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Warhammer Forum

Réécriture des mythes Européen dans le Seigneur des anneaux


fils de durïn

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Merci pour ces remarques Lucius :)

 

Deux choses sur lesquelles je ne suis pas d'accord avec toi : Saroumane est bien un très bon exemple de personnage qui tombe par démesure et par orgueil ; Isildur et les Nazgûl (surtout Isildur) sont largement aidés par les anneaux. Dans un cas comme dans l'autre les intentions peuvent être bonnes au début, mais je dirais que la déchéance est plus classique pour Saroumane, c'est un de nos seuls exemples aussi détaillés. C'est presque le cas d'école de l'oeuvre.

 

Sur la Comté, je te trouve aussi assez catégorique. L'industrie est bien, en Isengard et en Mordor, orientée dans un but de guerre, mais ce n'est pas l'idée principale chez Tolkien. C'est effectivement un motif présent très tôt du fait de son expérience à la guerre (machines pour la prise de Gondolin) mais par la suite l'idée est aussi écologique et en rapport avec la terre, je pense. En l'occurrence, on ne voit pas en Comté en quoi l'industrie est directement militaire. En revanche, l'idée de la productivité et des échanges est bien présente, ne serait-ce qu'avec les provisions qui partent enrichir l'Isengard. C'est à la fois une critique de l'exploitation sans limite d'un pays pour un autre, mais on ne peut pas nier que les ressources, de luxe ou non, jouent un rôle, et que ce n'est pas uniquement guerrier. L'erreur, je pense, est de parler de "profit", car le profit économique n'est pas bien présent chez Tolkien (mis à part chez les Nains), on a peu de trace des échanges commerciaux et surtout de la monnaie, quasi absente. Il est difficile par conséquent d'affirmer que l'industrialisation de la Comté était orientée vers les profit (et j'ai un peu la flemme de relire le chapitre tout de suite).

Modifié par Tiki
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Deux choses sur lesquelles je ne suis pas d'accord avec toi : Saroumane est bien un très bon exemple de personnage qui tombe par démesure et par orgueil ; 

Tu as raison, mais c'est lui qui cite Isildur comme étant dans le même cas. Je soulignais la contradiction. D'autre part, il est d'autres personnes qui résistent aux Anneaux.

 

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L'industrie est bien, en Isengard et en Mordor, orientée dans un but de guerre, mais ce n'est pas l'idée principale chez Tolkien.

Non, bien sûr, mais ça l'est chez Sauron et Saruman. 

 

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C'est effectivement un motif présent très tôt du fait de son expérience à la guerre (machines pour la prise de Gondolin) mais par la suite l'idée est aussi écologique et en rapport avec la terre, je pense.

Je suis d'accord, l'écologie est très présente dans toute l’approche de Tolkien sur la technologie, l'industrie. 

 

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En l'occurrence, on ne voit pas en Comté en quoi l'industrie est directement militaire.

Elle ne l'est pas. Je parlais bien de la vengeance de Saruman. Tout le saccage de la Comté est tourné vers ça.

 

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En revanche, l'idée de la productivité et des échanges est bien présente, ne serait-ce qu'avec les provisions qui partent enrichir l'Isengard.

Oui, symboliquement, on est d'accord. Mais pour Saruman, tout ça c'est pour humilier les Hobbits. C'est un moyen et non un but. Quand à l'exportation vers l'Isengard, elle a lieu avant , lorsque l'Isengard existe encore en tant que puissance, et pas dans un but d'enrichissement, mais de confort personnel de Saruman : fumer du bon tabac en cachette. Ca n'enrichit pas l'Isengard.

 

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C'est à la fois une critique de l'exploitation sans limite d'un pays pour un autre, mais on ne peut pas nier que les ressources, de luxe ou non, jouent un rôle, et que ce n'est pas uniquement guerrier. L'erreur, je pense, est de parler de "profit", car le profit économique n'est pas bien présent chez Tolkien (mis à part chez les Nains), on a peu de trace des échanges commerciaux et surtout de la monnaie, quasi absente. Il est difficile par conséquent d'affirmer que l'industrialisation de la Comté était orientée vers les profit (et j'ai un peu la flemme de relire le chapitre tout de suite).

Je suis d'accord. Il y a un peu de tout ça chez Tolkien. La défense de la nature, la critique de la consommation, du productivisme, du gaspillage, etc, (plus le rapport à la guerre, à la vengeance, à la propagande). Mais on ne peut pas le rattacher directement aux exemples qu'il cite en tant que motivation des personnages. C'est bien plus diffus et subtil pour pour le Mordor et la Comté saccagée que pour Fangorn, par exemple, où là c'est limpidement écolo.

 

Pour résumer, souvent il a raison sur la symbolique diffuse, mais les exemples qu'ils donnent ou l'interprétation directe qu'il en fait me paraissent simplistes ou erronés. Il cherche trop à coller des citations pour illustrer son idée prédéfinie, qui n'a pas forcément besoin de ça. Il cherche du premier degré au lieu de se contenter du second degré, des idées de l'auteur qu'il fait transparaître dans son oeuvre par des moyens plus ou moins détournés.

 

Un peu comme nous quand on se chamaille sur une demi-phrase pour savoir qui a raison dans l’utilisation d'une citation pour appuyer notre idée de départ. ^_^  Ce qui ne nous empêche pas de changer d'avis en discutant.

Modifié par Lucius Cornelius
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Oui, l'article est un peu superficiel dans ses références.

 

Tu sais Voltaire disait que si tout le monde passait son temps à lire (ou à danser), il y aurait probablement moins de guerres, mais je crois que la soif de savoir peut très bien mener au conflit, que ce soit dans le cas de Saroumane qui est tout d'abord animé par son goût de la connaissance, en passant par l'intégrisme religieux qui s'écharpe sur deux lignes dans un codex, jusqu'à nos propres discussions :wink: C'est une jolie mise en abyme pour moi (en espérant qu'on n'en arrive pas là tout de même), car notre rapport à Tolkien a tendance à faire de nous ce qu'il critique justement un peu.

Modifié par Tiki
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Je pense, si ça peut te rassurer (car tu as des réflexions bien sombres quoique pas dépourvues de pertinences), que notre rapport désintéressé à Tolkien, Tolkien pour lui-même, nous rapproche plus d'un Bombadil que d'un Saruman.

Ceci est extrêmement juste.

 

C'est fou les sujets de malade qu'on peut louper sur ce forum. Je me sens tel un Elfe revenu du Deuxième Âge et découvrant d'un coup tout ce qui s'est passé en son absence.

 

Poupi,

flooder des cavernes de Mandos

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  • 2 mois après...
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Peredhil

Les références à Dumézil se défendent pour le coup mais je ne l'ai jamais vu appliquée à la Communauté (pas sûr que ça fonctionne vraiment d'ailleurs puisque Aragorn concentre à lui seul les trois fonctions).

 

Je viens de découvrir le sujet et espère qu'il n'est pas trop tard pour apporter ma pierre à l'édifice.

 

Je trouve cette référence à la trifonctionnalité très intéressante.

 

Pour te répondre Peredhil, le roi au Moyen Âge permettait l'unité des trois fonctions; bien plus, il l'incarnait. Il était un roi pasteur et protecteur des pauvres (laboratores), un roi sacré ayant vocation à assurer le Salut de ses sujets (oratores) et enfin le primus inter pares des chevaliers, un roi guerrier (bellatores).

Ceci explique que jusqu'à la fin, les rois d'Ancien régime en France apprenaient un métier pour mieux connaître la vie de leur sujet, pour partager, dans une certaine mesure évidemment, la vie des laboratores (devenu depuis Tiers état): Louis XV par exemple était ébéniste ou plus exactement tourneur de chaises, Louis XVI, c'est plus connu, apprenait l'horlogerie (ce dont on s'est servi ensuite pour le tourner en ridicule). Les trois ordres présentaient leurs doléances séparément lors des Etats Généraux car ils avaient des intérêts distincts et le roi tranchait car il œuvrait pour l'intérêt commun, incarnant l'union des trois ordres.

 

Par ailleurs, j'ajouterai que le roi était un roi guérisseur, ce qui manifestait son pouvoir bienveillant sur ses sujets des trois ordres (pouvoir thaumaturgique, en France, le roi soigne depuis le XI-XIIe siècle, très exactement à partir du règne de Philippe Ier, la maladie des écrouelles, ce qui donnera lieu à la formule "le roi te touche, Dieu te guérit). Or, Aragorn est également un guérisseur (Frodon, Faramir, Merry, etc..), les prophéties du Gondor rappelant que "les mains du roi sont celles d'un guérisseur". 

 

Voilà, il y aurait beaucoup à dire sur le sujet, mais voici brossé rapidement quelques idées tirées de mes connaissances sur la période médiévale.

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A ceci près que la fonction religieuse est plutôt gommée chez Aragorn :)

 

Pour l'apprentissage d'un métier par les rois, est-ce vraiment durablement attesté ? ça a l'air si marginal que j'ai l'impression qu'il faut surtout y croire pour le voir...

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Hello Tiki,

 

oui  tu as tout à fait raison pour Aragorn et le Salut. Toutefois, dans l'histoire occidentale, on distingue deux types de rois. Le roi rector, qui enseigne à ses sujets les vérités de la foi, tenant un peu la place du prêtre (l'exemple type est Charlemagne pour les connaisseurs), modèle pas vraiment apprécié par l'Eglise qui trouvait que l'on empiétait sur ses compétences. Mais il y avait aussi le roi modèle pour son peuple qui incarnait les vertus chrétiennes et montrait ainsi l'exemple par ses actes. Rôle plus discret. Je pense que l'on peut sans peine rattacher Aragorn à ce second modèle, puisqu'il incarne les vertus de probité, franchise, dévouement, loyauté, honneur, etc... vertus qui étaient attendues de tout chrétien car elles étaient nécessaire pour leur Salut. Le roi montrait en quelque sorte la voie pour accéder au Paradis, qui était à l'époque la finalité de la vie terrestre, envisagée comme un passage et non une fin en soi. Ce deuxième modèle royal correspond en plus davantage à l'esprit de l'oeuvre de Tolkien, qui n'entendait pas faire un livre spécifiquement chrétien, bien que sa foi et sa culture chrétienne transparaisse assez souvent dans le SDA à mon sens, même si la question est discutée. 

