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Historique alternatif du monde de Warhammer....


cracou2

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Je n'aime pas le nouveau fluff AOS, c'est un fait. Je le trouve pauvre, incohérent, caricatural. Plus que tout je regrette que l'on ait jeté aux orties 30 ans de fluff. C'est pourquoi je développe un fluff alternatif. Je ne suis pas, mais alors pas du tout un littéraire donc c'est écrit avec mes compétences.

 

Nous sommes en 2521.

 

Personnages principaux

Dargrim Dent D’acier, chef de l’expédition

Garwrin le Tonnant, fils de Krawi, engingueur

Hofbar, maître des runes, assisté par Borgaf l’apprenti

Konev Kronski, sorcier kislévite

Thorgrim Blanche-Barbe, capitaine des Marteliers, chef d’état-major.

Von Heim, prieur des prêtres guerriers d’Ulrik

Ymnar Sent-de-Loin, chef des éclaireurs

 

Structure de commandement de l'unité naine

Commandant : Dargrim

          Commandant en second : Thorgrim et ses marteliers (10)

          Conseillers : Hofbar, Kronski

Eclaireurs : Ymar Sent-de-Loin (30)

Compagnie de Harun Brise-Hache (100)

Compagnie de Borek Perce-Mur (100)

Compagnie de Marik Coup-de-Tête (100)

Mineurs de Troum Fierfer (75)

Brise-Fers de Hirkek le Jeune (50)

Arquebusiers de Krad-a-Tork: (75)

Rangers commandés par Skalf le Borgne.(50)

Détachement de la guilde des engingueurs de Garwrin (110)

Spécialistes (20)

 

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Chapitre I L'arrivée

 

Sur la piste…

Le poney peinait et glissait sur la neige crissante. Garwrin devait l'encourager de sa voix basse pour qu'il continue d'avancer. Tout autour d'eux s'élevaient les hautes montagnes glacées du Bord du Monde. Entre les pics déchiquetés et les ravins vertigineux serpentait une route presque abandonnée. Des murs de granit noir s'élevant jusqu'au ciel barraient la vue. Au dessus d'eux, de sombres nuages laissaient filtrer de gros flocons que les bourrasques du blizzard rabattaient vers la face rougeaude du voyageur.

 

Plus que quelques efforts, marmonnait-il, et nous arriverons au camp de Snori Courtehache. Quelle idée de partir en hiver !

 

Sa longue barbe grise était couverte de givre et les sourcils blanchis par la neige lui donnaient une apparence fantomatique. Avec la fin du jour, le sentier devenait de plus en plus indistinct. Heureusement la pente diminuait. Garwrin se rendait compte qu'il devait avoir atteint les hauts plateaux de Karak-a-Dvark.

 

D'après ses souvenirs, Dvark était la dernière forteresse de quelque importance avant les premiers contreforts de la grande barrière. Il se rappelait aussi que pendant la grandeur des Royaumes Nains la grande barrière n'était qu'une étape entre les villes du levant et du couchant. Maintenant elle est le lieu de rassemblement de toutes les grandes expéditions vers les repaires des peaux-vertes, maudit soit leur nom. Le clan d’Unfom Tête de Pierre était responsable de la défense. A l'origine ce clan venait de Karak aux Huit Pics, mais rendait maintenant hommage au roi de Zhurbar. C'était vraiment tout ce qu'il savait de ce lieu et tout ce qu’on avait bien voulu lui dire avant son départ précipité.

 

La température continuait à baisser. Il balaya les flocons qui recouvraient sa barbe et maugréa contre l'arrivée précoce de l'hiver. Comme tous les nains, il supportait bien le froid. Par contre les naseaux du poney étaient menacés par la gelure. Alors que les lueurs des premières torches apparaissaient au loin, Garwrin continuait à penser à sa mission. Son esprit vagabondait d'une idée à l'autre.

 

Il y a seulement quelques siècles, j'aurai pu m'épargner ce pénible voyage en utilisant le dédale. Enfin, ca pourrait être pire. Au moins la route de Zhufbar à Dvark est relativement sure depuis les dernière campagnes. Je me demande pourquoi ce voyage. Un aigle aurait porté bien plus rapidement le message.

 

Il n'était pas habitué à ce genre de périple. Bien sûr son entraînement militaire et sa résistance naturelle le protégeaient contre les éléments mais il n'était pas un guerrier. Un conseiller, un engingueur, mais pas un guerrier. Il se remémora l'enchaînement des événements qui l'avaient conduit sur cette sente rocailleuse. Déjà pendant son enfance à Karak-Varn, il voulait devenir engingeur. Quand l'occasion s'était présentée - c'est à dire après que l'on eu entendu parler de lui - pour avoir fait exploser la moitié d'une étable en essayant diverses compositions de poudres - il avait prêté serment auprès de la Guilde des Engingueurs et avait suivi le long et difficile apprentissage dans les forges géantes de Zhufbar. Ses maîtres avaient décelé en lui non seulement un esprit clair et entreprenant, mais aussi une réelle capacité à partager ses connaissances. Bien qu'il soit un peu trop remuant à leur goût, il était le candidat idéal pour apporter une aide technique aux jeunes humains.

 

Bon c’est probablement une pénitence. Le grand maître des forges a toujours trouvé que je voulais trop souvent tester des nouveautés. Que j’étais un futur Sven Hasselfriesian en puissance… Je suis certain qu’il ne m’a pas tout dit ou qu’il préfère que je fasse mes expériences chez les humains.

 

C'est pourquoi dès sa centième année ils l'avaient envoyé à l'école impériale d'artillerie de Nuln, comme master es substances détonnantes, pétardantes et déflagrantes. Cette position de confiance l'avait conduit à fréquenter les allées du pouvoir impérial et à se rendre de plus en plus fréquemment à Altdorf pour apporter des conseils aux unités d’artilleries attachées à la Reiksguard. Son plus grand succès était le développement des pétards perceurs de portes sous cloches.

 

Et en remerciement, une mission d'une grande importance… porter un message à Dargrim puis se mettre sous ses ordres comme maître artilleur. Et en plus un message provenant des humains…J’aimerais bien avoir le fin mot de tout ça.

 

Il commença à distinguer les murailles de l'avant poste. Situées entre la montagne et le précipice, elles barraient complètement la piste. Les courtines, comme les lourds ventaux de la grande porte étaient couverts de plaques de bronze verdies par l'âge. Entre chacun des créneaux de pierre dépassait la gueule menaçante d'un canon. Quatre imposantes tours carrées couvertes de symboles runiques dominaient la courtine.  Fouillant les fontes de la selle, il dénicha une torche qu'il se dépêcha d'allumer pour se faire reconnaître.

 

Plaine des terres noires

- C'est moi qu'est le chef. Et c'lui q'est pas d'accord, y m'en parle beugla Grok en brandissant le crâne défoncé de son adversaire. Son regard terrible balaya l'assemblée.

 

Tout autour de lui les deux tribus Ork se faisaient toutes petites. C'était le cinquième adversaire que Grok écrabouillait à la suite. Bon, d'accord, celui là il avait levé la main seulement parce que ses voisins avaient demandé qui voulait du rab de snot.

Grok avait une intelligence remarquable pour un Ork. Il se rendait compte qu'il n'arriverait jamais à les tenir s'il ne leurs donnait pas un but. Une grosse bagarre par exemple. Il harangua les tribus.

 

- Suis'l chef. L'autre, j'vais le bouffer. Tous avec moi, on va boire, on va s'battre et l'dernier qu'est mort y aura à faire à moi.

 

La profondeur de ce discours atteignit son but. Les Orks entrèrent en transe en hurlant "Gork Mork, Gork Mork" pour appeler sur eux l'attention des dieux. Les tambours en peau humaine résonnèrent sur la lande sauvage. Les Orks se dépouillèrent de leurs derniers oripeaux et se mirent à danser d'un pas lourd autour des feux. Le festin allait commencer.

 

Tout autour d'eux, les servants gobelins essayaient de se rendre indispensables. Les chances de survie dépendaient de leur obséquiosité et de leur capacité à fournir de la nourriture. Ils jetaient furtivement des regards sournois, cherchant une cible qui relâcherait sa garde. Déjà quelques cris retentissaient, signe que les règlements de compte allaient bon train. La nuit serait longue.

 

Karak-a-Dvark

Le garde posté sur le chemin de ronde avait repéré l'inconnu depuis quelques temps déjà. Ses vêtements ocre se détachaient du sol immaculé. Lorsque le voyageur alluma une torche il cria

 

- Hola voyageur, qui va la. Avance pour que je te vois mieux. Ce faisant il braqua son arbalète à titre de précaution.

- Je suis Garwrin Le Tonnant, fils de Krawi. Paix à toi et à tes ancêtres. J'ai un message pour Dargrim. Il m'attend. La réponse avait fusée. Il comprenait la situation des gardes dans cet avant-poste isolé. L'adage de toutes les sentinelles n'était-il pas « tirer d'abord et si ça continue à remuer, tirer encore ».

