de votre qualité. Vous héritez de la couche de Rupert; Taal me pardonne, j'espère que vous n'avez pas le nez trop délicat...

 

Je souris malgré moi à ces paroles; Stan semblait ne jamais se départir de son humeur guillerette quelles que soient les circonstances et sa compagnie me distrayait quelque peu de ma douleur et de mes courbatures. Je me demandai un instant à qui il faisait référence puis, ne voyant vraiment pas, je décidai de lui poser la question.

 

-Ne cesses-tu donc jamais de sourire à la vie, quoi que le sort te réserve? La journée m'a semblé assez rude et si j'en juge d'après ce que je vois ici, votre quotidien me paraît peu enviable. Et qui est donc ce Wolfram qui vit dans un palais? Un cousin à toi, peut-être?

 

Stan éclata de rire à cette dernière question.

 

-Vous ne connaissez pas Wolfram? Ha, vraiment vous n'êtes pas d'ici! Il s'agit rien moins que du Comte Electeur d'Ostermark, Wolfram Hertwig; et il n'est hélas pas mon cousin. Quant à votre première question, ma nature est ainsi faite. Corben était comme ça lui aussi il y a quelques années, mais la corde l'a rendu taciturne. Personne ne semble plus comprendre ce qu'il dit, à l'exception de moi bien sûr, ce qui tempère assez bien sa bonne humeur d'autrefois. Allons, prenez ce qu'il vous faut et soignez ce pauvre bougre avant qu'il ne s'en aille dîner avec le vieux Morr, lui aussi...

 

Je ressortis et pris dans mes fontes mon matériel de soin. Ma monture n'appréciait pas de se retrouver dehors par un temps pareil, mais je ne pouvais rien y faire. Tout en la caressant, je lui murmurai à l'oreille que nous ne resterions pas plus que nécessaire.

Une fois à l'intérieur, j'entrepris de m'occuper du larron à qui j'avais entaillé le ventre à peine deux heures plus tôt et qui avait finalement perdu connaissance. Le coup n'était pas mortel et il se remettrait rapidement s'il prenait du repos. Tout à mon ouvrage de couture, j'observai que Stan ne nous quittait pas du regard. Manifestement, il était anxieux du sort de son ami.

 

-Il s'en sortira s'il reste un peu au calme. C'est l'affaire d'une semaine ou deux, voilà tout. Depuis combien de temps vous connaissez-vous?

 

-Depuis toujours, damoiseau, Corben est quant à lui bel et bien mon cousin; de sept ans mon ainé. Nous formions une sacré bande avant qu'ils ne le pendent.

 

-Comment est-ce arrivé?

 

Stan mit quelques instants à répondre. Quand il le fit, sa voix avait perdu ses accents goguenards. Le souvenir devait être pénible.

 

-Nous brigandions joyeusement en ville, usant de ruse et d'adresse pour délester les bourgeois. Corben était le chef, et il fut finalement pris et jugé. Il se vantait souvent de connaître une filouterie pour échapper à la mort, mais ça n'a pas aussi bien fonctionné qu'il l'aurait souhaité, apparemment.

 

-Que veux-tu dire? Il est toujours vivant. Comment peut-on survivre à la pendaison?

 

-Il avait placé une sorte de tube de métal dans sa gorge, relié à ses dents par un fil pour ne pas l'avaler. Quand la corde à serré son cou peu à peu, il a pu  continuer à respirer tant bien que mal. Tout le monde le croyait mort et son corps devait rester en exemple pour décourager les voleurs. A la nuit tombée, on est allé le décrocher et on a pris la fuite dans les bois. Il était toujours en vie, mais son cou est à moitié écrasé et il ne peut plus prononcer les mots correctement désormais. Il est resté plus de sept heures à se balancer au bout de cette maudite corde en faisant semblant d'être mort. Sept saloperies d'heures à suffoquer sans pouvoir rien y faire d'autre que s'accrocher en attendant qu'on le descende. Je ne l'ai plus vu sourire à dater de ce jour-là.

