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Warhammer Forum

La Véritable histoire du Chaos


Inxi-Huinzi

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La suite !


Il fit d’un coup plus sombre, signe de leur arrivée dans le bâtiment, puis on lui retira la cagoule. Ils étaient revenus dans l’entrepôt. Comme tous ceux qui avaient été là lors de leur visite dans les égouts, il se figea sur place et regarda la trappe qui descendait en contrebas. Il respirait difficilement et sentit une goutte froide parcourir son échine. Ce fut un soupir dans son dos qui le tira de sa torpeur. Mel’Ermat remarqua alors que la cache de contrebande ne ressemblait plus à ce que cela avait été et que Llis s’était bien occupé. La poussière avait été nettoyée, les caisses avaient été retirées et le chariot en réparation avait été poussé dans un coin. On avait installé le long d’un mur une trentaine de couchettes qui paraissait peu confortables. Le mur qui faisait face, quant à lui, voyait trois tables de bois collées contre lui. Sur l’une se trouvait des carafes d’eau et de vin ainsi que des bouteilles de lait. Les deux autres tables contenaient de la nourriture séchée et froide : des haricots secs, de la viande blanche de porc et de poulet, du fromage mais aussi du pain, du miel et des pâtes. On notait aussi un réchaud au milieu de la pièce et plusieurs sacs de charbon. Ils pourraient tenir plusieurs jours avant de manquer de vivres. Les dirigeants semblaient un peu déboussolés contrairement aux gardes de Mel’Ermat qui étaient tous en train de quitter la tenue des soldats de l’Empereur. Puis, comme un seul homme, ils partirent manger. Visiblement, depuis leur arrestation la veille au soir, ils n’avaient rien eu à avaler.

Mel’Ermat était tellement stressé depuis le début de la journée qu’il en avait eu l’estomac noué et que même maintenant sauf, il ne se sentait pas mieux. Il partit voir Mel’Placer, allongé dans un coin de la pièce. Celui-ci était toujours inconscient, profondément endormi. Un soldat veillait sur lui et épongeait le sang visible. La plaie qu’il avait à la tête semblait superficielle malgré le fait qu’on notait plusieurs traces d’impact. Sous sa chemise, son corps avait bleui au niveau des côtes et de l’épaule gauche. Mel’Barn vint le voir, touché de voir son roi ainsi.

-Va-t-il s’en sortir ? s’inquiéta le soldat.
-Ca devrait aller, le rassura l’intendant. Il a souffert mais je n’ai pas l’impression que ça soit grave, il nous faudrait un médecin pour confirmer ça.
-Je peux y aller, dit le soldat désespérant de pouvoir aider, je connais quelqu’un de confiance ! Vous savez, c’est lui qui m’a donné ma chance, dit le soldat. Sans lui je serais toujours en train de ramer sur cette galère.

Mel’Ermat n’osa pas le contredire.

-Bien, vas-y. Va voir Mel’Carem et Mel’Seba. Ils doivent se faire un sang d’encre et ont du comprendre qu’on tramait quelque chose.
-Surtout qu’on leur a laissé une vingtaine de gardes de l’Empereur assommés…

Mel’Ermat sourit.

-Techniquement, c’étaient des hommes de Regut qu’on nous avait envoyés. D’ailleurs à ce propos, s’ils posent des questions, dites-leur de les garder enfermés ailleurs. Si jamais ils rapportent ce qu’on a fait, la villa risquerait d’avoir quelques problèmes… Et après la disparition des rois, je pense que tous les bâtiments de cette ville vont être fouillés.
-Oui, Seigneur. Je leur ferai passer les consignes.

Il mit le poing sur le cœur, fit un salut et s’éclipsa. Mel’Ermat se tourna vers ses hommes qui discutaient de leur mission de sauvetage, satisfaits qu’ils se soient plus ou bien tirés. Certains avec des marques de coup et des entailles. Leurs pérégrinations dans la prison n’avait visiblement pas été sans dommages collatéraux. Une fois que les dirigeants aient fini de se servir, ils se rendirent aussi vers le banquet. Ben’Lor vint jusqu’à lui, une assiette dans chaque main.

-Tiens, tu devrais manger.
-Merci, fit Mel’Ermat qui savait qu’il n’en ferait rien.

Les deux s’assirent sur une même couchette.

-Je t’en dois une pour nous avoir sorti de là, commença le guerrier.

Mel’Ermat renifla.

-Une ? Tu as dû perdre le compte depuis la Longue Bataille, lui fit un clin d’œil Mel’Ermat.

Les deux hommes rirent tout bas puis fixèrent le sol en silence. Ca avait été une sale guerre… Ben’Lor avait servi moins longtemps mais cela ne l’avait pas empêché d’assister à des atrocités inimaginables. Ce fut Iri et Frendlorian, peu remis de son périple à travers la ville, qui vinrent les tirer de leurs souvenirs morbides. Voyant un état-major se dessiner, Egéa et Democles vinrent au petit trop de peur de rater des décisions importantes.

-Nous ne pouvons pas nous cacher là éternellement, dit Frendlorian. Nos royaumes ont besoin de nous et je ne parle pas que de la guerre au sud.

Ben’Lor et Mel’Ermat se relevèrent de la couchette et laissèrent leur assiette sur le côté.

-C’est exact, dit l’intendant, mais nous ne pouvons pas quitter la ville pour l’instant bien que nous ayons six des sept sceaux. De plus, nous avons tous besoin de repos et organiser nos départs.
-Nous devons discuter de Regut, dit Democles qui n’avait perdu l’envie de venger son roi.
-Regut est coupable de trahison mais il est protégé dans l’Impériale, résuma Ben’Lor. Nous n’avons aucun moyen de l’en déloger, même si nous mettions tous nos hommes en commun. Et même si nous tentions quelque chose, il doit avoir un moyen de quitter la ville et de se réfugier dans son royaume.
-Il nous faut un plan, dit Iri qui aurait tout donné pour ne pas assister à la réunion.

Mel’Ermat vit que Isidor et Bernardian tendaient l’oreille derrière le cercle de rois pour tenter de capter les échanges.

-Venez, leur proposa Mel’Ermat, plus d’idées ne seront pas de refus.

Le cercle s’élargit pour les deux nouveaux venus.

-Résumons la situation, fit Ben’Lor qui était le plus expérimenté ici en gestion militaire et qui prit donc les choses en main. Nous avons une armée de plusieurs millions de soldats, humains ou non, et de civils qui marchent sur nous. Visiblement, ils sont là pour conquérir puisqu’ils tuent tout ce qui vit sur leur passage. Gageons qu’ils installent leur propre population à notre place. Ils sont entrés par Sustor et montent au nord sur la capitale, Erno qu’ils atteindront dans trois semaines, quatre tout au plus. Ensuite, nous pouvons dire sans crainte qu’ils iront vers l’ouest sur Terra puisque Regut tiendra l’est pour eux. Ils continueront ainsi leur avancée menant des combats sur un seul front et feront le tour des montagnes de l’Impériale jusqu’à nous avoir tous conquis.

Le silence accueilli ce bilan. La situation était catastrophique.

-Sans oublier, les Ombres grouillant sous nos pieds, crut bon de rappeler Mel’Ermat.

Cela assombrit encore plus les mines et il regretta ses paroles.

-Quelles sont nos options ? demanda Iri qui tripotait sa dentelle nerveusement.
-Nous devons nous regrouper, je pense que tout le monde est d’accord avec ça, dit Egéa.
-Maintenant, il reste de savoir comment, je ne peux laisser notre frontière nord sans surveillance sinon nous perdrons nos bases arrière tout en nous faisant attaquer de face, annonça Ben’Lor.
-Et je ne peux envoyer de troupes tant que je n’ai pas maté cette guerre civile, enchaîna Frendlorian de sa voix de vieillard.
-Combien de temps te faudrait-il pour rétablir la paix ? lui demanda Ben’Lor.
-Deux semaines, au plus tôt, calcula le Roi de l’Ostel. Si j’avais négocier beaucoup plus mais avec la manière forte cela prendra une paire de semaines.
-Je pourrais venir te prêter main forte, une fois mon problème réglé au nord, se proposa Ben’Lor.
-Iri, vous pourriez en faire de même, demanda Mel’Ermat.

L’homme ne parut pas ravi qu’on se souvienne de lui mais hocha vigoureusement la tête.

-Nous devrions arrêter de défendre le nord, proposa Isidor.

Il avait toujours eu des idées contre-courant. Tous les yeux étaient tournés vers lui mais il ne se laissa pas impressionné.

-Si nous laissions une brèche et que nous ne défendions Syrarture que sur un côté… disons le côté menant à Sal. Où les créatures iraient-elles ?
-Elles pourraient tenter de passer au travers mais elles iront sûrement au sud, sur Kator, comprit le premier Frendlorian dont les facultés mentales restaient quand même opérationnelles.
-On le forcerait à être de notre côté. Il voulait aider ses alliés envahisseurs ? Il serait obligé de prendre notre place au nord.
-Je devrais pour ça abandonner la moitié de mon royaume, grommela froidement Ben’Lor.

Le peuple de Syrarture était un des plus coriaces que Mel’Ermat connaissait. Ils avaient connu nombre de guerre et de catastrophes et pourtant ils reconstruisaient inlassablement.

-Ce ne serait que pour un temps, tu pourrais bouger tes populations vers Sal. Nous reprendrons les territoires plus tard.

Iri tiqua mais une paire de regard le fit taire. Il était temps de ne plus être égoïste.

-De toute manière, rappela Mel’Ermat, nous ne gagnerons pas cette guerre sans que nos populations participent au combat également. Ils seraient sinon dix fois plus nombreux que nous. Il faut que nous les préparions à devoir tout abandonner.
-Comment allons-nous faire les années suivantes ? s’inquiéta Egéa qui comprenait les tenants et les aboutissants. Les récoltes ?
-Ce que je sais, trancha Mel’Ermat, c’est que si nous ne nous unissons pas, il n’y aura pas d’années suivantes de toute manière.

Le silence se fit pesant.

-Donc je rassemble mes troupes et ma population puis réorganise les défenses sur une ligne verticale à l’ouest de mon royaume. Je passe par Sal où je me joins avec Iri puis nous aiderons Frendlorian à reprendre le contrôle total de l’Ostel. Là, nous continuons notre chemin pour rejoindre Sustor ?
-Même au pas de course, sans problème et sans combat, il faudrait plus d’un mois pour faire se trajet… rappela Iri.
-Il faudra faire encore plus vite, paniqua Democles, sinon nous tomberons avant que vous arriviez.
-Il nous faut un plan de secours, proposa Bernardian, au cas où nous n’arrivions pas à nous regrouper.
-Il faut évacuer le royaume de Sustor… se lança Egéa puisque personne n’osait le dire.
-Jamais ! protesta énergiquement Democles, son gros ventre rebondissant sous ses gestes brusques. Mon royaume ne sera pas conquis !
-Et que comptes-tu faire, hein ? s’énerva Ben’Lor. Sacrifiez un demi-million de personnes pour du pur chauvinisme ? Si vous restez vous battre vous serez exterminés jusqu’au dernier. Crois-tu que cela me fait plaisir d’abandonner les deux tiers de mon royaume aux monstres que l’on combat depuis des millénaires ? Non et pourtant, c’est ce qu’il doit être fait. Ce n’est pas une guerre classique, mets-toi ça dans le crâne. Si nous perdons, nous cesserons tous d’exister. Il n’y a pas de conquête, pas de rédition, nous gagnons ou nous perdons, c’est tout.

Le gros intendant déglutit à mesure que Ben’Lor s’était rapproché de lui et lui plantait le doigt sur le torse à chacune de ses remarques.

-Quels sont les limites temporelles pour nous regrouper ? Je veux dire au pire, où serons-nous si nous fuyons constamment devant eux ? s’interrogea Bernardian.

Frendlorian, qui était visiblement bon en calcul répondit pour lui tout en s’appuyant sur une canne qu’on lui avait faite.

-Les neiges tombent encore dans plusieurs mois, à condition que celles-ci soient précoces. D’ici là, ils seront au moins aux portes de mon royaume. C’est donc au minimum ici que nous allons nous regrouper.
-Il faut espérer ne pas en arriver là… se plaignit Mel’Ermat.

Effectivement, cela aurait voulu dire que le royaume de Mel était tombé.

-Au cas où, je dis bien, au cas où, continua Frendlorian. Je pense que nous devrions emporter tout ce qui est utilisable par l’ennemi. Nous avons de la chance que notre cher intendant Mel’Ermat ait déjà regroupé toute la nourriture de l’Empire en sécurité.

Mel’Ermat n’avait pas pensé à ça. Effectivement, le ravitaillement serait plus facile maintenant que tous les royaumes avaient vendu ses stocks au royaume de Mel.

-Il a raison, reprit Mel’Ermat enthousiaste malgré l’annonce qu’il faisait, nous devons tout prendre et ne rien laisser. Aucun champ, aucune maison, aucun outil. Tout doit disparaître. Si nous tenons jusqu’à l’hiver, ils vont mourir de faim. Nos ennemis doivent s’attendre à nous piller et à nous remplacer, que se passera-t-il s’il n’y a plus rien ?
-Tu envisages sérieusement de détruire ton propre royaume ?

Democles semblait franchement surpris. Il devrait se faire à l’idée car il serait sûrement le premier à devoir le faire.

-Je préfère ça que de laisser des gens s’emparer de l’Empire et de nous exterminer comme des animaux, avoua-t-il.

Il n’avait pas réfléchi en disant ça mais conclut que c’était sûrement vrai. Ca ne serait pas facile mais c’est ce qu’il faudrait faire.

-Nous pourrions passer par les grottes sous la Capitale pour gagner du temps, réfléchit Ben’Lor après le froid qui avait été jeté.
-Nous avons vu les Ombres, répondit Egéa. Je pense qu’il serait dangereux de revenir dans les environs tant que nous n’avons pas trouvé de solution.
-Bien, conclut Ben’Lor. Nous avons donc un plan. Maintenant, nous ne pourrons pas les affronter tant qu’ils seront aussi nombreux. Surtout s’il y a des créatures contre lesquelles nous ne pouvons pas lutter. Ils ont réussi à invoquer des Ombres dans l’Impériale, les Dieux seuls savent ce qu’ils nous réservent d’autres.
-Les Dieux, justement ! réagit Egéa. Nous pourrions les convoquer et leur demander de nous aider. Ils l’ont déjà fait par le passé !
-Bonne idée, dit Democles, ils ne laisseront sûrement pas l’Empire tomber sans rien faire.
-Donc les Dieux, ensuite ? les poussa à se creuser les méninges le guerrier.
-Les Quatre ? proposa Bernardian.
-Non, riposta Mel’Ermat. J’ai pu évoquer le sujet avec l’un d’entre eux qui m’a clairement dit qu’ils n’avaient pas encore pris partie malgré le fait que ceux de Terre soient parmi les envahisseurs.

Tous le regardèrent comme s’il venait d’un autre monde. D’accord peu avaient d’entretien avec les Quatre Races mais ce n’était pas aussi exceptionnel que ça !

-Bien, dommage, reprit Isidor. Les nains, les elfes, les centaures et les hommes-scorpions ?
-Il va falloir envoyer des ambassadeurs mais je n’ai peur qu’ils ne puissent pas être là à temps.
-Il n’y aurait bien que la prophétie pour nous sortir de là ! plaisanta Iri.

Il ne servait vraiment à rien, s’insurgea mentalement Mel’Ermat. En plus d’être lâche, il était vraiment inutile. Par contre, il était vrai qu’il mettait le doigt sur quelque chose.

-J’ai l’enfant, leur avoua-t-il.
-Comment ça tu as l’enfant ? demanda Ben’Lor en plissant les yeux.

Cette conversation ressemblait fortement à celle qui l’avait eu avec ses seigneurs. Les rôle étaient juste inversés…

-Certains de mes seigneurs prétendent, alors que je ne leur avais rien demandé, avoir mis la main sur l’enfant en question. Celui de la prophétie.

Mel’Ermat se dit qu’il était vraiment temps de la lire.

-Alors ça serait vrai ? se réjouit Iri. On a encore une chance ?
-Comment savoir que c’est l’enfant ? demanda plus pragmatique Bernardian.
-Quelqu’un sait la véritable version de cette prophétie ? J’en ai entendu plusieurs ! s’inquiéta Isidor.
-Où est-il ? chercha à savoir Democles.

Ils parlaient tous en même temps.

-Silence ! cria Ben’Lor.

Il cria si fort que tout l’entrepôt se tut et tous les soldats se tournèrent vers le groupe de dirigeants, étonnés que l’un d’entre eux ose s’emporter et rabroue les autres ainsi. Ils reprirent plus calmement.

-Je pense, commença Mel’Ermat en choisissant ses mots, que nous ne devons pas tout miser là-dessus. Ce ne reste qu’une légende et il se pourrait que ça soit faux.

Les autres soupirèrent. Beaucoup s’étaient mis à fonder des espoirs dessus.

-Qui ira sous la capitale ? s’inquiéta quand même Iri. Il y a des Ombres !

Mel’Ermat souhaitait vraiment, mais alors vraiment lire cette prophétie.

-Je connais quelques personnes pour ça, annonça Frendlorian. La Compagnie d’Argent.


@+
-= Inxi =-
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La suite !


Il fit d’un coup plus sombre, signe de leur arrivée dans le bâtiment, puis on lui retira la cagoule. Ils étaient revenus dans l’entrepôt. Comme tous ceux qui avaient été là lors de leur visite dans les égouts, il se figea sur place et regarda la trappe qui descendait en contrebas. Il respirait difficilement et sentit une goutte froide parcourir son échine. Ce fut un soupir dans son dos qui le tira de sa torpeur. Mel’Ermat remarqua alors que la cache de contrebande ne ressemblait plus à ce que cela avait été et que Llis s’était bien occupé. La poussière avait été nettoyée, les caisses avaient été retirées et le chariot en réparation avait été poussé dans un coin. On avait installé le long d’un mur une trentaine de couchettes qui paraissait peu confortables. Le mur qui faisait face, quant à lui, voyait trois tables de bois collées contre lui. Sur l’une se trouvait des carafes d’eau et de vin ainsi que des bouteilles de lait. Les deux autres tables contenaient de la nourriture séchée et froide : des haricots secs, de la viande blanche de porc et de poulet, du fromage mais aussi du pain, du miel et des pâtes. On notait aussi un réchaud au milieu de la pièce et plusieurs sacs de charbon. Ils pourraient tenir plusieurs jours avant de manquer de vivres. Les dirigeants semblaient un peu déboussolés contrairement aux gardes de Mel’Ermat qui étaient tous en train de quitter la tenue des soldats de l’Empereur. Puis, comme un seul homme, ils partirent manger. Visiblement, depuis leur arrestation la veille au soir, ils n’avaient rien eu à avaler.

Mel’Ermat était tellement stressé depuis le début de la journée qu’il en avait eu l’estomac noué et que même maintenant sauf, il ne se sentait pas mieux. Il partit voir Mel’Placer, allongé dans un coin de la pièce. Celui-ci était toujours inconscient, profondément endormi. Un soldat veillait sur lui et épongeait le sang visible. La plaie qu’il avait à la tête semblait superficielle malgré le fait qu’on notait plusieurs traces d’impact. Sous sa chemise, son corps avait bleui au niveau des côtes et de l’épaule gauche. Mel’Barn vint le voir, touché de voir son roi ainsi.

-Va-t-il s’en sortir ? s’inquiéta le soldat.
-Ca devrait aller, le rassura l’intendant. Il a souffert mais je n’ai pas l’impression que ça soit grave, il nous faudrait un médecin pour confirmer ça.
-Je peux y aller, dit le soldat désespérant de pouvoir aider, je connais quelqu’un de confiance ! Vous savez, c’est lui qui m’a donné ma chance, dit le soldat. Sans lui je serais toujours en train de ramer sur cette galère.

Mel’Ermat n’osa pas le contredire.

-Bien, vas-y. Va voir Mel’Carem et Mel’Seba. Ils doivent se faire un sang d’encre et ont du comprendre qu’on tramait quelque chose.
-Surtout qu’on leur a laissé une vingtaine de gardes de l’Empereur assommés…

Mel’Ermat sourit.

-Techniquement, c’étaient des hommes de Regut qu’on nous avait envoyés. D’ailleurs à ce propos, s’ils posent des questions, dites-leur de les garder enfermés ailleurs. Si jamais ils rapportent ce qu’on a fait, la villa risquerait d’avoir quelques problèmes… Et après la disparition des rois, je pense que tous les bâtiments de cette ville vont être fouillés.
-Oui, Seigneur. Je leur ferai passer les consignes.

Il mit le poing sur le cœur, fit un salut et s’éclipsa. Mel’Ermat se tourna vers ses hommes qui discutaient de leur mission de sauvetage, satisfaits qu’ils se soient plus ou bien tirés. Certains avec des marques de coup et des entailles. Leurs pérégrinations dans la prison n’avait visiblement pas été sans dommages collatéraux. Une fois que les dirigeants aient fini de se servir, ils se rendirent aussi vers le banquet. Ben’Lor vint jusqu’à lui, une assiette dans chaque main.

-Tiens, tu devrais manger.
-Merci, fit Mel’Ermat qui savait qu’il n’en ferait rien.

Les deux s’assirent sur une même couchette.

-Je t’en dois une pour nous avoir sorti de là, commença le guerrier.

Mel’Ermat renifla.

-Une ? Tu as dû perdre le compte depuis la Longue Bataille, lui fit un clin d’œil Mel’Ermat.

Les deux hommes rirent tout bas puis fixèrent le sol en silence. Ca avait été une sale guerre… Ben’Lor avait servi moins longtemps mais cela ne l’avait pas empêché d’assister à des atrocités inimaginables. Ce fut Iri et Frendlorian, peu remis de son périple à travers la ville, qui vinrent les tirer de leurs souvenirs morbides. Voyant un état-major se dessiner, Egéa et Democles vinrent au petit trop de peur de rater des décisions importantes.

-Nous ne pouvons pas nous cacher là éternellement, dit Frendlorian. Nos royaumes ont besoin de nous et je ne parle pas que de la guerre au sud.

Ben’Lor et Mel’Ermat se relevèrent de la couchette et laissèrent leur assiette sur le côté.

-C’est exact, dit l’intendant, mais nous ne pouvons pas quitter la ville pour l’instant bien que nous ayons six des sept sceaux. De plus, nous avons tous besoin de repos et organiser nos départs.
-Nous devons discuter de Regut, dit Democles qui n’avait perdu l’envie de venger son roi.
-Regut est coupable de trahison mais il est protégé dans l’Impériale, résuma Ben’Lor. Nous n’avons aucun moyen de l’en déloger, même si nous mettions tous nos hommes en commun. Et même si nous tentions quelque chose, il doit avoir un moyen de quitter la ville et de se réfugier dans son royaume.
-Il nous faut un plan, dit Iri qui aurait tout donné pour ne pas assister à la réunion.

Mel’Ermat vit que Isidor et Bernardian tendaient l’oreille derrière le cercle de rois pour tenter de capter les échanges.

-Venez, leur proposa Mel’Ermat, plus d’idées ne seront pas de refus.

Le cercle s’élargit pour les deux nouveaux venus.

-Résumons la situation, fit Ben’Lor qui était le plus expérimenté ici en gestion militaire et qui prit donc les choses en main. Nous avons une armée de plusieurs millions de soldats, humains ou non, et de civils qui marchent sur nous. Visiblement, ils sont là pour conquérir puisqu’ils tuent tout ce qui vit sur leur passage. Gageons qu’ils installent leur propre population à notre place. Ils sont entrés par Sustor et montent au nord sur la capitale, Erno qu’ils atteindront dans trois semaines, quatre tout au plus. Ensuite, nous pouvons dire sans crainte qu’ils iront vers l’ouest sur Terra puisque Regut tiendra l’est pour eux. Ils continueront ainsi leur avancée menant des combats sur un seul front et feront le tour des montagnes de l’Impériale jusqu’à nous avoir tous conquis.

Le silence accueilli ce bilan. La situation était catastrophique.

-Sans oublier, les Ombres grouillant sous nos pieds, crut bon de rappeler Mel’Ermat.

Cela assombrit encore plus les mines et il regretta ses paroles.

-Quelles sont nos options ? demanda Iri qui tripotait sa dentelle nerveusement.
-Nous devons nous regrouper, je pense que tout le monde est d’accord avec ça, dit Egéa.
-Maintenant, il reste de savoir comment, je ne peux laisser notre frontière nord sans surveillance sinon nous perdrons nos bases arrière tout en nous faisant attaquer de face, annonça Ben’Lor.
-Et je ne peux envoyer de troupes tant que je n’ai pas maté cette guerre civile, enchaîna Frendlorian de sa voix de vieillard.
-Combien de temps te faudrait-il pour rétablir la paix ? lui demanda Ben’Lor.
-Deux semaines, au plus tôt, calcula le Roi de l’Ostel. Si j’avais négocier beaucoup plus mais avec la manière forte cela prendra une paire de semaines.
-Je pourrais venir te prêter main forte, une fois mon problème réglé au nord, se proposa Ben’Lor.
-Iri, vous pourriez en faire de même, demanda Mel’Ermat.

L’homme ne parut pas ravi qu’on se souvienne de lui mais hocha vigoureusement la tête.

-Nous devrions arrêter de défendre le nord, proposa Isidor.

Il avait toujours eu des idées contre-courant. Tous les yeux étaient tournés vers lui mais il ne se laissa pas impressionné.

-Si nous laissions une brèche et que nous ne défendions Syrarture que sur un côté… disons le côté menant à Sal. Où les créatures iraient-elles ?
-Elles pourraient tenter de passer au travers mais elles iront sûrement au sud, sur Kator, comprit le premier Frendlorian dont les facultés mentales restaient quand même opérationnelles.
-On le forcerait à être de notre côté. Il voulait aider ses alliés envahisseurs ? Il serait obligé de prendre notre place au nord.
-Je devrais pour ça abandonner la moitié de mon royaume, grommela froidement Ben’Lor.

Le peuple de Syrarture était un des plus coriaces que Mel’Ermat connaissait. Ils avaient connu nombre de guerre et de catastrophes et pourtant ils reconstruisaient inlassablement.

-Ce ne serait que pour un temps, tu pourrais bouger tes populations vers Sal. Nous reprendrons les territoires plus tard.

Iri tiqua mais une paire de regard le fit taire. Il était temps de ne plus être égoïste.

-De toute manière, rappela Mel’Ermat, nous ne gagnerons pas cette guerre sans que nos populations participent au combat également. Ils seraient sinon dix fois plus nombreux que nous. Il faut que nous les préparions à devoir tout abandonner.
-Comment allons-nous faire les années suivantes ? s’inquiéta Egéa qui comprenait les tenants et les aboutissants. Les récoltes ?
-Ce que je sais, trancha Mel’Ermat, c’est que si nous ne nous unissons pas, il n’y aura pas d’années suivantes de toute manière.

Le silence se fit pesant.