Voilà, je ne pense pas pour ma part que Tolkien ait sciemment cherché à représenter en Aragorn le roi des trois fonctions, mais je pense que sa culture du haut Moyen Âge a influencé inconsciemment les traits de ce personnage et qu'un parallèle est effectivement défendable sans déformer la pensée de l'auteur. Après, comme toute interprétation, c'est sujet à discussion, d'autant que si je connais bien la période médiévale, je suis loin d'avoir la culture de certains qui rôdent sur ce forum sur l'oeuvre de Tolkien.

 

Je vais répondre à présent en détail sur ta remarque sur l'apprentissage d'un métier par les rois. Tu as raison, c'est attesté à la fin de l'ancien régime seulement: j'y vois pour ma part un effet de la philosophie utilitariste en germe à cette époque mais aussi peut-être, ce qui est plus positif, une volonté de se rapprocher du peuple, car la monarchie d'Ancien régime est plus centralisée, plus administrative que la royauté médiévale et donc moins accessible, moins mêlée aux sujets. Toutefois, même à la fin de l'Ancien régime, il était possible à un paysan de trouver le roi dans les jardins de Versailles pour lui présenter une requête (seules conditions, onéreuses: faire le voyage jusqu'à Versailles, ce qui n'était pas donné à tout le monde pour des raisons évidentes d'interruption du travail et des frais occasionné par le voyage, et louer un costume à l'entrée des jardins du château pour être présentable devant le roi, et là, je pense que les loueurs devaient se faire plaisir^^). Au Moyen Âge, par contre, pour avoir bossé sur un nombre conséquent de chroniques, j'ai été frappé par la facilité d'accès des sujets de toute condition au roi, qui pouvait être interpellé en pleine rue et décider de recevoir aussitôt la personne pour régler son problème (dette, agression, etc...).

 

Avant l'Ancien régime, le roi est surtout envisagé comme le protecteur des laboratores, il est au-dessus de cet ordre mais pour autant il "s'abaisse" souvent (le terme latin utilisé dans les sources pour décrire ce comportement envers les laboratores est condescendere, qui signifie littéralement "descendre pour être avec", notion précise et riche de sens) auprès des couches laborieuses de la population et des démunis pour les aider, soit par le glaive en prenant leur défense, soit par l'écoute (en entendant leurs plaintes ou réclamations), en veillant à leur intérêt (chartes de privilèges ou franchises délivrées aux communautés urbaines et villageoises) ou en soulageant leurs misères (que ce soit indirectement par la fondation d'hôpitaux et de léproseries sur les deniers royaux, fondations très nombreuses au Moyen Âge central, ou directement, comme le faisait Louis IX avec les pauvres en les recevant à sa table ou en les soignant lui-même). Donc, au Moyen Âge, les rois n'apprenaient pas les métiers de leurs sujets, par contre, ils en connaissaient l'exercice et les modalités: ils avaient des notions très précises d'agriculture dans un pays à 90% rural (Louis XIV plus tard a encore eu des cours en ce domaine durant son enfance), délivraient des chartes pour réglementer les privilèges des corporations d'artisans, etc...  Par ailleurs, la royauté alors n'est pas centralisée à Paris, mais elle est itinérante: le roi depuis l'époque mérovingienne voyage de palais en palais et c'est autant de moments de rencontres avec ses sujets (attestés par les documents délivrés aux cours de ses voyages à des bénéficiaires de tous les ordres).

 

Voilà, une partie de ces réponses sont, il faut le préciser, parfois un peu théoriques: c'est-à-dire que j'ai décrit l'idée que l'on se faisait de la royauté à l'époque. Tous les rois ne l'ont pas incarnée au même degré bien entendu, après, il faut étudier règne par règne et comparer les idées aux faits.

 

J'espère ne pas vous avoir lassé avec ce pavé. Merci de m'avoir lu jusqu'au bout pour les plus courageux.

 

Modifié par royaume
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Quelle belle éloquence en ce qui concerne nos rois d’antan (avec et sans blague !), on y retrouverais presque le désir du peuple (français, entre autre... et surtout) de croire en l'homme/la femme providentiel(le) !

Tes connaissances en la matière sont très appréciables pour le néophyte que je suis.

Tolkien avait, je pense, intégré ces données (il va de soi d'un point de vue anglophile, voir peut-être britannique). Mais il pré-sentait également et surtout le bouleversement technologique et humaniste que les deux révolutions industrielles ont entraîné ou entraîneront, que ce soit d'un point de vue éthique (chacun y verra ses propres considérations) ou évolution de la considération humaine (où il est possible de considérer qu'il sera relayé par la suite par Engels...)[propos qui pourrait paraître politique, sans l'être toutefois, ou bien si, mais sans cette idée à la française de la politique....].

Il me semble que JRR discernait fort bien les dérives du monde qui évoluait devant lui, et l'âge aidant, il  y perdit quelque peu son 'latin' (sic).[désir de réécrire ou refaire certaines paries de son oeuvre -pour faire court-].

Pour revenir sur l'intitulé du thème développé ici, même si Tolkien aurait pu être considéré comme un réactionnaire selon nos critères dit 'modernes', je crois très volontiers qu'il n'aurait pas apprécier que ses œuvres soient utilisées à des fins biaisées par les cocos et les fachos.

Je finis sur ces 'o'...Marco

 

Loin des mythes européens...

 

Désolé, finalement je n'apporte rien de tangent au débat initial de ce thème...

 

Edit Lucius : message fusionné. Pensez à la fonction éditer.

 

Modifié par Lucius Cornelius
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Le 13/05/2017 à 02:28, royaume a dit :

 

Dans l'histoire occidentale, on distingue deux types de rois. Le roi rector, qui enseigne à ses sujets les vérités de la foi, tenant un peu la place du prêtre (l'exemple type est Charlemagne pour les connaisseurs), modèle pas vraiment apprécié par l'Eglise qui trouvait que l'on empiétait sur ses compétences. Mais il y avait aussi le roi modèle pour son peuple qui incarnait les vertus chrétiennes et montrait ainsi l'exemple par ses actes. Rôle plus discret.

 

 

Je ne connaissais pas ces distinctions. Sont-ce des catégories pensées par les historiens ?

Pour qui trouve-t-on ce terme de rector ? D'autant que ce terme de direction et de droiture peut certes recouvrir la foi, mais pas seulement. Quant au roi modèle, n'est-ce pas un leitmotiv des dirigeants en général et pourquoi est-ce incompatible avec l'autre ?

Comme tu sembles disposer des connaissances je me permets de te pousser à expliquer un peu plus, mais n'y vois pas une bousculade :wink:

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Hello Tiki,

 

Tu me fais travailler^^.

 

Ce sont des catégories pensées par les historiens à partir des termes employés par les penseurs politiques médiévaux. Alcuin, par exemple, l'un des principaux conseillers de Charlemagne, utilisait entre autres titulatures celle de rector pour désigner l'empereur, ce qui était assez nouveau, le terme étant généralement employé pour désigner l'autorité des évêques sur les âmes (très exactement depuis le pontificat de Grégoire le Grand me semble-t-il). On trouve encore cette titulature couramment employée, de mémoire, pour les empereur du Saint Empire, Frédéric Barberousse et Frédéric II (XIIe et XIIIe donc).

Ta remarque est très juste: alors que cela concernait jusqu'alors la foi surtout et le gouvernement des âmes, les empereurs vont s'accaparer le terme de rector pour désigner le gouvernement des corps (donc la politique) et des âmes (ils entendaient donc avoir un rôle spirituel). Bref, c'était une façon pour ces empereurs de démontrer qu'ils n'entendaient pas être confinés à la seule sphère temporelle, et de montrer qu'ils étaient supérieurs aux évêques (puisqu'ils détenaient une autorité sur l'âme et le corps). Tout cette rhétorique est à insérer dans l'histoire parfois tumultueuse des rapports entre les deux pouvoirs, le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel.

Cette figure du roi rector n'était pas incompatible avec celle du roi modèle de vertu, bien au contraire. Pardon, je me suis mal exprimé. Mais le modèle du roi vertueux dans la pensée médiévale est plus courant que celui du rector, pour une raison simple: les intellectuels sont alors des clercs et répugnent à accorder un pouvoir de direction trop important au roi/à l'empereur. Les rois vertueux sont en général soumis à l’Église ou, à tout le moins, à son écoute et disposés à entendre son conseil car ils cultivent l'humilité; le roi rector est plus sûr de son bon droit, souvent plus autoritaire et n'hésite pas à exiler des évêques récalcitrants (voire pire!). Il risque de glisser dans l'orgueil en se passant des conseils des clercs qui ont le savoir et la connaissance (car la source de toute connaissance est à l'époque la Bible). Or, l'orgueil est dans la pensée politique classique le péché politique par excellence: c'est la faute qui mène à la tyrannie (et cela n'est pas propre à la pensée chrétienne. Ce principe date des Grecs, l'hybris d'Agamemnon le rend tyrannique. Mais la pensée chrétienne a encore davantage insisté sur ce point: l'orgueil est le père du péché, c'est ce qui mène Satan à la révolte contre Dieu, et par la suite les hommes à ignorer superbement la volonté divine).

 

Enfin, pour terminer, oui, l'exemplarité du gouvernant est un principe fondamental de la pensée politique européenne/occidentale, mais surtout dans la pensée classique (jusqu'aux Lumières). En effet, la pensée politique moderne (à partir des Lumières donc) a peu à peu versé dans le pessimisme sur cette question. Montesquieu dira que "tout homme qui dispose du pouvoir est porté à en abuser" (L'Esprit des Lois, 1746). Passage fondamental, qui va ensuite inspirer les penseurs libéraux, à chercher encadrer le pouvoir (Montesquieu est à l'origine de la séparation des pouvoirs, ce qui était impensable auparavant). A l'inverse de la pensée médiévale, on croît moins aux vertus du gouvernants qu'aux vertus du système politique: d'où l'essor du constitutionnalisme qui cherche à préserver le citoyen de l'arbitraire des gouvernants, d'où la démocratie comme régime idéal et appelé à devenir l'unique régime (car le meilleur ou le moins pire selon Churchill, c'est bien connu). Comme la corruption des gouvernants n'a finalement pas été empêchée par les lois ni par la constitution, et même qu'elle est de plus en plus flagrante (grâce au travail des journalistes mais aussi, je pense, à cause d'un effondrement moral de la classe dirigeante; ce dernier avis n'engageant que moi), sous Hollande, on a travaillé à "la moralisation de la vie politique", qui répond à une aspiration profonde des citoyens car c'est un vieux fond de culture européenne qui a conduit à tempérer l'exercice du pouvoir, à le rendre bienfaisant (qui se souciait en Orient de la vertu de Pharaon, de l'empereur de Perse ou de l'empereur de Chine?). Quant à savoir si ces mesures récentes sont efficaces et si elles sont davantage que de la communication hypocrite, je laisse à chacun le soin d'en juger mais vous aurez compris que j'ai pour ma part une petite idée sur la question^^.