 

Sans plus un mot, je finis de recoudre l'homme inconscient puis m'occupai de ma propre plaie au bras. Stan farfouilla quelques instants dans le fourbis qui s'amoncelait près de sa propre paillasse et trouva finalement quelques provisions de viande séchée et de pain dur. Il m'adressa un bref sourire et sa voix redevint plus joyeuse à l'idée de manger.

 

-J'espère que malgré ton âge tu as encore de bonnes dents, jouvenceau, tu risques d'en avoir grand besoin.

 

Sans m'offusquer de ces incessantes petites piques, je pris la nourriture qu'il me tendait et entreprit de la manger lentement. Entre deux bouchées, je repris la parole.

 

-Et Rupert? De ta famille également?

 

La question était délicate, mais si je devais passer plusieurs jours avec lui, je devais savoir à quoi m'en tenir.

 

-Non, il était la dernière recrue de notre petite bande avant la pendaison. Pas très brillant, mais fort comme un taureau. Quand tous les autres se sont enfouis en pensant que Corben était mort, lui seul est resté. Il ne savait pas quoi faire d'autre, tout simplement. Il n'était pas assez malin pour se débrouiller sans nous, alors il est venu avec moi pour décrocher Corben et puis il nous a suivi... jusqu'à aujourd'hui.

 

Il laissa un silence s'installer, le regard perdu dans les flammes de son feu et je ne parvenais pas à décider s'il était en colère ou soulagé de la mort du gros homme. Je me dis qu'il valait mieux crever l'abcès.

 

-Je suis désolé, dis-je maladroitement.

 

Il répondit aussitôt, mais sans détourner le regard du brasier.

 

-Pourquoi? C'était lui ou toi, l'étranger, tu le sais fort bien. A ta place, il n'aurait pas hésité une seconde et t'aurait abattu avec sa stupide masse. Je suis un brigand minable et je vis dans une grotte pour me cacher de la milice, mais je ne suis pas un idiot; je sais à quel jeu je joue et j'en connais les règles. Quand on veut dépouiller un homme, il ne faut pas s'attendre à ce qu'il fasse dans la dentelle. Je n'ai pas de colère pour ce qui s'est passé aujourd'hui, damoiseau. Tu peux dormir sur tes deux oreilles. Ranald m'en est témoin, je jure de ne pas te trancher la gorge pendant ton sommeil.

 

Sur quoi il me jeta un regard oblique puis éclata soudainement de rire devant ma mine surprise. J'attendis encore un peu que mes vêtements sèchent puis je m'étendis sur la paillasse de Rupert. J'avais besoin de repos et ne pourrais de toute façon pas veiller jusqu'à ce que Stan s'endorme. Je fermai les yeux.

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

  • 2 semaines après...

Ah pas mal !!

 

J'allais faire comme remarque au début que ça n'avançait pas beaucoup mais finalement ça va. Parce que le village a été plutôt lent et je pensais que la scène de combat n'allait rien mieux donner que ça. Finalement, tu avais un plan :p Voyons où cette pseudo amitié va les mener du coup !!

 

@+

-= Inxi =-

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

  • 1 an après...

Haha! Moins de deux ans de patience auront suffit pour avoir la suite de ce récit; qui dit mieux?!

Bon, il ne servirait à rien de nous étendre sur mon absence; concentrons-nous sur ce que nous sommes venus faire céans:

 

Il ne me trancha pas le col cette nuit-là.

 

Je m'éveillai sur la même paillasse crasseuse un peu après le lever du soleil. L'odeur qui régnait dans la grotte était un mélange de sueur rance, de fumée et de sang; un mélange âcre sans le moindre doute, mais pas tellement pire que celui que produit une pleine tente de soudards après quelques semaines de campagnes. Moi et mes vieilles habitudes de soldat...