- Nous t'attendions plus tôt, maître messager. Entre et vient de réchauffer. Que ta bourse se remplisse d'or. Et prend garde aux pièges. Passe par le Krak à vingt.

 

J’avais failli les oublier ceux-là. Il existe un seul chemin non piégé, encore faut-il le connaitre. Le secret est finalement simple : suivre la rune ! Krak ressemble à une potence donc tout droit puis longer le mur sur vingt pas.

 

Au pied des murailles une poterne impeccablement camouflée s'ouvrit dans une encoignure sombre. Il ne la voyait que grâce à la lueur de la lanterne sourde accrochée à l'intérieur. Retenant le battant d'une main, un soldat lui fit signe d'entrer. Garwrin s'approcha lentement. Il prenait garde à ne pas s'écarter du sentier. Sous la couche de neige crissante se cachaient quelques chausse-trappes. .

 

Dés qu'il eut franchi le seuil, le garde se dépêcha de rabattre la lourde porte de bronze poli puis fit coulisser deux barreaux d'acier épais comme la cuisse. Enfin il abaissa une herse et dessina sur le mur quelques signes runiques. Probablement une rune d'alarme. Un servant le déchargea et entraîna le poney dans une petite écurie débordante de fourrage. Le garde le guida à travers tout un dédale de couloirs et de passages creusés dans le roc. A chaque instant Garwrin constatait que tout le poste était conçu pour la défense. Dans le plafond voûté s'ouvraient des assommoirs. Comme toujours, les escaliers étaient tournés vers la droite pour gêner les assaillants et de nombreux pièges couvraient chaque porte.

 

L'intérieur lui rappelait son enfance. Les tunnels creusés à même le granit, le même éclairage de torches se reflétant dans de grands disques recouverts d'argent martelé. Plus il s'enfonçait dans les profondeurs de la forteresse plus l'atmosphère était chaude et accueillante. Probablement des sources d'eau chaude pensa-t-il. Il n'avait encore rencontré personne mais des murmures et des bribes de chants où l'on parlait d’elfe farci parvenaient à ses oreilles.

Le garde le fit enfin pénétrer dans une gigantesque salle voûtée. Il s'arrêta sur le seuil pour mieux accoutumer ses yeux et rectifier sa tenue.

 

Pas bien glorieux. Je dégouline de neige fondue et ma barbe ressemble à un poulpe échoué.

 

Devant lui plusieurs centaines de nains attablés à de longs bancs de chêne bâfraient, buvaient et chantaient. Des deux côtés de l’aula de hautes cheminées ronflaient joyeusement et diffusaient de merveilleuses odeurs de porc grillé. Personne ne fit attention à lui. A travers les fumerolles qui s'élevaient paresseusement de grilles de bronze incrustées à même le sol il distingua une estrade où se détachait un groupe hétéroclite de nains et d'humains.

 

Abandonné par le garde, il se faufila entre les convives pour rejoindre la grande table en tentant de faire bonne figure. Au centre du groupe de dressait un grand homme robuste habillé d'une aube de fourrure blanche. Ses traits allongés et halés par le soleil, sa longue chevelure noire retenue par un lacet de cuir blanc et ses chausses de feutre trahissaient une origine kislévite. Dans la main droite il manipulait sans cesse un large sceptre d'obsidienne couvert de pierreries couleur d'azur. Ses yeux bleu pâle lançaient des éclairs. Garwrin pensa un moment en être la cible, mais remarqua rapidement que cette mauvaise humeur était dirigée vers un nain isolé en bout de table. Il reconnu immédiatement Maître Hofbar. Le maître de Runes n'avait pas changé depuis leur dernière rencontre à Karak Kadrin. Toujours aussi imposant, teigneux et taciturne. Et habillé d'une armure de Gromril gravée des armes de son clan.

 

Le Kislevite. C’est encore Hofbar qui s’amuse. Je ne sais pas quel genre de rune peut perturber les vents mais vu la tête du sorcier humain, ça doit pas être beau à voir.

 

- Ah… Voici notre nouveau chef artilleur. Regardez moi comme il est beau dans son accoutrement impérial rugit le nain à la gauche de Hofbar. A ces paroles, les assistants éclatèrent de rire, avant de rapidement faire silence pour observer les réactions.

 

Devant cette attaque inattendue, Garwrin hésita sur la conduite à tenir. Au plus profond de lui venait le désir de venger cette insulte, mais il s'adressait probablement à Dargrim Dent D'acier. De plus ce n'était pas si faux puisque son pourpoint était orné de l'aigle crachant du feu, symbole des artilleurs impériaux.

 

- L'habit n'est rien. Ce qui compte c'est l'armure qui se cache en dessous, lança-t-il sur un ton de défi.

 

Les humains retinrent leur respiration, s'attendant à voir le jeune impudent être écharpé pour son effronterie. Mais telles ne sont pas les coutumes naines.

 

-Bien parlé, jeune barbe. Tu es bien comme Hofbar t'avait décrit lança Dargrim en riant. Tu dois avoir faim. Mange. Boit, dit-il en lui lançant une cuisse de sanglier et une chope vide. Assied toi. Tu as quelque chose pour nous. Parle en toute confiance, tu n’as ici que des amis, termina-t-il avant de se rassoir d’un coup tout en se saisissant d’une épaule de chèvre couverte de sauce brune.

- Je vais te présenter la compagnie, reprit-il entre deux mâchonnements. Commençons par Ymnar Sent-de-Loin, capitaine de l'avant garde. Il parle peu et pue comme un bouc, mais c'est pour ça que c'est un bon éclaireur.

 

Ymnar salua d'un petit hochement de tête avant de vider ton crâne de troll d’une traite, ce qui n’était pas un mince exploit. Même à cette distance on sentait d'étranges odeurs émaner des peaux d'ours qui couvraient à peine un poitrail rebondi et velu.

 

- Ensuite voici notre ancien, le vénérable Thorim Blanche-Barbe. C'est mon chef d'état major et le responsable du détachement de Marteliers. Si tu ne le sais pas, c'est un officier des Gardes du corps du Haut Roi. Et il en est fier. Un jour il deviendra porteur du Trône. Thorim inclina la tête et considéra le nouveau venu des pieds à la tête d’un air navré avant de lever les yeux au ciel.

 

Encore un qui va me dire comment je devrais faire, du haut de ses deux cent ? trois cent ans ?

 

- Maintenant nos deux alliés humains. Le premier c’est Konev Kronski. Il est un peu sorcier et a une folle envie de nous aider ajouta-t-il sur un ton ironique. Je crois que tu connais le Prieur Von Heim.

 

Garwrin se rappela les négociations menées le printemps précédent à Altdorf. A la suite d'interminables délibérations, le haut roi et l'empereur étaient arrivé à un accord. Officiellement, l'expédition était sous la conduite des Nains. Le commandant en second de l'expédition devrait être un humain. L'Empereur reconnaissait la suzeraineté du Haut Roi sur ces terres. En retour il lui était accordé le privilège de libre passage par le col et le droit à l'établissement d'un temple d'Ulric. Les bénéfices commerciaux éventuels devant être partagés équitablement. Les prêtres de Sigmar n'avaient pas tellement apprécié l'avantage obtenu par leurs concurrents. Cependant l'idée de rouvrir la grande route commerciale vers les montagnes du levant diminuait leur courroux. Une solide domination Naine sur le col ne pouvait être que bénéfique. Les Orks seraient mieux tenus à distance - ce qui évitera la répétition de la désastreuse attaque du Solland de 1701. De plus, une nouvelle alliance entre le Haut Roi et l'Empereur ne pouvait que renforcer les liens unissant les deux peuples. Et c'est ce que désirait Sigmar lorsqu'il avait fait alliance avec Kurgan Barbe de Fer.

 

Von Heim était un homme de plus de six pieds auquel on donnait une quarantaine d’années. De lui émanait une impression de solidité martiale. Ce sentiment était renforcé par son grand uniforme composé d’une armure de plaques étincelante renforcée de mailles recouverte de peaux de loup des neiges, symbole de la congrégation des moines-soldat d’Ulric, renommés pour leur bravoure. Garwrin avait assez côtoyé la cour impériale pour savoir que sa réputation de boucher sans cœur n’était pas usurpée. Il avait toujours réussi ses missions sans faire attention aux pertes.

 

Maintenant c’est à moi. Comment présenter les choses… Cela risque de s’avérer intéressant.

 

- Je vous présente le salut de l'Empereur, digne compagnie. Il me charge de vous faire part de ses encouragements et de son support, déclama Garwrin d'un ton officiel tout en s'asseyant.

- Le salut de l'Empereur est doux à mes oreilles, répondit immédiatement Von Heim.