 

C'est un peu rapide comme explication, mais à cette heure, on s'en contentera^^. En plus, je crains que cela ne nous éloigne un peu de Tolkien! Mais pas tant que cela en fait. On remarque que dans l'oeuvre de Tolkien, les questions institutionnelles sont assez peu développées (de mémoire, car cela fait quelques temps que je n'ai pas relu le SDA, on n'en parle guère pour le Rohan; quant au Gondor, le rôle de l'Intendant n'est que rapidement brossé; mais comment gouverne-t-il? qui le conseille?): ce qui compte pour que le gouvernement soit juste, c'est davantage la vertu de l'acteur politique que la vertu du régime. D'où les figures assez sublimes de Theoden et d'Aragorn. En cela, J.R.R me paraît bien plus médiéval que moderne. Les penseurs politiques médiévaux ne réfléchirent pas souvent à autre chose qu'à la royauté (saint Thomas d'Aquin au XIIIe siècle évoquera la démocratie et l'aristocratie en reprenant Aristote, mais plus par goût intellectuel que par enjeu): ils n'en faisaient pas un régime parfait, loin de là, puisque l'Histoire leur montrait des portraits de tyrans, à commencer par le roi Hérode de la Bible par exemple ou de la figure du mauvais roi tracée par Dieu lui-même dans le Deutéronome. Pour éviter la tyrannie, il fallait exhorter inlassablement le roi à la vertu (humilité, prudence, clémence, patience, justice, largesse, charité,...), au respect des traditions, au respect des lois de ses prédécesseurs, au respect des coutumes, à la vertu du conseil (et que fait Aragorn si ce n'est accepter de soumettre sa volonté à la sagesse éprouvée de Gandalf alors qu'il est roi, si ce n'est dans les faits au moins en droit? L'humilité lui constitue un rempart contre l'orgueilleuse folie d'Isildur me semble-t-il... à confirmer ici par des spécialistes du SDA).

Là encore, on me dira qu'institutions et vertus du gouvernant (on dirait aujourd'hui "éthique du gouvernant", ça fait moins amish^^) ne sont pas incompatibles. Je le crois sincèrement. 

 

Je suis ravi en tous cas que ces quelques considérations éveillent votre curiosité, notamment la tienne et celle de Krakus, et je vous remercie pour vos questions et remarques qui me permettent de corriger ou d'affiner un propos souvent trop rapide et superficiel. 

Modifié par royaume
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Yo,

 

ce que tu racontes est moultement intéressant, quoique je trouve tes conclusions un peu péremptoires. Je te soumets quelques remarques qui font en plus un lien facile avec Tolkien.

 

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Montesquieu dira que "tout homme qui dispose du pouvoir est porté à en abuser"

ça n'est pas une invention des lumières, et notamment, il y a toute une tradition judéo-chrétienne de profonde défiance vis-à-vis du pouvoir politique, dès le récit du Royaume d'Israël, qui est assez hallucinante pour un texte biblique tant elle est anti-théocratique : Dieu explique mot pour mot que si les Juifs veulent un roi "Cela veut dire qu'ils ne veulent pas de Moi", ce qui condamne la royauté dans son principe même. A cette condamnation juridico-théologique s'ajoute une condamnation morale de toutes les personnes qui pourraient viser la royauté, dans la fable des arbres (livre des Juges) :

Citation

 

Un jour, les arbres décident de choisir un roi.

Ils disent à l’olivier : - Sois notre roi ! – Sûrement pas ! Tout le monde aime mes olives et mon huile. Vais-je les laisser pour m’agiter au-dessus des autres arbres ? Non.

Puis ils demandent au figuier : - Viens donc, toi. Sois notre roi ! – Sûrement pas ! Est-ce que je vais laisser mes belles figues et mes fruits sucrés pour aller me balancer au-dessus des autres arbres ? Non.

Les arbres disent à la vigne : - Toi, sois notre reine ! – Sûrement pas ! Mes raisins et mon vin réjouissent les dieux et les hommes. Faudra-t-il que j’y renonce pour aller m’agiter au-dessus des arbres ? Non.

Alors, les arbres présentent leur requête au buisson d’épines. Il leur répond : - Si vraiment vous voulez m’oindre pour régner sur vous, venez vous mettre sous mon ombre. Sinon, un feu sortira du buisson d’épines et vous brûlera tous !

 

Le message est clair : les êtres bons et utiles (l'olivier, le figuier, la vigne) ont autre chose à foutre que de briguer la royauté, et il n'y a que les salopards (le buisson d'épines) qui veulent "s'agiter et se balancer au-dessus des autres", d'abord sois-disant pour les protéger, mais rapidement, en devant utiliser la menace pour assurer leur pouvoir (cf. les derniers mots du buisson : bon obéissez-moi ou vous serez tous cramés). A titre personnelle, je surkiffe cette fable.

Au Moyen-Âge, puisque c'est ce dont on cause, cette tradition est très présente, et notamment incarnée dans le nolo episcopari : on disait que pour choisir un évêque, il fallait refuser ceux qui aspiraient à cette fonction de pouvoir, et forcer ceux qui n'en voulaient pas à l'assumer. Évidemment, c'est un beau principe spirituel qui est loin d'avoir été universellement appliqué dans les méandres de la politique ecclésiale, mais tous l'avaient en tête, non seulement les clercs, mais aussi le petit peuple qui le connaissait grâce à des exemples de saints célèbres qui étaient devenus évêques contre leur gré (ex : Saint Martin, Saint Augustin...).

 

Le lien avec Tolkien est assez évident : le but n'est pas de confier l'Anneau de Pouvoir à l'olivier Aragorn ou au figuier Gandalf, le but est de détruire l'Anneau de Pouvoir.

 

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qui se souciait en Orient de la vertu de Pharaon, de l'empereur de Perse ou de l'empereur de Chine?

Pour le coup, ce que tu dis est tout à fait faux et assez euro-centré, si je puis me permettre. Dans toutes les cultures que tu cites, et dans beaucoup d'autres, le souverain fonde sa légitimité non sur la seule force ou sur le simple naissance, mais aussi sur sa vertu qui en fait un lien entre le ciel et la terre. Pour te répondre précisément sur la Chine, lorsque les premiers Empereurs du Milieu ont du choisir leur idéologie officielle parmi toutes les philosophies chinoises, ils ont rejeté les légistes qui disaient "le peuple est un troupeau de moutons, y'a qu'à couper des têtes pour les faire obéir" et choisi le confucianisme pour qui le souverain devait sans cesse montrer l'exemple de la vertu à ses sujets pour se faire aimer et en même temps assurer le bon fonctionnement de tout le royaume.

Le lien avec Tolkien est aussi assez clair, puisque Aragorn, par tout où il passe, fait renaître les sentiments monarchiques dans le coeur de ses sujets (Eomer, Eowyn, Boromir...) par l'admiration de sa vertu personnelle.

 

Citation

On remarque que dans l'oeuvre de Tolkien, les questions institutionnelles sont assez peu développées

Ouh, je pense aussi qu'il faut sérieusement nuancer ce que tu dis là. Certes, Tolkien n'a pas rédigé le Code Pénal du Gondor ; m'enfin, on trouve dans son légendaire de multiples références au droit coutumier, au travail législatif de certains rois comme Isildur... Je n'ai pas les références précises en tête et j'ai la flemme de chercher, mais c'est assez présent. Et pour reprendre ton exemple sur le gouvernement du Gondor, il y a quand même un certain nombre de renseignements précis.

Bref, dans toutes tes conclusions, je trouve que tu sépares les choses de façon un peu trop caricaturale : un Moyen-Âge qui serait optimiste sur la vertu du souverain, une modernité qui serait pessimiste sur cette question ; un Occident qui s'intéresserait à la vertu du souverain et un Orient qui s'en foutrait ; un Tolkien qui s'intéresserait à la vertu du prince et pas à la vertu du régime, comme le Moyen-Âge...

C'est marrant, tu m'as dit que tu bossais sur l'imperium au Moyen-Âge : si je peux m'aventurer sur ton terrain, est-ce que tu n'as pas vu que le Moyen-Âge classique était aussi une époque très légaliste, qui se passionnait pour la redécouverte du droit positif romain, tout en le mêlant à son bordel féodal et à ses strates de droit coutumier ? On retrouve très bien cette ambiance chez Tolkien, où les personnages évoquent tantôt les antiques lois héritées de Numenor (qui pour le coup jouit un peu du même prestige lointain que la Rome antique pour les médiévaux), tantôt les serments féodaux qui relient les hommes entre eux, tantôt les coutumes locales qu'il convient de respecter, le tout évidemment en le mêlant à la vertu du prince ; d'ailleurs tu le dis toi-même :

Citation

il fallait exhorter inlassablement le roi [...] au respect des traditions, au respect des lois de ses prédécesseurs, au respect des coutumes, à la vertu du conseil

Les traditions, les lois, les coutumes, ce sont des institutions ! Ce n'est pas du constitutionnalisme moderne parce que la part de droit positif y est beaucoup moins importante, mais c'est du droit ! Est-ce que je dis des bêtises ?

 

Je reprends une dernière fois ta première affirmation sur les Lumières :

Citation

Passage fondamental, qui va ensuite inspirer les penseurs libéraux, à chercher encadrer le pouvoir

Mais bon sang, à la fin de ton paragraphe, tu dis toi-même que le roi médiéval (et le roi tolkiennien) était déjà encadré par la tradition, la loi, le conseil... La loi et la tradition, ça n'est pas un cadre peut-être ? Je m'excite, mais je comprends pas comment tu peux sortir des argumentaires avec des exemples aussi riches et pertinent et des conclusions aussi étrangement péremptoires que "aux Temps Modernes, on encadre le pouvoir ; au Moyen Âge, on fait confiance au souverain" (WTF?)