-Donc je rassemble mes troupes et ma population puis réorganise les défenses sur une ligne verticale à l’ouest de mon royaume. Je passe par Sal où je me joins avec Iri puis nous aiderons Frendlorian à reprendre le contrôle total de l’Ostel. Là, nous continuons notre chemin pour rejoindre Sustor ?
-Même au pas de course, sans problème et sans combat, il faudrait plus d’un mois pour faire se trajet… rappela Iri.
-Il faudra faire encore plus vite, paniqua Democles, sinon nous tomberons avant que vous arriviez.
-Il nous faut un plan de secours, proposa Bernardian, au cas où nous n’arrivions pas à nous regrouper.
-Il faut évacuer le royaume de Sustor… se lança Egéa puisque personne n’osait le dire.
-Jamais ! protesta énergiquement Democles, son gros ventre rebondissant sous ses gestes brusques. Mon royaume ne sera pas conquis !
-Et que comptes-tu faire, hein ? s’énerva Ben’Lor. Sacrifiez un demi-million de personnes pour du pur chauvinisme ? Si vous restez vous battre vous serez exterminés jusqu’au dernier. Crois-tu que cela me fait plaisir d’abandonner les deux tiers de mon royaume aux monstres que l’on combat depuis des millénaires ? Non et pourtant, c’est ce qu’il doit être fait. Ce n’est pas une guerre classique, mets-toi ça dans le crâne. Si nous perdons, nous cesserons tous d’exister. Il n’y a pas de conquête, pas de rédition, nous gagnons ou nous perdons, c’est tout.

Le gros intendant déglutit à mesure que Ben’Lor s’était rapproché de lui et lui plantait le doigt sur le torse à chacune de ses remarques.

-Quels sont les limites temporelles pour nous regrouper ? Je veux dire au pire, où serons-nous si nous fuyons constamment devant eux ? s’interrogea Bernardian.

Frendlorian, qui était visiblement bon en calcul répondit pour lui tout en s’appuyant sur une canne qu’on lui avait faite.

-Les neiges tombent encore dans plusieurs mois, à condition que celles-ci soient précoces. D’ici là, ils seront au moins aux portes de mon royaume. C’est donc au minimum ici que nous allons nous regrouper.
-Il faut espérer ne pas en arriver là… se plaignit Mel’Ermat.

Effectivement, cela aurait voulu dire que le royaume de Mel était tombé.

-Au cas où, je dis bien, au cas où, continua Frendlorian. Je pense que nous devrions emporter tout ce qui est utilisable par l’ennemi. Nous avons de la chance que notre cher intendant Mel’Ermat ait déjà regroupé toute la nourriture de l’Empire en sécurité.

Mel’Ermat n’avait pas pensé à ça. Effectivement, le ravitaillement serait plus facile maintenant que tous les royaumes avaient vendu ses stocks au royaume de Mel.

-Il a raison, reprit Mel’Ermat enthousiaste malgré l’annonce qu’il faisait, nous devons tout prendre et ne rien laisser. Aucun champ, aucune maison, aucun outil. Tout doit disparaître. Si nous tenons jusqu’à l’hiver, ils vont mourir de faim. Nos ennemis doivent s’attendre à nous piller et à nous remplacer, que se passera-t-il s’il n’y a plus rien ?
-Tu envisages sérieusement de détruire ton propre royaume ?

Democles semblait franchement surpris. Il devrait se faire à l’idée car il serait sûrement le premier à devoir le faire.

-Je préfère ça que de laisser des gens s’emparer de l’Empire et de nous exterminer comme des animaux, avoua-t-il.

Il n’avait pas réfléchi en disant ça mais conclut que c’était sûrement vrai. Ca ne serait pas facile mais c’est ce qu’il faudrait faire.

-Nous pourrions passer par les grottes sous la Capitale pour gagner du temps, réfléchit Ben’Lor après le froid qui avait été jeté.
-Nous avons vu les Ombres, répondit Egéa. Je pense qu’il serait dangereux de revenir dans les environs tant que nous n’avons pas trouvé de solution.
-Bien, conclut Ben’Lor. Nous avons donc un plan. Maintenant, nous ne pourrons pas les affronter tant qu’ils seront aussi nombreux. Surtout s’il y a des créatures contre lesquelles nous ne pouvons pas lutter. Ils ont réussi à invoquer des Ombres dans l’Impériale, les Dieux seuls savent ce qu’ils nous réservent d’autres.
-Les Dieux, justement ! réagit Egéa. Nous pourrions les convoquer et leur demander de nous aider. Ils l’ont déjà fait par le passé !
-Bonne idée, dit Democles, ils ne laisseront sûrement pas l’Empire tomber sans rien faire.
-Donc les Dieux, ensuite ? les poussa à se creuser les méninges le guerrier.
-Les Quatre ? proposa Bernardian.
-Non, riposta Mel’Ermat. J’ai pu évoquer le sujet avec l’un d’entre eux qui m’a clairement dit qu’ils n’avaient pas encore pris partie malgré le fait que ceux de Terre soient parmi les envahisseurs.

Tous le regardèrent comme s’il venait d’un autre monde. D’accord peu avaient d’entretien avec les Quatre Races mais ce n’était pas aussi exceptionnel que ça !

-Bien, dommage, reprit Isidor. Les nains, les elfes, les centaures et les hommes-scorpions ?
-Il va falloir envoyer des ambassadeurs mais je n’ai peur qu’ils ne puissent pas être là à temps.
-Il n’y aurait bien que la prophétie pour nous sortir de là ! plaisanta Iri.

Il ne servait vraiment à rien, s’insurgea mentalement Mel’Ermat. En plus d’être lâche, il était vraiment inutile. Par contre, il était vrai qu’il mettait le doigt sur quelque chose.

-J’ai l’enfant, leur avoua-t-il.
-Comment ça tu as l’enfant ? demanda Ben’Lor en plissant les yeux.

Cette conversation ressemblait fortement à celle qui l’avait eu avec ses seigneurs. Les rôle étaient juste inversés…

-Certains de mes seigneurs prétendent, alors que je ne leur avais rien demandé, avoir mis la main sur l’enfant en question. Celui de la prophétie.

Mel’Ermat se dit qu’il était vraiment temps de la lire.

-Alors ça serait vrai ? se réjouit Iri. On a encore une chance ?
-Comment savoir que c’est l’enfant ? demanda plus pragmatique Bernardian.
-Quelqu’un sait la véritable version de cette prophétie ? J’en ai entendu plusieurs ! s’inquiéta Isidor.
-Où est-il ? chercha à savoir Democles.

Ils parlaient tous en même temps.

-Silence ! cria Ben’Lor.

Il cria si fort que tout l’entrepôt se tut et tous les soldats se tournèrent vers le groupe de dirigeants, étonnés que l’un d’entre eux ose s’emporter et rabroue les autres ainsi. Ils reprirent plus calmement.

-Je pense, commença Mel’Ermat en choisissant ses mots, que nous ne devons pas tout miser là-dessus. Ce ne reste qu’une légende et il se pourrait que ça soit faux.

Les autres soupirèrent. Beaucoup s’étaient mis à fonder des espoirs dessus.

-Qui ira sous la capitale ? s’inquiéta quand même Iri. Il y a des Ombres !

Mel’Ermat souhaitait vraiment, mais alors vraiment lire cette prophétie.

-Je connais quelques personnes pour ça, annonça Frendlorian. La Compagnie d’Argent.


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Tout petit passage avant la suite !

Des cris de protestation s’élevèrent et l’un d’entre eux en cracha sur le sol. Visiblement, il n’était pas le seul à ne pas les porter dans son cœur.

-Je sais qu’ils ne sont pas irréprochables, dit l’ancien Empereur toujours en appui sur une canne, mais ils sont fidèles à l’Empire et n’ont pas peur de grand-chose.
-Cela nous fera donc une escorte pour cet enfant, cela fait un problème de moins à régler.

Un nouveau venu fit son apparition dans la salle. Ils étaient même deux. Llis et un autre homme que Mel’Ermat eut du mal à reconnaître au premier abord poussé comme il l’était par l’espion.

-Je l’ai surpris à roder dans les environs…
-C’est donc toi qui a survécu, lança Mel’Ermat.

Les autres dirigeants se tournèrent vers lui pour avoir une explication.

-C’est un mage, ils étaient avec nous dans les égouts mais nous avons été séparés.
-Merci, fit l’autre lorsqu’il put se relever sans être remis au sol par Llis, j’ai bien cru que votre chien de garde allait en finir avec moi.

Mel’Ermat ne tenta pas de le rassurer. C’était mieux qu’il ne sente pas en sécurité ici.

-Que viens-tu faire ici ? l’interrogea Ben’Lor.
-J’ai appris pour ce qu’il se passait en ville et un secrétaire m’a envoyé vers vous, puisque je vous connaissais déjà. Mes collègues mages veulent juste que vous sachiez qu’ils ont conscience de la menace du sud et ils seront là le moment venu, voilà, c’est tout.
-C’est une bonne nouvelle, s’exclama Egéa.
-Ce n’est que leur devoir, lui rappela Mel’Ermat.

Le magicien fit mine de s’en aller mais Llis le repoussa face aux rois et aux intendants.

-Tu vas rester ici un petit moment, lui ordonna l’intendant de Mel. Pour notre propre sécurité, personne ne doit savoir que nous sommes là.

L’homme soupira, regarda Llis, Mel’Cari, les hommes autour de lui, puis partit s’asseoir dans un coin. Llis les rejoignit sans que personne ne s’intéresse à lui. Il avait vraiment le don de se rendre invisible.

-Et la cité technologique d’Arsonval d’ailleurs ? demanda Democles.
-Elle est en plein territoire Kator, impossible que des machines nous viennent de là…
-Je ne veux pas dire, lança Iri en reprenant depuis le début, mais la première étape ne serait pas de sortir de la ville ? Il nous manque le sceau de Regut, je vous rappelle…
-Plus maintenant, fit Llis en dépliant sa main devant tout le monde pour y montrer le talisman du roi.

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  • 2 semaines après...
Suite !

Chapitre 13

Il leur fallut deux jours de plus pour s’enfuir. Ils attendirent d’abord que le médecin diagnostique l’état de Mel’Placer. Celui-ci le trouva inquiétant mais sûrement hors de danger. Il lui fallait du repos, sûrement une semaine ou deux. Malheureusement ils n’avaient pas autant de temps à disposition. Le médecin leur dit sans ambages que le transporter était hors de question et que le roi ne ferait pas quelques kilomètres sans que cela n’aggrave sa situation. La décision fut alors prise de partir sans lui. Il était de toute manière à l’abri dans cette cache. Il lui fut laissé une note explicative sur les décisions que tous avaient prises. Une fois réveillé, il avait été décidé que Mel’Placer devrait les rejoindre au plus vite ou, s’il acceptait, gérer la Capitale après le départ de Regut pour son royaume. L’avantage de cette dernière solution serait de faire accélérer la participation des magiciens au conflit en libérant la ville de ses gêneurs.

Il fut aussi décidé de renvoyer certains des gardes du corps de Mel’Ermat à la villa. Autant de soldats disparus au même moment risquaient d’attirer l’attention. De plus, cela aurait obligé le groupe à se faire transporter de grandes quantités de nourriture jusqu’à la planque et ils auraient risqué une filature jusqu’à eux. De plus, cela ferait croire à Regut qu’ils n’étaient peut-être plus en ville. Llis était allé ouvrir la ville le soir même après que chaque roi et intendant aient fourni son sceau pour l’ouverture des portes. Leur plan marcha car, alors que les hommes de l’Empereur fouillaient les jours auparavant sans discontinuer toutes les habitations de l’Impériale, ceux-ci se firent moins nombreux et Mel’Ermat supposa qu’ils avaient été envoyés à leur poursuite dans les grottes sous la ville. Malheureusement pour eux, leur fuite n’était pas encore commencée et la troupe de dirigeants les laissa partir pourrait ensuite partir tranquillement derrière eux. Jamais ceux-là ne penseraient à regarder dans leur dos.

Il fut décidé de ne prendre qu’une troupe réduite de soldats pour le voyage afin de ne pas attirer l’attention. Si les soldats de chaque roi venaient subitement à manquer, Regut comprendrait le subterfuge et relancerait immédiatement des hommes à leur poursuite. Cela ne semblait être dangereux que sur la première centaine de kilomètres, région où chaque roi n’arriverait pas à recruter une escorte suffisante pour se protéger. Mel’Ermat et ses gardes devrait parcourir moins que ça. La première garnison de soldats alliée se trouverait à seulement cinquantaine de kilomètres de la sortie des grottes. Il espérait que le voyage se passerait sans anicroche.

Il fallut donc ces deux jours pour que l’ambiance en ville se fasse moins inquisitrice. Ils en profitèrent pour rassembler des vivres et tout le matériel dont ils auraient besoin pour le voyage. Chaque roi partait dans une direction différente ce qui faisait de ces moments les derniers instants pour s’organiser. Ils avaient beaucoup discuté autour de cartes pour décider de la façon dont ils allaient s’y prendre. Ils partirent de nuit, laissant Mel’Placer au soin de deux de ses propres gardes du corps. A la sortie l’attendait la Compagnie d’Argent. En effet, ceux-ci avaient accepté le rôle qu’on leur avait confié et devaient aller au royaume de Mel chercher l’enfant. Ils feraient le voyage avec Mel’Ermat qui allait en profiter pour garder un œil sur cette bande de canailles. A l’heure actuelle, elle se composait d’une vingtaine de membres de races différentes les unes des autres. Au plus fort moment de sa gloire, la troupe avait compté une cinquantaine de membres. Il y avait là cinq humains, deux orcs, trois nains, un elfe, un homme-scorpion, deux centaures, un kobold, deux changes-formes des îles occidentales, un mort-vivant et un semi-géant. Mel’Ermat les aurait tous faits exécuter. La majorité d’entre eux était des ennemis contre qui des guerres avaient été menés et les voilà tous unis sous une même bannière. L’intendant se demandait vraiment comme le chef de cette troupe maintenait une cohésion. Pour la peine, l’intendant leur confia le mage de la lumière qui avait survécu aux Ombres. Il n’allait pas le renvoyer auprès de ses confrères qui allaient encore le mettre sur la touche. Mel’Ermat savait maintenant comment l’appeler puisqu’il répondait au nom de Nestor.

L’insurrection en ville commença au milieu de la nuit. Chaque roi et intendant avaient donné des ordres par missive aux commandants de leurs troupes pour créer du raffut en ville. Les dirigeants se souhaitèrent bonne chance et rendez-vous fut pris au plus tôt pour rejoindre Erno en Sustor. On notait de grandes flammes en ville qui n’étaient pour une fois pas dues au système de protection de ceux du Feu. Quand Mel’Ermat, Mel’Cari, Mel’Felic, Mel’Flo et la Compagnie d’Argent arrivèrent à la porte sud-ouest, ils la trouvèrent déserte. Dans l’ombre des tunnels attendait une silhouette reconnaissable entre mille : un Guide. Ils avaient le don de se trouver là où on avait besoin d’eux. Mel’Ermat regretta que cela ne s’applique pas à d’autres personnes…

Comme à l’aller, ils mirent deux jours pour sortir des cavernes. Le trajet fut plutôt silencieux, du moins pour les quatre de Mel. La Compagnie d’Argent faisait un boucan monstre mais se tenait loin en retrait d’eux si bien qu’il était impossible de savoir ce qu’ils se racontaient. Ils avaient bien compris que Mel’Ermat ne les tenait pas dans leur cœur. A la sortie des grottes, ils tombèrent sur une paire de soldats de Regut qui avaient été laissés là pour couvrir leur arrière. L’un tenta de s’enfuir tandis que l’autre tenta de retenir la troupe mais cela ne fonctionna pas car tous deux furent facilement mis hors d’état de nuire. Ils décidèrent de prendre la direction de la ville où ils avaient été attaqués à l’aller plutôt que de tenter de redescendre La Vive en bateau. Ils étaient sûrs que la première partie de la rivière était surveillé et il faudrait donc embarquer plus loin. De plus, se rendre jusqu’à cette ville leur permettrait de continuer de profiter de la protection de la compagnie de mercenaires et de recruter sur place de nouveaux soldats. Une fois chose faite et sans nouvelle des troupes qui les devançaient, ils se séparèrent là. La Compagnie prit la direction du Nord en direction de la ville de Capucin pour aller sécuriser l’enfant grâce à un sauf-conduit que leur fit Mel’Ermat. Ils devaient ensuite l’emmener faire ce qu’il avait à faire. Mel’Ermat prendrait quant à lui l’ouest puis au sud pour rejoindre le comptoir qui s’était créé après la collision des navires et où ils avaient probablement été aussi attaqués.

Mel’Ermat fut surpris de voir trois jours plus tard, à destination, qu’une véritable ville s’était créée. Les bâtiments de bois étaient devenus de pierre, on notait là des auberges, des maisons, des offices et énormément de magasins. La rivière avait due être longue à dégager pour que les gens s’installent finalement ici définitivement… Les quatre hommes choisirent une des trois tavernes de la ville. Ils se firent discrets et ne choisirent qu’une chambre pour eux tous. La milice locale fut recrutée afin qu’avec d’autres soldats, ils forment un anneau de protection. A leur réveil, Mel’Cari n’était plus là. Ils le retrouvèrent une heure plus tard en train de négocier un passage sur un fin navire de transport. Cela fut facile puisque le capitaine n’avait rien de mieux à faire. Ils mirent donc une semaine pour rejoindre Mel et Mel’Ermat ne fut jamais autant soulagé d’être de retour malgré tout ce qu’il y avait à faire…



Mel’Ermat était à l’heure actuelle dans la salle du trône. Il avait réussi à faire repousser à plus tard toutes les personnes qui avaient patienté pourtant plus d’un mois et demi pour lui présenter des doléances. Le général Mel’Surika finit par le rejoindre et l’intendant arrêta de faire les cent pas sur le tapis de l’allée centrale. L’homme parut d’abord satisfait de voir l’intendant puis se fit inquiet quand l’autre lui fit de grands signes afin qu’il se dépêche. Ils se dirigèrent dans un petit bureau se situant derrière le trône de Mel’Placer.


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-= Inxi =- Modifié par Inxi-Huinzi
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  • 2 semaines après...
Voici venu le temps des cathédrales !! Mais non, juste la suite !


Ce bureau mesurait cinq mètre sur trois et ne se composait que d’une table et d’une demi-douzaine de chaises.

-Mel’Placer n’est pas avec vous ? s’enquit l’homme.
-Non, nous l’avons laissé blessé à la Capitale. Rien de grave, le rassura immédiatement Mel’Ermat. Il lui faut juste du temps et il est probable qu’il reste sur place pour gérer les choses. C’est à nous de prendre en main la situation. Où en sommes-nous ?
-Les préparatifs avancent comme vous nous l’avez ordonné, dit le général. Je peux vous poser une question d’ailleurs ? D’où vous l’avez sorti votre messager ? J’ai vraiment cru qu’il s’agissait d’une entourloupe.
-Ce n’est pas vraiment un de mes hommes, avoua Mel’Ermat en se demandant qui son espion avait contacté avec les pierres de communication. C’est l’homme d’un de mes hommes. L’important est que le message soit arrivé.
-Alors c’est donc vrai, nous partons en guerre ?
-En effet, les détails ?
-Les forgerons tournent à plein régime et tous sont mis à contribution. On arrive à équiper une centaine de soldats supplémentaires par jour.
-C’est insuffisant, décréta l’intendant. Mettez tout ce qu’il faut à leur disposition, hommes ou fournitures mais il faut que la cadence augmente.
-Ca me paraît guère possible, commença le général.
-Trouvez une solution ! le coupa net Mel’Ermat. Nous n’allons pas emmener que nos soldats à la guerre, il faudra que tous soient équipés.
-Comment ça ? s’inquiéta le général.

Mel’Ermat lui résuma la situation.

-Mon Seigneur, je ne veux pas mettre en doute vos paroles mais il n’existe aucune armée aussi nombreuse ! Et encore moins qui feraient se battre ses civils à ses côtés…
-J’ai bien peur que ça ne soit la vérité, se désola Mel’Ermat. Où sont nos troupes pour l’instant ?
-Stationnées à la frontière est, comme vous l’avez demandé.
-Très bien, Il faut faire passer des ordres et les mettre en route en direction de la frontière entre Sustor et Terra. Marchez sur l’est, les serviteurs d’Egéa viendront sûrement à notre rencontre pour nous organiser. Sinon, il faut que, dès aujourd’hui, tous les habitants du royaume convergent vers nous. Seuls les enfants de moins de quatorze ans et les vieilles femmes ne seront pas recrutées. Lorsque les soldats iront chercher les troupes, tout ce qui pourra être utilisé pour mener à bien la guerre devra être réquisitionné. Libre à ceux qui ne sont pas emmener de rester dans leur village mais nous offrons l’hospitalité à la Capitale au cas où ils ne pensent ne pas pouvoir survivre. Ne laissez que de quoi tenir l’hiver. Dites leur aussi de se méfier des voleurs, certains s’enfuiront avant que vous arriviez, général, et nous ne pourrons pas empêcher leurs méfaits. Ah oui, et laissez tomber les îles occidentales, nous perdrions trop de temps.

Mel’Ermat avait en fait un autre plan pour ces îles. Un plan qu’il ne pouvait confier à personne.

-Peu vont l’accepter… dit Mel’Surika en reprenant la conversation. Ca ne s’est jamais vu…
-On est dans une situation hors du commun, lui fit comprendre Mel’Ermat. A temps désespéré, mesures désespérées.
-Et pour les récalcitrants ?

Mel’Ermat avait déjà réfléchi à la situation.

-Prenez les mesures adéquates.

L’homme hocha la tête, il venait de recevoir un permis de tuer.

-Pour ce qui est des vivres ?
-Nous avons continué de recevoir de la nourriture encore pendant un mois après que je vous ai envoyés la lettre. Nous ne savons plus quoi en faire et nous en avons stocké un peu partout dans le royaume. Comme vous nous l’avez demandé, la majorité de la nourriture de l’Empire se situe plutôt dans les villes du nord sous bonne garde.
-Très bien, acquiesça l’intendant. Pour ce qui est des recrues, elles doivent être emmenées à la frontière avec les autres légions. Là, il faudra les former au plus vite.
-Chez les tireurs, proposa le général. Ils seront plus utiles avec un arc qu’avec une épée. Impossible de leur apprendre les rudiments du combat en régiment en si peu de temps…
-Mettez quand même quelques novices dans les régiments de professionnels, ils apprendront au contact des autres. Autre chose, se souvint d’un coup l’intendant en se redressant sur chaise, il y a des soldats de l’Empereur sur notre territoire, ce sont des hommes que Regut a promu, je veux que si jamais quelqu’un tombe dessus que vous les tuez.
-Compris, Seigneur, ça sera avec plaisir. Que fais-je avec tous ceux qui désirent s’entretenir avec vous ?
-Si cela a un rapport avec le conflit, envoyez-les moi sinon, dites-leur de m’écrire. La guerre leur donnera bientôt autre chose à penser. Bien, je vais rédiger les décrets pour lever nos armées, préparez les troupes car elles auront du chemin à parcourir.
-Au fait, vous ne seriez pas pourquoi tous ces satanés prophètes sont partis vers Capucin ?

Mel’Ermat fit mine de réfléchir et le regarda dans les yeux. Il ne pouvait pas lui dire pour la prophétie sans passer pour un fou.

-Pas la moindre idée… mentit Mel’Ermat.

Il haussa les épaules, déçu de ne pas avoir de réponse à sa question.

-De combien de temps, disposons-nous ? chercha-t-il à savoir.

Mel’Ermat fit le calcul dans sa tête.

-Ils atteindront Erno dans trois semaines, quatre si nous avons de la chance…
-Il nous faut au moins trois semaines pour rejoindre la frontière avec l’Ostel ! s’exclama l’autre.
-Je sais, fit l’intendant… Je sais…



Après le départ de son état-major militaire réduit, Mel’Ermat se dirigea vers sa maison. A l’entrée, deux gardes lui firent un salut.

-Il n’y a plus personne ? interrogea-t-il les deux vétérans.

Ceux-ci restèrent au garde-à-vous, professionnels jusqu’au bout des ongles.

-Non, Seigneur ! Ils sont tous partis selon vos exigences voilà une semaine.
-Très bien, fit Mel’Ermat. J’ai une mission pour vous. Je veux que vous condamniez la maison et que vous partiez les rejoindre au plus tôt, tuez des montures s’il le faut. Mon fils et ma femme doivent se rendre sur les îles occidentales. Ne donnez pas de raison et peu importe ce qu’il se passe dans les semaines à venir, ils doivent y rester. Si ce n’est pas le cas, vous le payerez. N’oubliez pas, vous les garderez sur place !

La menace ne pouvait pas être plus claire.

-Oui, Seigneur ! saluèrent-ils à l’unisson.

Mel’Ermat soupira. C’était égoïste mais il ne voulait pas que sa femme ni son fils ne participent aux combats. Cela ne lui posait pas de problème d’envoyer les familles des autres mourir mais la sienne… Non ! Il ne pouvait pas. Sur ces îles, que l’intendant avait fait exprès de laisser hors du recrutement, ils seraient en sécurité. Les gardes n’attendirent pas d’être congédiés pour commencer à fermer les lieux. Mel’Ermat n’avait pas envie de dormir là. Il n’était jamais rentré sans que sa femme soit également absente, ou très rarement. Il allait de plus être vraiment seul puisque les serviteurs étaient partis également. Pas besoin d’ajouter la solitude aux fardeaux qu’il portait déjà sur ses épaules. Il réajusta sa tunique et retourna au palais. Il lui fallait un état de leurs fournitures. Les productions locales devaient être spécialisées dans ce qu’il manquait. Ils devaient aussi étudier les lignes de ravitaillement ainsi que l’hypothétique construction de défense dans le cas où les combats parviendraient jusque là. Il soupira. Il avait de longues journées devant lui en perspective.


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  • 3 semaines après...
Voici la suite s'il me reste encore des lecteurs :P Désolé pour le retard, je viens de m'installer aux USA et ça m'a pris du temps !

Deux semaines avaient passé. Deux semaines pour que Mel’Ermat arrive au campement de son armée à la frontière de Sustor, à l’ouest d’Erno. Il ne pouvait être que content puisque ce fut aussi le moment où il revit le soleil pour la première fois du voyage. Deux semaines de pluie ininterrompues, à patauger dans la boue et a essayé de trouver des passages que l’eau n’avait pas coupé. L’intendant n’avait plus vu de camps militaires de cette taille depuis les guerres dans lesquelles il avait servies au nord des années de ça auparavant. Le camp s’étendait sur plusieurs kilomètres carrés et semblait bien organisé. On y notait trois parties principales : les zones d’entraînement, les campements, qui se divisaient en une partie civile et militaire, et une dernière partie communautaire dont principalement les cuisines, l’hôpital et les forgerons.

Sur place, c’était le général Mel’Lissandro que Mel’Placer avait envoyé surveillé les troubles frontaliers. Depuis lors, l’eau avait coulé sous les ponts et la mission du gradé était tout autre. Mel’Surika était resté à la capitale pour gérer le flux de soldats et de conscrits qui allaient venir jusqu’à eux. Ce dernier ne les rejoindrait au plus tôt que deux semaines plus tard. Mel’Ermat avait fait le déplacement avec près de vingt milles soldats supplémentaires. Sachant que cinquante mille des siens étaient sur place, cela portait, avec les civils déjà présents, leur nombre à deux cents mille personnes. C’était ridicule face à une armée cinquante fois plus nombreuse mais Mel’Ermat avait foi, cela n’était que le début. Ils avaient près de cinq cents mille combattants au nord, deux cents mille soldats chez Iri pour la même chose chez Frendlorian. Cela ferait près d’un million de combattants professionnels qui devaient arriver en renfort. En y rajoutant les civils, cela portait leur nombre à cinq millions de personnes. Jamais cette terre n’aura rassemblé autant de belligérants et pourtant, même en prenant les rapports les plus optimistes, ils étaient toujours à un contre deux…

Quant à Egéa, il avait été plus rapide et avait déjà commencé à rassembler ses troupes. Son camp se situait à cinquante kilomètres au sud du sien. Il avait été décidé de se mettre ainsi afin qu’une partie de l’armée adverse ne puisse pas bifurquer vers l’ouest sans qu’ils ne le remarquent. Son armée à lui se composait de deux cents cinquante mille militaires pour deux fois plus de civils. Mel était l’un des plus petits royaumes en taille et serait sûrement le plus petit contributeur en effectif. Democles avait déjà perdu tout le sud de son royaume et bien que cela soit minime, ce serait toujours ça de moins à leur côté. Ses effectifs étaient environ égaux à ceux d’Egéa. La difficulté de la chose était de pouvoir recenser tout ce monde. Cela portait la région à près d’un million de personnes et on ne pouvait englober ce que cela représentait d’un seul coup d’œil.