- Et pourquoi ne pas commencer par s’adresser à notre assemblée glissa Hofbar tout en ouvrant largement ses bras vers les tables couvertes de victuailles et en jetant un regard plein de malice vers les humains.

 

Bon et bien ça va picoter… Je me demande combien de choppes les humains vont supporter.

 

- A votre convenance, répondit Garwrin en opinant gravement avant de quitter la table et de monter les quelques marche menant à l’estrade des saluts. Il y trouva la large corne de cérémonie déjà remplie à ras-bord d’hydromel.

 

Il commença par sonner le cor en corne d’auroch pour réclamer l’attention. Rapidement les chants et discussions s’éteignirent.

 

- Je vous apporte les nouvelles du monde. Que Karl Franz vive longtemps, que l'Alliance soit éternelle! cria alors Garwrin à la cantonade, aussitôt suivi par les acclamations de tous les nains.

 

Devant ce rappel historique, l'assemblée entonna en cœur la Saga relatant l'histoire de l'Alliance entre les humains et les Nains. A la fin de chaque strophe, ils martelaient les tables de pierre de leurs mains, faisant trembler la montagne et avalaient d'un trait leur chopine. Ca et là les quelques humains présents faisaient de leur mieux pour suivre le rythme. Devant tant d'enthousiasme, Garwrin se surprit lui même à reprendre le refrain. Entraîné par la musique il ne vit pas le temps passer.

 

Et descendu de Karaz-a-Karak avec ses nains il vint,

Pour détruire les peaux-vertes, tous réunis ils luttèrent

Malheur évité! Grâce au jeune Sigmar délivré il fut.

Ensemble pour les cols et les pics ils luttèrent

Du serment des hommes la prospérité revint

 

Von Heim ne semblait goûter que modérément les distractions mais devait bien prendre une gorgée à chaque fois. L'assemblée chantait pourtant bien selon les critères nains… C'est à dire très fort. Ne disait-on pas que la Chorale de Zhufbar avait provoqué une panique à Altdorf quand leurs chants avaient brisé les vitraux des temples ?

 

Pendant toute la discussion, Horbar manipulait le torque en or poli qu'il portait au cou en regardant le kislévite.

 

J'aimerai bien les voir l'un à côté de l'autre rien que pour voir si lequel va disparaître dans un nuage de fumée.

 

Chaque table, suivant la tradition, commença à inventer de nouveaux couplets et Garwrin put enfin s’affaler sur un savonarole libre. Les humains demandèrent à quitter la table étant donné l’heure tardive et le fait que leurs oreilles commençaient probablement à sonner.

 

Les choses sérieuses commençaient. Une fois entre nains, Garwrin déballa quelques documents et une lourde plaque de deux mains de haut et une de large, couleur de plomb.

 

- Maîtres, je vous ai apporté la carte originelle accompagnée du récit des Brise-Fer. Laissez-moi vous le lire. Pour remettre le texte dans son contexte, il a été écrit-il l’an dernier suite à la capture d’un convoi d’hommes-rats dans l’Ungrim Ankor.

 

De par ma main, Barek Tête Dure

Alors que nous étions en train de patrouiller la portion quatorze entre les échappées des trois vallées nous avons entendu un grand charroi progresser et de multiples piaillements. Reconnaissant les hommes-rats nous nous sommes postés dans les postes latéraux avant de bloquer les portes médianes et arrière. Nous avons facilement éliminé les premiers ennemis qui passaient plus de temps à jeter leurs congénères vers nous qu’à essayer de se battre. Pour être honnête ils ont passé plus de temps à s’entre-tuer qu’à faire face. Ce fut plus difficile avec quatre gigantesques hommes-rats enchainés à une charrette de fer. Heureusement leurs chaines nous permirent de les occire à coups de tromblons sans pertes. Nous avons trouvé dans la charrette un coffre d’où émanait une leur verdâtre, une vasque de vif-argent, des documents et un petit homme-rat contrefait et terrifié enfermé dans une cage.

Nous avons attelé les poneys pour rentrer. Au début pas de problème mais après deux sabliers les gardes les plus proches commencèrent à se plaindre de maux de tête. Le prisonnier commença à crier de manière fort étrange. La langue ressemblait à de l’humain de Tilée mais personne ne le comprenait. Devant cette magie noire évidente nous avons tout enfermé dans le temple de Valaya le plus proche pour éviter  la contamination.

 

Maintenant voici le rapport du maître Harlok qui comme vous le savez est chargé par la guilde d’étudier les machines infernales récupérées sur l’ennemi.

 

Les documents trouvés consistent avant tout en un journal d’expédition Tiléen dans les nouvelles terres du sud. Elle raconte une expédition qui a visiblement mal tournée. Après avoir pillé deux temples et récupéré des plaques d’or, les tiléens ont été attaqués par des hommes-rats alors qu’ils étaient poursuivis par des espèces de lézards recouverts d’armures chatoyantes. Ils parlent aussi d’une étrange maladie qui rendrait fou les hommes et d’un trésor de soixante plaques d’or. La maladie provoque des cauchemars et des visions.

La carte est des plus étrange. Elle représente, pour autant que nous le sachions, des courants dans les vents de magie. On observe deux nœuds : au septentrion et à Ulthuan. Sont aussi indiqués exactement soixante lieux répartis sur toute la surface du monde. Ils sont désignés par des caractères inconnus que nous avons été incapable de déchiffrer malgré leur ressemblance à des runes anciennes mélangées à des espèces de dessins. La majorité des lieux désigné par des cercles mélangés semble se trouver au fond des mers et les autres ne correspondent à rien : ni aux villes, ni aux forteresses, ni à des montagnes ou des lieux remarquables. Vous trouverez une copie de la carte et l’emplacement approximatif de chaque lieu ci-dessous.

 

Levant la tête des parchemins, Garwrin regarda son auditoire. Il avait spontanément baissé la voix lors de la lecture. Il nota les hochements de tête qui lui confirmère qu’ils connaissaient ces documents

 

- Je vais vous rapporter directement l’interrogatoire de l’homme rat. C’est la première fois que ses mots franchissent les murs de sa prison. J’ai pu observer directement les dernières phases et les paroles être révélé à quiconque sauf à briser un serment.

- Nous n’avons pas eu besoin de l’inciter à parler. Le mettre en présence des plaques d’or suffisait à le terroriser. D’après lui son maitre s’est livré à des expériences étranges. Il voulait, « modifier la couleur de la chose-invisible en filtrant les courants à l’aide de malepierre ». Nous ne sommes pas certains de ce qu’il voulait dire.  Toujours est-il qu’il nous raconta avoir eu des visions étranges une fois mis en présence des plaques. Des visions dérangeantes de mondes remplis d’humains, de démons, de nains ou même des différentes engeances d’elfes. Les expériences ont visiblement mal tournées après. Son maitre a tenté d’assassiner son propre chef de clan mais a échoué. Nous ne savons pas si c’est lié aux plaques. Après son échec, son assistant fut capturé et était en route pour être interrogé sur les expériences. Le plus important maintenant : son maître a été capable d’identifier la localisation précise d’un des lieux indiqué. Vra-Krak, le pic de fer. Plus précisément dans les profondeurs de la sous-forteresse. Vous savez tout maintenant. Nous devons savoir ce qui se cache là. Nous devons le capturer, l’étudier et le détruire.

 

Dargrim resta silencieux quelques instants. Personne n’osa prendre la parole et tous semblaient perdus dans leurs pensées.

 

- Jeune barbe. Tu as vu le prisonnier. Cette histoire est un conte pour imberbes. Nous ne pouvons pas faire confiance à un homme-rat. Je sens le piège.

- Digne Dargrim, c’est ce que tous pensaient. Il est de notoriété publique que les rats sont veules et racontent n’importe quoi. Nous ne croyons pas à la fin de l’histoire mais les plaques sont là et sont dangereuses. La seule manière de les neutraliser est de les recouvrir d’une feuille d’or-des-fous et…

- Nous devons savoir de quoi il retourne, le coupa Hofbar. Le Pic de Fer est à nous. Nous devons savoir si quelque chose y est caché. Nos ancêtres ont pu cacher là une partie de leurs richesses avant les âges sombres affirma-t-il.

- De toute façon nous avions prévu de reprendre la forteresse, continua Thorgrim. Autant en profiter pour examiner les salles des bas-fonds. N’en parlons pas aux humains. La fièvre de l’or peut les atteindre aussi.

- Mais les orques… tenta de dire Dargrim

- Seront chassés. C’est notre destin et notre mission, termina Dargrim.

 

La veillée commençait à se terminer. Les torches charbonnaient et les plus endurants ne trouvaient plus leur chope. Certains, pensant à leurs épouses, s'éclipsaient pour éviter de prendre quelques coups de maillet.

 

Garwrin se laissa mener vers sa chambre et s'écroula sur le lit.