 

Je rajoute à ce message un millier de poutous virtuels si jamais mon entrain paraît par trop agressif :)

 

 

Poupi,

soyons francs : ça m'avait manqué

Modifié par Poupi
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Sans rentrer dans les détails un peu capillotractés, je suis assez d'acord avec Poupi : c'est plus nuancé que ça, et les systèmes politiques sont assez présents en filigrane, y compris pour le Rohan, et puisent un peu dans tous les systèmes et les époques. Difficile d'aillerus de dire lequel à plus la faveur de Tolkien, dans ce qui a priori est toujours un système monarchique, sous ses différents aspects.

 

Citation

 fait renaître les sentiments monarchiques dans le coeur de ses sujets (Eomer, Eowyn, Boromir...) par l'admiration de sa vertu personnelle.

Le Rohan et ses habitants ne sont pas des sujets d'Aragorn ou du Gondor.

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Brasser les siècles et les concepts si rapidement invite nécessairement à entrer en contradiction à un moment donné, même si l'on est d'accord.

 

Je trouve que royaume n'a pas tort sur la légitimité du souverain "européen" à mon avis assez complexe dans ce qu'on a hérité de la tradition romaine, alors que le pratique du pouvoir hellénistique ou parthe me paraît bien limitée à un droit de gouverner fondé sur la victoire et la bravoure. Bien sûr, cela n'exclut pas que des pouvoirs orientaux aient conçu le pouvoir de manière comparable, mais mais dans l'angle tolkienien qui est d'aveu même européanocentré, ce qui compte est bien l'idée que l'on se faisait de cet héritage romain.

 

Pour les institutions, il est clair que Tolkien n'a pas développé richement le droit de ses Etats au-delà de certains aspects récurrents. Se dessine de façon plutôt précise un schéma-type du bon gouvernement légitimé par les dieux et assisté par un conseil royal, approuvé par le peuple. On connaît par exemple le Conseil royal du Gondor, ses membres, sa hiérarchie, et quelques-unes de ses prérogatives. On connaît aussi quelques lois mais, de manière générale, la "constitution" est fondée sur une pratique coutumière, ce que l'on peut comparer à Rome du reste. Cela n'empêche pas de regretter l'absence d'une précision sur les instances du gouvernement, le personnel politique principal ou secondaire, aspects délaissés au profit de l'apparition de grands généraux et de leurs capitaines. On sait globalement qui conseille l'Intendant, mais de la pratique concrète du pouvoir on ignore tout ou presque.

 

Cela tient à deux aspects, le fait d'abord que Tolkien ne désirait pas développer le droit dans un contexte d'histoire originelle où celui-ci devait essentiellement être d'origine divine et peu d'origine humaine ; ensuite son intérêt pour les institutions devait se limiter au roi et à la curia regis d'après ce qui s'étudiait à son époque et qui était le goût général, particulièrement si l'on suit une histoire épique tournée vers les souverains. Ce n'est que plutôt récemment que l'attention s'est tournée vers la pratique du droit et une approche plus anthropologique, dans la lignée de Louis Gernet par exemple.

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Discussion fort intéressante que je n'ai malheureusement pas eu le temps de lire en entier (mais j'y reviendrai).

 

Juste un truc qui m'a donné envie d'appuyer:

 

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Mais bon sang, à la fin de ton paragraphe, tu dis toi-même que le roi médiéval (et le roi tolkiennien) était déjà encadré par la tradition, la loi, le conseil...

 

En plus, la monarchie anglaise a une Histoire très différente de la monarchie française: dès le XIIIème siècle, la Magna Carta pose les bases de la monarchie constitutionnelle, tout du moins parlementaire, qui est encore celle de l'Angleterre aujourd'hui, alors qu'en France, le Moyen Age puis la période moderne voient un renforcement progressif des pouvoirs du roi jusqu'à "l'absolutisme" de Louis XIV et de ses successeurs.

 

Il est d'ailleurs étonnant de la part de Tolkien que son modèle de roi semble plus être le roi absolu à la française que le modèle royal anglais..... encore qu'on a jamais une idée claire de l'exercice du pouvoir de la part des rois dans la Terre du Milieu: on sait qu'ils sont rois, mais on ne les voit pas gouverner, que ce soient Théoden (d'ailleurs le pouvoir politique des rois anglo saxons du Haut Moyen Age, hérité d'un modèle germain, était très faible, et même en France au Moyen Age le roi n'est que "le premier parmis les pairs"), Aragorn ou même, il me semble, dans le Silmarillion. Il n'y a que Thingol que l'on voit clairement exercer la justice de façon personnelle, mais ça cadre avec le pouvoir de justice attribuée à la royauté au Moyen Age (encore que ce pouvoir était bien souvent tombé entre les mains de féodaux... Tolkien ne semble d'ailleurs jamais évoquer une forme de féodalité). En fait, le roi chez Tolkien (pour les hommes en tous cas, et en particulier Numenor), m'évoque une sorte de mélange entre le roi médiéval et l'empereur de l'antiquité tardive.

 

 

Sur les aspects soit-disant identitaires de Tolkien il y aurait long à dire. Le fait que les peuples inféodés à Sauron sont des orientaux et des "arabo-africains" (les haradrim quoi) m'a toujours interpellé. Heureusement, on voit que des peuples moins connotés ethniquement, ou qui semblent en tous cas posséder des traits "européens" dans leur look et leur situation géographique, peuvent être inféodés à Sauron également: dunlendings, Rudhaur, Cardolan, et surtout numénoréens noirs (d'ailleurs, Umbar est un port numénoréen à la base). Je me demande d'ailleurs quelle était sa position vis à vis du colonialisme sachant qu'il a vécu dans ce qui était encore "l'empire sur lequel le soleil ne se couche jamais".

 

Après, que Tolkien ait été un vieux con homme de son temps, c'est indéniable. D'autres auteurs comme Moorcock, qui lui était fondamentalement anti colonialiste et anti impérialiste (il dit clairement que Melnibonée, c'est l'Empire Britannique mourant et décadent), ont pas hésité à qualifier l'oeuvre de Tolkien de crypto fasciste (je parle pas de tous les pseudo intello qui ont essayé de dire que Tolkien était nazi.... mais de la part de Moorcock, que j'adore aussi, ça m'interpelle plus), mais c'était un autre temps.

 

Et ça ne m'empêche pas d'apprécier la poésie, la beauté et les ambiances extraordinaires qui se dégagent de l'oeuvre de Tokien. Je suis d'ailleurs fasciné par le fait que Tolkien parle autant à des gens qui ont des idées si diamétralement opposées (hippies vs fachos). Mais c'est vrai que j'ai toujours largement préféré la Communauté de l'Anneau plutôt que les deux autres en ce qui conerne le SDA.

 

En outre, le contenu mythique (et pas seulement européen) confère à son oeuvre une richesse extraordinaire en mettant au goût du jour d'anciens mythes pour lesquels j'ai un attachement particulier (mais surtout sans en faire un repère identitaire ou je sais pas quoi, on peut apprécier une culture sans l'opposer à une autre!).

 

 

 

 

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Il y a 1 heure, Ser Eddard a dit :

Il est d'ailleurs étonnant de la part de Tolkien que son modèle de roi semble plus être le roi absolu à la française que le modèle royal anglais..... encore qu'on a jamais une idée claire de l'exercice du pouvoir de la part des rois dans la Terre du Milieu: on sait qu'ils sont rois, mais on ne les voit pas gouverner, que ce soient Théoden (d'ailleurs le pouvoir politique des rois anglo saxons du Haut Moyen Age, hérité d'un modèle germain, était très faible, et même en France au Moyen Age le roi n'est que "le premier parmis les pairs"), Aragorn ou même, il me semble, dans le Silmarillion. Il n'y a que Thingol que l'on voit clairement exercer la justice de façon personnelle, mais ça cadre avec le pouvoir de justice attribuée à la royauté au Moyen Age (encore que ce pouvoir était bien souvent tombé entre les mains de féodaux... Tolkien ne semble d'ailleurs jamais évoquer une forme de féodalité). En fait, le roi chez Tolkien (pour les hommes en tous cas, et en particulier Numenor), m'évoque une sorte de mélange entre le roi médiéval et l'empereur de l'antiquité tardive.

 

Elessar exerce formellement la justice (épisode où il affecte Beregon à la garde de Faramir) et on sait que les rois prennent leurs décisions seuls, même s'ils consultent leur Conseil.

Ils peuvent être tyranniques et absolus (Pharazon, Castamir), mais ils n'oppressent jamais la majorité de leur peuple, la population qui souffre (Fidèles, proches d'Eldacar) reste limitée à un parti et la contestation ne s'étend pas à une large frange de la société comme c'est le cas dans le cas de la France absolutiste. Quand Castamir assiège Osgiliath, il signe ainsi un point de non retour. Ainsi, les rois tolkienniens qui sont de droit divin restent légitimes chez eux tant qu'ils sont en accord avec leur population, mais ils peuvent ne plus être légitimes au regard de Dieu.

 

Cette double légitimité, populaire et divine, est illustrée par le fait que le roi de Nùmenor, lors des cérémonies sacrées sur le Meneltarma, était accompagné par une procession de tout le peuple. Le roi n'est donc pas seul, il bénéficie du soutien de son peuple qu'il représente devant dieu. L'aspect intéressant avec Pharazon est que la royauté sur l'île de Nùmenor leur avait été conférée par les Valar, et qu'ils s'en détournent. C'est une des raisons pour lesquelles cette légitimité leur est retirée par la destruction du Pays du Don. Le couronnement d'Elessar par Olorin relève du même principe : il reçoit la charge d'un royaume, devant le peuple qui a manifesté son approbation en criant "oui". Et il est intéressant de voir que lorsque Faramir le présente au peuple il ne se contente pas de rappeler son appartenance à la lignée via Isildur et Elendil : il mentionne sa victoire au combat ainsi que sa qualité de thaumaturge, signes de sa bénédiction par Eru.

Modifié par Tiki
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Le Rohan et ses habitants ne sont pas des sujets d'Aragorn ou du Gondor.

Certes. Mais par exemple, l'attitude déférente d'Eomer devant l'épée Anduril rejoint ce que je disais (et ça allait dans le sens de Royaume, pour le coup) sur Aragorn qui fonde son retour du roi sur son swag/vertu personnel.

 

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Il est d'ailleurs étonnant de la part de Tolkien que son modèle de roi semble plus être le roi absolu à la française que le modèle royal anglais...