A égale distance des trois forces alliées, avait été établi un camp de commandement où les trois intendants devaient se retrouver pour prendre les décisions. En effet, ils avaient d’abord choisi la Capitale Erno mais devant l’affluence de la population ils avaient préféré s’en éloigner. Democles avait organisé sa défense de façon sommaire : tous ceux qui savaient se battre étaient à l’abri derrière les murailles. Le reste avait établi un campement géant au nord de la ville. L’intérieur de la capitale de Sustor était devenu un camp militaire gigantesque. On optimisait chaque intersection, on construisait, on criait, on se battait, on déplaçait. Bref, un vrai capharnaüm. Les maisons étaient vidées et les meubles avaient été entassés dans la rue afin de servir de murs pour ne laisser que des artères facilement défendables. Toute la ferraille était également rassemblée pour être fondue et reforgée en armes, en armure ou tout autre objet qui allait pouvoir servir. Les canons étaient installés sur les murs, la poix était stockée à portée de main, les carquois de flèches décoraient les créneaux. La guerre était proche.

Les ennemis étaient à deux semaines au sud de la Capitale. Il ne leur restait que cent kilomètres à parcourir. Cela paraissait long mais également très court. Les représentants officiels n’avaient pas reçu des nouvelles du nord et ne savaient pas comment se passait la pacification du royaume de l’Ostel. Il aurait fallu que Llis soit là pour lui confier la mission de le tenir au courant. Pourtant, depuis leur départ de la Capitale, Mel’Ermat ne l’avait pas revu. Il n’avait pas non plus de nouvelle de l’enfant et de la Compagnie d’Argent ce qui l’inquiétait encore plus. Il se rassura néanmoins. Pas de nouvelle, bonne nouvelle, disait-on. Il aurait quand même préféré en avoir… Mel’Ermat faisait le tour du camp. A part des hauts gradés et quelques soldats, personne ne savait qui il était. C’était en soi une bonne chose puisqu’on ne le dérangeait pas, ni le regardait avec des yeux apeurés comme s’il était responsable de la situation. Il pouvait marcher librement dans le camp et prendre la température de la situation.

Il passa au travers de la zone de construction. A l’heure actuelle, on préparait surtout beaucoup d’engins de transport pour la logistique. Effectivement, si bataille rangée il y avait, ils devraient être prêts à transporter tout l’équipement nécessaire d’un lieu à l’autre. On voyait donc une armée de chariots être stockée dans une plaine à l’ouest du camp. A l’exact endroit où ils rasaient les arbres pour y récupérer le bois. Mel’Ermat se demandait s’ils auraient assez de chevaux pour tirer tout ça. Les canons aussi, après avoir été démontés, étaient remontés sur place. Des carrosses blindés étaient également préparés. Cela ressemblait à un carrosse classique sauf que tous les côtés étaient doublés par le plus pur des aciers. Et il était impossible d’ouvrir cette boite si ce n’était que de l’intérieur. On y notait plusieurs meurtrières qui permettaient à l’équipage de faire feu. De façon plus classique, les balistes et les catapultes étaient aussi mises dans un coin. Cela était moins efficace que les canons mais les munitions étaient illimitées. Quelques civils étaient également là et taillaient des lances dans les chutes du bois des arbres. Mel’Ermat était sûr que tous ne seraient pas équipés d’ici la bataille, il fallait donc trouver des armes alternatives et c’était ce qu’ils avaient de mieux à proposer. Quand les renforts arriveront, il leur faudrait mettre la main à la pâte pour que tous soient prêts.

La partie du camp suivante était plus calme puisqu’essentiellement composée de femmes. Des couturières, pour être exact, qui avaient en charge la création de toutes sortes de linges. En effet, il leur fallait préparer les nouvelles tentes, fabriquer des draps ou encore préparer les affaires chaudes si la campagne perdurait en hiver. Elles étaient installées par groupe d’une dizaine en cercle et agitaient leurs adroites mains dans des mouvements qu’elles faisaient sans y penser. Venait ensuite dans la continuité le traitement des linges et des bains. A cette heure-ci de la journée, il n’y avait personne mis à part quelques femmes qui déplaçaient des grandes panières de linges blancs. Au-delà, on pouvait voir les grandes tentes de l’hôpital où il n’y avait pas grand monde. Seuls venaient ici les malheureuses victimes d’accident de la vie quotidienne. Bientôt cela changerait.

Mel’Ermat repartit vers l’est et tomba dans la chaleur étouffante des forges. Il ne traina pas. Le bruit des marteaux battant le fer aurait rendu n’importe qui sourd. Pourtant, sérieux et imperturbables, les forgerons frappaient sans répit pendant que les apprentis géraient l’approvisionnement en métal et toutes les tâches faciles que l’artisan pouvait déléguer. Ils semblaient pourtant fatigués et on les faisait travailler près de quatorze heures par jour. Sous leur tablier, les corps suintant de sueur tenaient néanmoins le coup. Visiblement, chacun avait sa spécialité et ne fabriquait qu’une seule chose. Certains faisaient des armes, d’autres des fers à cheval, certains des outils, d’autres des pointes de flèches, là-bas des armures et de l’autre côté des plaques pour les carrosses blindés.

La partie du camp suivante était plus petite, faute à Regut. Avaient pris quartier ici le peu d’ingénieurs d’Arsonval qui n’avaient pas subi le blocus du roi de Kator et ceux qui avaient réussi à passer au travers. Sur le millier de talents qu’il y avait là-bas, ils n’étaient que dix. Mais ils semblaient plus que jamais motivés, impatients de pouvoir se venger de celui qui avait assiégé leur bastion dans les montagnes. Avec les moyens du bord, ils essayaient de recréer des prototypes ou des objets qu’ils avaient pu inventer dans la cité. Aussi étonnant que cela paraisse, il y avait également des musiciens et des mages parmi eux. Finalement, Mel’Ermat se dit que tous les domaines étaient révolutionnés et non pas seulement les aspects technologiques dont il était friand.

Mel’Ermat s’arrêta avant d’aller plus loin. Après se situait le côté des moines, des Dieux et de leurs fidèles. Ca avait été l’idée d’Egéa de les accueillir ici aussi. L’intendant aurait préféré qu’ils restent avec la population de Terra qui les vénérait. Ici, dans le royaume de Mel, ils ne jouissaient que d’une piètre considération. Malgré cela, le fait que la guerre arrivait et que tous pouvaient mourir avait poussé les gens dans leur bras et les prêtes, autant que les moines, passaient leur journée à faire des offices pour les fidèles. Egéa avait essayé de contacter les Dieux mais cela était resté sans succès. Mel’Ermat était sûr que ceux-ci les avaient abandonnés. Egéa nuança en pensant plus que ceux-ci leur donnaient une leçon. Qu’on ne prie pas les Dieux uniquement quand on a besoin d’eux. Democles s’était même demandé si ce n’était pas ces Dieux qui avaient poussé les ennemis à les attaquer. Quelle autre raison sinon divine aurait pu pousser des millions de personne à attaquer un Empire qui n’était pas le leur ? Egéa ne pensait pas cela possible mais il ne l’assura pas. Qui savait ce que pensaient les Dieux ? Après tout, des Humains restaient des Humains. Au goût de Mel’Ermat, cela faisait un peu trop écho à ce que le membre du peuple de l’Air lui avait dit.

L’intendant prit donc un autre chemin en passant au travers des forges vers de sommaires habitations où des gens étaient rassemblés autour d’un prophète. Mel’Ermat écouta attentivement. Il savait que la prophétie était à propos de ce garçon trouvant une arme et chassant un grand mal de ces terres. Pourtant le discours avait changé. Il paraissait sûr que l’enfant avait été trouvé et qu’ils marchaient pour leur rédemption à tous. La dizaine de personnes agenouillées au sol avait les mains jointes au dessus de leur tête et paraissait croire avec force à ce qu’on leur disait. Mel’Ermat avait donné l’ordre à ses généraux de les laisser faire. Ils avaient eu un long débat à ce sujet et il avait été convenu que ce qu’ils déclenchaient allait plutôt dans leur sens. En effet, la principale crainte avec les civils était qu’au moment de se battre, on ne savait pas comment ils réagiraient. Ils pourraient se laisser massacrer, morts de peur, ils pourraient tourner les talons et s’enfuir ou se battre courageusement. Le fait que les prophètes prêchent pour le combat, même si cela tournait la population en fanatiques, les arrangeait bien. Mel’Ermat avait même proposé de laisser courir les rumeurs sur les exactions des ennemis. Qui tenterait de fuir ou demanderait pitié lorsqu’on savait que l’ennemi s’en moquait ? Mieux valait se battre et mourir pour la victoire que fuir et de toute manière mourir comme un lâche. Visiblement, cela marchait car Mel’Ermat avait entendu des gens avouer qu’ils avaient peur non pas de mourir mais plutôt peur de perdre tout ce qu’ils avaient.

En attendant de pouvoir être sûr de l’état psychologique des troupes, des patrouilles avaient été mises tout autour du camp afin d’éviter que certains ne désertent. Malgré cela, des dizaines de personnes disparaissaient quand même tous les jours. Un général s’était occupé d’envoyer ses gradés les plus psychologues au sein des civils pour les préparer moralement et qu’il garde en tête l’enjeu de la situation. Ce dernier était plutôt simple : s’ils perdaient, peu importe de survivre ou non, leur destin serait le même : abattus en troupeaux par les envahisseurs. Les réactions étaient alors diverses. Des larmes pour les plus sensibles qui répétaient qu’ils ne voulaient pas mourir, de la résignation pour les autres qui ne voyaient pas d’autres issues, de la fierté pour les plus jeunes qui voulaient faire leurs preuves ou de l’impatience pour certains qui voulaient juste que tout ça se termine, d’une manière ou d’une autre.

Il était non loin des champs d’entraînement et s’y dirigea. A l’heure actuelle, c’était au tour des militaires de formation de l’occuper. Plus particulièrement, les chevaliers du royaume de Mel. Ceux-ci faisaient des allers-retours pour tester la rapidité du changement de formation. Ils passaient de la ligne, au fer de lance, en tirailleurs ou par escouades. Au loin, on pouvait observer des civils s’entraîner au maniement des arcs. Vu le nombre de flèches plantées dans les cibles, ce n’était pas encore ce qu’ils réussissaient de mieux. Les généraux avaient également décidé de les instruire à la base du combat au corps à corps. Mel’Ermat tenait à les éloigner au maximum des lignes ennemies où ils ne contrôleraient plus leurs réactions. Les généraux le convainquirent de la nécessité de leur inculquer les bases car, quoiqu’il en soit, ils finiraient par avoir à se battre.

-Seigneur ! l’interpella un soldat dans son dos.


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Voici la suite s'il me reste encore des lecteurs :P Désolé pour le retard, je viens de m'installer aux USA et ça m'a pris du temps !

Deux semaines avaient passé. Deux semaines pour que Mel’Ermat arrive au campement de son armée à la frontière de Sustor, à l’ouest d’Erno. Il ne pouvait être que content puisque ce fut aussi le moment où il revit le soleil pour la première fois du voyage. Deux semaines de pluie ininterrompues, à patauger dans la boue et a essayé de trouver des passages que l’eau n’avait pas coupé. L’intendant n’avait plus vu de camps militaires de cette taille depuis les guerres dans lesquelles il avait servies au nord des années de ça auparavant. Le camp s’étendait sur plusieurs kilomètres carrés et semblait bien organisé. On y notait trois parties principales : les zones d’entraînement, les campements, qui se divisaient en une partie civile et militaire, et une dernière partie communautaire dont principalement les cuisines, l’hôpital et les forgerons.

Sur place, c’était le général Mel’Lissandro que Mel’Placer avait envoyé surveillé les troubles frontaliers. Depuis lors, l’eau avait coulé sous les ponts et la mission du gradé était tout autre. Mel’Surika était resté à la capitale pour gérer le flux de soldats et de conscrits qui allaient venir jusqu’à eux. Ce dernier ne les rejoindrait au plus tôt que deux semaines plus tard. Mel’Ermat avait fait le déplacement avec près de vingt milles soldats supplémentaires. Sachant que cinquante mille des siens étaient sur place, cela portait, avec les civils déjà présents, leur nombre à deux cents mille personnes. C’était ridicule face à une armée cinquante fois plus nombreuse mais Mel’Ermat avait foi, cela n’était que le début. Ils avaient près de cinq cents mille combattants au nord, deux cents mille soldats chez Iri pour la même chose chez Frendlorian. Cela ferait près d’un million de combattants professionnels qui devaient arriver en renfort. En y rajoutant les civils, cela portait leur nombre à cinq millions de personnes. Jamais cette terre n’aura rassemblé autant de belligérants et pourtant, même en prenant les rapports les plus optimistes, ils étaient toujours à un contre deux…

Quant à Egéa, il avait été plus rapide et avait déjà commencé à rassembler ses troupes. Son camp se situait à cinquante kilomètres au sud du sien. Il avait été décidé de se mettre ainsi afin qu’une partie de l’armée adverse ne puisse pas bifurquer vers l’ouest sans qu’ils ne le remarquent. Son armée à lui se composait de deux cents cinquante mille militaires pour deux fois plus de civils. Mel était l’un des plus petits royaumes en taille et serait sûrement le plus petit contributeur en effectif. Democles avait déjà perdu tout le sud de son royaume et bien que cela soit minime, ce serait toujours ça de moins à leur côté. Ses effectifs étaient environ égaux à ceux d’Egéa. La difficulté de la chose était de pouvoir recenser tout ce monde. Cela portait la région à près d’un million de personnes et on ne pouvait englober ce que cela représentait d’un seul coup d’œil.

A égale distance des trois forces alliées, avait été établi un camp de commandement où les trois intendants devaient se retrouver pour prendre les décisions. En effet, ils avaient d’abord choisi la Capitale Erno mais devant l’affluence de la population ils avaient préféré s’en éloigner. Democles avait organisé sa défense de façon sommaire : tous ceux qui savaient se battre étaient à l’abri derrière les murailles. Le reste avait établi un campement géant au nord de la ville. L’intérieur de la capitale de Sustor était devenu un camp militaire gigantesque. On optimisait chaque intersection, on construisait, on criait, on se battait, on déplaçait. Bref, un vrai capharnaüm. Les maisons étaient vidées et les meubles avaient été entassés dans la rue afin de servir de murs pour ne laisser que des artères facilement défendables. Toute la ferraille était également rassemblée pour être fondue et reforgée en armes, en armure ou tout autre objet qui allait pouvoir servir. Les canons étaient installés sur les murs, la poix était stockée à portée de main, les carquois de flèches décoraient les créneaux. La guerre était proche.

Les ennemis étaient à deux semaines au sud de la Capitale. Il ne leur restait que cent kilomètres à parcourir. Cela paraissait long mais également très court. Les représentants officiels n’avaient pas reçu des nouvelles du nord et ne savaient pas comment se passait la pacification du royaume de l’Ostel. Il aurait fallu que Llis soit là pour lui confier la mission de le tenir au courant. Pourtant, depuis leur départ de la Capitale, Mel’Ermat ne l’avait pas revu. Il n’avait pas non plus de nouvelle de l’enfant et de la Compagnie d’Argent ce qui l’inquiétait encore plus. Il se rassura néanmoins. Pas de nouvelle, bonne nouvelle, disait-on. Il aurait quand même préféré en avoir… Mel’Ermat faisait le tour du camp. A part des hauts gradés et quelques soldats, personne ne savait qui il était. C’était en soi une bonne chose puisqu’on ne le dérangeait pas, ni le regardait avec des yeux apeurés comme s’il était responsable de la situation. Il pouvait marcher librement dans le camp et prendre la température de la situation.

Il passa au travers de la zone de construction. A l’heure actuelle, on préparait surtout beaucoup d’engins de transport pour la logistique. Effectivement, si bataille rangée il y avait, ils devraient être prêts à transporter tout l’équipement nécessaire d’un lieu à l’autre. On voyait donc une armée de chariots être stockée dans une plaine à l’ouest du camp. A l’exact endroit où ils rasaient les arbres pour y récupérer le bois. Mel’Ermat se demandait s’ils auraient assez de chevaux pour tirer tout ça. Les canons aussi, après avoir été démontés, étaient remontés sur place. Des carrosses blindés étaient également préparés. Cela ressemblait à un carrosse classique sauf que tous les côtés étaient doublés par le plus pur des aciers. Et il était impossible d’ouvrir cette boite si ce n’était que de l’intérieur. On y notait plusieurs meurtrières qui permettaient à l’équipage de faire feu. De façon plus classique, les balistes et les catapultes étaient aussi mises dans un coin. Cela était moins efficace que les canons mais les munitions étaient illimitées. Quelques civils étaient également là et taillaient des lances dans les chutes du bois des arbres. Mel’Ermat était sûr que tous ne seraient pas équipés d’ici la bataille, il fallait donc trouver des armes alternatives et c’était ce qu’ils avaient de mieux à proposer. Quand les renforts arriveront, il leur faudrait mettre la main à la pâte pour que tous soient prêts.

La partie du camp suivante était plus calme puisqu’essentiellement composée de femmes. Des couturières, pour être exact, qui avaient en charge la création de toutes sortes de linges. En effet, il leur fallait préparer les nouvelles tentes, fabriquer des draps ou encore préparer les affaires chaudes si la campagne perdurait en hiver. Elles étaient installées par groupe d’une dizaine en cercle et agitaient leurs adroites mains dans des mouvements qu’elles faisaient sans y penser. Venait ensuite dans la continuité le traitement des linges et des bains. A cette heure-ci de la journée, il n’y avait personne mis à part quelques femmes qui déplaçaient des grandes panières de linges blancs. Au-delà, on pouvait voir les grandes tentes de l’hôpital où il n’y avait pas grand monde. Seuls venaient ici les malheureuses victimes d’accident de la vie quotidienne. Bientôt cela changerait.

Mel’Ermat repartit vers l’est et tomba dans la chaleur étouffante des forges. Il ne traina pas. Le bruit des marteaux battant le fer aurait rendu n’importe qui sourd. Pourtant, sérieux et imperturbables, les forgerons frappaient sans répit pendant que les apprentis géraient l’approvisionnement en métal et toutes les tâches faciles que l’artisan pouvait déléguer. Ils semblaient pourtant fatigués et on les faisait travailler près de quatorze heures par jour. Sous leur tablier, les corps suintant de sueur tenaient néanmoins le coup. Visiblement, chacun avait sa spécialité et ne fabriquait qu’une seule chose. Certains faisaient des armes, d’autres des fers à cheval, certains des outils, d’autres des pointes de flèches, là-bas des armures et de l’autre côté des plaques pour les carrosses blindés.

La partie du camp suivante était plus petite, faute à Regut. Avaient pris quartier ici le peu d’ingénieurs d’Arsonval qui n’avaient pas subi le blocus du roi de Kator et ceux qui avaient réussi à passer au travers. Sur le millier de talents qu’il y avait là-bas, ils n’étaient que dix. Mais ils semblaient plus que jamais motivés, impatients de pouvoir se venger de celui qui avait assiégé leur bastion dans les montagnes. Avec les moyens du bord, ils essayaient de recréer des prototypes ou des objets qu’ils avaient pu inventer dans la cité. Aussi étonnant que cela paraisse, il y avait également des musiciens et des mages parmi eux. Finalement, Mel’Ermat se dit que tous les domaines étaient révolutionnés et non pas seulement les aspects technologiques dont il était friand.

Mel’Ermat s’arrêta avant d’aller plus loin. Après se situait le côté des moines, des Dieux et de leurs fidèles. Ca avait été l’idée d’Egéa de les accueillir ici aussi. L’intendant aurait préféré qu’ils restent avec la population de Terra qui les vénérait. Ici, dans le royaume de Mel, ils ne jouissaient que d’une piètre considération. Malgré cela, le fait que la guerre arrivait et que tous pouvaient mourir avait poussé les gens dans leur bras et les prêtes, autant que les moines, passaient leur journée à faire des offices pour les fidèles. Egéa avait essayé de contacter les Dieux mais cela était resté sans succès. Mel’Ermat était sûr que ceux-ci les avaient abandonnés. Egéa nuança en pensant plus que ceux-ci leur donnaient une leçon. Qu’on ne prie pas les Dieux uniquement quand on a besoin d’eux. Democles s’était même demandé si ce n’était pas ces Dieux qui avaient poussé les ennemis à les attaquer. Quelle autre raison sinon divine aurait pu pousser des millions de personne à attaquer un Empire qui n’était pas le leur ? Egéa ne pensait pas cela possible mais il ne l’assura pas. Qui savait ce que pensaient les Dieux ? Après tout, des Humains restaient des Humains. Au goût de Mel’Ermat, cela faisait un peu trop écho à ce que le membre du peuple de l’Air lui avait dit.

L’intendant prit donc un autre chemin en passant au travers des forges vers de sommaires habitations où des gens étaient rassemblés autour d’un prophète. Mel’Ermat écouta attentivement. Il savait que la prophétie était à propos de ce garçon trouvant une arme et chassant un grand mal de ces terres. Pourtant le discours avait changé. Il paraissait sûr que l’enfant avait été trouvé et qu’ils marchaient pour leur rédemption à tous. La dizaine de personnes agenouillées au sol avait les mains jointes au dessus de leur tête et paraissait croire avec force à ce qu’on leur disait. Mel’Ermat avait donné l’ordre à ses généraux de les laisser faire. Ils avaient eu un long débat à ce sujet et il avait été convenu que ce qu’ils déclenchaient allait plutôt dans leur sens. En effet, la principale crainte avec les civils était qu’au moment de se battre, on ne savait pas comment ils réagiraient. Ils pourraient se laisser massacrer, morts de peur, ils pourraient tourner les talons et s’enfuir ou se battre courageusement. Le fait que les prophètes prêchent pour le combat, même si cela tournait la population en fanatiques, les arrangeait bien. Mel’Ermat avait même proposé de laisser courir les rumeurs sur les exactions des ennemis. Qui tenterait de fuir ou demanderait pitié lorsqu’on savait que l’ennemi s’en moquait ? Mieux valait se battre et mourir pour la victoire que fuir et de toute manière mourir comme un lâche. Visiblement, cela marchait car Mel’Ermat avait entendu des gens avouer qu’ils avaient peur non pas de mourir mais plutôt peur de perdre tout ce qu’ils avaient.

En attendant de pouvoir être sûr de l’état psychologique des troupes, des patrouilles avaient été mises tout autour du camp afin d’éviter que certains ne désertent. Malgré cela, des dizaines de personnes disparaissaient quand même tous les jours. Un général s’était occupé d’envoyer ses gradés les plus psychologues au sein des civils pour les préparer moralement et qu’il garde en tête l’enjeu de la situation. Ce dernier était plutôt simple : s’ils perdaient, peu importe de survivre ou non, leur destin serait le même : abattus en troupeaux par les envahisseurs. Les réactions étaient alors diverses. Des larmes pour les plus sensibles qui répétaient qu’ils ne voulaient pas mourir, de la résignation pour les autres qui ne voyaient pas d’autres issues, de la fierté pour les plus jeunes qui voulaient faire leurs preuves ou de l’impatience pour certains qui voulaient juste que tout ça se termine, d’une manière ou d’une autre.

Il était non loin des champs d’entraînement et s’y dirigea. A l’heure actuelle, c’était au tour des militaires de formation de l’occuper. Plus particulièrement, les chevaliers du royaume de Mel. Ceux-ci faisaient des allers-retours pour tester la rapidité du changement de formation. Ils passaient de la ligne, au fer de lance, en tirailleurs ou par escouades. Au loin, on pouvait observer des civils s’entraîner au maniement des arcs. Vu le nombre de flèches plantées dans les cibles, ce n’était pas encore ce qu’ils réussissaient de mieux. Les généraux avaient également décidé de les instruire à la base du combat au corps à corps. Mel’Ermat tenait à les éloigner au maximum des lignes ennemies où ils ne contrôleraient plus leurs réactions. Les généraux le convainquirent de la nécessité de leur inculquer les bases car, quoiqu’il en soit, ils finiraient par avoir à se battre.

-Seigneur ! l’interpella un soldat dans son dos.


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Bonsoir,

Il te reste des lecteurs :) (au moins un)

Alors, vu de quand date mon dernier poste je vais être concis.

Il y a moins de politique pure et c'est bien.

Je m'explique:

C'est pas que je dénigre tout le début qui est hyper politique avec relativement peu d'action, mais je suis bien content que les évènements se soient accélérés.

Mais du coup, dans les derniers chapitres, on a l'impression d'une continuelle course contre la montre qui me donne l'impression suivante:
- ou bien tout le monde va mourir parce que le héros n'aura pas le temps de rassembler une armée suffisament nombreuse
- ou bien il va y avoir intervention divine (par le biais du gamin ou des dieux) et tout le monde sera sauvé (sauf Regut)

Par conséquent, ça me fait penser à deux histoires:
- Games of Throne (partie politique et retour des zombies de la mort qui tue)
- les Chevaliers d'Emeraude où il y a pas mal de situations où les héros s'en sortent par le biais d'un Deus Machina

Après, tu as sûrement une trame pour éviter ces écueils, et j'attends les prochains chapitres pour en juger.

A bientôt,

Crio
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  • 1 mois après...
Hey !

Merci de ton retour ça rassure quand même de savoir que je parle pas dans le vide ! Je dis rien sur tes propositions d'avenir mais y a des pistes ;)

[quote]Par conséquent, ça me fait penser à deux histoires:
- Games of Throne (partie politique et retour des zombies de la mort qui tue)
- les Chevaliers d'Emeraude où il y a pas mal de situations où les héros s'en sortent par le biais d'un Deus Machina[/quote]

Totalement ! La première partie politique m'a clairement été inspiré parr GOT. Je voulais faire une première partie avec ses intrigues en temps de paix pour marquer la coupure qu'il va y avoir avec la suite de l'histoire !

Il tendit sa main pour lui montrer le symbole des Messagers. Il semblait avoir perdu son chapeau mais gardait quand même son air hautain. Sa veste était frappée du symbole de Kator. Cela ne faisait pas de lui un traître car les Messagers avaient juste pour coutume d’afficher leur royaume d’origine. A l’heure actuelle, Mel’Ermat était sûr que tous les Messagers avaient déserté la zone. Regut devait être assez fou pour avoir tenté de tous les capturer voire de les tuer. L’intendant de Mel s’abstint de lui poser la question mais récupéra néanmoins l’enveloppe que l’autre tendait depuis une dizaine de secondes.

-Merci, fit Mel’Ermat en se tournant vers le champ d’entraînement.