 

Stan était sorti, visiblement, et Corben était toujours inconscient. Ces quelques heures de répit lui feraient le plus grand bien, coupé de la douleur. Je jetai discrètement un œil sur ses bandages et les tâtai pour m'assurer qu'ils n'étaient pas souillés de sang. Satisfait, j'adressai rapidement une prière coutumière à Shallya pour qu'elle prenne soin de ce misérable. Moi, je ne pouvais plus grand chose pour lui.

 

Je sorti pour prendre l'air autant que pour pouvoir enfin me tenir debout sans que ma tête ne racle sur la voûte de cette grotte sordide.

Stan n'était nulle part en vue. Je me trouvai un buisson à ma convenance et entreprit de délasser mon haut de chausse pour me soulager. Mon cheval hennit de mécontentement; non seulement je le laissais dehors toute la nuit, mais j'avais encore l'outrecuidance de faire passer mes besoins personnels avant de lui servir son repas?!

 

Je me pris à sourire à cette pensée grotesque et décidai que je ferais une exception pour ce cheval en lui donnant un nom; et des plus illustres!

Je lui caressai la tête et lui donnai une pomme pour qu'il cesse ses jérémiades tout en lui susurrant quelques mots à l'oreille:

 

-Te rends-tu compte, compagnon? Tu vas être nommé; c'est un grand privilège. Comme tu es impérieux dans tes souhaits et que tu poses sur toutes choses en ce monde un regard de digne propriétaire, quel nom pourrait mieux te convenir que Dieter le Magnifique? C'est un prénom prestigieux qui ne présente qu'un seul inconvénient: c'est déjà celui de mon frère aîné. Le premier né de la fratrie de von Beckdorf, grand héritier de la fortune et de la demeure familiale et éternel rabroueur de ses cadets, moi en particulier. S'il apprend que tu te nommes d'après lui, il est capable de toutes les extrémités alors voilà ce que je te propose: si tu sais tenir ta langue sur le sujet, je saurai tenir la mienne.

 

A ces mots et comme il avait terminé d'engloutir la pomme que je lui avait donné, Dieter émit un souffle et frotta affectueusement sa tête contre moi.

 

-Et bien, c'est décidé alors! Dieter le Magnifique...

 

Je lui servi une ration de fourrage et le laissai manger tout à son aise.
Je m'étirai alors et je senti mon dos qui craquait en plusieurs endroits; je n'avais décidément plus l'âge de passer mes nuits seulement séparé du sol rocheux par deux centimètres de paille moisie. Il me faudrait trouver un plus digne couchage sans délais sous peine de rester coincé à demi penché comme un vieillard.

 

Stan revint deux bonnes heures plus tard alors que j'étais occupé à faire boire Corben qui était finalement revenu à lui et ne cessait depuis de geindre et de marmonner en produisant ces infects petits bruits que j'avais déjà entendu la veille. Je ne parvenais pas à distinguer un seul mot dans tout ce flot de sons répugnants, mais il n'était pas bien difficile de savoir ce dont avait besoin un homme qui venait de passer une rude nuit avec le ventre à moitié ouvert...

 

-Vous êtes encore ici, damoiseau? J'aurais cru retrouver Corben mort et tous nos biens dérobés.

 

Encore une de ses stupides plaisanteries; tout ce que j'aurais pu ramasser ici n'aurait pas valu un sou. Je décidai de rentrer dans son jeu.

 

-L'idée m'a effleuré un instant, mais je n'ai trouvé que des puces et quelques cadavres de rats en fouillant vos affaires. Et puis, un inconnu m'a un jour laissé dormir dans sa grotte sans me trancher la gorge dans mon sommeil; je me sentais redevable je présume...

 

Stan fit un grand sourire et posa près du foyer un couple de lapins.

 

-Excellent état d'esprit, damoiseau! Voici de quoi ne pas mourir de faim encore pour un moment. Les collets nous nourriront encore quelques semaines, jusqu'à ce que l'hiver soit sur nous.

 

-Et que ferez-vous ensuite?