Les historiens du droit me contrediront peut-être, mais cette divergence entre l'absolutisme français et le modèle royal anglais, est-ce qu'elle ne relève pas plutôt des Temps Modernes et est un peu anachronique au Moyen-Âge ? Il me semblait qu'en ces temps là, la monarchie anglaise était plutôt dans l'imitation de la monarchie française, même si les barons locaux imposent des spécificités (Magna Carta, etc.) qui préparent les divergences futures mais ne constituent pas encore une vraie rupture entre deux régimes opposés.

 

Et puis, l'inspiration de Tolkien, est-ce qu'elle n'est pas légendaire avant d'être historique ? Je veux dire, quand les auteurs anglais du Moyen-Âge ou même d'après racontent les aventures du Roi Arthur, est que M. Pendragon soumet ses édits à la chambre des lords et la chambre des communes ? ça rejoint ce que dit Tiki sur les buts du SdA : la pratique du pouvoir d'Aragorn, autoritaire mais respectueuse des lois et des traditions, me semble assez proche du modèle arthurien, Grand-Breton s'il en est.

 

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Après, que Tolkien ait été un vieux con homme de son temps, c'est indéniable.

Eh ben moi monsieur, je suis pas d'accord ; ou plutôt, je pense qu'il faut franchement nuancer ça : Tolkien n'a pas été n'importe quel homme de son temps. D'abord, il n'a pas attendu Moorcock pour être anti-colonialiste et anti-impérialiste (l'histoire de Numénor est assez explicite là-dessus, sans parler de ses Lettres). Il s'est aussi alarmé de choses comme l'antisémitisme, le nazisme ou l'apartheid sud-africain avant que ça soit à la mode ; ce qui rend d'autant plus détestables les accusations de racisme à son encontre.

ça demanderait des pages de développement, mais en bref, les convictions de Tolkien s'inscrivent dans un amour de la nature, des traditions et de la religion catholique qui le rendent très pessimiste vis-à-vis de la modernité, qu'il définit dans ses lettres comme le "triomphe de la Machine" ; mais ça ne fait pas de lui un reackinéplupertinendenojour, au contraire, ça le rend très actuel ! La question écologique, l'alternative entre le capitalisme vert ou la décroissance radicale, ça n'est pas un sujet du XXI° siècle ? Quand dans une de ces lettres, il écrit (à peu près mot pour mot) que "bientôt, l'américanisation du monde aura standardisé jusqu'aux dernières tribus de Sibérie", c'est une parole de vieux con de 1950 qui n'a rien à nous dire aujourd'hui, peut-être ? Et le rapport à Dieu, ça ne nous pose pas quelques problèmes ces derniers temps ?

A la limite, la dénonciation tolkienienne du triomphe de la Machine, dans ses œuvres de fiction comme dans ses écrits théoriques en font presque un type hyper en avance sur son temps, car il avait cerné le grand enjeu des générations à venir, au-delà des contingences politiques de  son époque, comme Heidegger ou Jacques Ellul qui écrivait au même moment que "la Guerre froide est un épi-phénomène" (!) car de toute façon, l'URSS comme les USA étaient gagnés par le technicisme qui était la vraie question pour l'avenir de l'Humanité. Quand il écrit ça à son époque, ses contemporains le prennent pour un taré, mais aujourd'hui, c'est d'une pertinence extraordinaire ! On retrouve pratiquement le même propos chez Tolkien, qui en pleine Seconde Guerre mondiale choisit de façon provocante de ne pas définir ce conflit comme la lutte entre le Bien et le Nazisme, mais comme "la Guerre des Machines" qui est "remportée par les Machines". On est très loin de la propagande british, ni même du bonhomme enfoncé dans le petit contexte de son époque, au contraire, on est face à un grand esprit qui au-delà de Hitler comprend les enjeux des siècles à venir !

 

Non mais !

 

 

Poupi,

si si, je suis dans le sujet, je ne floode pas

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ça demanderait des pages de développement, mais en bref, les convictions de Tolkien s'inscrivent dans un amour de la nature, des traditions et de la religion catholique qui le rendent très pessimiste vis-à-vis de la modernité, qu'il définit dans ses lettres comme le "triomphe de la Machine" ; mais ça ne fait pas de lui un reackinéplupertinendenojour, au contraire, ça le rend très actuel ! La question écologique, l'alternative entre le capitalisme vert ou la décroissance radicale, ça n'est pas un sujet du XXI° siècle ? Quand dans une de ces lettres, il écrit (à peu près mot pour mot) que "bientôt, l'américanisation du monde aura standardisé jusqu'aux dernières tribus de Sibérie", c'est une parole de vieux con de 1950 qui n'a rien à nous dire aujourd'hui, peut-être ? Et le rapport à Dieu, ça ne nous pose pas quelques problèmes ces derniers temps ?

 

C'est bien pour cela que je reste un inconditionnel de Tolkien dont l'oeuvre me parle toujours énormément et où beaucoup des idées que tu évoques font écho avec beaucoup de mes convictions.

 

Le "vieux con" barré était affectif et j'ai tout de même le soucis de nuancer mon idée du bonhomme (j'ai eu le plaisir il y a une dizaine d'années de converser avec quelqu'un qui l'avait eu comme prof à Oxford, un prof d'anglais de la fac où j'étais, et il m'avait laissé entendre qu'avec les étudiants, c'était un peu une terreur, un mec ultra sérieux, intransigeant et cassant) que j'aurais tendance à défendre même parfois contre des éléments évidents.

 

Et on peut tordre certains trucs comme on le veut, le fait est que les peuples ayant choisi le camp du "mal" sont pour la plupart des peuples orientaux et basanés. Les orcs sont décrit comme mongoloïdes.... Même les peuples servant Morgoth à Beleriand au premier âge sont noirs de cheveux (ok, les noldor aussi, c'est un de mes principaux arguments quand je suis confronté à ce genre de propos) et foncés de teint face aux ancêtres des numénoréens qui sont blond et clairs de peau. Certes, Tolkien n'était pas un raciste convaincu, mais comment expliquer ce fait sinon par des "réflexes" que l'on pourrait qualifier avec retenue d'"ethno centrés" de son époque. Et je trouve l'argument qu'il s'inspire du légendaire européen ne tient pas: dans ces légendes, il est très peu fait mention de peuples non européens (et quand c'est le cas, ils sont décrits exactement comme des européens de la même époque), pourquoi en avoir inclus dans la Terre du Milieu, surtout pour en faire des agents du mal?

 

De la même manière, des personnages comme Elessar, hiératique et sûr de son droit à régner (le passage, dans les Deux Tours, du personnage plutôt sympathique de Grand Pas au roi intransigeant et presque inhumain m'a toujours surpris, même après de nombreuses relectures), et on pourrait assez facilement trouver d'autres exemples. Ca dénote tout de même d'un rapport au pouvoir assez réactionnaire. 

 

Tout n'est pas blanc ou noir, et bien que beaucoup de choses chez Tolkien m'aient infiniment touché (et ont même forgé ou tout du moins renforcé certaines de mes convictions les plus profondes, n'ayons pas peur des mots!), il y a toujours un certain nombre de choses qui m'interpellent dans le sens où j'ai du mal à leur donner une autre explication qu'un côté réac, au bas mot. Conservateur si tu veux, mais c'est jouer sur les mots. Et ça n'est pas toujours péjoratif hein, en matière d'écologie, de technologie, et même au niveau économique, une forme de réaction est assez pertinente.

 

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Les historiens du droit me contrediront peut-être, mais cette divergence entre l'absolutisme français et le modèle royal anglais, est-ce qu'elle ne relève pas plutôt des Temps Modernes et est un peu anachronique au Moyen-Âge ?

 

C'est pas faux notamment du fait qu'avant la Guerre de Cent Ans, les identités nationales n'ont pas beaucoup de sens (c'est même anachroniques) et que les rois d'Angleterre ont un pied de chaque côté de la Manche (plus continental qu'anglais d'ailleurs) et sont issus d'une famille "française" (d'Anjou et de Normandie avec des bouts d'Aquitaine pour être précis).

 

Mais le fait est que dès le XIIIème siècle, la monarchie anglaise a pris des chemins assez différents que la monarchie française.

 

La figure d'Arthur est en grande partie, d'ailleurs, issue de cette époque où le pouvoir royal se renforce, se mêle à une idée de roi sacré dont le pouvoir est d'origine divine. Ce serait anachronique de parler de propagande, mais on en est pas loin! En particulier chez les Plantagenêts, qui très tôt (Henri II) se sont servis du légendaire arthurien pour légitimer leur lignée.

 

Le personnage d'Aragorn-Elessar participe pas mal de cette construction politique que du légendaire pur et du personnage primitif d'Arthur (issu de réminiscence de personnages historiques et de héros celtiques insulaires). La légende arthurienne dès le XIIème siècle est une incarnation de l'idéal monarchique et féodal du Moyen Age central et du Bas Moyen Age (à ce titre, le Morte d'Arthur, qui supprime toute référence au merveilleux ou au surnaturel, est édifiant).

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Le roi absolu, c'est les temps modernes.

 

Que le récit que fait Tolkien soit ethnocentré n'a rien à voir avec des réflexes racistes ou à une inspiration des mythes européens. Tolkien écrit l'histoire de la Terre du Milieu depuis le point de vue des Elfes et de leurs alliés Hommes qui s'y sont établis. Leur histoire est celle de peuples qui revendiquent un droit à habiter sur ces terres plus important que ceux des autres, qu'ils soient migrants (Orientaux, Suderons) ou autochtones (Druedain, Hommes sauvages écartés par les nouveaux Gondoriens, Dunlendings chassés par les Rohirrim parce que le Gondor leur a donné le territoire). C'est un droit arrogé mais perçu comme légitime parce que perçu comme béni par les Valar. Tolkien écrit donc une histoire très subjective et bien xénophobe, mais parce qu'elle représente une histoire presque "nationale" si l'on entend la Terre du Milieu comme une nation composée de plusieurs peuples libres, qui vont progressivement diminuer au profit des seuls hommes. Tolkien raconte comment s'est formée la cohésion de cette Terre du Milieu avant qu'elle ne devienne notre Europe, car le monde de Tolkien est antérieur à elle. Il ne s'inspire pas seulement des mythes européens, il les intègre donc à son récit pour créer un passé européen alternatif.