Le Messager prit la direction des cuisines. Il devait être venu à lui directement. Mel’Ermat tourna la lettre dans sa main. Elle était marquée au sceau de Mel’Ermat. Il déplia la lettre, inquiet de ce qu’il pourrait apprendre. Il parcourut la lettre du regard. Les nouvelles étaient mitigées. Mel’Placer avait repris conscience et commençait à récupérer, ce qui était une bonne chose. Le départ de Regut de l’Impériale était aussi un bon point mais celui-ci était visiblement parti en laissant le chaos derrière lui. Cela faisait trois semaines que Mel’Placer, bien que dénué de toute autorité légale, essayait de remettre de l’ordre en ville. Ce n’était pas chose aisée avec une population qui avait appris coup sur coup la présence d’Ombres et d’une guerre toute proche. Ils voulaient donc tous s’enfuir mais ne le pouvait pas de peur de se faire prendre dans les combats. C’était un paradoxe qui pouvait rendre fou… Le roi annonçait à son intendant que les mages se montraient forts peu coopératifs et qu’il envisageait sérieusement de mettre feu à leur quartier. Les mages semblaient néanmoins, avec l’aide des membres du Feu, surveiller les Ombres qui restaient aux aguets sous la ville. Personne ne savait encore pourquoi et Mel’Ermat craignait le jour où ils comprendraient. Désireux de savoir ce qu’il advenait de son royaume, Mel’Placer lui demandait de le tenir régulièrement au courant de ce qu’il se passait.

Mel’Ermat plia et rangea la lettre dans une de ses poches. L’Impériale était sauve pour l’instant. Le puissant sort qui protégeait la ville assurerait sa protection, en espérant que les envahisseurs ne connaissaient pas une faille qu’eux-mêmes ignoraient. Même si c’était le cas, la ville ne présentait aucun avantage stratégique hormis le fait qu’elle se trouvait au milieu de tous les royaumes et qu’elle pouvait être le point de départ d’une invasion multidirectionnelle. C’était au final, conclut Mel’Ermat, assez important pour que celle-ci soit préservée. Tant que le sort était actif, ils n’avaient rien à craindre. Un nouveau soldat coupa ses pensées.

-Mon Seigneur, les éclaireurs sont de retour !

Mel’Ermat se mit immédiatement à la suite de l’homme. Comment allaient être les nouvelles ?



Les nouvelles furent similaires à celles des jours qui suivirent. L’armée avançait, doucement mais sûrement. Pour l’instant, mis à part une pause de quelques jours, l’avancée était inexorable. Aussi bizarre que cela paraisse, elle semblait concentrée sur un seul but : prendre Erno. Ni les généraux, ni Mel’Ermat, ni Egéa, ni Democles ne comprenaient cette stratégie. En effet, lorsqu’on envahissait un territoire en large supériorité numérique, on frappait en plusieurs endroits différents. Prendre point par point ne leur faisait que perdre du temps et en laissait aux autres pour se regrouper. Tant mieux pour eux et tant pis pour le reste, pensa Mel’Ermat.

L’armée ennemie fut donc aux portes d’Erno avec seulement une semaine de retard sur ce qu’ils avaient prévu. Malheureusement pour eux, même avec cette semaine de perdue, les armées du nord n’étaient toujours pas là. Ils avaient commencé à recevoir des rapports disant qu’Iri s’était barricadé avec ses troupes et ne voulait plus envoyer son royaume au combat. Tenter de le convaincre leur avait fait perdre du temps mais Iri n’avait pas changé d’avis. Ben’Lor avait néanmoins pillé son royaume en provisions et en troupes. Tout du moins, tout ce qui n’était pas avec lui à la capitale de Sal. Isidor s’était visiblement entretenu avec Ben’Lor et avait essayé de l’aider tout son possible mais, n’étant qu’intendant, peu de troupes se laissèrent convaincre de désobéir au roi et de partir se battre au sud. De plus, malgré une tentative de révolte dans les rangs de l’armée Impériale, le roi de Syrarture empêcha les troupes de Sal précédemment mobilisée à la frontière de rejoindre leurs foyers. Ben’Lor gardait donc à ses côtés cent cinquante mille soldats du royaume de Sal ainsi que trois cent mille civils supplémentaires. C’était cependant moitié moins de ce dont ils avaient escompté.

Les nouvelles suivantes furent envoyées une semaine plus tard. Ben’Lor et Frendlorian étaient embourbés dans la guerre civile du nord-ouest et les seigneurs qui s’étaient révoltés offraient une résistance peu commune. Ils étaient bien préparés et bien équipés. Regut les avait bien financés et ils ne semblaient pas enclins à se rendre. Ils se battirent tous jusqu’au dernier mais la supériorité numériques de deux royaumes et demi ne leur laissèrent aucune chance. Frendlorian eut néanmoins le malheur de commencer son ménage avant que Ben’Lor ne soit là et il y perdit une trop grande partie de ses soldats. Entre ceux qui se révoltèrent sur et ses propres pertes, Frendlorian laissa pratiquement un tiers de ses forces mort dans son royaume. Mel’Ermat montrait réellement des signes d’inquiétude mais il se cachait bien de les exprimer en public. Ils étaient déjà dans une mauvaise position sans qu’ils ne doivent se passer de trois cent milles militaires professionnels supplémentaires. C’était un tiers des renforts qu’ils attendaient…

Mel’Ermat et son armée était à deux kilomètres à l’ouest de la ville d’Erno. Celle-ci avait été bâtie entre une colline et une large plaine aux nombreux points d’eau qui rendait l’endroit assez marécageux. Les troupes du royaume de Mel étaient disposées sur la crête de la colline, qui s’étendait jusqu’à plus loin au sud. A quelques kilomètres de là, dans cette même direction, étaient également préparées les troupes d’Egéa. L’armée ennemie se situait à une dizaine de kilomètres de là, au sud-est. On ne les voyait pas encore mais on les imaginait facilement aux fumées qui s’élevaient de leur gigantesque campement. Il y en avait des milliers, peut-être même des dizaines de milliers. Mel’Ermat était vraiment impressionné par l’organisation qu’il avait fallu mettre en œuvre pour déplacer autant de personnes.

Malgré cette menace, ce fut vers la ville que se porta le regard de l’intendant de Mel. On pouvait noter autrefois de grands bâtiments au sein d’Erno et on voyait maintenant que des gravas. Interrogé à ce sujet, Democles leur avait dit qu’il organisait sa ville afin que celle-ci soit optimisée défensivement parlant. Ni Mel’Ermat, ni Egéa ne se permirent la moindre réflexion bien que ceux-ci doutèrent du bien fondé de telles opérations. En tout cas, ils durent avouer que l’homme avait réussi un coup de maître en préparant sa cité aussi vite qu’il l’avait fait. Les murs avaient été réparés et renforcés, tous ceux qui avaient été choisis pour la défendre étaient équipés, les rations avaient été rassemblées pour tenir jusqu’à deux semaines et les instruments de guerre avaient été préparés et chargés. Malgré cela, le travail continuait nuit et jour pour créer des abris contre les bombardements qu’ils allaient subir, pour fabriquer de nouvelles armes ou pour consolider des barricades. A l’extérieur de la ville, dans les autres armées, la propagande avait été accentuée afin d’éviter le maximum de désertion et que tous soient prêts le moment venu.

Ce moment devait d’ailleurs être proche puisque depuis la veille au soir, l’armée de Regut était apparue au nord-est. Mel’Ermat se demandait si ce traître allait prendre part à cette guerre. Il semblait que c’était le cas. Cela voulait aussi dire que leur plan de le tenir occupé à sa frontière nord n’était pour l’instant pas un succès. Il était encore tôt pour émettre une telle conclusion mais fait était que le roi de Kator et son armée prenait place. Bien qu’uniquement formée de militaires, ceux-ci n’avançaient pas bien vite, empêtrés qu’ils étaient dans les marécages et les slaloms entre les innombrables étangs de la zone. Malheureusement cette arrivée fortuite avait provoqué un vent de panique sur le campement qui s’était créé autour d’Erno. Une réorganisation des lieux avait été décidée. La base arrière d’Egéa et de Mel’Ermat avait été repoussé à cinquante kilomètres à l’ouest. Leurs provisions et les bêtes avaient été mises encore cinquante kilomètres après ce camp. Les civils, les milices et les soldats qui n’avaient pas eu leur place en ville avaient rejoint pour moitié les armées de Mel’Placer et Egéa. Mis à part les mouvements sur les murailles et les bidonvilles abandonnés autour de celles-ci, on aurait pu croire la ville et ses alentours complètement vides.

Mel’Ermat ferma les yeux une seconde et profita du soleil sur son visage. Les chaleurs arrivaient. L’été ne serait là que dans un mois mais il en était persuadé, ce serait une année chaude. Il espérait juste être là pour en profiter. Il ouvrit les yeux et se retourna vers Egéa, Democles et les généraux des trois royaumes. Une pause avait été décidée et l’intendant de Mel était parti s’étirer les jambes. Les discussions sur la suite du plan étaient arrivées dans une impasse. Le grand chapiteau blanchâtre sous lequel ils négociaient était partiellement ouvert pour laisser entrer de l’air. Une demi-douzaine de gardes de chaque royaume montait la garde autour du lieu. Mel’Ermat replongea sous la tente et reprit sa place autour de la table en bois. Peu l’avaient quittée. Les seuls qui semblaient l’avoir fait étaient ceux partis se chercher une coupe de vin. L’intendant de Mel préférait garder les idées claires. Alcoolisés, la discussion aurait pu même facilement dégénérer alors qu’ils avaient besoin de rester soudés.

Au milieu de la table avait été étalée une carte de la ville et de ses environs proches. Grâce à des figurines et des flèches souples provenant de ce matériau de Syrarture, ils imaginaient tous les cas qui pouvaient se présenter à eux. Cela faisait longtemps qu’ils ne s’étaient pas repenchés dessus, concluant chaque fois que leur infériorité numérique aurait raison d’eux, quelque soit la manière qu’ils avaient d’aborder la bataille à venir. Mel’Ermat regarda les généraux de trois des sept régions. Ils étaient une quinzaine et pas un ne ressemblait à son voisin. Il y avait évidemment plus généraux mais ils avaient dû faire un tri pour la réunion. Mel’Ermat avait choisi Mel’Surika, arrivé quelques jours auparavant de Mel avec les renforts, Mel’Lissandro, le général ayant géré les troupes dans un premier temps ainsi que Mel’Sylvano, Mel’Alexan et Mel’Jul, trois généraux ayant acquis leur expérience dans la perpétuelle guerre du nord et à qui il avait confié la tâche de former et d’organiser les civils. Mel’Ermat sourit furtivement en regardant les gradés de Sustor. Ils étaient tous chauves et il s’était demandé si cela était dû au caractère d’Egéa qui avait dû leur faire s’arracher les cheveux de la tête. Ceux d’Egéa étaient concentrés et c’était à peine si on pouvait les surprendre à murmurer de temps à autre. Democles, à l’autre bout de la table était boudeur. Cela se comprenait vu la discussion qu’ils tenaient depuis une heure.

-Tout le monde est revenu, déclara Egéa dans sa robe blanche de deuil qu’il n’avait toujours pas quittée, alors nous pouvons reprendre la cession.
-Je n’abandonnerai pas ma ville, répéta pour la énième fois Democles en prenant les devant.

Il gardait les bras croisés, réellement frustré de la situation.

-Il le faut, répéta Egéa. Ben’Lor et Frendlorian ne seront pas là avant deux semaines. Nous ne pouvons pas nous battre.
-Je n’abandonnerai pas Erno ni mon royaume !

Ses généraux ne disaient rien, tiraillés entre deux courants. Un premier humain qui leur interdisait d’abandonner ce qu’ils avaient juré de protéger toute leur vie et un deuxième militaire qui les poussait à se retrancher en attendant des renforts. Mel’Ermat et Egéa étaient plus catégoriques puisqu’il ne s’agissait pas de leurs royaumes. La situation serait plus délicate s’ils venaient un jour à avoir le même dilemme.

-Democles, la situation est désespérée. Je ne dis pas que nous n’allons pas avoir des choix difficiles à faire et nous devons battre en retraite. Nous pourrons toujours revenir reconquérir Sustor plus tard.

Le gros homme bouillonnait de colère.

-Non, non et non ! martela-t-il. Nous nous battrons, quoi que cela coûte !

Mel’Surika, juste à sa droite, se serrait la cuisse. Il semblait hors de lui. Malheureusement, les généraux ne parleraient que pour organiser la partie opérationnelle de ce qu’ils allaient décider. La partie politique n’était discutée qu’entre les trois intendants.

-Ecoutez votre raison, tonna Egéa.

Tous commençaient à s’échauffer. C’était la première fois que Mel’Ermat voyait l’intendant de Terra hausser le ton. Il était habituellement calme et maître de lui-même. A situation exceptionnelle, comportement exceptionnel.

-A quoi cela rimerait-il de rester ? Vous allez être anéantis et nous ne gagnerons rien. Nous perdrions juste deux cent mille soldats sans que vous ne fassiez le moindre effet sur l’armée ennemie !
-Ma population se battra à mes côtés, rétorqua l’autre en se penchant en avant. Avec votre attaque sur le flanc nous pouvons gagner !

Egéa regarda Mel’Ermat avec stupeur. Il prit alors la décision.

-Si vous restez, Democles, nous ne viendrons pas. Nous allons nous replier en Terra que vous veniez ou pas. Votre population reste avec nous, libre à vous de rester mais nous accueillerons avec plaisir tout soldat qui voudra participer un combat qui en vaut la peine.

Mel’Ermat regarda Democles quand il dit cela mais c’était bien un message à destination de ses généraux. L’intendant de Mel ne se faisait cependant aucune illusion. La loyauté d’un soldat était dure à contourner et ils feraient sûrement ce que leur roi leur dirait de faire. Pourtant, Mel’Ermat aurait aimé que ceux-ci écoutent plutôt leur raison. Peut-être tenteraient-ils plus tard de convaincre leur intendant. Tout était possible. Mel’Ermat, qui s’était levé pour sa déclaration, se rassit dans un silence étrangement pesant. Democles fixait à tour de rôle Egéa et Mel’Ermat.

-Qu’il en soit ainsi.

Sa voix était froide de colère. Il se leva d’un coup et quitta la tente. Les généraux se regardèrent l’espace d’une seconde et suivirent le mouvement.


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  • 2 semaines après...
Chouite

-Maudit soit-il ! jura Mel’Ermat une fois qu’ils se furent éloignés.
-Je pense qu’il est dans une situation compliquée, essaya de le défendre Egéa.
-Il va surtout amener son royaume au bord de l’extinction !
-Peut-être changea-t-il d’avis, sembla se dire Egéa.
-Nous n’avons pas le temps ! tempêta Mel’Ermat en se mettant à marcher autour de la table, mains croisées dans le dos. Ils pourraient attaquer d’un moment à l’autre.
-Il faut que nous parlions du nouveau plan, changea de conversation Egéa.

Un de ces généraux lui tendit un rouleau. Il s’avérait que c’était une carte du royaume de Terra.

-Une idée ? demanda Mel’Ermat. Après tout, ce n’est pas mon royaume.

L’homme regarda ses soldats puis hocha la tête pour l’intendant de Mel.

-Ici.

Il désigna un point quelconque à une centaine de kilomètres à l’est de Vitoria, capitale de Terra.

-Nous devons les affronter ici. La région est naturellement montagneuse et les routes directes entre Erno et Vitoria sont constituées de vallées. Nous pouvons les attendre à la sortie où leur avantage numérique ne pourra compter.

Mel’Ermat se tourna vers ses propres conseillers. Mel’Sylvano, un fin moustachu, prit la parole.

-Je pense que c’est une bonne idée. Je suis souvent allé dans ces parages et il n’y aura pas de meilleures places fortes. Attention néanmoins à ce qu’ils ne passent pas par le sud. Nous serions pris en étaux et nous nous perdrions alors l’avantage de la position.
-Alors ça sera là, conclut Mel’Ermat. Nous jouerons notre avenir ici.


L’assaut sur Erno débuta deux jours plus tard. On vint le tirer de son lit juste avant l’aube. Les civils et les armées avaient déjà commencé à déménager et à partir vers l’ouest en direction de Vitoria la veille après-midi. Seule restait une petite troupe d’une centaine de soldats des plus compétents. Egéa était resté là également. Malgré le danger, ils devaient voir l’armée ennemie et ne pouvait juste se détourner comme ça de Democles. L’homme, malgré tout, était resté accroché à ses convictions et avait refusé de quitter sa capitale. Mel’Ermat n’arrivait pas à lui pardonner, malgré. C’était juste pour lui un immense gâchis.

Les troupes adverses se déversaient telle une vague sur le sable. Les éclaireurs impériaux et leurs espions avaient réussi à en apprendre plus sur ces envahisseurs. La première chose qu’ils apprirent était que la grande majorité de l’armée ennemie était bien Humaine. En tout point similaire à ce qu’ils étaient. Seule la langue attestait qu’ils n’étaient pas de l’Empire. Mel’Ermat se vit rassurer car cela signifiait que, comme eux, ils pouvaient mourir et, comme eux, ils devaient avoir peur. Egéa et Mel’Ermat se firent également confirmer le fait que l’armée ennemie avait perdu du temps en construisant des villages sur leur passage pour y installer des civils, du bétail et les blessés. Les deux intendants de l’Empire avaient déjà imaginé comment leurs adversaires allaient livrer bataille grâce aux ressources dont ils disposaient.

Leurs suspicions étaient les suivantes : Les bêtes, et tout ce qui était animal, incapables d’attaquer une cité fortifiée, seraient envoyés encercler la cité afin que rien n’entre ni ne sorte. Les membres de la Terre utiliseraient leur affinité pour faire tomber les murailles tandis que par magie, projectiles ou créatures volantes, le reste ferait s’abattre la mort sur la ville. Finalement, les troupes humaines lanceraient leur assaut pour achever les survivants. Ils n’avaient même pas besoin d’impliquer leurs civils, leur force militaire réussirait seule. Mel’Ermat fit tourner son cheval et prit la direction de l’ouest. Autant ne pas être repéré. Ca serait dommage de mourir ici alors qu’une belle bataille l’attendait.




Chapitre 14

Deux semaines avaient passé depuis la bataille d’Erno. Les éclaireurs leur avaient annoncé la chute de Democles et de sa capitale. L’ennemi avait marché dessus en une journée quand une armée classique aurait normalement pris des mois pour la faire tomber. Néanmoins, on lui avait rapporté que les soldats s’étaient battus bravement et en avaient emporté nombre d’envahisseurs dans la tombe. Visiblement, Democles avait fait du bon travail car chaque centimètre de terrain avait été chèrement vendu. La ville était désormais inutilisable, c’était un cimetière à ciel ouvert. Les Impériaux avaient également appris que le traître de Regut était rapidement reparti vers le nord et n’était plus là. Les monstres avaient dû envahir son royaume. Il était donc sûrement remonter au nord défendre ses positions. Ce devait être la seule bonne nouvelle de ces dernières semaines. Ils avaient un adversaire de moins à gérer.


Après une journée de repos, et comme prévu, ils marchaient maintenant vers l’ouest droit sur leurs positions.
Sur le trajet, ils durent prendre une des pires décisions de cette guerre. En effet, leur route les menèrent non loin de la Grande Bibliothèque. Ils durent faire un choix quant à quoi faire de ce savoir. Etait contenu là tout le savoir de l’Empire, toutes leurs technologies, tous leurs secrets. Décision fut prise de laisser une semaine et des moyens illimités aux sages pour mettre à l’abri le maximum d’ouvrages. Après cette date, malgré les dizaines de chariots remplis qui partaient chaque heure, ils ne sortirent qu’un nombre très restreints de livres. Les impériaux incendièrent alors la Bibliothèque avec regret. Ils venaient de faire disparaître un des joyaux de l’Empire. Un bond de savoir de plusieurs centaines d’années en arrière, si ce n’était des millénaires. Leur seule chance de récupérer ce savoir-faire était que les personnes compétentes puissent réécrire les ouvrages, en espérant qu’ils survivent à la guerre à venir. Il fallait aussi être sûr que les livres sauvés arrivent à bon port. Pour l’instant, le convoi se dirigeait à l’Impériale, là où ces documents seraient en sécurité. Mel’Ermat grincha régulièrement sur leur décision, même des jours après que cela ait été fait. Tellement de connaissances sur la logistique, la médecine, l’artisanat, l’agriculture, la magie, la politique étaient parties en fumée.

L’intendant de Mel était à cheval et traversait le camp du royaume de Syrarture. Les tentes étaient dressées de manière experte et l’organisation était irréprochable. Les gens du royaume de Ben’Lor n’étaient pas nomades mais avaient néanmoins l’habitude de se déplacer d’un lieu à l’autre. On lui jetait des regards curieux mais jamais plus de quelques secondes. A l’orée de ce camp là, commençait celui des soldats de l’Empire. Plus d’un million de guerriers était stationné ici. Chacun était regroupé par rapport à son royaume natif, son général et sa division. C’était bruyant et cela, que ce soit nuit ou jour. Il y avait toujours de l’activité. On construisait des avant-postes, on s’entraînait ou on se préparait.

Ben’Lor lui avait dit que le voyage avec les renforts s’était plutôt bien passé, si on oubliait le lâche d’Iri qui se terrait dans son château avec ses troupes. Ils étaient tombés sur des voleurs et des déserteurs en chemin qu’il s’était empressé de faire pendre. Voir tous ces militaires entraînés ainsi que tous les civils remonta le moral aux défenseurs de Terra et de Mel. Ils avaient vraiment l’impression d’avoir une chance. Mel’Ermat savait que c’était parce qu’ils n’avaient pas vu l’ennemi… Ils venaient à peine d’équiper en arme leurs propres royaumes qu’il fallait maintenant s’occuper des autres. Sauf qu’il y en avait trois fois plus à faire dans le même laps de temps. Et encore, équiper était un grand mot. Ca consistait juste à fournir une épée, ils n’avaient pas le temps de préparer des armures.

Depuis deux jours, ils avaient aussi été rejoints par des elfes, des nains, des centaures et des hommes scorpions. C’était une très bonne nouvelle même si ces peuples ne suffiraient pas à faire pencher la balance. Ca serait toujours ça de leur côté, même si ça ne représentait que cent mille individus. Les Dieux avaient continué de les ignorer et Egéa était sûr que ceux-ci ne leur répondraient plus. Mel’Ermat savait qu’il était trop tard pour regretter mais il aurait aimé les avoir de son côté plutôt que de celui de l’ennemi.

Mel’Placer avait envoyé une missive annonçant que les magiciens avaient finalement cédé et que ceux-ci seraient également bientôt là. Les derniers renforts qu’ils attendaient dépendaient de la participation des autres races. C’était d’ailleurs pour ça qu’il se déplaçait à cheval vers la tente de commandement où des ambassadeurs s’étaient présentés. La tente s’était d’ailleurs plutôt transformée en maison de commandement puisque les parois de lin étaient désormais des murs de pierre. La bâtisse mesurait près de cinquante mètres de long pour dix de large et s’y agitaient tous ce que l’Empire comptait comme décisionnaires stratégiques. Bien sûr, les membres des clergés, les membres des guildes, les petits seigneurs avaient tenté de mettre leur grain de sel mais ils furent gentiment éconduits. Ils tentaient encore des manœuvres politiques pour tirer un avantage de la situation. Comme s’ils s’attendaient que tout reprenne bientôt un cours normal. Mel’Ermat se demandait s’ils avaient conscience que s’ils étaient encore vivant dans un mois, ils auraient bien de la chance. L’intendant de Mel laissa sa monture à l’entrée du bâtiment, il avait mis plus de vingt minutes à venir jusque là et il fallait une heure pour aller du camp le plus au nord à celui le plus au sud.


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  • 3 semaines après...
Here we go :P !

L’intérieur du centre de commandement était très fonctionnel. Beaucoup de tables, très peu de chaises et des papiers et des cartes à perte de vue. On y notait là les itinéraires des patrouilles, les missions des éclaireurs, les forces en présence, la liste des commandants de l’armée. Si ces documents étaient perdus ou même volés, ils perdraient la guerre à coup sûr, c’était aussi simple que ça. Toutes leurs stratégies y étaient là indiquées. A l’heure actuelle, sur le mur qui faisait face à l’entrée, étaient affichées quatre cartes différentes de la région de Terra. Une affichait les routes du royaume, l’autre la topographie, une autre leurs routes de ravitaillement et la dernière la disposition des camps et les premières stratégies de défense. Ils avaient pour l’instant adoptés la même technique que pour Sustor. En première ligne étaient installés les militaires, suivaient ensuite derrière les civils. A cinquante kilomètres de là, avaient été rebâti les entrepôts, des hôpitaux, des forges et tout ce qui servait de support. La population choisie pour s’occuper des bêtes, qui en général déjà auparavant des éleveurs, avaient été mis au sud de Vitoria, à cent kilomètres de là. Vitoria étant déjà occupée comme Mel par les enfants et les femmes âgées du royaume de Terra.

Les commandants des royaumes discutaient en de petits groupes épars au travers de toute la salle. Mel’Ermat repéra immédiatement ses homologues en pleine discussion avec Ondoliel, membre de l’Air et un autre individu, qui ne pouvait être que de l’eau. L’intendant se joignit en groupe d’un mouvement de tête. Ben’Lor les présenta.

-Mel’Ermat, voici Ondoliel de l’air…

Visiblement, elle ne leur avait pas dit qu’ils s’étaient déjà rencontrés.

-… et Gabri, de l’eau.
-Enchanté, enchaîna l’intendant qui salua en se penchant brièvement en avant.

Les deux autres répondirent d’un mouvement de tête poli. Ils tenaient dans leur main un breuvage que Mel’Ermat n’identifia que lorsqu’on lui apporta sa propre coupe. Connaissant déjà Ondoliel qui se cachait toujours sous ses vêtements, son attention se porta sur le dénommé Gabri. Il était grand, près de sept pieds de haut. Mais il semblait fragile, c’était surtout dû au fait que sa peau était translucide et qu’elle paraissait pouvoir s’effondrer à tout instant. Il n’arrivait d’ailleurs pas à se décider sur la couleur du liquide. Il était à la fois, blanc, bleu et rosé. Il portait un ensemble blanc des pieds jusqu’au cou. Mel’Ermat n’arrivait pas à voir de coupure dans les vêtements si bien qu’il supposa que c’était un ensemble. En regardant d’un peu plus près, l’intendant de Mel se persuada que c’était de la glace. En tout cas, on voyait tout de suite le lien avec ses yeux. Des points noirs centrés autour de points blancs.

-Nous étions en train de parler de la situation, lui résuma le géant du nord, ils se joindront à nous.
-C’est une bonne nouvelle, commenta Mel’Ermat en regardant Ondoliel.

Celle-ci lui rendit son regard, il semblait inexpressif.

-Je ne vois pas d’ambassadeur du Feu, remarqua l’intendant.
-Ceux-ci ne participeront pas, annonça Gabri.

Ils ne semblaient pas avoir abordé le sujet.

-Ou du moins d’une manière différente de la nôtre. Même selon nos critères, ceux du Feu ont toujours été étranges… Animés d’une volonté religieuse. Ils ont dit qu’ils avaient une autre tâche plus importante mais qui nous aidera tous.
-Une idée de ce que cela peut-être ? demanda Egéa.

Frendlorian, juste à sa gauche et tenu par le bras par Isidor, avait été sur le point de poser la même question.

-Non, admit Ondoliel. Nous n’avons pas pour l’habitude de communiquer les uns avec les autres.

Il sembla déçu de la réponse mais n’insista pas.

-Votre plan est désespéré, reprit Ondoliel là où ils avaient laissé la discussion. Vous avez rassemblé tous les royaumes et vous êtes toujours largement en infériorité numérique. Vous ne gagnerez pas en une bataille rangée.
-Malheureusement, contra Ben’Lor, nous sommes à court de bonnes solutions. Nous ne pouvons continuer à fuir et à perdre tous les royaumes un par un. Une fois qu’ils y seront ancrés, il sera impossible de les faire partir. Nous devons frapper là où nous avons l’avantage.
-Vous savez que s’ils contournent vos défenses par le sud, vous allez vous faire encercler ?

Ondoliel paraissait savoir quelque chose.