 

-Nous irons en ville, probablement. Il fera trop froid pour vivre dans cette grotte et n'importe comment il n'y aura plus assez à manger, même sans le gros ventre de Rupert à remplir.

 

Je jetai un regard à Corben qui s'était rendormi avant de revenir sur Stan.

 

-Ils vous laisseront entrer? Corben passe difficilement inaperçu avec son cou noir et son langage bizarre. Je ne connais pas beaucoup de ville qui acceptent ce genre de personne.

 

Stan dépiautait consciencieusement ses lapins.

 

-Peut-être bien, peut-être pas... A quoi servirait de m'en inquiéter maintenant? Si je ne trouve pas de quoi nous nourrir d'ici-là il ne sera pas utile de s'en faire d'avantage. Ha! Et j'ai encore une pleine bourse de bon argent qui m'attend à votre ceinture, si ma mémoire est bonne.

 

-Elle l'est, à n'en pas douter! dis-je en comptant les dix pièces que je lui avais promises. Voici ce que nous avions convenu.

 

Stan tendit sa grande main pour recevoir la somme et empocha le tout rapidement.

 

-Comme il est agréable de traiter avec un gentilhomme; c'est si rare dans notre métier.

 

Nous n'ajoutâmes plus rien pendant quelques minutes, puis je revins à la charge.

 

-Dix pistoles ne vous tiendront pas chaud tout l'hiver, tu le sais bien.

 

Stan embrocha l'un des lapins sur une branche et le positionna en équilibre au dessus du feu.

 

-Que veux-tu que j'y fasse? Nous volerons comme nous l'avons toujours fait; c'est tout ce que nous savons faire.

 

-Je suis d'avis que vous méritez mieux. J'ai tâté de ton lancer de couteau, et tu es plutôt bon. Quant à Corben, il sait manier une épée et il est encore assez jeune pour apprendre à le faire mieux.

 

-Et qui lui apprendra? Toi, damoiseau?

 

-Et pourquoi pas? Je suis seul sur les routes et vieux à ne plus me souvenir de mon âge, comme tu te plaisais tant à me le rappeler encore hier. Un peu de compagnie ne me ferait pas de mal.

 

-Et devenir routier? Mercenaire?

 

-C'était bien mon idée. Je suis las de me battre pour des idiots et des jeunots qui n'y entendent rien. Battez-vous à mes côtés et je vous formerai comme je pourrai. Ensuite nous trouverons d'autres compagnons dans le Sud et aussi de l'embauche.

 

Stan contempla notre maigre repas qui grésillait sur sa branche, puis jeta un regard à Corben, toujours endormi.

 

-Je lui en parlerai tout à l'heure. Il faut qu'il se repose. Nous ne serions pas prêts à partir avant plusieurs jours; et même alors, nous te ralentirions.

 

-Ais-je donc l'air si pressé? Je comptais passer quelques jours en ville à dormir dans un bon lit et me faire masser le dos et le reste dans un bordel; vous n'aurez qu'à me rejoindre quand vous serez fatigués de vous caresser l'un l'autre.

 

Stan éclata de rire et me donna une grande claque dans le dos qui réveilla ma douleur dans le bras.

 

-Ha! Entendu damoiseau, nous ferons comme tu dis! Quand Corben sera capable de marcher nous te rejoindrons en ville.

 

Mi grimaçant de douleur, mi riant de bon cœur, je tendis une main franche à ce grand jeune homme étrange qu'Ulric en personne avait placé sur ma route.

 

-Ulrich von Beckdorf, mon garçon.

 

Il la saisit et sa poigne recelait autant de force que d'enthousiasme.

 

-Stanislas Kleineriese, grand-père.

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

  • 3 semaines après...

Et nous reprenons joyeusement les aventures de ce bon vieux Mercenaire.

Bonne lecture!