 

Tolkien était totalement conscient de la totale partialité de son récit qui frise l'aveuglement (cf. les Dunlendings et les Rohirrim, parachutés sur leur territoire). Pour preuve le passage où Sam imagine le point de vue suderon : "He wondered what the man's name was and where he came from; and if he was really evil of heart, or what lies or threats had led him on the long march from his home; and if he would not really rather have stayed there in peace – all in a flash of thought which was quickly driven from his mind." IV, 4). Mais Tolkien n'écrivait pas leur histoire (et de manière interne, il ne disposait pas des récits qui la racontaient).

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la "constitution" est fondée sur une pratique coutumière,

Je ne suis pas très d'accord. On a plusieurs reprises aussi des lois affirmées et mêmes écrites, à Numénor, dans les Royaumes Dunedain...

 

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ce que l'on peut comparer à Rome du reste. 

??? Tu parles des gars en toges qui passent leur temps à faire des lois, qui les mettent par écrit et qui adorent les tribunaux?

 

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Cela n'empêche pas de regretter l'absence d'une précision sur les instances du gouvernement, 

Sans doute parce qu'on est plus sur la géopolitique que les affaires internes, et sur les événements marquants (genre guerre) que sur le train-train quotidien. Ptet aussi parce que en fait, on est souvent sur des régimes proches, tantôt monarchiques, tantôt claniques.

 

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Il est d'ailleurs étonnant de la part de Tolkien que son modèle de roi semble plus être le roi absolu à la française que le modèle royal anglais..... 

Ca dépend de l'époque, vu que les deux modèles sont en fait toujours inverses : la monarchie anglo-nOrmande est bien plus autocratique que la monarchie capétienne à la même époque, le basculement se fait au XIIIe siècle, quand le roi d'Angleterre commence à être bridé quand effectivement les capétiens renforcent progressivement leur pouvoir.

Ca dépend aussi de quel royaume de la TDM tu parles. Perso, je vois plutôt un système intermédiaire, au Gondor comme au Rohan. Un Roi puissant mais pas omnipotent, conseillé et bridé par une cour en partie féodale.

 

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mais on ne les voit pas gouverner,

Tu as quand même des indices avec Helm, Eomer, l'histoire du Rohan, Dénéthor, etc.

 

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et même en France au Moyen Age le roi n'est que "le premier parmis les pairs"

Je ne trouve pas. Il est à la foi suzerain et souverain, et avec un ascendant religieux certain. Ca lui a bien servit lors des troubles nobiliaires et pour asseoir son pouvoir judiciaire.

 

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Il n'y a que Thingol que l'on voit clairement exercer la justice de façon personnelle, 

Pas que lui. Mais pour le coup, ceux qui paraissent les plus autocrates, ce sont les Elfes.

 

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Tolkien ne semble d'ailleurs jamais évoquer une forme de féodalité

Tout dépend de ce que tu appelles féodalité, et de quelle féodalité on parle. Pour le coup, Gondor comme Rohan semblent plus ou moins féodal. Le Rohan par exemple est plein de seigneurs, hiérarchisés et quand on voit la description d'Erkenbrand suite à la première Bataille de l'Isen, le Rohan ressemble beaucoup à l'Angleterre post 1066, mais avec la transmission de la couronne à la capétienne.

Le Gondor aussi, on a que des princes, seigneurs, pas de gouverneur ou de choses comme ça.

 

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Le fait que les peuples inféodés à Sauron sont des orientaux et des "arabo-africains" (les haradrim quoi) m'a toujours interpellé. 

Pas vraiment. La TDM étant une projection de notre continent, c'est assez logique de retrouver des types physiques similaires répartis à peu près de la même façon. 

 

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 et on sait que les rois prennent leurs décisions seuls

Au Gondor, peut-être, pas au Rohan.

 

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mais ils peuvent ne plus être légitimes au regard de Dieu.

Dans quel sens? Je ne vois pas d'intervention divine ou d'argument religieux pour déposer un roi chez Tolkien.

 

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C'est une des raisons pour lesquelles cette légitimité leur est retirée par la destruction du Pays du Don. 

La seule raison, c'est qu'il est ait attaqué Valinor. Sinon, Numénor aurait été rayé de al carte depuis longtemps. Et pour le coup, le peuple il suit les rois déviant.

 

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 Le couronnement d'Elessar par Olorin relève du même principe : il reçoit la charge d'un royaume, devant le peuple qui a manifesté son approbation en criant "oui".

Le rôle de Gandalf n'est religieux que par le clin d'oeil à d'autres mythes, mais pas religieux en soit. Quand à l'approbation du peuple, elle n’intervient que parce que Aragorn sort de nul part et qu'il faut légitimer son héritage.

 

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ainsi que sa qualité de thaumaturge, signes de sa bénédiction par Eru.

Non, signe de son  ascendance royale.

 

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Mais par exemple, l'attitude déférente d'Eomer devant l'épée Anduril rejoint ce que je disais (et ça allait dans le sens de Royaume, pour le coup) sur Aragorn qui fonde son retour du roi sur son swag/vertu personnel.

C'est tout autre chose, et ça ne concerne pas le Rohan. Là c'est juste du charisme.

 

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Il me semblait qu'en ces temps là, la monarchie anglaise était plutôt dans l'imitation de la monarchie française, même si les barons locaux imposent des spécificités 

Voir plus haut.

 

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Et puis, l'inspiration de Tolkien, est-ce qu'elle n'est pas légendaire avant d'être historique ?

Je pense qu'il y a des deux.

 

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Et on peut tordre certains trucs comme on le veut, le fait est que les peuples ayant choisi le camp du "mal" sont pour la plupart des peuples orientaux et basanés. 

Sauf que les races et peuples chez Tolkien sont loin d'être uniformes et si typés, et que ce sont les peuples les plus semblables aux Européens qui déconnent le plus. Le thème central de Tolkien, c'est la décadence et l'arrogance.

 

Citation

face aux ancêtres des numénoréens qui sont blond et clairs de peau

Non, les peuples de Bëor et d'Haleth sont bruns, une partie des Numénoréens aussi, et ils sont largement majoritaires dans les Royaumes Dunedain. Et pour le coup, ce sont des bruns à la Castamir qui font du racisme anti blonds en mode "pureté de la race".

 

Citation

De la même manière, des personnages comme Elessar, hiératique et sûr de son droit à régner

Sauf que chez lui, son droit est indéniable,e t il y voit plus un devoir, en fait.

 

Citation

(le passage, dans les Deux Tours, du personnage plutôt sympathique de Grand Pas au roi intransigeant et presque inhumain m'a toujours surpris, même après de nombreuses relectures),

Lequel?

 

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C'est pas faux notamment du fait qu'avant la Guerre de Cent Ans, les identités nationales n'ont pas beaucoup de sens 

Oui, mais ça ne jour pas sur le système politique pour le coup.

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Et je trouve l'argument qu'il s'inspire du légendaire européen ne tient pas: dans ces légendes, il est très peu fait mention de peuples non européens (et quand c'est le cas, ils sont décrits exactement comme des européens de la même époque)

Plaît-il ?

Les légendaires européens médiévaux regorgent de peuples cynocéphales, pygmées et monopodes habitant les contrées lointaines. Le roman Baudolino de Umberto Eco est très rigolo là-dessus. Et quid des Hyperboréens, des Amazones, et autres hurluberlus ? Et quid des représentations fantasmées de l'Inde, de l’Égypte, etc. ?

Quant au sujet que tu évoques (la place des hommes exotiques chez Tolkien), comme je suis un monstre de nécromancie et de narcissisme, je te recrache un paragraphe que j'avais pondu sur ce forum il y a quelques éons, et qui après tout va très bien avec ce sujet (mythes européens chez Tolkien) ici :

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dans le SdA, les Haradrims sont en permanence présentés dans cette figure de l'étranger exotique, et les traits que la narration leur prête sont précisément ceux que, dans la culture, on prête aux habitants des terra incognita, des fort-fort-lointain :
-la richesse : les Haradrims sont présentés comme ornés de bijoux, et la teinture rouge de leur vêtements participe à leur apparence luxueuse (le rouge, c'est la teinte qui coûte surper-cher, c'est pour ça qu'elle était associée à la dignité impériale). Ce fantasme du fort-fort-lointain richissime est un topos courant : l'or des Hyperboréens, les trésors orientaux, l'Eldorado...
-la peur et la cruauté : pour nous, qui mêlons malheureusement ça à des questions politiques, présenter l'étranger comme cruel, c'est xénophobe et pas bien. Et de fait, ce genre de cliché a pu servir des fins politiques peu recommandables. Mais en-dehors de toute perspective politique, c'est un procédé récurrent, lorsqu'un écrivain ou un philosophe a besoin d'imaginer une figure de cruauté, de la fantasmer comme provenant d'une contrée lointaine ; là où le monde sur-vertueux, dans la littérature, est éloigné de nous par le temps, le monde sur-cruel et sur-effrayant est éloigné de nous par l'espace (cf par exemple L'Esprit des Lois) ; et les Haradrims sont dépeints à la fois comme relativement cruels et vivant en permanence dans la peur.
-les créatures fantastiques : je trouve qu'on ne souligne pas assez souvent que, comme le montre les Contes Perdus, c'est d'abord comme ça que Tolkien a commencé à imaginer le Harad, et que cette caractéristique, dans la conception de la contrée, est de loin antérieure à la richesse ou la cruauté des Haradrims. L'Oliphant n'est pas un pachyderme historique, c'est une créature fabuleuse, emplie d'une majesté mythique, et c'est encore une fois très courant chez les poètes de situer les créatures fabuleuses dans des contrées lointaines (les auteurs de contes vous expliquent toujours que les phénix, licornes et autres griffons vivent très très loin, que ce soit en Inde, en Égypte ou en Hyperborée).