Modifié par cracou2
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Chapitre II    Préparatifs

 

-Arrimez bien les chargements, hurlait le maître bourrelier.

 

Garwrin se réveilla en sursaut en entendant le remue ménage dans la cour. D'une main hésitante, il tâtonna sur la tablette et saisit son horloge à ressort. Le faible rayon de lumière blafarde qui tombait de la meurtrière lui donna assez de lumière. Encore une heure avant le réveil. Tranquillement allongé, il récapitula mentalement toutes les informations dont il disposait.

 

L'expédition avait un but limité. Il ne s'agissait pas de s'enfoncer profondément dans les terres des peaux-vertes au risque de tuer tout le monde, mais de reconquérir la Haute Tour du Pic de Fer. Ce seul nom était mythique dans tout le royaume Nain. Il désigne un pic isolé qui se dresse au centre même de la plus haute partie du col de la route du Pic. De très anciens tremblements de terre - antérieurs à ceux des années noires- avaient modifié l’aspect de la région et créé « la table de Grimnir ». Pour parvenir au col il fallait passer par une gorge étroite et lugubre qui conduisait à un plateau parfaitement plat de près de six miles de large. Sur ce plateau, le Pic de Fer, le Vra-Krak est le seul relief. Devant son importance stratégique évidente, il avait été complètement transformé. Pour cela un contingent de mineurs avait évidé la montagne: la forteresse était bâtie littéralement d'un seul bloc. Pendant l’époque de sa splendeur, elle servait de halte pour les marchands et de relais pour les courriers royaux.

 

Malheureusement, une épidémie d'origine inconnue avait décimé la garnison pendant les années noires. Profitant de la situation, des rats déformés par les radiations de malepierre surgirent des profondeurs de leurs tunnels et submergèrent les quelques défenseurs valides malgré une résistance acharnée. Par la suite, les hommes-rats avaient abandonné ce lieu ou furent eux même chassés. Il devint un repaire Gobelin.

 

Tout ceci ne nous dit pas ce qui se cache au plus profond des salles. Les chroniques ne rapportent rien d’étrange si ce n’est pas filons incroyablement riches de fer.

 

Garwrin s’habilla chaudement d’une pelisse taillée dans une peau d’ours des montagnes, serra bien ses chausses dans des bottes de feutre et lança sur son dos son sac et ses armes avant de sortir profiter du petit déjeuner dans la grand salle.

 

-Prieur Von Heim, c’est un plaisir de vous voir de si bon matin, lança-t-il d’une voix forte à la seconde où il aperçut l’humain buvant une décoction de plantes.

-Venez-vous joindre à moi, messager, dit calmement l’humain. Vous partagerez bien avec moi une décoction de thym et de hryze des vallées. Je me fais vieux pour ces aventures, vous savez.

 

Lui, il est vaseux de matin. Mais que sait-il exactement ?

 

-Vous savez, ce ne sera pas vraiment une grande aventure. Nous allons les surprendre, les massacrer et récupérer la Haute Tour, affirma Garwrin.

-Vous êtes bien certain de vous, jeune nain. Vous avez cependant raison. Nous devrions les surprendre. A commencer par la date. Attaquer en hiver c’est bien pour les surprendre. Cela contrevient aux habitudes immémoriales. Ne pas attendre le grand dégel est risqué mais j’appuie cette décision répondit Von Heim tout en mélangeant les herbes à l’aide d’un stylet d’argent.

-Nous sommes habitués au froid et à l'altitude. Les Orks le supportent aussi relativement bien à cause de leur cuir épais mais les Gobelins deviennent gourds et malhabiles, comme si leur sang se figeait avec le froid.

-Je sais jeune nain. Et vous oubliez de parler des machines de guerre. Je préfère les transporter lorsque les terres sont solides et les rivières gelées. Attaquer pendant l'été aurait obligé à traîner les canons sur un sol spongieux et boueux. Enfin, avec l'hiver les réserves de nourriture des Orks sont basses. S'ils fuient, ils ne pourront pas revenir avant la fin de l'hiver, ce qui laissera du temps pour remettre en place le système défensif. Regardez quand même nos hommes. Le froid ne leur facilite pas la vie.

 

Mais toutes ces raisons ne sont pas les plus importantes: avec la neige et la tempête, les reconnaissances des gobelins seront réduites. Assurer la surprise est au moins aussi important que le reste.

 

Garwrin se leva et s'approcha de la meurtrière. Derrière le grand camp se dressait un assemblage de tentes aux couleurs chatoyantes d'où émanait des volutes de fumée blanche. Plus loin, quelques baraquements de bois étaient adossés aux parois de la montagne. Devant chacune des tentes on apercevait un étendard symbolisant un loup dressé sur fond d’azur. De lourds destriers de combat piaffaient devant les meules de foin. Ici et là s'activaient des servants grelottant malgré les fourrures  qui les cachaient jusqu’au nez. Le contingent humain est plus important que ce je croyais, songea-t-il.

 

Il se détourna, constat que le prieur commençait à discuter avec quelques humains et saisit son sac de cuir brun pour en extraire un volumineux dossier.

 

Encore de la paperasse à vérifier. Enfin, cela m'occupera bien jusqu'au départ. Voyons voir, oui, commençons par les plaintes de ce bon Frijgar.

 

 Il déroula le parchemin et lu rapidement.

 

Rapport du maître fourrier au responsable des approvisionnements de Drak-a-Karak.

Onzième jour de la neuvième lune de la cent quarante troisième année après  le départ du nord.

La troupe est prête et les hommes sains et vaillants. Nous partons ce matin même. Voici la liste mise à jour des rationnaires. Le détachement de dix Marteliers servira d'état major. En plus des guerriers, nous avons un petit groupe de spécialistes divers (forgeron, maître artificier, maréchal ferrant).

Sept centaines plus sept dizaines de suivants décomposés en

Un détachement de trente éclaireurs sur poney, commandés par Ymnar Sent-de-Loin

Trois Compagnie des volontaires de Harun Brise-Hache, de Borek Perce-Mur et Marik Coup-de-Tête  de dix dizaines chacune

Quinze-cinq mineurs de de Karak Izor commandés par Troum Fierfer

Cinq dizaines de l'Ungrim commandés par Hirkek le Jeune

Quinze-cinq arquebusiers de Karak Hir commandés par Krad-a-Tork.

Cinq dizaines de rangers, commandés par Skalf le Borgne.

Maître Hofbar accompagné de son escorte

Onze dizaines d’artilleurs et engingueurs avec leurs armes soit quatre canons orgue, idem canons, deux balistes, idem gyrocoptère démontés, idem canons à flamme). Les pièces sont approvisionnées à cinquante centaines de salves chacune. Les catapultes, on été rejetées car la configuration du terrain ne se prête pas à leur utilisation. Je ne suis pas certain que ce soit une bonne idée. Les canons ont besoin de poudre. Les catapultes n'ont besoin que de grosses pierres. Les suivants occupent les postes habituels: conducteurs d'attelages, cuisiniers, maréchal ferrant… Malgré leur offre de service nous avons refusé d’embaucher des halflings. Ils coûtent horriblement cher en nourriture. Les Halfings font de bons archers, mais leur vaillance dépend de leur estomac.

Suivant vos ordres nous avons prévu des rations pour neuf mois soit deux mois de nourriture fraiche conservée par le froid, cinq mois de rations classiques et deux mois de rations de pierre en cas de besoin.

Les humains sont moins nombreux : vingt dizaines de guerriers humain plus quinze dizaines de suivants. Ils se décomposent en quatre dizaines de chevaliers du Loup Blanc commandés par le Prieur Von Heim, huit dizaines  d’hommes d'arme à pied, commandés par le capitaine Wilfried Hufeshiem et idem d’archers du Stirland commands par Karl Gofs Les suivants sont des bouches inutiles. Ils sont bien sûr armés, mais leur ardeur au combat est des plus discutable. J'ai eu vent de certaines rumeurs prétendant que des femmes déguisées font partie de la suite. Ils ont absolument tenu à emmener un de leur nouveau mortier. Je n'ai aucune confiance dans cet engin. Il me semble tout frêle. La plus grosse difficulté vient de l'approvisionnement des chevaux. Les poneys de débrouillent très bien en hiver en mâchouillant des feuilles et en raclant les écorces. Les destriers des humains ont besoin de foin ou d'avoine. Je suis certain que cela va nous poser des problèmes.

 

Derrière nous, j'ai créé un train d'intendance. Quarante chariots devront faire des allers et retours pour nous ravitailler. La nourriture pour les chevaux est tout juste suffisante pour deux mois.

 

Frijgar avait mis le doigt sur l'élément le plus important. Le ravitaillement. Celui qui sait ravitailler ses troupes contrôle le Pic, marmonna inconsciemment Garwrin en se levant.