Je quittai la grotte et les deux malandrins le matin même; Stanislas m'avait expliqué le chemin pour rejoindre la route et je lui en fus plus d'une fois reconnaissant. Les pluies torrentielles avaient si bien détrempé les sous-bois que j'aurais été incapable de retrouver notre piste de la veille même si j'étais tombé le nez en plein dessus.
Une fois sur les bons pavés de la voie impériale, il ne me restait qu'à me laisser porter par Dieter et j'atteignis "la ville" un peu plus tard. Je sus que j'en étais finalement proche en entendant faiblement la cloche d'un temple donner l'heure aux bonnes gens.
Au détour d'une sinuosité de la route, la ville apparu devant moi et je fus plus qu'un peu surpris de sa taille. Je m'étais figuré que les gens du cru l'appelaient "la ville" uniquement par habitude et surtout parce qu'en comparaison des trous boueux où ils vivaient eux-mêmes, les quelques cabanes de mauvaises planches qui devaient constituer un vague hameau étaient ce qui se rapprochait le plus d'un endroit civilisé à des lieues à la ronde. Mais je dus bien admettre que je me fourvoyais grandement en arrivant devant une belle enceinte de pierre, percée d'une large porte en excellent état et gardée par deux hommes en livrée. Deux autres étaient de faction sur une tourelle un peu plus loin qui dominait insidieusement la route et je songeai alors qu'ils avaient dû me voir depuis un bon moment déjà.
Tout cela finit de dissiper mes illusions sur la prétendue petitesse de l'endroit et j'étais sûr à présent de trouver de quoi boire et me délasser dans une bourgade de cette importance. C'est donc d'un ton joyeux que je m'adressai aux factionnaires:

 

-Holà! La bonne journée à vous, portiers. Quelle est donc le nom de cette ville que je vois joliment dressée devant moi?

 

Les deux hommes se regardèrent brièvement avant que l'un d'eux ne réponde. Il portait une courte barbe blonde plutôt soignée et son œil était vif. Il semblait détendu, sans doute assuré que toute menace serait décelée assez tôt par les autres gardes perchés plus haut, mais gardait tout de même sa longue pique à portée de la main. Il était sensiblement plus jeune que son compère et ne devait avoir plus d'un an de service à son actif.

 

-Elle se nomme Waldesherz, étranger, mais tout le monde alentour dit simplement "la ville" sans qu'il soit besoin de la nommer autrement.

 

Je souris à cette annonce; enfin quelqu'un qui pouvait me renseigner dignement.

 

-J'avais bien cru comprendre que les petites gens d'ici l'appelaient de la sorte, oui... Pour tout dire, je désespérais de découvrir jamais son véritable nom et je vous suis fort obligé d'avoir éclairé ma lanterne, dis-je en m'inclinant. Auriez-vous assez de bonté pour m'indiquer également où trouver une écurie pour mon cheval ainsi qu'un lieu où un honnête voyageur tel que moi pourrait se délasser tranquillement après plusieurs jours passés sur les routes poussiéreuses de votre belle province?

 

Les gardes sont habituellement toujours aptes à fournir ce genre de renseignements et tout particulièrement ceux qui sont souvent de faction à l'une des entrées de la ville. Quelle tenancière de bordel était assez pingre pour ne pas glisser discrètement une pièce ou deux aux sentinelles afin qu'elles recommandent leur établissement aux voyageurs de passage? Dans certaines villes du sud il n'était pas rare que telle ou telle maison close donne des primes ou d'autres avantages en nature aux gardes si des clients se présentaient en déclarant venir de leur part. Mais à la mine franche et sérieuse de celui-ci, je sus tout de suite qu'il n'avait pas compris l'allusion... Il m'indiquait une adresse quand son compagnon le poussa du coude et leva les yeux au ciel à mon intention.

 

-Vous seriez plus à l'aise au " Die Grunzende Katze ", m'est avis. Vous trouverez pas d'endroit plus accueillant en ville que c'lui-là. Vous devriez tomber dessus sans trop de mal, c'est dans l'quartier de la scierie.