Ces trois traits, qui pour moi sont les seuls qui nous sont délivrés au sujet des Haradrims, font vraiment du Harad un véritable condensé de tous les fantasmes au sujet de la terra incognita : pour prendre vite faits quelques exemples historiques, à l'extrême-Nord, les Grecs se représentaient des peuples cruels et féroces comme les Amazones, mais aussi les nobles griffons protégeant l'or des hyperboréens ; à l'extrême-est, les Perses sont représentés comme vivant à la fois sous une implacable tyrannie et dans un luxe prodigieux, en compagnie d'animaux fantastiques ; et à l'extrême-ouest, les Européens découvreurs étaient persuadés d'avoir abordé les rives de peuples terribles, sans doute les descendants des antiques Amazones, et les créatures incroyables qui peuplaient ces endroits ne pouvaient que protéger les routes menant à l'Eldorado. Tolkien tire de tous ces fantasmes une sorte de quintessence qui constitue le Harad.
Du coup, je trouve juste pas pertinent de vouloir se dessiner une carte du Harad avec des informations aussi nettes qu'on en a pour le Gondor, par exemple : parce que le Harad est, par définition, par son étymologie-même et son traitement dans le Seigneur des Anneaux, la figure même de la terra incognita. La figure du Serpent comme emblème est tout particulièrement géniale en la matière, puisqu'elle condense magnifiquement ces trois aspects : le Serpent est à la fois le symbole d'une certaine malveillance (et son opposition à l'Arbre du Gondor reconstitue le drame originel du jardin d'Eden), mais il revoit aussi aux animaux exotiques (à propos de Harad et d'extrême-sud, la Méduse aux cheveux de serpents est sensée habiter l’Éthiopie...) et au dragon gardien de trésors...

Encore un mot sur la cruauté et la peur des Haradrims : je le répète, faire une lecture xénophobe de ce trait, c'est plaquer un prisme politique là où il faut avoir un prisme littéraire ; et pour montrer que je ne cherche pas simplement à imposer mes goûts personnels, je m'appuie sur Tolkien pour repousser une lecture politique : ceci est un extrait de la Lettre 183, où Tolkien parle de la Quête de Frodon :
I dislike the use of 'political' in such a context; it seems to me false. It seems clear to me that Frodo's duty was 'humane' not political. He naturally thought first of the Shire, since his roots were there, but the quest had as its object not the preserving of this or that polity, such as the half republic half aristocracy of the Shire, but the liberation from an evil tyranny of all the 'humane'* – including those, such as 'easterlings' and Haradrim, that were still servants of the tyranny.

Je n'aime pas l'emploi du terme "politique" dans ce contexte ; il me semble clair que le devoir de Frodon était de l'ordre de l'humanité et non de celui de la politique. Bien sûr, il pensait d'abord à la Comté, puisque c'est là qu'étaient ses racines, mais la Quête avait pour objet non de préserver tel ou tel régime politique, comme celui, mi-républicain mi-aristocrate, de la Comté, mais de libérer d'une tyrannie maléfique l'ensemble des "humains"- y compris ceux qui, comme les Orientaux et les Haradrims, étaient toujours les serviteurs de cette tyrannie.
Bref, les Haradrims, au contraire des Orques par exemple, sont inclus dans l’œuvre de Salut qui s'opère dans le Seigneur des Anneaux. Il faut évidemment relier ça au passage connu où Sam, contemplant un Haradrim, le voit comme une âme fourvoyée. J'avais souligné, dans le sujet récemment fermé, que les Haradrims étaient toujours désignés comme collectivité anonyme, et que le seul moment où nous avons brièvement accès à l'individualité de l'un d'entre eux est justement ce passage où Tolkien tient à nous présenter le Haradrim comme une âme qui devrait être sauvée.
Je pense que si on veut faire une lecture sotériologique du parcours de Sam et Frodon, il est important de voir que leur parcours construit l'universalité de l’œuvre de salut qu'ils sont en train de réaliser en leur faisant rencontrer nombre de peuples et de races, et que le dernier peuple qu'ils rencontrent avant d'entrer en Mordor, là où l’œuvre doit s'accomplir, c'est justement, à travers ce soldat expirant, le peuple de l'extrême-étranger, couronnant le caractère universel de ce qui se prépare.
Si j'étais d'humeur lyrique, au sortir de ces fêtes de fin d'année et de l’Épiphanie, je comparerais malgré lui ce soldat anonyme à une sorte de quatrième Roi Mage, venu du fort-fort-lointain absolu pour entrer en contact avec la petite personne par qui le monde doit être sauvé.
Mais comme je suis un mec sérieux et que je me méfie de ce qui tend vers la lecture christique, je le ferais pas.

 

Citation

du personnage plutôt sympathique de Grand Pas au roi intransigeant et presque inhumain m'a toujours surpris

Franchement, dans le bouquin, Aragorn montre dès la rencontre de Bree son côté "tu es mignon mais c'est moi qui commandes alors obéis."

Je ne pense pas qu'il faille y voir une conception dictatoriale du pouvoir chez Tolkien, ça irait à l'encontre de tout ce qu'il écrit par ailleurs. C'est plutôt à lier à la perfection totale d'Aragorn qui le rend incontestable dans ses décisions. Une sorte d'infaillibilité pontificale...

 

Citation

Et ça n'est pas toujours péjoratif hein, en matière d'écologie, de technologie, et même au niveau économique, une forme de réaction est assez pertinente.

Mais tout à fait ! Je pense qu'il n'y a aucun mal à dire que Tolkien avait un côté réac (à condition de ne pas le réduire à ça), parce que lui-même l'aurait sans doute pris comme un compliment, dans sa révolte contre la modernité. Ce qui me dérange, c'est de dire "oh, c'est juste un homme de son temps", ce qui est une manière pour moi de lui chercher des excuses dont il n'a pas besoin. Tolkien n'est pas Hergé, et il n'y a pas à lui reprocher d'avoir écrit Tintin ou Congo.

 

Citation

les rois d'Angleterre ont un pied de chaque côté de la Manche (plus continental qu'anglais d'ailleurs) et sont issus d'une famille "française" (d'Anjou et de Normandie avec des bouts d'Aquitaine pour être précis).

Tout à fait. D'ailleurs, à tous ceux qui voudraient découvrir les origines de cette passionnante famille, il faut recommander de venir visiter le Château d'Angers, par exemple lors de la Nuit des Musées samedi prochain. D'ailleurs, vous ne vous êtes jamais demandé quels liens existaient entre Tolkien et la Tapisserie de l'Apocalypse ? Mais renseignez-vous ! (comment ça, je m'éloigne du sujet ?)

Modifié par Poupi
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Il y a 3 heures, Lucius Cornelius a dit :

Je ne suis pas très d'accord. On a plusieurs reprises aussi des lois affirmées et mêmes écrites, à Numénor, dans les Royaumes Dunedain...

 

??? Tu parles des gars en toges qui passent leur temps à faire des lois, qui les mettent par écrit et qui adorent les tribunaux?

 

Sans doute parce qu'on est plus sur la géopolitique que les affaires internes, et sur les événements marquants (genre guerre) que sur le train-train quotidien. Ptet aussi parce que en fait, on est souvent sur des régimes proches, tantôt monarchiques, tantôt claniques.

 

 

 

Dans quel sens? Je ne vois pas d'intervention divine ou d'argument religieux pour déposer un roi chez Tolkien.

 

La seule raison, c'est qu'il est ait attaqué Valinor. Sinon, Numénor aurait été rayé de al carte depuis longtemps. Et pour le coup, le peuple il suit les rois déviant.

 

Le rôle de Gandalf n'est religieux que par le clin d'oeil à d'autres mythes, mais pas religieux en soit. Quand à l'approbation du peuple, elle n’intervient que parce que Aragorn sort de nul part et qu'il faut légitimer son héritage.

 

Il y a plusieurs lois connues dans les royaumes de culture nùménoréenne, comme je l'ai dit, mais ce sont pour l'essentiel des lois précises venant préciser/infirmer la coutume établie. En l'occurrence, le fonctionnement du gouvernement fait partie des aspects les plus anciennement établis, et à l'époque d'Aragorn il ne remonte pas seulement à Nùmenor, il tire en fait son inspiration dans le gouvernement des Elfes de Valinor, qui lui-même est hérité du gouvernement valarien ; il est difficile de faire plus vieux et plus inchangé que ça. Comme le rapporte un passage des CLI, le fait que c'était le fils aîné qui hérite du trône (primogéniture mâle) n'était pas une loi, mais une coutume. Le principe est le même pour les autres aspects les plus pérennes du gouvernement.

 

De la même façon, une grande partie du fonctionnement politique romain est fondé sur la pratique coutumière, comme le rôle si particulier et si central du sénat, qui n'est pas inscrit dans la loi. La loi veut que ce soient les magistrats qui gouvernent, mais selon la coutume, ils demandent toujours l'avis du sénat. Loi et coutume se complètent donc, la loi ne vient confirmer ce qui n'est pas établi ou ce qui est enfreint : généralement, quand on fait une loi, c'est qu'un problème vient d'apparaître. Une grande partie du fonctionnement politique roule donc sur une pratique ancienne, la coutume.

 

Mais oui, l'absence de description tient aussi fait qu'on est dans le registre épique, ceci dit, cela n'empêchait pas Tolkien de décrire davantage d'aspects. Je pense que c'est parce qu'il ne voulait pas trop de lois humaines, l'essentiel est la loi divine.

 

Pharazon, Denethor, Castamir, finissent par ne plus être légitimes au regard de Dieu. Ils sont ensuite détrônés par la force des événements et le fait que d'autres prétendants sont favorisés par Eru. Cette faveur divine est visible dans le cas d'Elessar, je n'ai pas employé le terme de "religion" parce que c'est difficile chez Tolkien, mais il est clair que le rôle de Gandalf est celui d'un relai de Manwë pour couronner Elessar.

Modifié par Tiki
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Le roi absolu, c'est les temps modernes

 

Mais l'idée est vieille. L'idée qu'il y a un Dieu, un Royaume et donc un roi, ça remonte à la Christianisation de l'empire romain (récupération politique de l'idée d'universalisme derrière le Christianisme). Charlemagne a essayé de repiquer le truc mais ça ne survit pas à ses successeurs. Au passage, c'est "grâce" à cette idée que des Etats royaux centralisés se sont imposés en Scandinavie.

 

Au Moyen Age "central", dès Philippe Auguste, en France, les grands féodaux comprennent bien qu'il faut composer avec le roi (en comparaison du siècle passé ou Foulques Nera, Guillaume IX d'Aquitaine (le grand père d'Aliénor) ou Guillaume le Conquérant se soucient du soi disant roi de France comme de leur première paire de chausses.

 

Bref, je m'écarte du sujet (mais c'est pour dire que la conception assez unilatérale de la monarchie chez Tolkien peut surprendre sachant que son inspiration est avant tout le légendaire nordique et celtique.... mais aussi chrétien, ça doit être ça).

 

Citation

Pas que lui. Mais pour le coup, ceux qui paraissent les plus autocrates, ce sont les Elfes.