 

Après une toilette sommaire, il descendit dans la grand-cour pavée de granit et se dirigea vers la plus grande tente. Sans décorations ni blasons à l'exception de quelques peaux de loup des glaces, elle tranchait avec les ors et les brocards des autres abris. Juste devant l'entrée, un sergent humain qui essayait vainement de se réchauffer devant un faible brasero lui fit signe d'entrer.

 

- Avez-vous passé une nuit calme, demanda Thorim l'Ancien, posté juste derrière le bâtant d’étoffe. Balayant la pièce du regard, il devina plus qu'il ne vit Dargrim, Thorim Ymnar et maître Hofbar.

- Fort bien, maître. J'ai rêvé d'or.

- Je vais vous présenter à nos amis impériaux. Ils sont dans la forge.

 

Thorgim avait insisté sur le terme ami avec une inflexion ben spécifique. Elle signifiait la défiance ou l'indifférence la plus totale.

 

- Tu nous a bien transmis le message du Haut Roi de leur empereur mais je dois maintenant vous donner d’autres informations, continua Thorgrim avant de regarder autour de lui. Ces informations confirment et explique ce que tu nous raconté dit hier. Plus importante encore que la reconquête sur les Peaux Vertes. Ce récit doit rester secret, même vis à vis des autres membres de l’expédition. Que soit maudi comme briseur de serment celui qui le dévoilera.

 

En évoquant le plus grand déshonneur possible pour un nain, le vieux et respectable martelier avait éveillé leur plus grande attention. Ce faisant Thorim avait décousu la manche de son habit et exhiba la plaque des ambassadeurs, faisant de lui le dépositaire temporaire de l'autorité du Haut Roi et sa voix dans tous les conseils. Il continua d’une voix à peine perceptible.

 

- L’an dernier, alors que j’étais de garde dans la grande salle du Trône, le premier archiviste a apporté un livre à notre Haut Roi Thorgrim le Rancunier. D’après ce que sais cet ouvrage fait parti du trésor depuis près plus de dix-huit milliers de lunes mais sans jamais avoir pu être consulté. Un grand maître des temps glorieux, Ladok Bedvar, avait gravé sur sa couverture une rune d’inviolabilité. Ce matin là, donc, l’ouvrage s’est ouvert de lui même.

- Et qu’y avait-il dedans ? l'interrompit Dargrim, visiblement impatient.

- Ne me coupez pas, s'il vous plait, maître. Je disais donc… Le Haut Roi l’a dévoré d’une traite avant de convoquer le grand conseil, dont je fais parti. C’est le journal de Rogram Poing d'Acier, commandant de la garnison de Karak Ungor. D’après ce que les archivistes purent reconstituer, juste avant la chute de la forteresse un convoi spécial a franchi les lignes gobelines pour rejoindre Karak-a-Kadrin. Mais il n’est jamais arrivé. Le convoi restait en contact avec la garnison grâce à des aigles. Aussi, nous avons suivi sa trace jusqu’à Vra-Karak. Ensuite c’est le trou. Rogram supposait qu’il était tombé dans une embuscade après avoir traversé la passe. Il ne pouvait pas savoir que Vra-Karak était elle même attaquée. Le conseil est d’avis que le convoi n’est jamais ressorti de la Haute Tour.

Thorim se rapprocha de ses compagnons et parla plus bas encore. Ce faisant il extirpa un deuxième morceau de parchemin se son justaucorps.

- Rogram donnait la composition du chargement. Les vingt chariots transportaient les archives du clan, cinq quintaux de joyaux, et trois cent armes de gromril pur. Mais ce n’est pas tout. Je cite son dernier message.

 

Le passage est bloqué mais les deux tonnantes et le faiseur d’airain seront en sécurité. Nous avons découvert un moyen pour passer. Nous ne sommes pas certain d’où et ni de quand nous arriverons mais ne vous inquiétez pas pour nous. Nous arriverons. Avec plus de tonnantes.

 

Les deux enclumes de Karak Ungor, le marteau de Grungni…

 

Les quatre nains étaient soufflés par l’importance de cette découverte. Depuis des temps immémoriaux les enclumes du destin étaient forgées par le plus grand Seigneur des Runes. La rune majeure de sorcellerie capturait l’énergie magique et la concentrait dans l’enclume. Chacun savait qu’un des plus grands malheur des grandes invasions était la perte du secret de cette rune. Le Seigneur Ukgrir, seul détenteur de ce savoir avec ses apprentis avait été englouti par la lave d’un volcan qui avait soudain apparu sous sa forge.

Chacun imagina immédiatement le déroulement du drame: le convoi bloqué dans Vra-Karak, la maladie et les attaques des hommes-rats. Les assauts gobelins suivis de la mort des derniers défenseurs. Une chose était certaine: jamais l'armée de secours qui avait capturée un grand nombre de rats et de peaux vertes n'avait entendu parler des Enclumes. Une seule conclusion s'imposait: les assaillants ne devaient pas les avoir trouvées. Ils auraient été trop heureux de les exhiber comme trophée.

 

Cela explique pourquoi le Haut Roi avait insisté sur la présence de Maître Hofbar. C’est le seul à même de trouver les enclumes. Lui seul peut se mettre à la place du seigneur des runes et décoder les indices qu'il aurait pu laisser pensa Garwrin

 

Le journal avait touché le marteau de Grungni. Il a été scellé avec de la poudre d’enclume juste après. Il ne devait s’ouvrir que quand la rune sentirait le retour du marteau. C’est tout ce que nous pouvions faire. La fin du message n’a pas de sens. On a pensé à l’époque que Rogram commençait à perdre la tête termina Thorgrim.

 

Cela commence à sentir la sorcellerie… Le marteau, les enclumes, un homme-rat fou et des messages étranges. Je sens que cela va commencer à devenir intéressant. 

 

- Il a caché les évènements à notre peuple pendant longtemps, reprit Thorgim. Il a préféré favoriser les générations futures en faisant le pari de la survie de notre race. Il avait confiance en nous et il avait raison. De nos jours, la reconquête est engagée, les âges sombres sont loin et nos forces reviennent peu à peu.

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Chapitre III   Approche

 

Route des terres noires à Vra-Karak

Grok avançait lentement sur son palanquin d’os de yack tiré par une paire d’ogre des montagnes enchainés. Il montra les crocs pour signifier son ennui avant de jeter un regard sombre autour de lui, ce qui terrorisa le gobelin chargé de l’éventer. Il n’était que le troisième à occuper ce poste depuis le début de l’ascension et comprenait fort bien qu’il risquait de finir éparpillé sur les flancs de la montagne. Un chef de guerre ork noir ennuyé par un voyage dans le froid des mois courts-de-jour ne faisait pas un bon mélange. Encore pire que de devoir faire confiance à un squig !

 

Heureusement pour lui un marmonnement indistinct accompagné d’un ricanement dément et d’un entrechocage d’os émana de la cage rangée sous le siège de l’ork. Tout était de sa faute, pensait l’éventeur. Un shamane à moitié fou – bon il faut bien reconnaitre que c’était un peu le cas de tous les shamanes - qui prétendait avoir vu Gork et Mork. En train de gambader dans les collines et de s’amuser à écrabouiller quelques humains. Jusque-là c’était normal. Mais en plus ils montraient la montagne de métal dur des nains, grimpaient dessus en volant tout en battant des bras avant de conchier le sommet et de se battre avec des démons rouges et roses. Un signe certain qu’il fallait y aller pour avoir de la bonne bagarre avait décidé Grok!

 

Route de l’Empire à Vra-Karak

 

Les fondrières débordaient de congères. Les pins ployaient sous le lourd manteau de poudreuse. La route serpentait au plus profond de la vallée, longeant le torrent gelé qui fournissait une route parfaite pour les lourds charriots tirés par des poneys ferrés de crampons. Garwrin se retourna et observa la longue colonne serpenter.

 

Nous avançons comme prévu. Pour l’instant tout se passe bien. Enfin si on ne compte pas l’utilisation du feu barakvaroi pour faire fondre la glace. Ils auraient pu mettre le feu à la forêt. Dargrim a bien fait de les menacer de leur brûler la moitié de la barbe.

 

Garwrin profita de la marche pour se rapprocher de Borgaf, le premier assistant d’Hofbar.

- Salut apprenti. Tu sais toujours comment forger une rune de pierre ?

- Et toi, petit vermisseau, tu sais toujours fabriquer de la poudre ? répliqua Borgaf en riant.

- Fait moi plaisir et dit-moi si tu ressens la moindre sorcellerie. Notre approche doit être à la fois rapide et prudente. Nous n'avons probablement pas été repérés, mais il ne faut pas prendre de risques.

- Ait confiance, engingueur. Nos runes n’ont pas rougeoyé depuis le départ ou presque. Il n’y a que les sorts de Konev dans la région. Et il cible plutôt les sommets. Notre plus grand ennemi est probablement l'ancien système de signalisation à longue distance.