-Nous le savons, rétorqua Ben’Lor.
-Bien, parce que c’est effectivement le cas. Nos éclaireurs ont vu un tiers de l’armée ennemie passée par le sud. Ils sortiront des reliefs en les contournant. Votre plan de les contenir dans les vallées ne marchera pas, vous allez être submergés.
-Notre plan tient toujours, s’entêta Mel’Ermat qui refusait de se laisser abattre par le désespoir. Nous pouvons très bien les maintenir dans les collines le temps que nous nous occupions de ceux qui contournent. Une fois ce combat là terminé, nous pourrions nous en prendre à ceux des collines.
-C’est voué à l’échec, contra de nouveau celle de l’Air. Ils attaqueront en même temps dès qu’ils remarqueront votre manège. Même si vous vainquiez le sud, vous auriez trop de combattants hors d’état de se battre pour espérer vaincre le reste de l’armée.
-Quelle est votre solution ? Je suppose que si vous nous dites tout ça c’est que vous avez une idée.

Egéa lança sa phrase comme s’il était convaincu que c’était le cas. Pourtant, on voyait qu’il espérait sincèrement que ceux de l’Air et de l’Eau sachent comment les aider.

-Nous pouvons améliorer vos chances, concéda Ondoliel, mais pas vous donner d’avantage décisif. Puisque vous êtes décidés à vous battre, nos compagnons de l’Eau vont transformer les sorties des vallées en marécages ainsi que toute la partie du Sud. Cela forcera ceux venant de là à revenir au nord vers leurs compagnons en longeant les reliefs. Je vous conseille de défendre la zone du marécage, cela empêchera leurs troupes montées d’être efficaces.
-Se battre sur la plaine ? Mais nous perdions l’avantage de les retenir dans les vallées ! Leur nombre jouera contre nous, contra Ben’Lor.
-Il jouera, roi de Syrarture, en effet, il jouera. Ou que vous soyez, à partir du moment où vous les bloquerez, ils tenteront de vous contourner et vous n’êtes pas assez nombreux pour tout contrôler. Autant se battre avec un avantage permanent.

Un silence se fit.

-Bien, alors nous agirons ainsi…. si tout le monde est d’accord, lança Frendlorian.

Tous hochèrent la tête.

-Du travail nous attend tous, conclut Gabri. Je propose que nous mettions fin à cette séance. Seigneurs, acheva-t-il.

Les deux ambassadeurs s’éloignèrent laissant les intendants et rois à leurs pensées.

-Vous pensez que cela va marcher ? s’inquiéta Egéa qui n’arrêtait pas de se triturer les mains.
-Le problème n’est pas celui là, dit Isidor, ce qu’il faut savoir c’est : avons-nous un meilleur plan ?

Personne n’avait mieux, c’était un fait. Autant ils avaient débattu de mille et une façons de mener la bataille à venir autant ils n’avaient pas de plan pour autre chose qu’une bataille rangée. Il leur aurait fallu plus de temps pour y réfléchir, comme être au courant des mois auparavant de l’invasion et non pas deux semaines après son début. Mel’Ermat ne revenait pas de s’être fait manipulé ainsi. Fait est que maintenant, leur situation était catastrophique.

-Seigneurs, intervint un général, un des rares du royaume de Sal visiblement. Des éclaireurs ont un rapport que vous devriez entendre.


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  • 2 semaines après...
Suite




-Faites-les venir, ordonna Mel’Ermat en devançant les autres.

Les trois hommes venaient tout juste d’arriver. Ils étaient sales, poussiéreux, peu présentables et en sueur. Ils ôtèrent leurs casques et se présentèrent timidement aux dirigeants des quatre royaumes.

-Racontez-leur, leur intima le général.
-Nous étions en poste dans Eberdine pour relever l’avancée de nos ennemis. Nous les avons vus arriver, ils doivent maintenant être à cinq jours de là.

Mel’Ermat tourna la tête vers la carte. Eberdine était une ville qui avait été évacuée et dans lequel ils avaient stationné des troupes. Ce village se situait au pied des reliefs du côté est. Ils avaient donc maintenant une date à laquelle ils devaient être prêts. A cette annonce, Ben’Lor rejoignit la carte centrale et bougea des pions par rapport à ce que l’on venait de leur dire. Un tiers de l’armée au sud et le reste à cinq jours dans les collines et les monts. L’intendant de Mel laissa ses yeux dérivés sur la carte et tomba sur les îles occidentales.

-Je reviens, annonça-t-il à ses semblables qui commentaient les dernières avancées.

On ne fit pas attention à lui. Il sortit dans l’air doux de ce début d’été et remonta sur son cheval. Il prit la direction du camp de Mel où il alla directement trouver Mel’Cari. Le colonel, fidèle à lui-même, donnait à la fois des cours à ses hommes et à la fois à quelques civils sélectionnés. Cela ne lui avait pas plu au début mais l’intendant l’en avait convaincu. Ce n’était peut-être pas grand-chose mais les entraîner leur donnait de meilleures chances pour la bataille à venir.

-Colonel, j’ai besoin d’un homme de confiance à envoyer en mission.

L’homme devint suspicieux mais ne dit rien. C’était à Mel’Ermat de divulguer ses informations. Il se gratta le menton une seconde et s’approcha de son supérieur.

-Je connais un homme. Il a été blessé aux yeux et ne voit, et encore, que d’un œil. C’est quelqu’un de confiance mais il ne nous servira à rien pour la bataille à venir.
-Et si j’avais eu besoin d’un homme valide ? s’étonna l’intendant.
-Je ne pense pas que ça soit le cas. Vous le trouverez où les hommes sont en plaisante compagnie. Il s’appelle Hitch.

Le colonel fit un sourire mystérieux et se remit à diriger ses soldats en criant. Mel’Ermat soupira. Il n’avait aucune envie d’aller dans le campement des prostituées. Pourtant, il avait besoin de ce personnage. Tournant son cheval dans une autre direction, il le remit en mouvement vers l’ouest. Un campement de débauchées était ce qu’il y avait de plus normal en temps de guerre. Le fait que ce soit une guerre ayant regroupé tout l’Empire avait ameuté un nombre considérable d’entre elles. Elles en formaient d’ailleurs une ville où elle assurait elles-mêmes la sécurité. Heureusement pour lui, son titre lui ouvrit plus de portes que son visage. L’homme fut facile à trouver une fois que son nom fut lâché sur place. Il devait être un habitué des lieux. Mel’Ermat regardait autour de lui et s’admit surpris. Ce n’était pas un camp normal où les filles racolaient pratiquement nues à grands renforts d’obscénités. Elles avaient monté des cabanes en bois de toute taille et les filles attendaient toutes à l’extérieur de leurs cases, bien habillées. Si on omettait les bruits qu’on captait de temps en temps, cela aurait presque été un coin agréable. L’homme arriva débraillé, on avait dû lui dire qui s’était présenté et il n’avait pas perdu une seconde.

-Seigneur, s’inclina l’homme quand il arriva à hauteur de cheval.

Sa chemise dépassait de son pantalon, ses cheveux étaient ébouriffés et il semblait le chercher du regard.

-J’ai besoin de toi pour une mission confidentielle.

L’intendant lui jeta une bourse que l’autre manqua totalement. Mel’Ermat décida de lui tendre la lettre qu’il avait prévu de lui jeter également. Autant qu’elle ne finisse pas non plus dans la boue. Il y avait un bon paquet d’or. L’intendant de Mel s’en moquait. Il en aurait peut-être plus jamais besoin. L’autre ne semblait pas s’en moquer et regardait autour de lui en se léchant les babines. Il avait trouvé comment il dépenserait son argent.

-A vos ordres, Seigneur.
-J’ai besoin que tu partes pour les îles occidentales immédiatement. Il y a un plan dans les papiers, tu y trouveras des gardes. Je veux que tu leur remettes la lettre.

Mel’Ermat se tut et l’autre continua de le fixer. Comme il réalisa que le gradé n’allait pas continuer à parler, il posa sa question.

-Et ?
-Et c’est tout, conclut Mel’Ermat. Tu as assez d’or pour ne pas avoir à te poser de questions. Avons-nous un accord ?
-Bien sûr ! dit l’homme sans hésiter une seule seconde.

Heureusement que Mel’Cari avait dit que c’était quelqu’un de confiance. Son avis à lui était qu’il allait se terrer dans un autre campement. Ils étaient tellement nombreux qu’il n’y avait aucune chance que Mel’Ermat retombe dessus. Les cartes n’étaient plus dans ses mains. S’ils perdaient, les ennemis auraient pour nouvelle étape Mel. Sa famille devait quitter la résidence par bateau pour se rendre au nord en Ostel. Il avait de la famille à quelques kilomètres d’un village si bien qu’ils seraient en sécurité là-bas jusqu’à la fin du conflit. C’est du moins ce qu’il espérait. Mel’Ermat tourna une nouvelle fois son cheval et reprit la direction de leur quartier général.

Il fut intercepté en chemin par un paysan en large culotte rouge maculée de terre. Il semblait sûr de lui et cela mit la puce à l’oreille de l’intendant qui mit lentement la main sur la garde de son épée. L’homme remarqua le mouvement car il leva tout de suite les mains en signe de soumission.

-Je viens de la part de Llis !

Mel’Ermat fronça les sourcils. Si l’homme connaissait le nom de son espion, c’était qu’il était du réseau. A la fois, Llis lui avait dit que ce dernier était corrompu bien que normalement maintenant nettoyé. Il était néanmoins sûr que celui-là était du bon côté. Il le prouva dans le mouvement suivant. Sous sa cape avait été glissée une pierre de vision. Mel’Ermat désigna une tente non loin de là. Il descendit de son cheval et parcourut les quelques mètres qui les séparaient du rabat. A l’intérieur, la décoration était sommaire. Des matelas, des coffres, des outils et des tableaux. Les civils étaient vraiment partis avec tout et n’importe quoi. Ils étaient cependant seuls ce qui était l’objectif. L’espion lui tendit la pierre. C’était un morceau argenté à peine plus grand qu’une pomme. La surface était lisse et l’intendant savait indestructible. Il ferma les yeux et serra le poing. Quand il ouvrit les yeux, Llis était face à lui. Mel’Ermat ne savait pas comment cela marchait mais il savait que ce n’était qu’une image de l’homme. Il savait également qu’ils pouvaient parler sans crainte d’être espionné. Dans la tente, on aurait juste l’impression qu’il restait debout sans rien faire.

-Qu’y a-t-il d’urgent ? s’inquiéta le dirigeant de Mel.

Mel’Ermat savait que si l’homme prenait le risque et l’urgence de le contacter c’était car quelque chose de grave était arrivé.

-C’est Mel’Placer ?
-Non, le rassura l’espion. Mel’Placer est têtu mais il gère bien les choses et est pratiquement arrivé à remettre de l’ordre dans la cité. C’est pire. Les Ombres ont disparu.

Le sang de l’homme ne fit qu’un tour. C’était un cauchemar.

-Où sont-elles ? Pourquoi sont-elles parties ?
-Je ne sais pas, admit le chef espion. J’allais enquêter dessus mais je préférais que vous soyez au courant au cas où il m’arrive quelque chose. Les mages restants en ville disent que quelque chose s’est produit mais nous n’en savons pas plus.

Mel’Ermat ne savait pas si c’était une bonne ou une mauvaise nouvelle. Elles étaient aussi bien disparues que parties ailleurs.

-Mais je ne pense pas qu’elles soient éradiquées. Les membres du Feu ont tous quitté la ville. Ils viennent dans votre direction.
-On nous a dit toute à l’heure qu’ils ne s’impliqueraient pas ! ne comprit pas l’intendant.
-Ils ont peut-être changé d’avis, proposa Llis en haussant les épaules.
-Ca m’étonnerait, ils disaient qu’ils avaient une autre mission.
-Et bien quelle qu’elle soit, cette mission doit être dans votre coin.

Mel’Ermat regarda le sol et s’inventa des centaines de raison sur leurs motivations.

-Bien compris, acheva l’homme. Tiens-moi au courant si tu as des informations.

Llis le regarda et disparut. Mel’Ermat parut se rappeler du paysan et lui tendit la pierre. L’homme la saisit et la fit disparaître sous sa toge. Il fit un signe de tête à son chef et quitta la tente. L’intendant attendit une minute et sortit également. Personne ne devait soupçonner l’existante du réseau de Mel. C’était le meilleur gage de leur résultat. Remontant sur sa monture, il continua son chemin la tête bouillonnant de questions.



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-Faites-les venir, ordonna Mel’Ermat en devançant les autres.

Les trois hommes venaient tout juste d’arriver. Ils étaient sales, poussiéreux, peu présentables et en sueur. Ils ôtèrent leurs casques et se présentèrent timidement aux dirigeants des quatre royaumes.

-Racontez-leur, leur intima le général.
-Nous étions en poste dans Eberdine pour relever l’avancée de nos ennemis. Nous les avons vus arriver, ils doivent maintenant être à cinq jours de là.

Mel’Ermat tourna la tête vers la carte. Eberdine était une ville qui avait été évacuée et dans lequel ils avaient stationné des troupes. Ce village se situait au pied des reliefs du côté est. Ils avaient donc maintenant une date à laquelle ils devaient être prêts. A cette annonce, Ben’Lor rejoignit la carte centrale et bougea des pions par rapport à ce que l’on venait de leur dire. Un tiers de l’armée au sud et le reste à cinq jours dans les collines et les monts. L’intendant de Mel laissa ses yeux dérivés sur la carte et tomba sur les îles occidentales.

-Je reviens, annonça-t-il à ses semblables qui commentaient les dernières avancées.

On ne fit pas attention à lui. Il sortit dans l’air doux de ce début d’été et remonta sur son cheval. Il prit la direction du camp de Mel où il alla directement trouver Mel’Cari. Le colonel, fidèle à lui-même, donnait à la fois des cours à ses hommes et à la fois à quelques civils sélectionnés. Cela ne lui avait pas plu au début mais l’intendant l’en avait convaincu. Ce n’était peut-être pas grand-chose mais les entraîner leur donnait de meilleures chances pour la bataille à venir.

-Colonel, j’ai besoin d’un homme de confiance à envoyer en mission.

L’homme devint suspicieux mais ne dit rien. C’était à Mel’Ermat de divulguer ses informations. Il se gratta le menton une seconde et s’approcha de son supérieur.

-Je connais un homme. Il a été blessé aux yeux et ne voit, et encore, que d’un œil. C’est quelqu’un de confiance mais il ne nous servira à rien pour la bataille à venir.
-Et si j’avais eu besoin d’un homme valide ? s’étonna l’intendant.
-Je ne pense pas que ça soit le cas. Vous le trouverez où les hommes sont en plaisante compagnie. Il s’appelle Hitch.

Le colonel fit un sourire mystérieux et se remit à diriger ses soldats en criant. Mel’Ermat soupira. Il n’avait aucune envie d’aller dans le campement des prostituées. Pourtant, il avait besoin de ce personnage. Tournant son cheval dans une autre direction, il le remit en mouvement vers l’ouest. Un campement de débauchées était ce qu’il y avait de plus normal en temps de guerre. Le fait que ce soit une guerre ayant regroupé tout l’Empire avait ameuté un nombre considérable d’entre elles. Elles en formaient d’ailleurs une ville où elle assurait elles-mêmes la sécurité. Heureusement pour lui, son titre lui ouvrit plus de portes que son visage. L’homme fut facile à trouver une fois que son nom fut lâché sur place. Il devait être un habitué des lieux. Mel’Ermat regardait autour de lui et s’admit surpris. Ce n’était pas un camp normal où les filles racolaient pratiquement nues à grands renforts d’obscénités. Elles avaient monté des cabanes en bois de toute taille et les filles attendaient toutes à l’extérieur de leurs cases, bien habillées. Si on omettait les bruits qu’on captait de temps en temps, cela aurait presque été un coin agréable. L’homme arriva débraillé, on avait dû lui dire qui s’était présenté et il n’avait pas perdu une seconde.

-Seigneur, s’inclina l’homme quand il arriva à hauteur de cheval.

Sa chemise dépassait de son pantalon, ses cheveux étaient ébouriffés et il semblait le chercher du regard.

-J’ai besoin de toi pour une mission confidentielle.

L’intendant lui jeta une bourse que l’autre manqua totalement. Mel’Ermat décida de lui tendre la lettre qu’il avait prévu de lui jeter également. Autant qu’elle ne finisse pas non plus dans la boue. Il y avait un bon paquet d’or. L’intendant de Mel s’en moquait. Il en aurait peut-être plus jamais besoin. L’autre ne semblait pas s’en moquer et regardait autour de lui en se léchant les babines. Il avait trouvé comment il dépenserait son argent.

-A vos ordres, Seigneur.
-J’ai besoin que tu partes pour les îles occidentales immédiatement. Il y a un plan dans les papiers, tu y trouveras des gardes. Je veux que tu leur remettes la lettre.

Mel’Ermat se tut et l’autre continua de le fixer. Comme il réalisa que le gradé n’allait pas continuer à parler, il posa sa question.

-Et ?
-Et c’est tout, conclut Mel’Ermat. Tu as assez d’or pour ne pas avoir à te poser de questions. Avons-nous un accord ?
-Bien sûr ! dit l’homme sans hésiter une seule seconde.

Heureusement que Mel’Cari avait dit que c’était quelqu’un de confiance. Son avis à lui était qu’il allait se terrer dans un autre campement. Ils étaient tellement nombreux qu’il n’y avait aucune chance que Mel’Ermat retombe dessus. Les cartes n’étaient plus dans ses mains. S’ils perdaient, les ennemis auraient pour nouvelle étape Mel. Sa famille devait quitter la résidence par bateau pour se rendre au nord en Ostel. Il avait de la famille à quelques kilomètres d’un village si bien qu’ils seraient en sécurité là-bas jusqu’à la fin du conflit. C’est du moins ce qu’il espérait. Mel’Ermat tourna une nouvelle fois son cheval et reprit la direction de leur quartier général.

Il fut intercepté en chemin par un paysan en large culotte rouge maculée de terre. Il semblait sûr de lui et cela mit la puce à l’oreille de l’intendant qui mit lentement la main sur la garde de son épée. L’homme remarqua le mouvement car il leva tout de suite les mains en signe de soumission.

-Je viens de la part de Llis !

Mel’Ermat fronça les sourcils. Si l’homme connaissait le nom de son espion, c’était qu’il était du réseau. A la fois, Llis lui avait dit que ce dernier était corrompu bien que normalement maintenant nettoyé. Il était néanmoins sûr que celui-là était du bon côté. Il le prouva dans le mouvement suivant. Sous sa cape avait été glissée une pierre de vision. Mel’Ermat désigna une tente non loin de là. Il descendit de son cheval et parcourut les quelques mètres qui les séparaient du rabat. A l’intérieur, la décoration était sommaire. Des matelas, des coffres, des outils et des tableaux. Les civils étaient vraiment partis avec tout et n’importe quoi. Ils étaient cependant seuls ce qui était l’objectif. L’espion lui tendit la pierre. C’était un morceau argenté à peine plus grand qu’une pomme. La surface était lisse et l’intendant savait indestructible. Il ferma les yeux et serra le poing. Quand il ouvrit les yeux, Llis était face à lui. Mel’Ermat ne savait pas comment cela marchait mais il savait que ce n’était qu’une image de l’homme. Il savait également qu’ils pouvaient parler sans crainte d’être espionné. Dans la tente, on aurait juste l’impression qu’il restait debout sans rien faire.

-Qu’y a-t-il d’urgent ? s’inquiéta le dirigeant de Mel.

Mel’Ermat savait que si l’homme prenait le risque et l’urgence de le contacter c’était car quelque chose de grave était arrivé.

-C’est Mel’Placer ?
-Non, le rassura l’espion. Mel’Placer est têtu mais il gère bien les choses et est pratiquement arrivé à remettre de l’ordre dans la cité. C’est pire. Les Ombres ont disparu.

Le sang de l’homme ne fit qu’un tour. C’était un cauchemar.

-Où sont-elles ? Pourquoi sont-elles parties ?
-Je ne sais pas, admit le chef espion. J’allais enquêter dessus mais je préférais que vous soyez au courant au cas où il m’arrive quelque chose. Les mages restants en ville disent que quelque chose s’est produit mais nous n’en savons pas plus.

Mel’Ermat ne savait pas si c’était une bonne ou une mauvaise nouvelle. Elles étaient aussi bien disparues que parties ailleurs.

-Mais je ne pense pas qu’elles soient éradiquées. Les membres du Feu ont tous quitté la ville. Ils viennent dans votre direction.
-On nous a dit toute à l’heure qu’ils ne s’impliqueraient pas ! ne comprit pas l’intendant.
-Ils ont peut-être changé d’avis, proposa Llis en haussant les épaules.
-Ca m’étonnerait, ils disaient qu’ils avaient une autre mission.
-Et bien quelle qu’elle soit, cette mission doit être dans votre coin.

Mel’Ermat regarda le sol et s’inventa des centaines de raison sur leurs motivations.

-Bien compris, acheva l’homme. Tiens-moi au courant si tu as des informations.

Llis le regarda et disparut. Mel’Ermat parut se rappeler du paysan et lui tendit la pierre. L’homme la saisit et la fit disparaître sous sa toge. Il fit un signe de tête à son chef et quitta la tente. L’intendant attendit une minute et sortit également. Personne ne devait soupçonner l’existante du réseau de Mel. C’était le meilleur gage de leur résultat. Remontant sur sa monture, il continua son chemin la tête bouillonnant de questions.



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  • 2 semaines après...
Suite !

Il ne fit pas un kilomètre de plus sans qu’il ne tire une nouvelle sur les rênes. Une foule compacte entourait un prophète qui criait. Mel’Ermat dut se rapprocher pour écouter ce qu’il se disait. Celui-ci criait à la fin du monde et que tout était perdu. Un autre arriva et se lamenta d’un discours similaire. Que se passait-il ? Pourquoi n’encourageaient-ils plus les foules ? Des gardes regardaient impuissants les gens se faire décourager. Mel’Ermat lança son cheval vers eux et l’arrêta au dernier moment les faisant sursauter. Il fronça les sourcils et les foudroya du regard.

-Je veux qu’ils soient arrêtés et bâillonnés. Enfermez-les quelque part où ils ne poseront pas de problème ! Que ça soit pareil de partout, fouillez tous les camps et enfermez-les s’il le faut.
-Oui, Seigneur !

Ce n’étaient pas des hommes de son royaume mais le ton employé avait suffi à les mettre en avant. Les militaires fendirent la foule sans ménagement et s’emparèrent des prophètes qui n’essayèrent même pas de se défendre. Mel’Ermat avait un nouveau problème et il n’était pas sûr d’avoir de bonnes solutions…




Ce ne fut que le lendemain en milieu de la journée qu’il découvrit avec horreur pourquoi ils avaient dû mettre aux arrêts pratiquement cinq cent religieux qui ne juraient auparavant que par la prophétie. Ce fut Mel’Ermat qui tomba par hasard dessus alors qu’il cherchait à trouver un chargé de logistique pour discuter avec lui de l’approvisionnement de l’eau. Le mouvement de foule que provoquèrent les nouveaux venus aurait poussé n’importe qui à se poser des questions. C’était la Compagnie d’Argent. Elle revenait. Seule. Le chef du groupe vint vers lui pendant que le reste se fit une place où s’installer au milieu des tentes. C’était bien un humain qui dirigeait cette troupe, allez savoir pourquoi !

-Vous êtes déjà là ? s’étonna Mel’Ermat. Soit c’est une très mauvaise nouvelle, soit c’est une très bonne. Que s’est-il passé ?

A la tête que faisait son interlocuteur, cela ne semblait être qu’une mauvaise nouvelle. Ou alors il ne savait pas sourire.

-Le gamin est mort, dit Vinderian, criminel bien connu de l’Ostel.

Mel’Ermat sentit son estomac bouillonner et ses jambes flageller. Il ne croyait pas en cette prophétie mais au fond de lui, il aurait aimé que ça soit vrai pour que tout ça ne soit qu’un mauvais cauchemar. Désormais, ils étaient fixés. Il n’y aurait pas d’autres choix que la bataille rangée et uniquement avec les forces qu’ils avaient déjà rassemblées. Mel’Ermat se mit une main sur la bouche.

-Nous avons fait voyage avec des prophètes jusqu’aux cavernes sous la ville. Nous sommes tombés sur les Ombres mais nous avions de quoi nous protéger. Un soir, on a été rejoint par des mendiants qui fuyaient l’agitation en ville. Ils nous ont racontés qu’ils avaient été séparés d’un autre groupe avec des enfants. Le gamin a complètement perdu les pédales en parlant de sauver le monde et de leur porter secours. Faute à ces maudits prophètes qui l’ont abruti tout le voyage. On a dû l’assommer pour l’empêcher de s’élancer dans les cavernes. Plus tard dans la nuit, les prophètes se sont élancés sur les veilleurs et le gamin en a profité pour s’échapper. Une fois débarrassés des barbus, nous sommes partis à sa poursuite. On savait où il se rendait. Le temps d’arriver sur place, il ne restait plus rien de lui. Les Ombres l’attendaient. C’est la dernière fois qu’on les a vues d’ailleurs, elles ont quitté les cavernes juste après.

-Et dire que tout le monde voyait en lui un héros…
-Pardon ? demanda le capitaine mercenaire en entendant les grommèlements de Mel’Ermat.
-Rien, rien. Reposez-vous, la bataille aura lieu dans quelques jours.

L’homme hocha la tête. Il ne semblait pas à l’aise d’avoir échoué dans sa mission. C’était tant mieux, ils mettraient deux fois plus de motivation dans la guerre à venir. L’intendant n’avait jamais cru à cette prophétie mais il se souvint que d’autres avaient misé encore plus d’espoir que lui dans cette quête. Il cacherait l’information de sa mort, il le savait. Il était hors de question que son armée se laisse abattre par la mort d’un gamin qui était sensé les faire gagner la guerre. Deux choses seulement le pouvaient : la discipline et la rage. Ils se laissèrent là et Mel’Ermat retourna vers sa tente, oubliant totalement ce pourquoi il était venu jusque là dans un premier temps.

Toujours torturé par ses pensées et avec l’impression qu’il avait quand même envoyé un enfant se faire exécuter, il fut intercepté par le général Mel’Jul. C’était un solide gaillard plutôt petit du haut de son mètre soixante-dix mais qui compensait sa taille par une nervosité à toute épreuve. Il semblait d’ailleurs bien énervé à ce moment-là. Son teint cramoisi allait d’ailleurs bien avec sa chemise rouge ouverte à la poitrine.

-Seigneur, nous avons besoin de vous.
-Dites-moi, général.

Ses généraux étaient en charge de toute l’organisation du camp. Cela lui évitait d’avoir à gérer les petits soucis du quotidien. Cela lui laissait beaucoup de temps que Mel’Ermat utilisait pour s’entraîner ou faire le politicien quand ils avaient une décision stratégique à prendre. Ses généraux n’aimaient donc pas le déranger, même si c’était pour faire pendre un voleur qui chapardait dans les provisions ou pour juger d’une querelle d’ivrognes.

-Les tensions augmentent entre les différents royaumes et nous craignons que les bagarres nocturnes se généralisent.

Mel’Ermat avait effectivement remarqué qu’il jugeait de plus en plus souvent des crimes impliquant plusieurs royaumes. Les populations n’étaient pas particulièrement racistes et xénophobes mais la tension qui grandissait faisait parfois perdre les esprits. Pour l’instant, cela restait des évènements mineurs au vu du nombre de personnes qu’ils avaient à gérer mais il ne fallait pas que la situation ne dégénère. Il ne fallait pas qu’ils se trompent d’ennemis.

-Rajoutez des patrouilles dans les camps. Limitez les déplacements entre les différents campements et doublez les entraînements. On verra s’ils auront encore envie de se battre.