 

En fait, que ce soit chez les elfes, les nains ou les humains, le modèle du roi hiératique à l'autorité absolue et indiscutable semble indéboulonnable... j'ai pas d'exemples qui me viennent chez Tolkien d'un autre système d'organisation politique.... Esgaroth? Comme Bree, il ne s'agit que d'un reliquat de royaume qui attend le retour du roi...

 

Mais c'est vrai que les elfes ont toujours eu des rois, de leur naissance à leur.... ah bah non! A la fin, à part Thranduil, y a pas un roi elfe en Terre du Milieu. Elrond est un sage mais qui n'a pas de fonction politique particulière, et Galadriel est une elfe tellement âgée, sage et puissante qu'elle fait office de "déesse" de la forêt du coin.

 

Il est amusant d'ailleurs de constater que même chez les elfes, il y a des "sous races" qui doivent être dirigées par des races plus nobles: les noldor règnent sur les autres (Thingol, par son lien avec une maïa est une exception, après le premier âge, TOUS les royaumes elfes sont dirigés soit par des noldor, soit par des sindar, les autres, ceux n'ayant pas répondu à l'appel n'étant que des damnés condamné à constituer les classes laborieuses des elfes), et en leur absence, les Sindar règnent sur les elfes moindres (termes souvent utilisé pour décrire certains peuples "hommes moindres" notamment, en opposition aux Dunedain dont le droit à diriger est établi par leur naissance et leur appartenance à un certain peuple: qu'on me dise pas que sur ce point là, Tolkien n'était pas un peu raide.

 

De la même manière, même des peuples "libres", comme les rohirims sont assujettis aux dunedain de façon "naturelle", parce qu'ils sont des hommes "moindres".

 

C'est d'ailleurs le passage qui me fait tiquer à chaque fois: à partir du moment où Aragorn arrive à Meduseld, il se comporte comme en terrain conquis: je suis le roi des hommes, suivez moi et fermez là (que ça fasse plusieurs siècles que mes ancêtres vous aient lâché et que vous ayez du vous démerder tout seul, on s'en fout).

 

De façon générale, il y a l'idée chez Tolkien que la naissance et l'appartenance à un peuple en particulier conditionne le droit à régner et à diriger: le statut social.... et ça, on ne peut pas dire que c'est avant-gardiste.

 

Citation

Tolkien était totalement conscient de la totale partialité de son récit qui frise l'aveuglement

 

Vraiment? J'ai jamais eu cette lecture là, mais j'ai peut-être loupé quelque chose.

 

Citation

Pas vraiment. La TDM étant une projection de notre continent, c'est assez logique de retrouver des types physiques similaires répartis à peu près de la même façon. 

Euh oui, mais en quoi c'est logique que ces peuples là en particulier soient des sbires du seigneur des ténèbres???

 

C'est pas qu'il  y ait une répartition ethnique comparable à l'Europe et au monde en général qui m'interpelle, c'est que ces "ethnies" soient réparties de façon si radicales entre "peuples libres" et "esclaves du mal" en fonction desdites appartenance ethniques.
 

Citation

 

Je ne trouve pas. Il est à la foi suzerain et souverain,

 

 

 

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Primus_inter_pares

 

Même si évidemment au XVIIème siècle, ce n'était plus que sur le papier. Mais Au Moyen Age, c'est resté longtemps une idée associée à la royauté (héritée des anciens modèles germaniques de l'assemblée des hommes libres). Hugues Capet a été élu par une assemblée et c'est pour cela que Louis VII croyait encore bon d'associer son fils (Philippe Auguste pour le coup) au trône avant sa mort (l'hérédité n'allait pas de soit), et que lors de l’extinction de la branche principale des capétiens, ce fut un vrai bordel, avec un valois qui tenait encore son pouvoir d'un conseil des grands nobles.

 

L'idée qu'Aragorn, héritier d'un roi mort des siècles et des siècles avant, ait pu hériter de ce roi un droit incontestable à régner aurait été une idée totalement saugrenue au Moyen Age. Il y a vraiment l'idée que la royauté est sacrée et se transmet par une hérédité qui transcende le temps et l'espace (Aragorn est l'héritier d'Arnor, pas de Gondor, rapporté à notre Moyen Age, Denethor lui aurait pondu une bonne petite loi salique qui l'aurait renvoyé sur les roses).

 

Citation

Les légendaires européens médiévaux regorgent de peuples cynocéphales, pygmées et monopodes habitant les contrées lointaines. Le roman Baudolino de Umberto Eco est très rigolo là-dessus. Et quid des Hyperboréens, des Amazones, et autres hurluberlus ? Et quid des représentations fantasmées de l'Inde, de l’Égypte, etc. ?

 

J'ai pas une culture très étendue sur l'ensemble du légendaire et des mythes de l'Europe à travers les siècles. En matière de légendaire et de mythes nordiques et celtique j'ose dire que je me suis quand même intéressé à la question et hormis quelques peuples exotiques faisant rarement référence à de réelles ethnies historiques (et même dans la culture classique, les amazones...bon...) ou alors bien spécifiques (les sames dans les saga islandaises), ça me paraît quand même léger par rapport à ce que Tolkien a intégré dans son oeuvre à ce niveau.

 

C'est ce que je voulais dire par "on peut le tordre comme on veut". Oui, on peut avoir une interprétation cryptico-intello de la chose qui fait que ça nuance vraiment. Mais si on caricature (et quelqu'un qui ne s'intéresse pas particulièrement à Tolkien mais qui lit ses bouquins aura cette vision assez facilement): les "peuples libres" sont blancs et de culture plutôt européenne, et les "méchants" inféodés au mal sont des noirs, des orientaux et des "mongoloïdes" (il me semble que c'est ce terme, ou approchant, que Tolkien utilisait pour décrire l'apparence physique des orcs) habitant des régions (déserts, contrées lointaines et exotiques, nomades envahisseurs) qui rappellent l'Afrique ou l'Asie, contrées assujetties par l'Empire Britannique dans lequel Tolkien a passé toute sa jeunesse. Et même pour un génie visionnaire, la culture et la mentalité dans lesquelles on a grandi, ça laisse des traces, mêmes inconscientes, même si sa conscience s'y oppose (combien de "contestataires" du système actuel, décroissant, anar, hippies et autres, ont des réflexes et des idées totalement induits par ledit système?).

 

Et encore une fois, ça ne m'empêche pas d'avoir une grande admiration et un affect très poussé pour l'oeuvre de Tolkien.

Modifié par Ser Eddard
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Il y a 3 heures, Ser Eddard a dit :

Il est amusant d'ailleurs de constater que même chez les elfes, il y a des "sous races" qui doivent être dirigées par des races plus nobles: les noldor règnent sur les autres (Thingol, par son lien avec une maïa est une exception, après le premier âge, TOUS les royaumes elfes sont dirigés soit par des noldor, soit par des sindar, les autres, ceux n'ayant pas répondu à l'appel n'étant que des damnés condamné à constituer les classes laborieuses des elfes), et en leur absence, les Sindar règnent sur les elfes moindres (termes souvent utilisé pour décrire certains peuples "hommes moindres" notamment, en opposition aux Dunedain dont le droit à diriger est établi par leur naissance et leur appartenance à un certain peuple: qu'on me dise pas que sur ce point là, Tolkien n'était pas un peu raide.

 

De la même manière, même des peuples "libres", comme les rohirims sont assujettis aux dunedain de façon "naturelle", parce qu'ils sont des hommes "moindres".

 

C'est d'ailleurs le passage qui me fait tiquer à chaque fois: à partir du moment où Aragorn arrive à Meduseld, il se comporte comme en terrain conquis: je suis le roi des hommes, suivez moi et fermez là (que ça fasse plusieurs siècles que mes ancêtres vous aient lâché et que vous ayez du vous démerder tout seul, on s'en fout).

 

De façon générale, il y a l'idée chez Tolkien que la naissance et l'appartenance à un peuple en particulier conditionne le droit à régner et à diriger: le statut social.... et ça, on ne peut pas dire que c'est avant-gardiste.

 

La distinction entre Hauts et "bas" (ce qui ne se dit pas au passage) Elfes n'est pas sociale, mais historique. Elle peut recouvrir des aspects sociaux, technologiques, mais c'est annexe, car la distinction découle seulement de la séparation originelle entre Elfes d'Aman et Elfes de Terre du Milieu, pays qui avaient des richesses différentes. Le terme "Haut" est ambigu parce qu'il fait penser à une hiérarchie sociale, mais ce n'est pas le sens du propos, les Sindar n'étant pas les larbins des Noldor. Toute la population elfe, Sindar comme Noldor, obéit communément au roi qui est effectivement de race noldorine (souvent).

"Haut" signifie que les Elfes sont plus proches du Ciel et des Valar, parce qu'ils ont connu Aman et la lumière des Deux Arbres. Leur proximité avec le divin les rend plus légitimes au gouvernement, même si leur peuple a été désavoué par certains des Valar. C'est en ce sens qu'ils assument la direction des peuples qui se joignent à eux, ce qui est refusé au moins une fois, par Oropher le père de Thranduil, qui se lança sur la Morannon avant que Gil-Galad n'en ait donné l'ordre.

 

Cette distinction historique offre une légitimité divine, qui se retrouve dans les droits des rois dùnedain à commander à l'ensemble des hommes dans un contexte particulier (la guerre contre Sauron par exemple). Cela ne leur donne pas le droit de les asservir (d'où la condamnation de la colonisation nùmenoréenne). En revanche les peuples peuvent rejoindre le royaume (comme les Sindar qui composaient sans doute environ 50% de la population à Gondolin).

 

A la fin il n'y a plus de roi noldo car il n'y a plus assez de Noldor. Elrond songe à reprendre le titre laissé par Gil-Galad, mais la population est trop peu nombreuse pour légitimer cette revendication. Le droit divin est important, mais il n'y a quand même pas de roi sans accord populaire, comme le montre l'entrée d'Aragorn à Minas Tirith.

 

Pour les orques, c'est la lettre 210, mais le terme "mongol" est employé avec recul : " They are (or were) squat, broad, flat-nosed, sallow-skinned, with wide mouths and slant eyes: in fact degraded and repulsive versions of the (to Europeans) least lovely Mongol-types. ". Pour des européens, car c'est le point de vue de son histoire.

 

 

Modifié par Tiki
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