 

Borgaf pensait aux tours d’alerte. Tout le monde reconnaissait ces imprenables tours isolées perchées sur les plus haut sommets, surmontées de fines échauguettes. Pas un seul accès depuis la terre, un baliste à traits explosifs sur le toit, un emplacement pour ravitailler un gyroscope, juste un escalier en colimaçon vertigineux autour d’un ascenseur à corde pour rejoindre les souterrains de communication. Rien d’autre et c’était suffisant. Une demi-section suffisait à observer et relayer les messages.

 

- Engingueur, crois-tu que les peaux vertes auraient pu remettre en état de fonctionnement les lentilles d’alerte ?

- C’est peu probable. Les messages sont transmis par le biais d’une torche dont la lumière est réfléchie et concentrée par des lentilles de quartz et des panneaux d'argent poli. C’est bien trop compliqué pour eux. Il pourrait quand même faire des feux d’alerte. Même eux y penseraient.

- Konev est là pour ça. Regarde-le un peu en haut du ravin enlever ses chausses et courir dans la neige. Encore un qui a dormi la tête trop près de la forge.

- Pourquoi est ce que Koniev a l’air aussi abattu ? Il est volontaire, non ?

- Tu n’as pas eu vent de l’affaire ? C’était un sorcier-conseil proche de la Tzarine. Il avait été envoyé à Pragg pour vérifier les comptes du gouverneur, mais il aime bien tout ce qui brille. La Tzarine lui a laissé le choix. La piscine de vomi de Troll ou l’engagement dans une expédition. Enfin, s’il aime l’or il ne peut pas être aussi mauvais que cela lâcha Borgaf dans un soupir.

- Je ne lui ferai pas confiance. Il s’est déjà laissé acheter.

- Et à qui crois-tu qu’il pourrait nous vendre ? Heureusement qu’il est là. Pourquoi crois-tu que nous progressons sous des nuages bas sans averse de neige ? Il détourne les vents de tempête. Si les preux-vertes sont alertées, ils recevront des renforts plus rapidement que nous ne pouvons avancer avec le train de siège.

 

Derrière eux s'étirait la longue colonne. En tête venaient les chevaliers du loup blanc. Ils avaient réclamé le privilège de mener la marche. On le leur avait accordé avec facilité. Les chevaux foulaient la poudreuse et rendaient la marche des unités à pied plus facile. Suivaient les régiments accompagnés de flanc-garde. Les charriots fermaient la marche.

 

Une demi-étape plus loin Ymnar conduisait son petit groupe d'éclaireurs bien en avant du gros de la troupe. Mission simple mais terriblement dangereuse: ouvrir la voie, identifier les menaces, éviter les embuscades et surtout éliminer les éclaireurs ennemis. Dans cette partie, ce n'est pas la force brute qui a le plus de chance de conduire au succès, mais l'expérience et la ruse. C'est pourquoi il avait soigneusement sélectionné les éclaireurs parmi les nains les plus familiers des montagnes et de leurs pièges.

 

Il émergea enfin sur le dernier plateau avant le Pic de Fer. Il distinguait à peine le sol et devant se concentrer pour éviter de perdre la piste qui serpentait entre les ruines des entrepôts et des auberges implantés au pied du pic.

 

Il se dressa sur les étriers et attacha une bande de tissu rouge sur le tronc d'un arbre mort. Elle servirait de guide pour le gros de la troupe. Alors qu'il travaillait, son poney se redressa et huma l'air. Il piaffa immédiatement, l'air inquiet.

- Il a senti quelque chose. Pied à terre. Ouvrez bien l'œil.

Huit nains se dispersèrent autour de la piste en se camouflant derrière les rocs épars et les quelques sapins rabougris qui survivaient à cette altitude. Les deux autres rebroussèrent chemin avec les poneys. Il fallait les éloigner pour que les hennissements ne trahissent pas la position. C'était peu probable car la neige profonde amortissait tous les bruits, mais ce n'est pas en prenant des risques qu'un éclaireur survivait longtemps.

 

La configuration du terrain se prêtait parfaitement à une embuscade. Ils surplombaient la route et si à gauche les sapins étaient le seul couvert, les moraines situées à droite leur procuraient une protection très efficace.

 

-Qu'est-ce que ça peut bien être? souffla Farok le Puant.

-J'en ai pas la moindre idée. Mais on a de la chance. Au moins le vent souffle vers nous et nous ne serons pas trahis par notre odeur.

 

Farok lança une oeuillade rigolarde. Il n'avait pas gagné ce surnom pour rien. Il sentait la sueur, le rance et la bière et pas forcément dans cet ordre.

 

Ymnar leva le bras et dessina un tourniquet imaginaire. Les nains changèrent la corde de leur arbalète par moitié. Avec ce temps, les cordes se mouillaient vite et se détendaient, ce qui faisait perdre tout son efficacité à l'arbalète. Le groupe, bien entraîné, mis seulement quelques secondes pour effectuer la manœuvre. La neige continuait à tomber, paisible. Après quelques minutes d'attente, il commençait à se dire qu'il devenait trop nerveux avec l'âge. Peut-être que le poney a senti une charogne quelconque.

Brusquement, il perçu un mouvement au loin. Des silhouettes sombres se détachant nettement sur le sol blanc se déplaçaient rapidement vers eux. Il reconnut immédiatement des chevaucheurs de loups couverts de hardes rapiécées et de fourrures mitées, armés de lances ébréchées et d'arcs courts. Ils n'étaient pas nombreux. Une petite quinzaine. Et avançant sans prendre de précautions, comme s'il s'agissait d'une patrouille de routine…

 

A cet instant, il se remémora les paroles de Dargrim. Effectivement, avec un temps pareil nul ne peut imaginer la présence d'une expédition aussi près de la Haute Tour. Pour eux ça doit ressembler à une patrouille assommante. Puis il revint au problème présent: comment faire disparaître cette patrouille sans qu'ils donnent l'alerte. Il ne faut pas qu'un seul d'entre eux en réchappe, sinon c'en est fait de la surprise. Ymanr tapota sur le coude de son voisin et lui glissa dans son argot des batailles "laisse les nous dépasser. Viser la queue de la colonne, fait passer". En quelques secondes chacun su ce qu'il avait à faire.

Le vent continuait à siffler à leurs oreilles, mais ils entendaient les Gobelins se chamailler. Le groupe passa devant eux sans même regarder les arbres. Ils continuaient à jacasser dans leur langue en y ajoutant force reniflements.

 

A peine le dernier cavalier passé, les loups commencèrent à renâcler, sentant à leur tour une présence. Les Nains ne laissèrent pas le temps aux cavaliers de réfléchir. Ymnar hurla un commandement et d'un mouvement brusque les Nains se dressèrent, l'arbalète braquée. Huit carreaux partirent presque simultanément. Tous touchèrent les cavaliers immobilisés à moins de vingt empans. Sept Gobelins furent atteints directement, l'un d'entre eux par deux carreaux. Mais ce n'était pas grave. A cette distance, les carreaux traversèrent les corps frêles et empalèrent un huitième Gobelin sur un sapin. Le choc avait été tellement violent que la plupart d'entre eux vidèrent les étriers et s'effondrèrent dans la neige. Leurs loups, surpris, s'égaillèrent immédiatement dans toutes les directions en jappant.

 

-Qu'est c'qui s'passe encore ici, hurla le chef en se retournant pour voir quel était l'abruti qui avait encore réussi à se faire désarçonner voir à se faire bouffer par les loups.

 

Ses yeux jaunes s'élargirent à la vue du cavalier embroché qui continuait à gigoter contre son arbre. Son cerveau embrumé par le froid arriva immédiatement à la conclusion habituelle: en cas de doute, fuir.

 

- Tous avec moi. On s'casse.

 

Mais pour fuir il fallait faire demi-tour et repasser devant les nains. Cela ne le gênait pas. Il ne savait pas d'où venait la menace, mais il sentait au plus profond de ses entrailles la nécessité de s'éloigner de ce lieu.

Profitant des quelques secondes de confusion, les éclaireurs échangèrent d’arbalète. C'est une arme excellente, mais la cadence de tir est faible. Même un soldat entraîné ne tire pas plus de quatre fois par minute. Ymnar se rendit compte qu'il risquait d'en laisser passer. Accompagné de Farok, il sorti de la futaie en courant, ou plutôt en dégringolant vers la piste pour barrer le chemin.

 

- Celui qui tombe, qui s'débrouille, lança le chef à titre d'encouragement aux survivants de sa patrouille.

 

Ils plantèrent leurs éperons dans les flancs des loups qui se mirent au galop, les lances tressautant dans leurs mains gelées. Pour s'alléger deux d'entre eux jetèrent leurs armes et s'accrochèrent désespérément aux crinières des loups bondissants.