Les exercices auxquels étaient soumis les civils comme les militaires étaient déjà exténuant. Cela était gage de discipline. Mel’Ermat s’en réjouissait car incorporés des civils dans des bataillons de professionnels avaient été compliqué. Pourtant, après plusieurs semaines, une certaine cohésion avait fini par s’installer et les uns apprenaient aux autres. C’était vrai dans la majorité des régiments, certains faisaient encore de la résistance et excluaient ces nouveaux membres. Ils n’avaient pas encore compris que leurs vies dans la bataille à venir dépendraient de ceux qui les côtoieraient.

-Nous notons aussi des cas de dysenterie de plus en plus nombreux.

Mel’Ermat grogna. Les problèmes sanitaires n’allaient qu’augmenter. Une armée en campagne ne restait jamais au même endroit sauf quand elle était assiégée ou assiégeuse. La population de l’Empire au même endroit posait d’énormes problèmes d’évacuation des déchets. Heureusement pour eux, ils avaient envoyé les bêtes ailleurs car la situation aurait dégénéré bien plus tôt. Il restait néanmoins les chevaux et les chiens. Ils avaient assez de médicaments mais ceux-ci étaient quand même limités. Il n’y avait sûrement plus personne pour en produire et il faudrait les utiliser avec parcimonie.

-Isolez-les plus loin à l’ouest. Trouvez des docteurs ou des herboristes qui sont incorporés dans des régiments et qu’ils s’en occupent. Enterrez les déchets le plus possible et dites aux soldats d’aller plus loin pour se soulager. Il nous reste quelques jours à tenir, hors de question que ce soit les maladies qui nous fassent perdre.

L’homme se mit au garde-à-vous en se frappant le poing sur le torse.

-Ce sera fait, Seigneur, termina-t-il en se penchant légèrement en avant.

Mel’Ermat commençait à s’impatienter ce qui était mauvais signe. Comme tous, l’attente était pire que tout. Beaucoup pensaient que la bataille serait un moment de délivrance. Mel’Ermat savait que ce n’était pas le cas, il n’y avait rien de pire que ce qui les attendait. Il eut à peine le temps de faire quelques pas qu’il se fit interpeller. C’était un homme rondouillet et dégarni sur le dessus. Derrière lui, on notait trois autres hommes. Ils étaient tous craintifs, comme si Mel’Ermat avait eu le pouvoir de les foudroyer. L’intendant était sûr de connaître l’homme mais il n’arrivait pas à savoir d’où.

-Seigneur, je voulais juste vous dire merci.

Mel’Ermat était intrigué et il dut l’exprimer visuellement car l’autre continua.

-Nous savons tous ce vous faites pour nous pendant que Mel’Placer n’est pas là.

C’était un marchand ! Mel’Ermat en était persuadé. C’était un habitué de la salle du trône et il devait venir se plaindre au moins une fois par semaine. Comme cela lui paraissait loin. L’homme était d’ailleurs bien moins véhément qu’à l’époque. Il était même docile.

-Savez-vous quand cela arrivera ?
-Quelques jours, avoua Mel’Ermat en sachant pertinemment de quoi il voulait parler.

L’autre soupira.

-Ne vous inquiétez pas, cela sera rapidement là.
-Oh, je ne suis pas inquiet, s’expliqua le marchand. Impatient que tout cela finisse.

Les autres hochèrent la tête.

-Nous sommes résignés maintenant, nous n’avons pas d’autres choix que de gagner, n’est-ce pas ?
-Effectivement…
-Est-ce vrai qu’ils mangent les cadavres des vaincus ?
-Je ne sais pas, se fit surprendre Mel’Ermat par la question. J’espère ne jamais le savoir.

L’autre sourit timidement.

-Vous devez être occupé, Seigneur, je vous souhaite une bonne journée.
-Vous de même, le congédia l’intendant de Mel.

Finalement, leur propagande avait plutôt bien marché. Il était vrai qu’ils ne semblaient pas avoir peur de la situation. Cela serait une autre paire de manches lorsque les armées se feraient face et qu’il faudrait tuer ou être tué. Mel’Ermat continua sa route en se demandant combien de fois il allait encore être interrompu. Un éclair blanc l’aveugla alors puis disparut la seconde d’après. L’intendant avait les yeux qui flashaient et se demandait ce qu’il venait de se passer. Au loin, en direction du camp d’Egéa, une tour avait fait son apparition. Maudits magiciens, grommela l’intendant en comprenant qui étaient les responsables. L’avantage était que désormais, tous savaient qu’ils étaient là. Ca passerait du baume au cœur aux plus craintifs des combattants. La nouvelle se répandrait comme une traînée de poudre. Mel’Ermat devait se concerter avec ses homologues pour savoir comment les magiciens comptaient prendre part aux évènements. Ils n’obéissaient normalement qu’à l’Empereur, et encore quand cela les arrangeait. Sachant que l’Empereur était du mauvais côté du champ de bataille, l’intendant craignait qu’ils n’en fassent qu’à leur tête.


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Il ne fit pas un kilomètre de plus sans qu’il ne tire une nouvelle sur les rênes. Une foule compacte entourait un prophète qui criait. Mel’Ermat dut se rapprocher pour écouter ce qu’il se disait. Celui-ci criait à la fin du monde et que tout était perdu. Un autre arriva et se lamenta d’un discours similaire. Que se passait-il ? Pourquoi n’encourageaient-ils plus les foules ? Des gardes regardaient impuissants les gens se faire décourager. Mel’Ermat lança son cheval vers eux et l’arrêta au dernier moment les faisant sursauter. Il fronça les sourcils et les foudroya du regard.

-Je veux qu’ils soient arrêtés et bâillonnés. Enfermez-les quelque part où ils ne poseront pas de problème ! Que ça soit pareil de partout, fouillez tous les camps et enfermez-les s’il le faut.
-Oui, Seigneur !

Ce n’étaient pas des hommes de son royaume mais le ton employé avait suffi à les mettre en avant. Les militaires fendirent la foule sans ménagement et s’emparèrent des prophètes qui n’essayèrent même pas de se défendre. Mel’Ermat avait un nouveau problème et il n’était pas sûr d’avoir de bonnes solutions…




Ce ne fut que le lendemain en milieu de la journée qu’il découvrit avec horreur pourquoi ils avaient dû mettre aux arrêts pratiquement cinq cent religieux qui ne juraient auparavant que par la prophétie. Ce fut Mel’Ermat qui tomba par hasard dessus alors qu’il cherchait à trouver un chargé de logistique pour discuter avec lui de l’approvisionnement de l’eau. Le mouvement de foule que provoquèrent les nouveaux venus aurait poussé n’importe qui à se poser des questions. C’était la Compagnie d’Argent. Elle revenait. Seule. Le chef du groupe vint vers lui pendant que le reste se fit une place où s’installer au milieu des tentes. C’était bien un humain qui dirigeait cette troupe, allez savoir pourquoi !

-Vous êtes déjà là ? s’étonna Mel’Ermat. Soit c’est une très mauvaise nouvelle, soit c’est une très bonne. Que s’est-il passé ?

A la tête que faisait son interlocuteur, cela ne semblait être qu’une mauvaise nouvelle. Ou alors il ne savait pas sourire.

-Le gamin est mort, dit Vinderian, criminel bien connu de l’Ostel.

Mel’Ermat sentit son estomac bouillonner et ses jambes flageller. Il ne croyait pas en cette prophétie mais au fond de lui, il aurait aimé que ça soit vrai pour que tout ça ne soit qu’un mauvais cauchemar. Désormais, ils étaient fixés. Il n’y aurait pas d’autres choix que la bataille rangée et uniquement avec les forces qu’ils avaient déjà rassemblées. Mel’Ermat se mit une main sur la bouche.

-Nous avons fait voyage avec des prophètes jusqu’aux cavernes sous la ville. Nous sommes tombés sur les Ombres mais nous avions de quoi nous protéger. Un soir, on a été rejoint par des mendiants qui fuyaient l’agitation en ville. Ils nous ont racontés qu’ils avaient été séparés d’un autre groupe avec des enfants. Le gamin a complètement perdu les pédales en parlant de sauver le monde et de leur porter secours. Faute à ces maudits prophètes qui l’ont abruti tout le voyage. On a dû l’assommer pour l’empêcher de s’élancer dans les cavernes. Plus tard dans la nuit, les prophètes se sont élancés sur les veilleurs et le gamin en a profité pour s’échapper. Une fois débarrassés des barbus, nous sommes partis à sa poursuite. On savait où il se rendait. Le temps d’arriver sur place, il ne restait plus rien de lui. Les Ombres l’attendaient. C’est la dernière fois qu’on les a vues d’ailleurs, elles ont quitté les cavernes juste après.

-Et dire que tout le monde voyait en lui un héros…
-Pardon ? demanda le capitaine mercenaire en entendant les grommèlements de Mel’Ermat.
-Rien, rien. Reposez-vous, la bataille aura lieu dans quelques jours.

L’homme hocha la tête. Il ne semblait pas à l’aise d’avoir échoué dans sa mission. C’était tant mieux, ils mettraient deux fois plus de motivation dans la guerre à venir. L’intendant n’avait jamais cru à cette prophétie mais il se souvint que d’autres avaient misé encore plus d’espoir que lui dans cette quête. Il cacherait l’information de sa mort, il le savait. Il était hors de question que son armée se laisse abattre par la mort d’un gamin qui était sensé les faire gagner la guerre. Deux choses seulement le pouvaient : la discipline et la rage. Ils se laissèrent là et Mel’Ermat retourna vers sa tente, oubliant totalement ce pourquoi il était venu jusque là dans un premier temps.

Toujours torturé par ses pensées et avec l’impression qu’il avait quand même envoyé un enfant se faire exécuter, il fut intercepté par le général Mel’Jul. C’était un solide gaillard plutôt petit du haut de son mètre soixante-dix mais qui compensait sa taille par une nervosité à toute épreuve. Il semblait d’ailleurs bien énervé à ce moment-là. Son teint cramoisi allait d’ailleurs bien avec sa chemise rouge ouverte à la poitrine.

-Seigneur, nous avons besoin de vous.
-Dites-moi, général.

Ses généraux étaient en charge de toute l’organisation du camp. Cela lui évitait d’avoir à gérer les petits soucis du quotidien. Cela lui laissait beaucoup de temps que Mel’Ermat utilisait pour s’entraîner ou faire le politicien quand ils avaient une décision stratégique à prendre. Ses généraux n’aimaient donc pas le déranger, même si c’était pour faire pendre un voleur qui chapardait dans les provisions ou pour juger d’une querelle d’ivrognes.

-Les tensions augmentent entre les différents royaumes et nous craignons que les bagarres nocturnes se généralisent.

Mel’Ermat avait effectivement remarqué qu’il jugeait de plus en plus souvent des crimes impliquant plusieurs royaumes. Les populations n’étaient pas particulièrement racistes et xénophobes mais la tension qui grandissait faisait parfois perdre les esprits. Pour l’instant, cela restait des évènements mineurs au vu du nombre de personnes qu’ils avaient à gérer mais il ne fallait pas que la situation ne dégénère. Il ne fallait pas qu’ils se trompent d’ennemis.

-Rajoutez des patrouilles dans les camps. Limitez les déplacements entre les différents campements et doublez les entraînements. On verra s’ils auront encore envie de se battre.

Les exercices auxquels étaient soumis les civils comme les militaires étaient déjà exténuant. Cela était gage de discipline. Mel’Ermat s’en réjouissait car incorporés des civils dans des bataillons de professionnels avaient été compliqué. Pourtant, après plusieurs semaines, une certaine cohésion avait fini par s’installer et les uns apprenaient aux autres. C’était vrai dans la majorité des régiments, certains faisaient encore de la résistance et excluaient ces nouveaux membres. Ils n’avaient pas encore compris que leurs vies dans la bataille à venir dépendraient de ceux qui les côtoieraient.

-Nous notons aussi des cas de dysenterie de plus en plus nombreux.

Mel’Ermat grogna. Les problèmes sanitaires n’allaient qu’augmenter. Une armée en campagne ne restait jamais au même endroit sauf quand elle était assiégée ou assiégeuse. La population de l’Empire au même endroit posait d’énormes problèmes d’évacuation des déchets. Heureusement pour eux, ils avaient envoyé les bêtes ailleurs car la situation aurait dégénéré bien plus tôt. Il restait néanmoins les chevaux et les chiens. Ils avaient assez de médicaments mais ceux-ci étaient quand même limités. Il n’y avait sûrement plus personne pour en produire et il faudrait les utiliser avec parcimonie.

-Isolez-les plus loin à l’ouest. Trouvez des docteurs ou des herboristes qui sont incorporés dans des régiments et qu’ils s’en occupent. Enterrez les déchets le plus possible et dites aux soldats d’aller plus loin pour se soulager. Il nous reste quelques jours à tenir, hors de question que ce soit les maladies qui nous fassent perdre.

L’homme se mit au garde-à-vous en se frappant le poing sur le torse.

-Ce sera fait, Seigneur, termina-t-il en se penchant légèrement en avant.

Mel’Ermat commençait à s’impatienter ce qui était mauvais signe. Comme tous, l’attente était pire que tout. Beaucoup pensaient que la bataille serait un moment de délivrance. Mel’Ermat savait que ce n’était pas le cas, il n’y avait rien de pire que ce qui les attendait. Il eut à peine le temps de faire quelques pas qu’il se fit interpeller. C’était un homme rondouillet et dégarni sur le dessus. Derrière lui, on notait trois autres hommes. Ils étaient tous craintifs, comme si Mel’Ermat avait eu le pouvoir de les foudroyer. L’intendant était sûr de connaître l’homme mais il n’arrivait pas à savoir d’où.

-Seigneur, je voulais juste vous dire merci.

Mel’Ermat était intrigué et il dut l’exprimer visuellement car l’autre continua.

-Nous savons tous ce vous faites pour nous pendant que Mel’Placer n’est pas là.

C’était un marchand ! Mel’Ermat en était persuadé. C’était un habitué de la salle du trône et il devait venir se plaindre au moins une fois par semaine. Comme cela lui paraissait loin. L’homme était d’ailleurs bien moins véhément qu’à l’époque. Il était même docile.

-Savez-vous quand cela arrivera ?
-Quelques jours, avoua Mel’Ermat en sachant pertinemment de quoi il voulait parler.

L’autre soupira.

-Ne vous inquiétez pas, cela sera rapidement là.
-Oh, je ne suis pas inquiet, s’expliqua le marchand. Impatient que tout cela finisse.

Les autres hochèrent la tête.

-Nous sommes résignés maintenant, nous n’avons pas d’autres choix que de gagner, n’est-ce pas ?
-Effectivement…
-Est-ce vrai qu’ils mangent les cadavres des vaincus ?
-Je ne sais pas, se fit surprendre Mel’Ermat par la question. J’espère ne jamais le savoir.

L’autre sourit timidement.

-Vous devez être occupé, Seigneur, je vous souhaite une bonne journée.
-Vous de même, le congédia l’intendant de Mel.

Finalement, leur propagande avait plutôt bien marché. Il était vrai qu’ils ne semblaient pas avoir peur de la situation. Cela serait une autre paire de manches lorsque les armées se feraient face et qu’il faudrait tuer ou être tué. Mel’Ermat continua sa route en se demandant combien de fois il allait encore être interrompu. Un éclair blanc l’aveugla alors puis disparut la seconde d’après. L’intendant avait les yeux qui flashaient et se demandait ce qu’il venait de se passer. Au loin, en direction du camp d’Egéa, une tour avait fait son apparition. Maudits magiciens, grommela l’intendant en comprenant qui étaient les responsables. L’avantage était que désormais, tous savaient qu’ils étaient là. Ca passerait du baume au cœur aux plus craintifs des combattants. La nouvelle se répandrait comme une traînée de poudre. Mel’Ermat devait se concerter avec ses homologues pour savoir comment les magiciens comptaient prendre part aux évènements. Ils n’obéissaient normalement qu’à l’Empereur, et encore quand cela les arrangeait. Sachant que l’Empereur était du mauvais côté du champ de bataille, l’intendant craignait qu’ils n’en fassent qu’à leur tête.


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  • 2 semaines après...
  • 3 semaines après...
Hey merci de ton retour ! Ca me fait plaisir ! Voici la suite ;)

Il fallait qu’il retourne au quartier général. Il venait d’avoir une idée. Certes, elle ne changerait pas le déroulement de la bataille mais cela allait leur donner un avantage. Il emprunta le cheval d’un soldat qui eut le malheur de passer par là et le rassura en lui disant qu’il pourrait le récupérer plus tard. L’homme ne sembla pas ravi d’avoir à marcher plusieurs kilomètres pour récupérer sa monture mais Mel’Ermat lui fit bien comprendre qu’il n’avait pas le choix. A peine s’élança-t-il qu’il fut sûr qu’il aurait été aussi rapide à pied qu’à cheval. Il avait l’impression que des tentes, des chariots et des étaux avaient été ajoutés à chaque espace disponible. Il fallait qu’il fasse nettoyer ça. Il n’y avait plus la place de circuler. C’était à se demander comment les gens arrivaient à retrouver leurs tentes. Surtout qu’ils avaient fait construire le même modèle à la chaine par les couturières. Ils n’avaient pas le temps de faire des choses personnalisées si bien qu’elles étaient toutes rondes pour environ trois mètres de diamètre, blanches et maintenues au centre par une colonne en bois.

Mel’Ermat sortit du camp et regarda la plaine où se jouerait leur destin. En face d’eux s’étendaient les contreforts des monts étalant leurs longues ombres sur la région. Cela créait un reflet inquiétant et sombre sur la plaine humide. Le travail de ceux de l’eau se sentait d’ailleurs plus qu’il ne se voyait. La plaine ressemblait à une clairière classique baignant sous la rosée. De fait, Mel’Ermat savait que c’était en fait détrempé et qu’on s’enfonçait de près de vingt centimètres dans la boue. Entre les camps et ce marécage artificiel, il apprécia l’avancée des fortifications. Des petits forts de quelques dizaines de mètres carrés avaient été construits afin de fournir un appui solide aux défenseurs. On était d’ailleurs en train d’y déposer les canons. On construisait également des palissades, des pieux et construisaient des tranchées pour diriger les ennemis vers les endroits voulus.

Il longea donc les fortifications et repiqua vers l’intérieur lorsqu’il fut à proximité du quartier général. Malheureusement, il était seul. Enfin, pas seul à proprement parlé, mais sans aucun autre homologue à portée de main. Il aurait été trop long de les faire venir, il fallait agir maintenant.

-Général Vesclori !

Mel’Ermat avait choisi le premier gradé tombé sous sa main. C’était sûrement le plus vieux général encore en activité. Il servait sous les ordres d’Egéa et sembla surpris qu’un autre dignitaire fasse appel à ses services.

-Seigneur ? s’interrogea-t-il.
-Nous avons besoin de mille hommes pour une mission spéciale.

Il sembla visiblement surpris. Mille hommes n’étaient pas rien. Surtout quand on voyait leur large infériorité numérique.

-Est-ce que c’est un plan du conseil ?

Mel’Ermat avait l’impression de détecter une once de méfiance dans la voix décharnée du vieil homme.

-C’est tout comme, trancha l’intendant menaçant.

Il leur expliquerait plus tard.

-Quelle sera cette mission ?

Mel’Ermat lui fit signe de le suivre jusqu’à la carte du royaume de Sustor.

-Leur mission sera de s’attaquer aux vivres de l’ennemi. Je pense qu’ils n’avaient pas compté sur le fait que nous détruirions notre propre royaume dans notre retraite et je pense que leur seul ravitaillement doit venir de leur royaume. Je voudrais donc que cette force remonte cet approvisionnement pour y mettre fin.
-C’est une idée, admit le général. Heureusement que vous avez fait provisionner les notres à Mel.

Mel’Ermat ne s’auto-féliciterait jamais assez de la chance qu’il avait eue d’acheter à l’époque toute la nourriture disponible.

-Le problème reste de savoir comment cette troupe rejoindra une zone se situant derrière l’armée ennemie. Entre ceux arrivant des montagnes et l’autre armée au sud des reliefs, il parait difficile qu’ils puissent y être rapidement. Surtout une troupe de cette taille.
-Je sais, admit l’intendant. C’est pour ça qu’il faut qu’ils partent au plus tôt avant d’être repérés. Ils prendront plein sud jusqu’à la frontière puis la longeront jusqu’à trouver ce qu’ils cherchent. Avec un tel détour, ils ne devraient pas être arrêtés.
-Cela leur prendra presque un mois de faire un tel voyage, remarqua l’homme. Que feront-ils après la bataille ?
-Si nous gagnons, qu’ils gênent leur retraite. Si nous perdons, qu’ils mettent les campagnes à feu et à sang.

Mel’Ermat savait ce qu’il se passerait. Il ne voyait pas vraiment comment ils pouvaient gagner. Autant leur faire le plus de dommages possibles afin qu’ils ne s’installent jamais sur ces terres.

-Sélectionnez les troupes, je vous ferais parvenir l’accord des rois et des intendants avant leur départ.

L’homme hocha la tête et quitta le bâtiment. Un de ses généraux entra à sa place.

-Mel’Surika, c’est parfait ! continua l’intendant dans sa lancée.

Il lui fit signe de s’approcher. Ils regardèrent la carte de Mel un instant, méditatif. Il sentait les coups d’œil que lui lançait son général à ses côtés. Il se mit à parler tout bas, les bras croisés toujours face à la carte de leur patrie.

-Pensez-vous que nous allons gagner ?

La question surprit son gradé. Autour d’eux, les états-majors déposaient des papiers, en récupéraient d’autres, griffonnaient sur les cartes et repartaient. Certains recevaient d’autres gradés pour leur donner des instructions. L’homme se frotta la nuque d’une main moite.

-Je pense que…
-Je ne suis pas un soldat, le coupa Mel’Ermat. Je veux le fond de votre pensée.
-Je ne pense pas, reprit l’homme d’une voix sûre.
-Bien, nous nous accordons là-dessus. Nous devons prévoir ce que nous allons faire si nous sommes défaits et encore là pour gérer les choses. On nous a dit que nos adversaires pouvaient se rendre jusqu’en Ostel avant l’hiver. Il faudrait les retenir d’un moyen ou d’un autre afin de les bloquer bien avant.

Le général écouta, sachant que son intendant avait déjà réfléchi à un plan. Il décida de l’écouter en intégralité. Mel’Ermat désigna La vive, fleuve sur lequel il avait navigué lors de l’accident des bateaux.

-Ce sera donc là ! Nous devons les maintenir de l’autre côté du fleuve. Nous avons le seul royaume coupé en deux par un cours d’eau. Si nous détruisons les ponts au nord et au sud, il ne restera que la région de la capitale à défendre. Cela nous ferait deux ponts, l’un étant proche de l’autre. Leur supériorité numérique ne leur servirait plus à rien.
-C’est un bon plan, fit l’homme. Mais si les cours d’eau ont été asséchés par l’été, ils pourront les traverser.
-Je pense que si l’été est aussi rude que ça, ils ne traverseront nos royaumes qu’au ralenti, sautant d’un point d’eau à un autre. Nous pourrions d’ailleurs y laisser des surprises empoisonnées. Bref, reprit Mel’Ermat, si l’été est chaud, cela veut dire qu’ils atteindront La vive seulement au début de l’automne et prions alors pour que les pluies aient commencé d’ici là.
-Nous pourrions préparer le terrain, proposa le général, envoyer une petite force dès maintenant saboter les ponts et une autre pour réserver des surprises pendant leur avancée, on pourrait gagner du temps.
-Bonne idée, approuva Mel’Ermat, tenez-moi informé des préparatifs et donnez leur carte blanche pour prendre ce qu’il faut pour leur mission. Espérons juste que nous faisons tout ça en vain… Surtout pas un mot à qui que ce soit.

L’homme hocha la tête. Il n’avait plus rien à faire qu’attendre désormais.



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Hey merci de ton retour ! Ca me fait plaisir ! Voici la suite ;)

Il fallait qu’il retourne au quartier général. Il venait d’avoir une idée. Certes, elle ne changerait pas le déroulement de la bataille mais cela allait leur donner un avantage. Il emprunta le cheval d’un soldat qui eut le malheur de passer par là et le rassura en lui disant qu’il pourrait le récupérer plus tard. L’homme ne sembla pas ravi d’avoir à marcher plusieurs kilomètres pour récupérer sa monture mais Mel’Ermat lui fit bien comprendre qu’il n’avait pas le choix. A peine s’élança-t-il qu’il fut sûr qu’il aurait été aussi rapide à pied qu’à cheval. Il avait l’impression que des tentes, des chariots et des étaux avaient été ajoutés à chaque espace disponible. Il fallait qu’il fasse nettoyer ça. Il n’y avait plus la place de circuler. C’était à se demander comment les gens arrivaient à retrouver leurs tentes. Surtout qu’ils avaient fait construire le même modèle à la chaine par les couturières. Ils n’avaient pas le temps de faire des choses personnalisées si bien qu’elles étaient toutes rondes pour environ trois mètres de diamètre, blanches et maintenues au centre par une colonne en bois.

Mel’Ermat sortit du camp et regarda la plaine où se jouerait leur destin. En face d’eux s’étendaient les contreforts des monts étalant leurs longues ombres sur la région. Cela créait un reflet inquiétant et sombre sur la plaine humide. Le travail de ceux de l’eau se sentait d’ailleurs plus qu’il ne se voyait. La plaine ressemblait à une clairière classique baignant sous la rosée. De fait, Mel’Ermat savait que c’était en fait détrempé et qu’on s’enfonçait de près de vingt centimètres dans la boue. Entre les camps et ce marécage artificiel, il apprécia l’avancée des fortifications. Des petits forts de quelques dizaines de mètres carrés avaient été construits afin de fournir un appui solide aux défenseurs. On était d’ailleurs en train d’y déposer les canons. On construisait également des palissades, des pieux et construisaient des tranchées pour diriger les ennemis vers les endroits voulus.

Il longea donc les fortifications et repiqua vers l’intérieur lorsqu’il fut à proximité du quartier général. Malheureusement, il était seul. Enfin, pas seul à proprement parlé, mais sans aucun autre homologue à portée de main. Il aurait été trop long de les faire venir, il fallait agir maintenant.

-Général Vesclori !

Mel’Ermat avait choisi le premier gradé tombé sous sa main. C’était sûrement le plus vieux général encore en activité. Il servait sous les ordres d’Egéa et sembla surpris qu’un autre dignitaire fasse appel à ses services.

-Seigneur ? s’interrogea-t-il.
-Nous avons besoin de mille hommes pour une mission spéciale.

Il sembla visiblement surpris. Mille hommes n’étaient pas rien. Surtout quand on voyait leur large infériorité numérique.

-Est-ce que c’est un plan du conseil ?

Mel’Ermat avait l’impression de détecter une once de méfiance dans la voix décharnée du vieil homme.

-C’est tout comme, trancha l’intendant menaçant.

Il leur expliquerait plus tard.

-Quelle sera cette mission ?

Mel’Ermat lui fit signe de le suivre jusqu’à la carte du royaume de Sustor.

-Leur mission sera de s’attaquer aux vivres de l’ennemi. Je pense qu’ils n’avaient pas compté sur le fait que nous détruirions notre propre royaume dans notre retraite et je pense que leur seul ravitaillement doit venir de leur royaume. Je voudrais donc que cette force remonte cet approvisionnement pour y mettre fin.
-C’est une idée, admit le général. Heureusement que vous avez fait provisionner les notres à Mel.

Mel’Ermat ne s’auto-féliciterait jamais assez de la chance qu’il avait eue d’acheter à l’époque toute la nourriture disponible.