 

Je souris devant l'air scandalisé du jeunot et leur lançai un cliquet à chacun.

 

-Pour votre peine, mes bons amis. Je vais suivre votre excellent conseil, je crois. Ha, et si d'aventure deux hommes se présentaient ici dans quelques jours, l'un parlant difficilement et l'autre grand et maigre à faire peur, ne vous effarouchez pas trop de leur mauvais aspect et ayez la grande bonté de me faire prévenir aussitôt dans cet établissement que vous me recommandez; vous n'aurez pas affaire à ingrat, je peux vous l'assurer.

 

Sur quoi j'éperonnai doucement Dieter qui reprit son avance d'un pas tranquille. Waldesherz offrait un curieux spectacle; une fois passé son enceinte de bonne pierre, tous les bâtiments semblaient construits exclusivement en bois. La forêt était visiblement la source de toutes les richesses de la ville si j'en jugeais par le nombre de solides gaillards qui passaient avec une cognée ou une longue scie à l'épaule. Il me suffit de leur emboîter le pas pour trouver le quartier que je cherchais et le premier venu pu me renseigner facilement sur ma destination.
 

Son sourire goguenard et mi-rêveur comme il m'expliquait le chemin m'assurait que l'établissement n'usurpait pas sa bonne réputation.

Il restait des chambres libres et malgré un prix à la nuitée un peu supérieur à mes estimations, l'établissement était plutôt propre ainsi que les filles qui y officiaient. J'avais d'avantage besoin de repos que de compagnie et je renvoyai à regret la donzelle que la tenancière m'avait expédiée, tout en songeant que quelques années plus tôt j'aurais bondi sur elle avec fougue.
Je m'étendis quelques instants pour étirer mon dos et songeai à toutes les maisons closes qu'il m'avait été donné de visiter aux quatre coins de notre bon Empire. Celle-ci n'était pas parmi les plus fantasques que j'avais connues, mais elle se distinguait malgré tout pour une bourgade aussi reculée.

Perdu dans mes pensées je ne tardai plus à m'assoupir.

Modifié par Thomov Le Poussiéreux
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

  • 1 an après...

Je fus réveillé le lendemain par un entêtant grondement. On aurait dit qu'un gigantesque chat ronronnait sans relâche avec la régularité de la grande horloge astronomique d'Altdorf. Je mis plusieurs secondes à sortir tout à fait des restes de mon songe avant de me relever péniblement.
Une nuit dans un bon lit avait chassé presque toutes mes douleurs dorsales, mais je n'étais pas dans ma meilleure forme pour autant. Crapahuter sous la pluie battante et dans ces bois détrempés deux jours durant risquait fort de se payer d'une bonne toux grasse à vous faire cracher vos tripes au sol.
Renonçant à élucider le mystère de l'origine de ce bruit insolite, je fouillai dans mes affaires à la recherche de vêtements pas trop sales et descendit avec le reste de mes frusques que je tendis à une servante qui passait.

 

-Ayez l'obligeance de me laver ces nippes au plus tôt, ma brave. Je n'ai plus rien à me mettre.

 

La fille paru surprise mais n'ajouta cependant rien et je repris ma route vers la salle principale.
Un bon feu ronflant chassait agréablement le froid de cette matinée humide d'automne et je claquai des mains avant de les frotter l'une contre l'autre aussi près du feu qu'il m'était possible d'approcher sans me brûler.
La pièce qui la veille m’avait paru enchanteresse  perdait un peu de sa superbe à la lumière froide du jour. A la nuit tombée, les draperies qui pendaient des murs, les nombreux tableaux suggestifs et les myriades de bougies donnaient à l’endroit un irrésistible air de cour des miracles qu’il était loin d’arborer encore alors que je pouvais voir combien de fois chaque tenture avait été reprisée, la grossièreté du trait du peintre et que le soleil inondait pleinement la salle.
Rien n’est plus triste pour moi qu’un bordel au petit matin ; cela dit, comme je m’étais contenté de dormir cette nuit, j’espérais qu’il me réservait encore quelques bonnes surprises.