 

Soudain ils virent apparaître devant eux deux Nain hirsutes et couverts de givre qui hurlaient des malédictions terribles tout en brandissant des fers de hache tournoyants horizontalement au bout de chaines d’acier qu’ils lancèrent dans la masse grouillante des cavaliers en déroute.

 

Les chaines s’emmêlèrent immédiatement qui dans une lance qui dans les pattes d’une louve grise, augmentant encore la vitesse de rotation des fers labourant les flancs, les bras, les têtes, arrachant les entrailles. Juste quelques secondes de furie avant qu'elles se plantent qui dans une congère qui dans une tête et fort comiquement dans la trachée du chef qui s’effondra dans un gargouillement mouillé et indigné. Les carreaux traversèrent les quatre survivants encore en selle, les couchants au sol. Les éclaireurs bondirent pour achever les blessés à coups de haches, de pics et de marteaux, éparpillant gaiement divers morceaux.

 

- Non mais qu’est-ce que c’est que ça encore, rigola Farok. Je vais encore mettre deux sabliers pour nettoyer tout ça. Non mais t’as vu dans quel état tu as mis mes belles chaines.

- Arrête de râler et chasse les loups vers le sud. On va faire passer ça pour une avalanche alors tu me prends le moins endommagé et tu lui fais rouler quelques cailloux dessus.

 

Palais de Skyss, sous Vra-Karak

Les deux hommes-rats déambulaient lentement le long de la galerie creusée par les esclaves tout en rognant une quelconque charogne qui trainait dans un coin. Un mince filet de bave verdâtre coulait de la gueule du plus tassé des deux. Au loin on entendait les imprécations des gardiens qui poussaient la chair-à-ogre à travailler plus vite. L'air vicié, l'obscurité quasi complète, les odeurs fortes de la meute rassuraient Ferdliss.

 

- Perdre les expériences est désagréable. Le clan demande des comptes. Je ne serai pas désigné comme responsable couina le plus tassé.

- Et pourquoi ne pas incriminer Grikk ? C’est lui qui a payé l’expédition après tout susurra le plus fluet.

- Pas possible. Il y a eu un regrettable accident avec une déchiqueteuse en réparation. C’est fou comme les objets sont dangereux quand on n’est pas prudent. En parlant de prudence, c’est bien calme ici. Va me chercher quelques gardes pour fouiller le dédale. J’ai envie de chair fraiche, ajouta-t-il dans un claquement de langue avant de cracher quelque remugle moisi.

- A votre guise maître piaillât le plus fluet en se prosternant jusqu’à queue basse avant de s’esquiver dans les profondeurs étouffantes du terrier.

 

Le plus tassé pensa qu’il était grand temps de se débarrasser de son porte-queue. Cette andouille commençait à connaitre bien trop de secrets. Il était bon de nettoyer le terrain de temps en temps. Et puis il était temps de se livrer à quelques nouvelles expériences de transfert de cervelle.

Modifié par cracou2
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Super ! On sent que tu connais bien l'histoire et le mode de vie de nos barbus préférés. C'est très agréable a lire et bien ecrit. Je suppose que tu connais le recueil JdR : Nains pierre et acier. Une vrai mine d'info.

J'attends la suite avec impatience !
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Chapitre IV : l’attaque

 

Le grand plateau

La longue colonne avançait lentement le long de la piste et débouchait petit à petit sur le plateau supérieur. Le moment était critique. Autant il était facile de se défendre dans la passe autant l’expédition était en danger entre le moment où elle débouchait et celui où son déploiement serait terminé.

 

Pas un seul accident. Pas d’embuscade. Tout se passe bien depuis une demi-lune. Plus moyen de se cacher maintenant. Il est temps de commencer le spectacle.

 

Devant eux se dressait la masse imposante du Pic de Fer surplombé par la Haute Tour. Tous s’arrêtaient, impressionnés par la configuration incroyable du lieu. Un plateau de près de six lieues en toutes directions au milieu des montagnes. Au levant les montagnes du bord du monde avec une seule route carrossable vers les forteresses perdues des nains et les mines de fer. Au couchant la même route vers l’Empire. Au nord et au sud des montagnes infranchissables sans même un sentier de chèvre. Au centre un pic. Unique, énorme, d’une lieue de circonférence, plus haut que large. Mélange d’un noir d’hématique, d’un rouge de fer et de faux-cuivre vert*. Surplombé par la Haute Tour, la forteresse littéralement creusée dans le somme du pic, accessible uniquement par les souterrains. De près, elle semblait encore plus gigantesque.

 

Juché sur son poney, Garwrin, en pleine réflexion se tirait lentement les poils de l’arrière-barbe.

 

Un gros morceau. Heureusement que nous possédons les plans des systèmes de défense. J'ose à peine imaginer un assaut direct. Et pourtant la Haute Tour est tombée. Les canons ne serviront à rien ici, il faut d’abord atteindre la salle de tri.

 

La piste s’élargissait lentement pour se transformer en route pavée de plaques de granite couleur de jais. Tout autour du pic une plaine fertile parcourue de canaux d’irrigation gelés. Une myriade de lignes brisées parcourait la plaine depuis les montagnes du nord, d’où émanaient quelques fumeroles soufrées. Ca et là les restes des entrepôts de commerce et des bergeries. L’air froid qui descendait des montagnes était effroyablement sec**. Presque pas une trace de neige sur la plaine couverte d’épeautre sauvage.

 

La première unité avait juste eu le temps d’avancer de cinq cent pieds sur le plateau, un cor retentit de trois court, un long, conformément au plan décidé la veille. Un écartelé de sinople profond et d’or aux pics d’argent et dragons bondissant de gueules répéta le signal. La bannière de l’expédition déployée défiait les occupants. Immédiatement les trois compagnies de guerrier quittèrent l’antique route par une conversion rapide et se déployèrent sur trois rangs de part et d’autre du débouché. Le premier rang planta son pavois dans la terre gelée, sortit ses carreaux et huila le mécaniste son arbalète avec du suif malodorant. Le deuxième chargea les arbalètes de rechange avant de ranger soigneusement au sol les rondaches, les targes, les écus. Bientôt vinrent les rejoindre les haches, marteaux, épées, estramaçons, scramasaxes, becs-de-corbin, fléaux, goupillons et fauchons. Le troisième rang se contenta de pencher hallebardes, guisarmes, vouges et bardiches ou se resserrer les liens des fagots.

Les Brise-Fers et les Rangers se rangèrent en potence respectivement à gauche et à droite pour couvrir les flancs jusqu’aux premières pentes. Seuls les arquebusiers quittèrent les rangs pour se déployer en enfants perdus.  Les humains à pied se déployèrent en deuxième ligne, sur quatre rangs, en deux bandes d’archers et d’hommes d’armes mélangés.

 

Presque à l’extrémité des lignes, les artilleurs s’escrimaient à pousser leurs lourdes machines sur deux petits mamelons d’à peine vingt pieds de haut et à remplir quelques gabions de terre. Deux demi-lunes commençait à apparaitre. Les canons orgue prenaient place aux deux angles, deux par deux. A bord de leurs charrettes, les ingénieurs vidaient des tonneaux quelques dizaines de pas devant les devant les premiers rangs. Un éclaireur plantait régulièrement des piquets surmontés d’un linge rouge le long de la route.

 

Quatre court, un long. Dans un ballet bien ordonné, les troisièmes servants-artilleurs refoulèrent une gargousse de toile au fond des fûts avant de charger un boulet de pierre. Le second servant retira son pouce de la lumière, perça la charge avec un dégorgeoir et enfonça l’étoupille de poudre fine. Le chef de pièce approcha un boutefeu incandescent couvert de runes. Deux canons tonnèrent dans le silence matinal, comme un cri de défi à la forteresse pendant que les servants se précipitaient pour remettre la pièce en batterie.

 

Une trompe retentit au loin. Le choc sourd des tambours la rejoignit bientôt. La Haute-Tour se réveillait.

 

La Haute Tour

 

Dans le froid soleil levant les ombres s’effaçaient du plateau. Seule demeurait l’imposant doigt d’ombre du pic. Du haut de la plus haute tour jusqu’à la plus basse poterne les éclats de mica scintillaient et rappelaient la puissance de l’antique forteresse. Une voix aiguë se faisait entendre au sommet du plus majestueux bastion.

 

- Des emmerdements, des quintaux d’emmerdements. D’abord Grok en route pour visiter la garnison et maintenant un raid de nabots. Mais qu’est-ce que j’ai fait à Mork pour mériter ça. Non mais dit moi, glapissait Noz tout en strangulant le nouveau chef des éclaireurs.

 

Celui-ci, bien incapable de répondre puisque Noz était accroupi sur son torse et cognait en rythme sa tête sur le dallage, se contentait de rire bêtement. Chose qu’il maitrisait parfaitement. Perdant soudain tout intérêt pour sa victime, Noz se redressa, lança un bon coup de pied dans les côtes de l’éclaireur pour faire bonne mesure et regarda d’un air mauvais le sous-chef, chef des chefs.