-Le problème reste de savoir comment cette troupe rejoindra une zone se situant derrière l’armée ennemie. Entre ceux arrivant des montagnes et l’autre armée au sud des reliefs, il parait difficile qu’ils puissent y être rapidement. Surtout une troupe de cette taille.
-Je sais, admit l’intendant. C’est pour ça qu’il faut qu’ils partent au plus tôt avant d’être repérés. Ils prendront plein sud jusqu’à la frontière puis la longeront jusqu’à trouver ce qu’ils cherchent. Avec un tel détour, ils ne devraient pas être arrêtés.
-Cela leur prendra presque un mois de faire un tel voyage, remarqua l’homme. Que feront-ils après la bataille ?
-Si nous gagnons, qu’ils gênent leur retraite. Si nous perdons, qu’ils mettent les campagnes à feu et à sang.

Mel’Ermat savait ce qu’il se passerait. Il ne voyait pas vraiment comment ils pouvaient gagner. Autant leur faire le plus de dommages possibles afin qu’ils ne s’installent jamais sur ces terres.

-Sélectionnez les troupes, je vous ferais parvenir l’accord des rois et des intendants avant leur départ.

L’homme hocha la tête et quitta le bâtiment. Un de ses généraux entra à sa place.

-Mel’Surika, c’est parfait ! continua l’intendant dans sa lancée.

Il lui fit signe de s’approcher. Ils regardèrent la carte de Mel un instant, méditatif. Il sentait les coups d’œil que lui lançait son général à ses côtés. Il se mit à parler tout bas, les bras croisés toujours face à la carte de leur patrie.

-Pensez-vous que nous allons gagner ?

La question surprit son gradé. Autour d’eux, les états-majors déposaient des papiers, en récupéraient d’autres, griffonnaient sur les cartes et repartaient. Certains recevaient d’autres gradés pour leur donner des instructions. L’homme se frotta la nuque d’une main moite.

-Je pense que…
-Je ne suis pas un soldat, le coupa Mel’Ermat. Je veux le fond de votre pensée.
-Je ne pense pas, reprit l’homme d’une voix sûre.
-Bien, nous nous accordons là-dessus. Nous devons prévoir ce que nous allons faire si nous sommes défaits et encore là pour gérer les choses. On nous a dit que nos adversaires pouvaient se rendre jusqu’en Ostel avant l’hiver. Il faudrait les retenir d’un moyen ou d’un autre afin de les bloquer bien avant.

Le général écouta, sachant que son intendant avait déjà réfléchi à un plan. Il décida de l’écouter en intégralité. Mel’Ermat désigna La vive, fleuve sur lequel il avait navigué lors de l’accident des bateaux.

-Ce sera donc là ! Nous devons les maintenir de l’autre côté du fleuve. Nous avons le seul royaume coupé en deux par un cours d’eau. Si nous détruisons les ponts au nord et au sud, il ne restera que la région de la capitale à défendre. Cela nous ferait deux ponts, l’un étant proche de l’autre. Leur supériorité numérique ne leur servirait plus à rien.
-C’est un bon plan, fit l’homme. Mais si les cours d’eau ont été asséchés par l’été, ils pourront les traverser.
-Je pense que si l’été est aussi rude que ça, ils ne traverseront nos royaumes qu’au ralenti, sautant d’un point d’eau à un autre. Nous pourrions d’ailleurs y laisser des surprises empoisonnées. Bref, reprit Mel’Ermat, si l’été est chaud, cela veut dire qu’ils atteindront La vive seulement au début de l’automne et prions alors pour que les pluies aient commencé d’ici là.
-Nous pourrions préparer le terrain, proposa le général, envoyer une petite force dès maintenant saboter les ponts et une autre pour réserver des surprises pendant leur avancée, on pourrait gagner du temps.
-Bonne idée, approuva Mel’Ermat, tenez-moi informé des préparatifs et donnez leur carte blanche pour prendre ce qu’il faut pour leur mission. Espérons juste que nous faisons tout ça en vain… Surtout pas un mot à qui que ce soit.

L’homme hocha la tête. Il n’avait plus rien à faire qu’attendre désormais.



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  • 2 semaines après...
Voici la suite ! Ca chauffe !

Trois jours plus tard, à l’aube, Mel’Ermat contemplait les avancées des préparatifs dans la grande plaine. Ils attendaient des nouvelles de leurs éclaireurs à tout moment. Un nouveau fortin était presque prêt et l’intendant porta son regard sur le terrain. Ils auraient pu encore passer un mois à mettre des défenses en place que cela n’aurait pas été suffisant. Néanmoins, les troupes de l’eau, bien aidé par la pluie de ces deux derniers jours, avaient rendu pratiquement impraticable le champ de bataille. C’était devenu au-delà du boueux, certains creux de terrain étaient devenus des grandes flaques voire même des petites mares. Un vrai marécage géant. Mel’Ermat tourna la tête et regarda en direction du sud. Aucun signe des ennemis arrivant par là. C’était plutôt une bonne chose.

-Ce sera une chaude journée, commença Ben’Lor dans son dos et venant se poster à ses côtes.

Mel’Ermat leva la tête vers le ciel. Pas un seul nuage en vue et le soleil qui dépassait faiblement de l’horizon semblait déjà chaud. Il hocha la tête. Le guerrier géant chauve regarda aussi vers le sud.

-Des éclaireurs viennent de rentrer. Notre troupe continue son avancée au sud et il n’y a aucun problème à déplorer.

C’était une bonne nouvelle, leur rôle pourrait être crucial. Il n’avait pas eu de mal à convaincre ses homologues du bien fondé de cette mission. Quand on ne pouvait pas atteindre sa cible, autant la frapper là où cela faisait mal. Le général eut donc son feu vert et la petite armée s’était immédiatement mise en chemin. Elle était composée à moitié de chevaliers et à moitié de fantassins. Cela permettrait d’être assez mobile et très peu exposé. En plus de soldats, il avait été incorporé des contrebandiers et des voleurs dont les compétences dans le domaine de la discrétion les sauvèrent de la pendaison. Ceux-ci devaient être impliqués dans les processus de décision afin de transformer des logiques guerrières en des logiques de voleur. Ils cherchaient à faire une guérilla et non pas l’affrontement direct. Mel’Ermat savait que c’était la dernière fois qu’ils auraient des nouvelles de leur petite force. Par mesure de précaution, les allers retours que faisaient actuellement quelques éclaireurs entre la troupe en mission et le campement général cesseraient afin qu’on ne remonte pas leur piste.

-Tant mieux.
-Nous avons commencé à donner les ordres pour que les camps soient nettoyés, continua Ben’Lor. Tu devrais faire pareil de ton côté.

Mel’Ermat acquiesça, très peu bavard. Ils allaient tout ranger afin de garder que le strict minimum. La bataille pouvait avoir lieu aujourd’hui même pour le peu qu’ils savaient. Il fallait donc être prêts à tout moment. Les chariots étaient remplis d’affaires personnelles et rangés d’un côté du camp. Seules devaient rester les tentes et des couvertures. Mel’Ermat souhaitait retarder au maximum ce moment car beaucoup ne tenaient le coup que par ce qu’ils ne se rendaient pas encore compte de la situation. Après les entraînements, ils se détendaient donc en écoutant de la musique, jouant ou discutant. Une fois le camp mit en position de guerre, ils n’auraient plus rien à faire que d’attendre. Cela jouerait sur le moral et l’ambiance risquait d’être particulière.

-Il faudrait aussi t’occuper des discours.

Mel’Ermat soupira, il aurait volontiers laissé ça à Mel’Placer qui se délectait de ses apparitions publiques. Devoir s’exprimer devant tout son royaume allait être calvaire puisqu’il était impossible de rassembler tout le monde quelque part. Ils allaient devoir faire plusieurs groupes et donc plusieurs discours. Au loin, un versant de la colline prit virtuellement feu. Mel’Ermat savait que ce n’était que de la magie qui avait été mise à disposition des soldats. C’était le signal. L’armée ennemie était en vue.

-Dépêchons-nous, intervint alors l’intendant. Il ne nous reste plus beaucoup de temps.

Ben’Lor se mit face à lui la mine sérieuse et lui tendit la main. Mel’Ermat la regarda un instant, la serra et fut emporté par la force du géant qui lui donna une accolade. Ils ne se dirent rien. Le guerrier le regarda, hocha la tête et s’en alla. Mel’Ermat espérait que ce n’était pas la dernière fois qu’ils allaient se voir. L’intendant se mit alors immédiatement en route. Ils devaient trouver ses généraux, l’heure de la guerre avait sonnée.



Chapitre 15


La journée suivante fut tendue et silencieuse. L’armée ennemie investissait lentement la grande plaine mais n’osait visiblement s’aventurer trop loin. Sur leurs collines, l’armée de l’Empire regardait avec appréhension ce flot de points noirs émerger lentement des collines. Impossible de distinguer quoique ce soit de là mais Mel’Ermat voyait avec appréhension d’énormes créatures terrestres comme aériennes accompagnant cette foule. Le front s’étendait sur plusieurs kilomètres et ne cessait de s’agrandir. Par curiosité, l’intendant de Mel regarda une nouvelle fois au sud mais ne vit toujours pas de signes du reste des ennemis. Ceux de l’Air étaient partis observer l’autre foule et leur avait dit que leurs adversaires avaient essayé de trouver un moyen de traverser les inondations qu’avaient créées ceux de l’Eau pour les prendre en étau par le sud. Ils avaient fini par abandonner et se repliaient comme prévu le long des reliefs pour se réassocier à l’armée principale.

Après deux heures d’attente dans le soleil matinal, il fut clair que l’ennemi attendait. Prenant sûrement mesure de la situation, il devait mettre au point une technique d’assaut. Au vu de leur avantage numérique, Mel’Ermat se dit qu’une attaque frontale avec débordement par les flancs leur aurait été fatal. Tous les royaumes se succédaient en ligne comme s’ils étaient prêts à contrer cette tactique. Ce n’était évidemment pas le cas mais l’ennemi ne le savait pas. Autant jouer la carte du bluff le plus longtemps possible. La consigne était de maintenir une ligne mais à tout signe de débordement, de reculer pour les empêcher de mettre leur plan en action.

A midi, rien ne se passa. L’ennemi garda sa position attentiste et les généraux congédièrent la moitié des troupes tandis que l’autre resta mobilisée. Une partie de ceux-ci furent envoyés démonter les tentes. Vu les températures nocturnes et le temps des jours à venir, ce n’était pas la peine de garder d’endroits où dormir. Ils ne restaient donc plus qu’une colline couverte de matelas et de couvertures à perte de vue. La fébrilité se sentait et Mel’Ermat dut s’obliger à lâcher la garde de son épée tant il se crispait dessus. Profitant du répit donné par ses ennemis, il passait en permanence au travers des régiments et discutaient avec bienveillance avec tout le monde afin de les garder concentrés. A l’heure actuelle, tout le monde était assis et attendaient le signal de se remettre en position.

Pourtant, plus l’après-midi passa, moins l’ennemi ne tentait quoi que ce soit. Ils continuaient d’élargir leur ligne d’occupation mais ne convergeaient pas vers eux. Mel’Ermat vit arriver Egéa en cheval. L’homme regardait dans toutes les directions. Il devait le chercher. Mel’Ermat se manifesta avant que ce dernier abandonne sa quête. Retrouver quelqu’un dans ces armées était un calvaire.

-Ah, Mel’Ermat, fit l’intendant de Terra quand il le vit.

Il descendit de sa bête et laissa ses rênes à un civil tout proche. C’était la première fois qu’il voyait Egéa dans une tenue autre que la robe blanche de deuil qu’il avait enfilé depuis l’Impériale. C’était une tenue fonctionnelle, toujours à base de blanc mais striée de noir. Il avait revêtu une armure de cuir et de métal qui ne semblait pas entraver ses mouvements.

-Nous avons repris les constructions des défenses. Ils ne semblent pas pressés de nous affronter.

Mel’Ermat regarda les monts en se frottant la barbe.

-C’est étonnant, je pensais que comme pour Erno, ils auraient continué leur marche. Enfin, nous n’allons pas nous plaindre… Les ballons dirigés sont prêts ?

L’homme hocha la tête. Les Messagers s’étaient joints, ou avaient été contraints peu importe, à l’effort de guerre et leurs grands vaisseaux volants seraient utilisés comme engin de guerre. On y avait des canons et énormément de bombes. A l’heure actuelle, les ballons étaient attachés au sol derrière leurs lignes. Autant ne pas dévoiler immédiatement toutes leurs cartes.

-Il y a quelque chose de plus bizarre, lui apprit Egéa. Ceux du Feu sont là.
-Du Feu ? s’étonna franchement Mel’Ermat. Mais je croyais qu’ils avaient autre chose à faire !

C’était partiellement vrai. Après la discussion avec son espion, il avait appris que ceux-ci se dirigeaient par là mais il n’était pas sûr que ça serait directement auprès des armées.

-Donc tu n’en sais pas plus ? déduisit l’intendant de Terra.
-Non, et je ne dois pas dire que ceux des Quatre Races me tiennent particulièrement informé.
-Ah…

Egéa semblait déçu. Il devait croire que Mel’Ermat était devenu l’interlocuteur privilégié de ceux-ci. Tout ça parce qu’une fois, il avait été invité à discuter par Ondoliel de l’Air.

-Bien, tiens-moi informé si tu apprends quelque chose, lui lança Egéa en retournant vers son cheval.
-Je n’y manquerai pas ! lui répondit l’intendant en le regardant s’éloigner.

Mel’Ermat s’avança au travers des lignes de soldats et regarda la future ligne de front. En effet, des membres du feu, des milliers, allaient d’un point à un autre sans but visible. Ils se penchaient, regardaient le ciel, repartaient puis recommençaient leur cinéma ailleurs. Que pouvaient-ils bien faire ? Ils ne se formalisaient néanmoins pas du regard curieux des armées devant lesquelles ils évoluaient. Un capitaine à ses côtes se permit la remarque.

-Mon Seigneur, que font-ils ?
-Si je savais… En tout cas, faites passer l’ordre de ne pas les en empêcher.

Mel’Ermat regarda son gradé s’éloigné vers les autres groupes de soldats pour faire passer le mot. Des soldats assis au sol lui jetèrent un regard intrigué mais baissèrent les yeux dès qu’ils virent que l’intendant les regardait aussi. C’était une troupe hétéroclite de tout âge et de toutes les origines. Les guerriers armurés côtoyaient des miliciens aux armures de cuir et aux épées usées. Ils semblaient tous fatigués et résignés mais Mel’Ermat ne voyait pas de désespoir. Les uns regardaient au loin pensivement, d’autres jouaient avec leurs armes et les autres parlaient de tout et de rien, juste pour passer le temps.

L’après-midi s’étira et le soleil commençait à décliner. Un assaut nocturne semblant peu probable, l’attente d’un combat se réduisit au fur et à mesure et plus de soldats furent congédiés afin de prendre du repos. Ceux du Feu continuaient leurs balais incessants et certains restaient assis au sol et semblaient prier. Mel’Ermat se demanda alors si ces créatures avaient des Dieux. C’était une bonne question mais l’intendant doutait d’avoir un jour la réponse. L’intendant de Mel avait quand même l’impression que ceux-ci accéléraient la cadence. Ils semblaient presque nerveux. Enfin il ne pouvait que le supposer, ils ne présentaient pas vraiment les mêmes caractéristiques physiques qu’un être humain. Les ombres de la nuit commencèrent lentement à s’étendre sur le champ de bataille et les monts tendirent les leur vers eux.

Un vent de panique s’étendit alors sur la région. Cela commença par quelques cris à sa gauche et derrière lui. Puis les cris aigus s’élevèrent et les murmures se firent plus forts jusqu’à devenir des cris. Mel’Ermat regarda en direction des ennemis et vit ce qui terrifiait les armées. Les ombres bougeaient. Les Ombres étaient là. Et ce n’était pas quelques unes d’entre eux, il y devait y en avoir des milliers. Mel’Ermat serait tombé sur ses genoux s’il n’était pas paralysé par la peur. Il avait vu ce que quelques unes étaient capables de faire… Ils allaient tous mourir. Il eut envie de se retourner et de courir. Comme c’était ce que commençaient à faire des formes autour de lui, la colère supplanta la terreur.

-Tenez les positions ! cria-t-il.


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  • 1 mois après...

Les gradés semblaient dépassés par la situation. Mel’Ermat se demandait s’il n’aurait pas dû tenir au courant ses états-majors de ce problème. A sa décharge, il n’aurait jamais imaginé que les Ombres soient là pour cette bataille. Les premiers généraux lancèrent leurs ordres et les tentatives de désertions furent matées, à coup de poing ou plats d’épées s’il le fallait. Les bataillons étaient désordonnés et il fallut près de trente minutes pour que tous se mettent au rapport. Mel’Ermat était bien content d’avoir pensé à mettre un cordon de sécurité autour du camp afin d’empêcher les mouvements de panique. Il n’avait pas le temps d’aller chercher des renforts aux camps, d’autres le feraient pour lui. Pour le moment, il n’arrivait qu’à fixer les ombres qui s’étendaient et qui permettaient aux créatures qui grouillaient à l’intérieur d’approcher inexorablement d’eux.

 

-Allez, foutus mages, grogna Mel’Ermat tout bas, c’est le moment de faire quelque chose.

 

Il sautillait sur place de nervosité.
Des cris, qui ne pouvaient être que de mourants, retentirent à sa gauche. Soudain, des bataillons entiers de son armée tourner talons et s’enfuirent.

 

Un point dans le ciel attira son attention. C’était à peine plus gros qu’une étoile mais il était trop tôt pour en voir quelques unes. Alors que tous prenaient la fuite sous l’attaque des Ombres, des silhouettes enflammées disparurent dans ce point lumineux et Mel’Ermat comprit qu’il devait s’agir de quelque chose créée par ceux du Feu. A ce moment-là, l’un d’entre eux passa à son côté, s’embrasa et s’envola en direction de la masse. Il disparut et la boule d’énergie grossit. Ce fut alors des centaines d’autres qui suivirent sn exemple et qui firent grandir l’espèce d’étoile. Cela ne semblait faire que la taille d’un pouce et pourtant cela ne cessait de croître. Malgré cette petite taille, cette chose était aussi éblouissante qu’un soleil et un cri plus terrifiant s’éleva du champ de bataille. Les Ombres souffraient. Les silhouettes de ceux du Feu continuaient de nourrir le puissant sortilège qui prenait de plus en plus de puissance. La luminosité était insoutenable et Mel’Ermat tomba au sol en essayant de se cacher les yeux et les oreilles des hurlements de douleur des monstres millénaires. A chaque fois qu’il crut que cela ne pouvait être pire, cela continuait de briller de mille feux et même les yeux fermés il ne voyait qu’une atroce lumière blanche. Les cris des Ombres suffisaient à peine à couvrir les gémissements de douleur de plus de cinq millions d’êtres humains en souffrance. Puis soudain, il n’y eut plus rien. Plus un bruit mis à par celui d’Hommes grognant de douleur. Mel’Ermat cligna des yeux mais ne vit rien. Il ne distinguait que du blanc. Puis, alors qu’il craignait d’être devenu aveugle, il retrouva progressivement la vue. Autour de lui, tous étaient au sol et retrouvaient progressivement l’usage de leurs yeux. Mel’Ermat se releva et regarda autour de lui. Les Ombres ne semblaient pas avoir frappées par ici. En tout cas, elles ne semblaient plus là. Ni aucun membre du Feu par ailleurs. Le décor était similaire à celui qu’ils avaient vu toute la journée. Le sortilège avait aussi eu l’effet d’arrêter la fuite des déserteurs. Ceux-ci regardaient, à la fois hébétés et honteux, autour d’eux pour être sûrs que c’était bien fini.

 

Une demi-heure plus tard, un lieutenant de Ben’Lor passa devant lui et il l’intercepta. Mel’Ermat était en train de remettre de l’ordre dans ses troupes mais il devait savoir les conséquences de ce qu’il venait de se passer.

 

-Les Ombres ont frappé au nord des troupes de Terra et en partie sur le peu de troupe de Sal qui étaient là. Ca a été un carnage mon Seigneur, on a perdu des milliers de personne en l’espace d’une minute.

 

Mel’Ermat se couvrit la bouche. En une heure, ils auraient pu être tous morts.

 

-Ben’Lor a discuté avec Ondoliel. Elle est pratiquement sûre qu’une des Quatre Race vient de disparaître.

 

Mel’Ermat déglutit. Les membres du Feu semblaient s’être sacrifiés pour vaincre les Ombres. Cela lui rappela les textes théologiques sur le fait que l’Ombre ne pouvait naître que grâce à la Lumière. Visiblement, trop de lumière leur avait été mortel. Cela avait chassé toutes les ombres de la région et les Ombres n’avaient pas eu d’abri pour se protéger. Mel’Ermat ne mesurait pas encore ce que venait d’accomplir ces créatures. Ils leur avaient tous sauvés la vie et il n’y avait plus personne à honorer. S’ils s’en sortaient et qu’ils gagnaient, Mel’Ermat se promit de faire construire des monuments en leur honneur. Le cavalier continua sa route en direction du sud.

 

-Vous allez bien ? s’inquiéta Mel’Cari dans son dos.

 

Mel’Ermat le regarda. Son colonel continua de cligner des yeux et à se les frotter.

 

-Ca va, j’ai connu mieux… Faites passer le message que tout le monde aille se reposer et que le cordon extérieur soit doublé. Il n’y aura pas de bataille ce soir et personne ne doit tenter de fuir.

-Oui, Seigneur, s’inclina l’homme en partant distribuer les ordres aux généraux de Mel.

 

Mel’Ermat regarda les monts. Leurs adversaires venaient d’abattre leur première carte et l’intendant avait peur de découvrir les autres. L’intendant bailla. Cette attente l’exténuait. Il était aussi fatigué que s’il avait couru plusieurs heures. Ce stress l’avait achevé. Comme la plupart des troupes présentes, il remonta la colline en direction du campement. Retrouver sa couche était assez facile puisqu’il n’avait qu’à trouver ses gardes du corps pour trouver son emplacement. C’était néanmoins plus difficile depuis que sa tente avait été rangée. Il ne se souvenait que d’être au pied d’un grand chêne. Ce fut d’ailleurs comme ça qu’il retrouva son matelas. Sans même prendre le temps de prendre un repas, il essaya de s’endormir. Il n’aurait sûrement pas beaucoup d’occasions de reposer à l’avenir. Surtout si on se mettait à le solliciter. S’endormir ne fut pas facile. Les gens parlaient autour de lui et le bourdonnement créé était difficile à ignorer. Mel’Ermat leur pardonnait néanmoins volontiers. Il comprenait que la découverte de l’existence des Ombres pouvait être bouleversante. Plus l’était encore leur extinction. L’intendant de Mel s’endormit avec des pensées morbides, se demandant qui allait nettoyer les morts de l’attaque des Ombres. 

 

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-= Inxi =-

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Comme le passage d'avant était un peu court, voici la suite !! Une 'petite' bataille que tous attendaient ;)

 

 

 

Heureusement pour lui, cela n’influença pas ses rêves. Il avait l’habitude de cauchemarder des dernières choses auxquelles il pensait. Il devait vraiment avoir été fatigué. Ce fut Mel’Cari qui le réveilla. Il sentit une main sur son épaule et entendit son nom. Il ouvrit brusquement les yeux et son colonel se redressa.

 

-Mon Seigneur, ils arrivent.

 

Il n’en fallut pas plus pour que son corps décharge un torrent d’adrénaline dans son corps. Il fut debout l’espace d’après et vit que tous ses généraux étaient là. Le camp était même en ébullition. Il devait avoir été le dernier à être réveillé. Il le leur reprocherait plus tard. On lui tendit une maigre collation. Mel’Ermat allait le laisser de côté mais se rappela qu’il n’avait rien avalé la veille. Il ne pourrait pas combattre sans énergie. Il se força donc à avaler le pain et les œufs qui lui étaient présentés.

 

-Quelle est la situation ? demanda-t-il entre deux bouchées.

 

Autant qu’ils parlent au lieu de le regarder bêtement manger.

 

-Ils ont commencé à s’activer à l’aube et on pense qu’ils avancent.

 

Mel’Ermat regarda l’horizon. Le demi-cercle orangé qui dépassait lui indiquait que cela faisait à peine un quart d’heure. C’était Mel’Surika qui avait parlé et comme les autres généraux, il était en tenue de guerre. Il avait fait fi des tenues de cérémonies et portait une armure complète qui, même polie, semblait avoir vécue. Mel’Ermat se demandait depuis combien de temps il pouvait l’avoir en sa possession.

 

-Les troupes ? continua-t-il en regardant l’agitation de toute part.

 

Rêvait-il où des civils semblaient désespérément chercher leurs armes ?

 

-Elles se rassemblent selon ce que nous avons convenu.

-Très bien, acheva Mel’Ermat après sa dernière bouchée.

 

Il jeta son assiette au sol et boucla la ceinture qui portait son épée. Il se battrait à pied, ayant laissé son cheval pour les unités de cavalerie. Il manquait de tout et surtout de temps. Il remarqua que tous ses soldats personnels étaient également prêts. Ca serait le cœur de son unité. Il semblait tous autant déterminés, du jeune Mel’Eclé au grand Mel’Flor. Il leur fit un signe de la tête, cela valait tous les discours qu’il avait dû faire la veille. Ils se joignirent à la foule qui affluait en direction des collines. Cette dernière était noire de monde et cela ne cessait d’augmenter. En descendant les flancs, les trouées dans les arbres leur laissaient un aperçu sur l’ennemi. Effectivement, ils avançaient. On voyait nettement que leur ligne de front s’étirait bien plus que la leur autant en largeur qu’en profondeur. Mel’Ermat déglutit, et il restait encore toutes leurs forces du sud…

 

Mel’Ermat et son régiment était une petite force présente en deuxième ligne, plutôt centré côté gauche de l’armée de Mel. Plus loin à sa gauche était rassemblée un tiers de la cavalerie de l’Empire. Les deux tiers restant avait été placés sur le flanc gauche. Leur cavalerie, comme celle de l’ennemie, serait peu efficace dans ce combat. Les sols détrempés étaient trop dangereux pour une charge de front. Si les chevaux piétinaient là-dedans, ils risquaient de se rompre les membres voire même faire tuer leur cavalier. Là charge serait donc très courte et seulement en appui aux fantassins. On avait délimité la zone inondée par de grandes tiges que les magiciens avaient rendues fluorescentes. Ce n’était pas très discret mais cela leur servirait plus à eux qu’à l’ennemi. A l’heure actuelle, ces marques étaient à deux cents mètres. Si tout se passait bien, ce serait donc la délimitation des combats.

 

La troupe de Mel’Ermat se plaça entre deux fortins ce qui laissa l’occasion à l’intendant de voir un peu plus de leur organisation. L’espace entre les deux bastions était d’une centaine de mètres et sur le front avant se dressait des pieux posés à quarante-cinq degrés en direction des ennemis. C’était juste derrière que se situait la première ligne. Eux venaient près de vingt mètres après. Mel’Ermat était du côté du fortin de gauche et voyait au-dessus de lui des artilleurs s’agiter pour que leurs machines soient prêtes. Il n’apercevait rien d’autre du fortin de pierre et de bois. L’intendant leva la tête derrière lui. Les ballons dirigés prenaient de l’altitude. La journée semblait d’ailleurs dégagée, si ce n’était cet énorme nuage blanc juste au-dessus du champ de bataille.

 

Un porte-étendard vint jusqu’à lui. Il portait le symbole royal de Mel’Placer en haut d’une lance. Frappé des couleurs de Mel, il était fier du rôle qu’il avait. Il s’approcha de l’intendant.