 

-Mais n'est-ce pas là notre dernier client? Je n'ai pas eu le plaisir de vous accueillir en personne au "Grunzende Katze" hier soir, noble étranger. Mais je suis certaine que nous trouverons bientôt l'occasion de réparer cette malencontreuse entorse aux règles de l'hospitalité...

 

Je tournai la tête vers la femme qui venait de pénétrer dans la pièce. Elle était habillée d'une bien étrange façon, comme si une dame de noble naissance avait savamment découpé de-ci de-là dans ses robes pour se dénuder au maximum sans perdre une once de prestance. Un roturier aurait certainement pu croire qu'il se trouvait face à une baronne ou une duchesse plus dévergondée et fantasque que la normale; mais mon éducation dans une authentique famille d'aristocrates me révélait qu'il ne s'agissait que d'une pâle imitation et que cette femme, pour toute attrayante qu'elle fut, n'était sans doute pas née dans un endroit plus prestigieux qu'une étable, l'arrière de la cabane d'un quelconque manant ou même un bordel pas si différent que celui dans lequel je me trouvais.
Néanmoins il ne me coûtait rien d'être aimable avec elle. Aussi me retins-je de rire de son accoutrement et m'adressais-je à elle avec rien de plus qu'un fin sourire.

 

-Vous devez être la propriétaire de ce charmant établissement. Bien que je n’aie pas encore profité des charmes de votre personnel je tiens à vous féliciter pour l’excellente tenue des lieux. Il me semble que cette nuit de bon sommeil m’a redonné toutes les forces que l’âge m’a prit insidieusement ces vingt dernières années durant. A qui ais-je l’honneur, madame ?

 

Ce-disant je saisi délicatement la main qu’elle me tendait et m’inclinai très bas pour y déposer un semblant de baiser. Ce mouvement m’appris que la raideur de mon dos était encore bien présente et qu’il faudrait plus que quelques heures de repos pour qu’il retrouve un peu d’élasticité.

 

-Je me nomme Ulla Gastfreundlichen, mais mes amis m’appellent simplement Baronne.

 

-Ulrich von Beckdorf, dis-je en me redressent de manière un peu raide.

 

-Un gentilhomme dans ces murs ?! Voilà qui est terriblement excitant. Pour peu je me serais même laissée aller à goûter en personne à cette fameuse vigueur retrouvée… Mais d’autres occupations m’appellent, j’en ai peur. Il faudra vous contenter de mes filles.

 

-Je suis sûr d’être comblé par leurs attentions, mais je ne perds pas pour autant espoir que nous reprenions cette conversation un peu plus tard. Je compte en effet rester quelques jours sous votre toit. Je paierai d’avance, afin de dissiper tous les doutes que vous auriez pu nourrir sur ma situation financière.

 

-Voyons, je ne me serais jamais permise de pareils soupçons à l’encontre d’une personne de votre qualité.

 

Elle prit cependant les pièces que je lui tendais avec une vivacité qui trahissait l’amabilité de son discours. Je ne pris toutefois pas ombrage de ce geste : je connaissais assez son milieu pour savoir que les plus belles promesses de ses clients ne nourriraient pas ses filles bien longtemps. Une paie d’avance ne se refusait pas.
Comme elle faisait mine se retirer, je la retins un instant.

 

-Une dernière chose avant que vous ne me quittiez : je n’ai pas pu m’empêcher de relever un bruit étrange ce matin. Nous ne l’entendons pas d’ici, mais je vous assure que depuis ma chambre c’est tout à fait net. Pouvez-vous me dire de quoi il s’agit ?

 

-Ha ! Vous parlez certainement du ronronnement chaleureux auquel notre maison doit son nom ; il s’agit en réalité d’un écho de l’activité qui règne à la scierie toute proche. Vous avez sans doute remarqué que la prospérité de notre ville, et donc de mon propre commerce, repose pour l’essentiel sur le travail du bois. Mais ne vous en inquiétez pas trop, vous verrez qu’on s’y habitue très rapidement.