 

- Gubz. tu me sors toute la garnison du bas, ça va les réveiller. Tu vas me les écraser et tu reviens avec les têtes. Je dois avoir un truc à montrer à Grok. Pas question de de débiner, hein. Il n’y a que quelques doubles-mains. Attention, pas question de faire n’importe quoi. Je reste ici pour superviser. Et qu’on me fasse éclairer par cet éclaireur de merde.

 

Entendant cet ordre simple, quatre gobelins obséquieux se dépêchèrent de se saisir du corps resté à terre, de l’emballer soigneusement dans un filet et de l’attacher sur une catapulte à plongeurs.

 

- Tu vas me la reconnaitre, la piste, maintenant, hurla Noz avant de frapper rageusement le levier qui retenait le boyau de troll.

 

Le trait décrivit une parabole presque parfaite et parcourue presque deux-mains pied de Gork avant de se volatiliser littéralement en frappant un canal gelé, rependant des lambeaux dépareillés à la ronde.

 

- Trop à droite. Même pas foutu de viser correctement en plus, lança Noz en guise d’épitaphe.

 

Noz était très fier de sa stratégie. Soit il gagnait, enfin pas lui mais c’était pareil et il avait de quoi se faire bien voir de Grok. Soit les bandes perdaient et il restait maître de la forteresse sans trop de bouches inutiles avec largement de quoi tenir en attendant Grok. Grok serait obligé de faire une grosse bagarre. Soit il mourrait. Soit ça lui plairait.

 

- Barricadez-moi les accès maintenant. Je ne veux pas qu’on puisse entrer.  

 

Le grand plateau

Les bannières flottaient faiblement dans le vent naissant. Pas une parole, seul le bruit des pics et des pelles trahissait une activité. A l’arrière des lignes les servants avaient installé quelques feux et apportaient des boissons chaudes aux guerriers assis pour épargner leurs forces. D’autres feux lourdement gardés réchauffaient le naphte. Quelques pierres étaient tombées à bonne distance des lignes. Un groupe de joueurs s’était déjà fait rabrouer pour avoir parié de quel côté de la route la prochaine aller tomber. Non pas que cela soit inintéressant mais ils n’arrivaient pas à se départager pour savoir qui avait gagné lorsqu’un roc était tombé pilepoil sur la route.

 

- Ils arrivent, hurla Garwrin penché sur la longue vue de cuivre repoussé posée sur un trépied de fer poli. Distance trois mille enjambées. Attendez mon ordre pour tirer.

 

Perché sur le mamelon de gauche, Garwrin était maintenant le maître des opérations. Lui seul pouvait estimer le meilleur moment pour tirer sur les peaux-vertes. Sa main, observée par tous les chefs de pièce, restait désespérément levée.

 

Pas trop tôt pour les forcer à s’engager. Pas trop prêt pour nous laisser le temps de tirer.

 

Il commentait à haute voix ce qu’il observait.

 

- Un groupe de chevaucheurs de squiggs plus un troupeau au centre. Trois bandes de lanciers avec des bonnets noirs à droite de la route. Quelques-uns ont des filets. A gauche j’ai des chevaucheurs d’araignées et des charriots de guerre plus des machines étranges avec des tas de petites peaux-vertes dessus. On irait qu’ils soulèvent de la poussière ou font du feu. Pas d’armes lourdes en vue. Elles ont dû rester dans la forteresse. Ils avancent selon leur mode.

 

Cela voulait simplement dire que la horde avançait fort lentement. Les peaux-vertes des premiers rangs tentaient de se faire dépasser pendant que les rangs suivants se serraient pour les empêcher de se cacher tout en cherchant eux même à trouver une place plus protégée. Les chefs restaient évidemment derrière chaque groupe pour s’assurer que personne ne restait derrière tout en motivant les troupes à coups de menaces ou de triques. Cela avait aussi l’avantage de faire en sorte que tous restaient bien devant eux. Quelques bannières déchirées représentant des croissants de lune ou des étoiles parsemaient la plaine. A l’arrière le grand chef de guerre Gubz paradait sur son tout nouveau char à sangliers.

 

Juste derrière le maître engingueur, Dargrim attendait des précisions. Il aurait bien aimé disposer d’un rapport de gyrocoptère mais le remontage aurait demandé trop de temps. Balayant la plaine du regard de gauche à droite, il se contenta de vérifier une dernière fois la disposition des troupes. Il croisa les yeux rieurs d’Hofbar qui, fort confortablement affalé sur l’autre position d’artillerie, semblait follement s’amuser de la situation.  

 

- Comme prévu, maître ingénieur, les machines d’abord.

- Oui ancien.

 

Levant la voix pour se faire entendre, il ordonna

 

- Concentrez la visée à gauche. Priorité aux lourds.

 

Le signaleur installé dans son dos répéta le message à l’aide de son tambour de peau d’homme-bête tannée à vif sur la bête et de l’étendard à bras mécanique installé dans son dos***.

 

Soudain Garwrin baissa la main. La horde avait atteint le signal des deux mille cinq cent pas. Quatre pièces crachèrent un boulet de fonte. Ils touchèrent le sol bien avant la horde. Trois rebondirent en fusant sur la lande gelée avant de traverser la horde de chevaucheurs d’araignées. Le quatrième s’était enfoncé dans la berge d’un canal abandonné. Le rechargement avait commencé avant même que les boulets n’aient atteint leur cible.

 

Supposons deux mille pas de distance. A leur vitesse assez de temps pour quinze salves s’ils marchent et sept s’ils courent. Sachant que chaque salve de quatre boulets a deux tiers de chance de provoquer des pertes d’une profondeur minimale de vingt pas sur une horde de quarante pas de profondeur. Il faut donc…

 

- Artilleurs, tir à vitesse normale jusqu’à huit cent pas ordonna-t-il.

 

Le moment du combat arrivait. Les soldats, repus mais impatients, se levèrent d’un bond lorsque le cor signala le réveil des troupes en quelques accords guillerets qui sonnaient, était-ce un hasard, comme une fort célèbre chanson de taverne parlant d’elfes et de pommes.

 

Etat-major de Gubz

 

- Chef-Chef, tout va bien. Personne n’a cherché à se débiner et on avance bien criait le chef en second qui tentait de se faire entendre dans le grondement des roues plus ou moins circulaires du char. Chef-chef, c’est pas facile de vous parler avec les faux sur les côtés. Qu’est ce qu’on fait maintenant chef ?

- On les écrabouille. Droit devant ! Mène la charge. Je conserve avec moi les chars et l’arme secrète.

 

Loin d’être décontenancés par les pertes qui s’accumulaient chez les chevaucheurs d’araignées, les trois régiments –  si le terme était approprié pour un ramassis d’individus plus ou moins entassés – commencèrent à courir vers leur cible, tous contents de ne pas être la cible du moindre tir. C’était aussi bien moins dangereux que de rester à l’arrière où un sombre règlement de compte avait commencé entre un conducteur de char acariâtre et des snotlings hallucinés qui avaient visiblement volé la réserve de champignons d’un shamane qui utilisait un snotling pour taper sur un autre.

 

- Plus vite, plus vite. Commence à jouer aux osselets, toi trépigna Gubz en regardant son deuxième shamane.

 

Celui-ci s’assit, farfouilla dans son pagne crasseux à la recherche d’un champignon-bonnet séché, se délecta du goût moisi, profita du croquant apporté par quelques poux malchanceux et commença une danse démente en gesticulant, éructant et vomissant (tout n’était pas perdu pour tous les poux). La bonne grâce de Mork, à moins que ce ne fut celle de Gork lui apparût et la horde la plus au centre sembla doubler de vitesse, au grand désespoir des guerriers qui se rendaient bien compte qu’ils devançaient largement la ligne de bataille.

 

 

(désolé les gens, demain c’est la rentrée et je dois préparer des cours mais j’avancerai petit à petit)

 

----------------------------------------------------------------------

 

* Le connaisseur reconnaitra un cratère d’impact de type Sudbury comblé par des alluvions. Le faux cuivre c’est du nickel.

** Ca s’appelle un vent catabatique.

*** Un télégraphe de chappe

Modifié par cracou2
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  • 3 semaines après...

Pas mal !!

 

Un bon petit texte ! J'aime bien tout pour l'instant ! C'est bien écrit, les personnages sont facilement reconnaissables, on se perd pas trop et tu y vas juste à la bonne vitesse. (J'aimerais peut être juste qu'on ralentisse un peu les voyages car on a l'impression de passer d'un endroit à l'autre en un claquement de doigt :p)

 

Alors voyons où ça nous mène ! Ah oui, unu post tous les deux jours ça fait vite, tu devrais ralentir un peu :p ! Good luck !

 

@+

-= Inxi =-

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  • 1 mois après...

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