 

Elle me laissa sur ces mots. Malgré son air confiant je n’étais pas si sûr de m’habituer à ce son particulier, comme un bourdonnement incessant bien qu’en sourdine.
La taule n’étant pas spécialisée dans les séjours de longue durée, je sortis avec l’intention de trouver un endroit où casser la croute. La matinée était plus avancée que je ne le pensais. Je fis un crochet par l’écurie afin de m’assurer que Dieter était bien traité puis me dirigeai vers cette fameuse scierie qui me vrillait les oreilles. Après tout, le travail dans un tel endroit devait être dur et chacun sait qu’un labeur harassant creuse fameusement l’appétit. Je tablais sur le fait que quelques marchands entreprenants supporteraient certainement le vacarme incessant des scies afin de s’assurer d’être au plus près de cette clientèle affamée.

 

Ma courte promenade m’en apprit un peu plus sur Waldesherz. Les rues dans ce quartier bourdonnaient d’une activité témoignant d’une grande prospérité. Presque toutes les bâtisses devant lesquelles je passai étaient encore parées du lustre de la nouveauté et je jugeai que la plupart n’avait pas plus de deux ans d’âge. Certaines étaient visiblement construites à la hâte et il n’était pas rare que leur devanture penche dangereusement sur la chaussée.
Toute cette effervescence m’étonnait quelque peu et je me demandai ce qui pouvait en être la cause. Je finis par trouver où me restaurer en suivant un groupe de bucherons qui parlaient fort et ne faisaient aucun mystère de leur destination.

Modifié par Thomov Le Poussiéreux
Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

  • 1 mois après...
  • 1 mois après...

Il ne faut pas désespérer. Même si mon rythme d'écriture est lamentablement lent, je ne lâche pas l'affaire. L'envie d'écrire une suite aux aventures de ce cher Ulrich me titille de plus en plus. Il faut d'abord que je règle la question su Concours de Récits du forum des Comtes Vampires qui est actuellement en cours et puis je m'attèle à ça.

Si le cœur t'en dit, sois le bienvenu dans notre humble demeure...

Sinon pour te faire patienter, je te mets le lien de mon sujet phare: Les Errances de Thomov Le Poussiéreux.

Bonne lecture à toi -_-

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

  • 1 an après...

Voilà un récit caractérisé par un style soigné et très agréable à lire, à une exception prête sur la forme : le double emploi des caractères gras / italiques rend la lecture un brin fatigante pour les yeux.

 

Je le répète, l'ensemble est bon, voire très bon. Ce serait dommage de ne pas poursuivre... :)

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

  • 3 mois après...

Salut à toi, Oberon et merci pour ton commentaire.
Je suis content que mon style te plaise. Pour ce qui est de la suite, j'avoue que mon quotidien s'est quelque peu complexifié avec la naissance de mon fils, mais je ne baisse pas les bras. Ca prendra le temps qu'il faudra mais j'y arriverai c'est certain ;)

Lien vers le commentaire
Partager sur d’autres sites

Rejoindre la conversation

Vous pouvez publier maintenant et vous inscrire plus tard. Si vous avez un compte, connectez-vous maintenant pour publier avec votre compte.
Remarque : votre message nécessitera l’approbation d’un modérateur avant de pouvoir être visible.

Invité
Répondre à ce sujet…

×   Collé en tant que texte enrichi.   Coller en tant que texte brut à la place

  Seulement 75 émoticônes maximum sont autorisées.

×   Votre lien a été automatiquement intégré.   Afficher plutôt comme un lien

×   Votre contenu précédent a été rétabli.   Vider l’éditeur

×   Vous ne pouvez pas directement coller des images. Envoyez-les depuis votre ordinateur ou insérez-les depuis une URL.

×
×
  • Créer...

Information importante

By using this site, you agree to our Conditions d’utilisation.