 

-Mon Seigneur, Ben’Lor transmet le message que ses troupes et celles de l’intendant Egéa s’intervertissent.

-Pourquoi cela ? s’étonna Mel’Ermat.

 

Il avait été décidé de mettre les guerriers de Syrarture plutôt au centre où leur expérience pourrait être déterminante.

 

-Les bêtes de l’ennemi sont en train de contourner la plaine par le nord et vont tenter de nous encercler. Ayant plus l’habitude des monstruosités, ils vont essayer d’empêcher ce mouvement.

-D’accord, en position.

 

On lui tendit un casque à visière et il l’enfila prestement. Comme tous les professionnels présents autour de lui, ils se vérifièrent tous les uns les autres leurs équipements. Les sangles étaient bien verrouillées, il n’y avait pas de pli dans les cottes de mailles et les armes n’étaient pas entravées dans les fourreaux. Les miliciens quand à eux ne s’avéraient pas trop savoir quoi faire et tournaient la tête de tous les côtés en se jetant des coups d’œil apeurés. Mel’Ermat s’avança vers un qui semblait se mettre à pleurer à tout moment. L’homme recula de quelques pas à mesure que l’intendant s’approchait de lui. S’il ne recula pas plus c’est qu’il buta sur un compagnon.

 

-N’aie pas peur, soldat, ils sont aussi apeurés que nous.

 

Mel’Ermat tira sur son armure de cuir pour la redresser et lui tapa un coup sec sur le torse. L’homme hocha plusieurs fois la tête mais ne sembla pas plus convaincu. C’était de toute manière un discours destiné à tous ceux qui pouvaient l’entendre.

 

-N’oubliez pas pourquoi vous vous battez, pour vos familles, pour vos terre mais surtout pour survivre. N’ayez pas de pitié car ils n’en auront pas. Restez proches de votre formation et couvrez vous les uns les autres.

 

Les consignes étaient simples.

 

-Oui, intendant ! rugirent tous les militaires à proximité.

 

Ils avaient compris qu’il fallait montrer des signes d’enthousiasme. Les rituels d’avant-bataille commencèrent alors. Certains donnèrent une dernière accolade pour se souhaiter bonne chose, d’autres s’agenouillaient pour une prière, une poignée firent chauffer leurs muscles avec des étirements et les derniers se contentèrent de rester debout immobiles. Il avait été décidé que les familles auraient le droit de se battre ensemble dans les mêmes régiments. Ils n’étaient pas rares de voir des parents serrer leurs enfants dans leurs bras. Mel’Ermat eut alors une pensée fugace pour sa famille, normalement en sécurité en Ostel. Cela lui fit de la peine, combien y aurait-il d’orphelins, de veufs et de veuves après cette bataille ? Au moins, se dit Mel’Ermat, ils seraient ensemble jusqu’à la fin.

 

Les ennemis se firent visibles une dizaine de minutes plus tard. Ils étaient encore loin mais nettement visibles. Surtout pour les plus grosses créatures. Il y avait là des géants d’une dizaine de mètres de haut. Ils étaient tous différents les uns des autres. Certains étaient squelettiques et très peu habillés comme d’autres étaient musclés et couverts de plaques de fer. Il y avait des golems de terre à leur côté, boule de roche directement extraite des montagnes dont la volonté était liée à ceux de la Terre. Plus inquiétant, derrière suivaient des énormes araignées de dizaines de mètres de long. Les pattes étaient velues et de gros bulbes luisant d’une couleur violette dominaient le thorax des bêtes. Au-dessus de cette armée volaient d’énormes lézards dont les écailles reflétaient la couleur chaude du soleil montant de cette belle journée d’été.  Plus petits et moins rapides, volaient également de façon éparpillés des centaines de petites silhouettes. Mel’Ermat n’arrivait pas à distinguer ce que pouvaient être ces choses.

 

Tous fixaient avec attention l’approche de ces ennemis bien qu’on ne put distinguer encore le gros de la troupe au sol pour l’instant. Mel’Ermat entendit des gens vomir, pleurer et même essayer de réveiller des personnes évanouies. Il n’était pas confiant mais il n’avait plus vraiment le temps désormais d’analyser ce qui allait arriver et s’il avait envie ou non de mourir. Il dégaina son épée et prit son arme à feu. Il la regarda un instant, il ne l’aimait pas particulièrement mais chaque mort que cette arme causerait serait un ennemi de moins contre lequel se battre. C’est une arme de belle facture qui coûtait plutôt cher vu la technologie qu’elle utilisait. Il avait six coups avant de devoir recharger, il espérait que ça serait assez. Il ne s’entraînait que rarement à viser avec.

 

On vit nettement l’armée ralentir, ils avaient atteint les premières zones marécageuses et inondées. C’était le signal, l’enfer se déchaîna. Les premiers coups furent tirés par les canons, les mesures étaient précises et la portée calculée. Les boulets s’écrasèrent au loin en faisant trembler la terre. Mel’Ermat tendit l’oreille mais n’arrivait pas à percevoir des cris qui auraient indiqué que les armes avaient fait mouche. On observait des lignes, tout comme les fortins, de la fumée monter dans les airs. Chaque salve était suivie d’une autre. Les points noirs volaient à travers la plaine avant de s’écraser plus loin. Parfois, on voyait des mottes de terre s’élever dans les airs. Enfin il espérait que ce soit ça… Mel’Ermat aurait aimé qu’ils visent plus néanmoins ces grosses créatures.

 

Les ennemis semblant hors de portée, ce fut leurs créatures ailées qui se lancèrent à l’assaut. Celles-ci grossirent à vue d’œil et, soudainement, alors que les archers se préparaient à faire feu, un éclair frappa dans la foule des créatures marquant l’apparition de la race de l’Air. Ils se lancèrent dans un splendide balai aérien qui aurait pu être envoutant si ça n’avait été un combat qui faisait rage. Les magnifiques créatures blanches de l’Air dégainaient de grandes épées lumineuses et des fouets pour se battre avec détermination. Ils n’étaient pas seuls et d’autres créatures les avaient rejoints. Mel’Ermat put voir de grands lions ailés qui semblaient concentrés leurs attaques sur ces lézards géants volants. Ceux-ci semblaient invulnérables et crachaient des cônes de feu qui avalaient ceux de l’Air par poignées entières. Les ballons dirigés passèrent au-dessus d’eux, les renforts allaient arriver.

 

Les ennemis semblèrent arriver à portée puisqu’il se mit à pleuvoir au milieu d’eux des projectiles en tout genre. A sa gauche, au niveau de la quatrième ligne, un rocher de la taille d’un chariot s’écrasa et roula sur quelques mètres écrasant les infortunés qui ne comprirent jamais ce qui arriva. Les grosses araignées pointèrent leur bulbe sur eux et firent feu. Un rayon violet percuta les rangs de son armée et des fortins qu’on entendit exploser. L’endroit où se tenait Mel’Ermat était pour l’instant épargné des tirs mais cela serait vite amené à changer. Autour de lui, on restait stoïque et inquiet, priant de mourir au combat plutôt que fauché par un tir lointain. Les mages rejoignirent l’assaut. Mel’Ermat vit des boules de feu et des éclairs frapper les ennemis. Un bouclier bleuté se créa juste devant eux au moment où un rayon avait commencé à les balayer. Le bouclier rétrécit sous l’impact puis le sort remonta le rayon jusqu’à revenir à l’intérieur de la bête. Elle fut secouée de violents spasmes, se plaqua au sol puis explosa projetant l’intérieur de son corps sur des centaines de mètres à la ronde. A sa gauche, Vinderian apparut avec le reste de ses mercenaires. Ils n’avaient pas rejoint de régiments et allaient agir comme un électron libre. Mel’Ermat était quand même content d’avoir une bande de tueurs non loin de lui. Nestor courut vers lui. La terre se souleva devant eux puis s’enfonça dans le sol créant une crevasse sans fin. Ce fut en tout cas ce qu’il supposa car les cris de ceux qui furent emportés résonnèrent longtemps dans ses oreilles.

 

-Tenez bon ! hurla Mel’Ermat.

 

Il fallait encore attendre, ils ne devaient pas charger maintenant. Encore quelques minutes.

 

-Seigneur, dit-il en désignant le trou, c’est ce que j’allais vous dire. Ils n’ont pas de mages, les Dieux sont contre nous.

 

Incroyables, Mel’Ermat savait qu’ils les avaient un peu délaissés mais il n’avait jamais cru les théories comme quoi ils étaient les responsables de cette invasion. Maintenant c’était clair, les Dieux participaient même à leur défaite.

 

Un rocher enflammé passa juste au-dessus de leur tête et s’écrasa dix mètres plus loin. Ils s’étaient baissés par réflexe et se retournèrent pour regarder derrière eux. Le projectile avait atteint un régiment et des personnes enflammées criaient en courant dans toutes les directions. Ils se débattaient vainement et essayaient d’éteindre les flammes avec leurs mains ce qui n’accentuait que plus leurs cris. L’odeur qui montait d’eux était insoutenable et ce ne fut que l’intervention d’un membre de l’Eau qui l’empêcha de vomir. Celui-ci éteignit les torches humaines qui, noircies, s’effondrèrent au sol sans bouger. Peu eurent le courage de vérifier si ces gens étaient vivants ou morts. Nestor retourna en courant dans sa nouvelle compagnie.

 

-Feu ! entendit-il au loin tandis que l’ordre était répercuté le long de la ligne de front.

 

Il y eut des claquements d’arcs, des bruits secs d’arbalètes et des coups de feu de fusils. Cela ne voulait dire qu’une chose, leurs adversaires étaient à moins de cinq cent mètres.

 

-Pour Mel ! cria Mel’Ermat en levant son épée en l’air.

-Pour Mel ! reprit ceux qui avaient capté son cri au travers du bombardement et des tirs.

 

Il ne restait que quelques instants puis ce fut là, le moment. Il entendit nettement des cris de gens hurler. Ce n’était pas des blessés, c’était une charge. Un long son de cor, suivi de plusieurs autres, s’élevèrent des fortins. La bataille commençait. L’instant suivant, il vit les humains se précipiter sur la première ligne de l’armée qui tenait les barricades d’un pied assuré. Ils avaient eu de la chance que les tirs, qui ne s’arrêtaient d’ailleurs pas, n’avaient pas touché leurs défenses. Il eut juste le temps de voir ses ennemis pour comprendre que Llis avait dit vrai. Ils ressemblaient en tout point à un être humain venant d’un des sept royaumes. Celui qu’il regardait était barbu mais il était évident qu’il s’entretenait. Ce n’était pas un sauvage. Il était grand dans la moyenne et portait une armure de fer marquée d’un lion en relief. L’instant d’après, il n’eut plus le temps de réfléchir. Les lignes entrèrent en contact les unes avec les autres et la contre-charge s’amorça.

 

-En avant ! Jusqu’aux délimitations ! hurla Mel’Ermat.

 

Les généraux reprirent les ordres et les états-majors s’éparpillèrent. Les soldats devant lui s’élancèrent en hurlant et Mel’Ermat libéra sa rage et sa peur en rejoignant leur cri et leur course. Ils couvrirent les quelques mètres qui les séparaient de la première ligne et se lancèrent dans le combat. Ce ne fut alors que chaos. Il ne sut pas comment ce fut possible mais la charge l’amena près de trente mètres derrière les barricades. Ils étaient dispersés et le but d’avoir un bataillon uni avait volé en éclat en même temps que leur cohérence. Cela semblait se battre de partout, la mêlée était farouche.

 

Sans plus le temps d’analyser la situation, deux hommes convergèrent vers lui en criant. Leurs jambes étaient maculées de boue et nul doute qu’ils avaient dû traverser la zone inondée. Mel’Ermat leva son arme et attendit qu’ils soient assez près pour ne pas les manquer. C’était lorsque le premier fut à cinq mètres qu’il tira et toucha l’homme en plein estomac. Tandis que le blessé s’effondrait, l’intendant tira son deuxième coup qui toucha l’attaquant dans le cou. L’homme se saisit la gorge en s’agenouillant, du sang rougissant ses mains et coulant sur sa tenue. Il était très difficile de distinguer l’ennemi de l’ami. Il y avait au moins sept groupes se battant à moins de trois mètres de lui. Il rejoignit des civils qui semblaient à la peine. Ils étaient trois contre un et n’arrivaient pas à en venir à bout. Mel’Ermat frappa l’homme dans le flanc et enfonça son épée jusqu’à la garde. L’homme sembla surprit de cette charge et l’éclat dans ses yeux s’éteignit rapidement.

 

-Ramassez des armes ! leur ordonna Mel’Ermat en reportant immédiatement son attention sur ce qu’il se passait autour de lui.

 

Il se sentit soulever du sol puis retomber lourdement. Il resta un instant immobile à fixer le ciel. Il n’entendait plus rien et n’arrivait pas à aligner deux pensées successives. Il toussa et réussit à se remettre partiellement assis ce qu’il signifia qu’il n’était pas blessé. Quelque chose avait frappé non loin de lui formant un cratère fumant de près de trois mètres de large. Il ne restait rien des combattants qui s’affrontaient là. Mel’Ermat prit son arme et se remit debout. D’autres blessés gémissaient autour de lui. Certains avaient perdu des jambes, d’autres des bras, certains se tenaient le ventre pour y empêcher leurs entrailles de se déverser. Les morts étaient coupés en deux, perforés ou décapités. Mel’Ermat prit une respiration et ne se concentra que sur les menaces. Il ne fallait pas se laisser distraire. A peine cet espace créé que des nouveaux adversaires s’engouffrèrent dans la brèche tandis que de nouveaux défenseurs cherchaient à se battre.

 

A sa gauche, un homme se battait au-dessus du cadavre de ce qui devait être sa femme. A sa droite, une femme pleurait sur le corps de son enfant avant de se faire transpercer par une lance. Son cadavre recouvrit celui de son fils. Là, une famille se battait dos à dos et repoussait plutôt avec succès les assaillants. Mel’Ermat tourna la tête mais ne trouva personne qu’il connaissait. Il mit le pied dans quelque chose de visqueux et n’osa pas regarder ce que c’était. Une femme se précipita sur lui, l’épée levée au-dessus de sa tête. Il ne se résolut pas à la tuer. Il voyait ce désespoir dans cette charge, comme si elle pouvait se laisser tomber au sol en pleurant à tout moment. Mel’Ermat para la lame et la frappa d’un coup de poing bien senti sous le menton. Elle s’effondra inconsciente sous l’impact.

 

L’intendant continua son avancée. Il frappa dans le dos un guerrier qui se battait contre un soldat et regarda avec appréhension un nouveau rayon violet frapper à une vingtaine de mètres de lui. Les canons continuaient de tirer avec rage et les projectiles s’échangeaient de tous les côtés. Cela ne choquait pas les envahisseurs de tirer sur leurs propres troupes. En effet, il tuait autant des leurs que de leurs ennemis mais leur supériorité numérique rendait cette considération visiblement peu déterminante. Mel’Ermat para encore un coup d’estoc et toucha un guerrier à l’épaule. L’armure de l’homme le sauva d’une blessure légère. Il sembla surprit de la réaction de l’intendant et ce dernier lança une attaque avant qu’il ne reprenne ses esprits. Cela aurait pu être un combat équitable s’il y avait eu plus de place mais l’assaut que lança Mel’Ermat ne s’évitait qu’en se déplaçant. L’autre ne put rien faire que de chuter sur un cadavre et de se faire perforer l’abdomen, là où la cotte de mailles s’était découverte dans la chute.

 

Mel’Ermat entendit un cri aigu qui venait du ciel. Il leva la tête, écarquilla les yeux puis se jeta au sol au moment où un énorme oiseau à allure humaine tenta de l’embrocher. Mel’Ermat se releva en vitesse mais l’animal semblait chercher des prises ailleurs. Dommage, son pistolet aurait été prêt à le recevoir. Il reçut alors un coup dans le dos et s’effondra sur le sol. Sa tête heurta le sol mais le casque absorba le choc. Il en serait quitte pour une belle bosse. Il attendit qu’on profite de sa faiblesse mais aucun autre coup ne vint. Mel’Ermat saisit sa chance et se retourna. Il n’y avait personne. Il cracha la terre qu’il avait dans la bouche et passa sa manche pour se nettoyer. En se relevant, l’intendant vit le cadavre d’un homme qui avait manié une énorme masse désormais étendue à ses côtés. Une lance avait été plantée dans son dos et gisait à la verticale, comme un drapeau en haut d’une tour. Mel’Ermat ne savait pas qui lui avait sauvé la vie mais il l’en remerciait chaleureusement.

 

Regardant dans toutes les directions mais avançant toujours vers l’avant, Mel’Ermat continuait de reprendre du terrain. Il aurait quand même bien voulu retrouver son escouade et Mel’Cari. Trois hommes se lancèrent sur lui mais cinq combattants de Mel se mirent en travers de leur chemin. Mel’Ermat choisit de combattre un homme qui venait d’abattre un des siens. Il était exténué, le coup qu’il tenta fut porté avec l’énergie du désespoir et passa à côté du dirigeant. Celui-ci n’hésita pas et lui planta son épée dans son cou vulnérable. Il en fut quitte pour être aspergé du liquide vermillon qui l’aveugla l’espace d’un seconde. Il sentit un nouveau coup dans son dos. Ca avait été porté avec assez de force pour le transpercer. Heureusement, son armure dévia l’attaque. C’était un garçon d’une quinzaine d’années qui avait tenté de le tuer. Il bredouilla dans une langue incompréhensible, comprenant qu’il allait mourir. Mel’Ermat ne pouvait pas assassiner un enfant, c’était au-delà de ses forces. Il se détourna de l’adolescent terrorisé. Deux secondes plus tard, il entendit un cri et sentit une douleur à l’arrière de sa cuisse. L’enfant avait retenté une attaque qui avait partiellement réussi. Il avait réussi à touché un endroit vulnérable et Mel’Ermat sentit le sang couler le long de sa jambe. Sans hésiter et sous le poids de la colère, l’intendant arma son coup de la gauche vers la droite de toute sa force. L’enfant n’eut pas le temps de se défendre et se fit sectionner le bras au niveau du coude avant que la lame ne rentre partiellement dans son thorax. Mel’Ermat entendit un hurlement et vit un homme se précipiter vers lui. Ne pouvant retirer son épée du corps, il leva son arme et fit feu. Touchant le père en pleine poitrine. Touchant un poumon, celui-ci se noya dans son sang.

 

Un géant à près de dix mètres à sa gauche faisait des ravages dans les rangs des défenseurs. Il ne semblait pas sentir les faibles coups de ceux qui réussissaient à s’approcher. Alors que Mel’Ermat décida qu’il était n’était pas de taille et qu’il ferait bien d’aller voir ailleurs quand l’estomac de la bête explosa. Le géant hurla à la mort en tombant en avant. Mel’Ermat suivi la course du boulet qui faucha plusieurs militaires avant de disparaître dans le sol. Il vit à sa droite un véhicule blindé dont sortait régulièrement des claquements secs et des explosions. Autour de celui-ci, des tas de cadavres se formaient. Chaque tir faisait mouche et les ennemis se jetaient dessus pour trouver la faille. Ils eurent un instant de génie et firent basculer le chariot de fer sur le côté. Mel’Ermat les vit alors avoir une idée beaucoup plus stupide. L’un d’entre eux jeta une torche par une meurtrière. Cela tomba finalement bien car un nouveau combattant fonça sur Mel’Ermat, pris au dépourvu. L’intendant eut juste le temps de se jeter au sol derrière un cadavre et de se mettre en fœtus qu’une énorme explosion rugit dans ses oreilles. Une boule de feu chauffa la zone sur près de cinquante mètres pendant que des débris de métal étaient projeter dans toutes les directions. Mel’Ermat eut la chance de ne pas être atteint, par contre, il ne put en dire autant de celui qui s’était dirigé vers lui. Il était méconnaissable, si c’était bien lui. Mel’Ermat vit que le cadavre derrière lequel il s’était abrité avait absorbé la majorité des projectiles, transformé en hérisson par des échardes grandes comme des couteaux.

 

Mel’Ermat regardait devant lui quand il plongea jusqu’aux genoux dans une eau froide. Il n’avait pas vu qu’il avait atteint les limites du champ de bataille. Pourtant, cela n’empêchait pas ses propres troupes de se battre dans ce marécage. L’eau tournait au rouge carmin et des corps flottaient de tous les côtés. Certains semblaient avoir été noyés. Mel’Ermat vit comment lorsqu’il sentit une présence frôler ses pieds. C’était un membre de l’Eau qui se précipita sur un envahisseur et l’entraîna afin de le noyer. Il y avait à peine cinquante centimètres mais c’était suffisant pour les vaincre. Mel’Ermat fit demi-tour, ce n’était pas la peine d’aller plus loin. Autant essayer de rejoindre sa position près du fortin. Peut-être retrouverait-il ses hommes. Sa jambe le piquait. Il espérait que l’adolescent ne l’avait pas blessé profondément.

 

@+

-= Inxi =-

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  • 3 semaines après...

Cha continue !!!

 

Il se fit alors emporter par une vague. Trempé, il se retourna pour voir le cadavre d’un de ces lézards géants. Si Mel’Ermat avait continué sa route, il se serait sûrement fait écraser par le cadavre de cette chose. C’était d’ailleurs ce qu’il semblait être arrivé à ces bouts de corps qu’il voyait dépasser dessous. L’intendant leva les yeux un instant vers le combat aérien qui n’avait pas diminué d’intensité malgré tous les cadavres qui tombaient vers le sol. Un énorme ballon dirigé était en feu et s’orientait droit vers le sol en dégageant une épaisse fumée noire. Mel’Ermat n’aurait pas aimé être à bord. Il fit marche arrière et passa à côté du cadavre du géant et de son arme. La lame que maniait la créature devait faire au moins sa taille. Prenant un peu de répit en se servant du corps mort de la créature dans son dos comme couverture, il regardait devant lui. C’était immuable, les uns et les autres se battaient, un gagnait puis se faisait tuer par le nouveau qui arrivait. Il n’y avait presque plus de place au sol pour marcher sans qu’on ne piétine un corps.

 

On vint l’attaquer, c’était une belle femme blonde qui frappait en serrant les dents. Celle-ci semblait savoir manier son épée même si elle ne rivalisait pas avec lui. Pour s’éviter une nouvelle blessure, il frappa ses épaules successivement avec la pointe de sa lame. La femme lâcha son arme et tomba au sol en pleurant. Elle aurait de la chance si elle récupérait un jour l’usage de ses bras. Fallait il déjà qu’elle arrive à fuir le champ de bataille. Mel’Ermat n’eut aucune considération pour elle et continua sa marche en arrière pour rejoindre ses lignes, affrontant des ennemis de face et frappant d’autres dans le dos sans aucun remord. Une fois quatre se jetèrent sur lui et il dut courir vers un groupe des siens pour pouvoir se défendre. Les flèches continuaient de tomber de façon éparses autour de lui et il se demandait comment aucune ne l’avait encore touché. Un guerrier de Mel courut en direction de la ligne de front et se fit faucher par un trait. Ce fut fini pour lui. L’audition de Mel’Ermat, qu’il avait perdu depuis le tir, revint alors et il se fit submerger par tous les bruits de cette guerre.

 

Les plus forts étaient ceux des lames s’entrechoquant. C’était un tintement métallique continu qui résonnait aux oreilles et les faisait bourdonner. Venaient ensuite les cris d’agonies de milliers de blessés qui, inlassablement, reprenaient le même chant funèbre. Suivait immédiatement la puissance des tirs des artilleries des deux camps et des missiles qui leur tombaient dessus. Pour terminer, on entendait parler leur langue tandis que les gradés essayaient de maintenir une cohésion dans les formations. Mel’Ermat entendait aussi des gens crier dans un langage qu’il ne comprenait pas. Il rejoignit un fortin dont il ne restait plus que la base de pierre. L’intérieur semblait s’être effondré sur lui-même et était actuellement en feu, dégageant une fumée blanche et odorante. Mel’Ermat s’arrêta là pour respirer, le vent emmenant la colonne incendiée vers le nord. Il n’eut pas le temps de reprendre son souffle que deux ennemis à moins de dix secondes d’intervalle lui sautèrent dessus. Son bras frappait sans trembler mais ses épaules se faisaient douloureuses. Il était néanmoins content d’avoir repris l’entraînement ces dernières semaines. Il n’aurait jamais tenu le rythme dans le cas contraire.

 

Un capitaine passa devant lui et Mel’Ermat le tira contre le fortin. L’homme surprit, se ressaisit lorsqu’il vit son supérieur.

 

-Quelle est la situation ? cria l’intendant pour se faire entendre.

-La mêlée est hors de contrôle, nous avons perdu le contrôle de la ligne de front. Nous sommes trop loin derrière les limites et certains ennemis s’en prennent à nos défenses dans la montée de la colline.

 

Mel’Ermat pencha la tête et regarda le flanc de colline. Celui-ci était plutôt dégagé si ce n’était de petites zones sylvestres.

 

-J’ai cru voir aussi des hommes d’Egéa ! Donc ceux-ci se battent vers le sud au lieu de vers l’est. Les grosses araignées vont des ravages, il faudrait les abattre. Les golems de terre sont également de vraies plaies.

 

Mel’Ermat encaissait les informations.

 

-D’accord, résuma l’intendant, regroupez le plus d’hommes possibles et repartez à la conquête du flanc de colline. Nous devons maintenir le combat entre les inondations et les fortins.

-Oui, Seigneur ! fit l’autre en saluant son supérieur.

 

Il disparut au coin du fortin. Mel’Ermat commençait à avoir chaud, l’incendie jouait sa part des choses. Deux individus passèrent à quelques mètres de lui. Ce n’était clairement pas des citoyens de l’Empire, il leva son arme et tira ses deux derniers coups. Les deux s’effondrèrent dans leurs courses comme des pantins inanimés. Il rangea l’arme à sa ceinture et mit main basse sur une courte lance. Il la lança sur un jeune homme qui criait dans sa direction. La pointe se figea dans la jambe du guerrier qui tomba en criant tout en se tenant le genou. Il se fit piétiné par un cavalier quelques instants plus tard. Mel’Ermat quitta le mur du fortin pour rejoindre la colline. Si des ennemis passaient au travers, ils allaient se faire encercler.

 

Mel’Ermat rentra dans un sous bois. Les arbres avait été arrachés par endroit et gisaient au sol, victimes de cette guerre. Des projectiles étaient plantés dans ce qu’il restait des troncs. Il y vit même un homme accroché, abattu par un trait de baliste de plus de deux mètres de long. Il n’avait pas dû agoniser longtemps. Il lui fallut quinze secondes pour sortir du bois ascendant. Le flanc de colline ressemblait en tout point au champ de bataille si ce n’était qu’il y notait quand même plus de soldats de Mel. Un massif guerrier le remarqua et tourna sa colère et une sorte de fusil vers lui. Mel’Ermat sauta derrière un arbre au moment où le premier tir fusait. Il était sûr que l’autre avait parfaitement visé et maintenant les tirs s’écrasaient contre le bois mort. L’intendant était persuadé que s’il bougeait d’un seul centimètre il prendrait une balle et il n’osait pas se pencher pour regarder si le guerrier convergeait vers lui. Il était fait comme un lapin. Il se mit à prier très fort pour qu’on lui vienne en aide. Les tirs s’arrêtèrent et, pensant que l’autre rechargeait, il se permit un coup d’œil. Le cadavre gisait à flanc de colline. Cela faisait deux fois qu’on lui sauvait la vie. Ne testant pas plus longtemps sa chance, il quitta le petit bois.

 

Il repéra alors une partie de son état-major. C’était le général Mel’Jul. Il était entouré par une trentaine de militaires qui maintenait efficacement les ennemis à distance. Cela laissait l’occasion à des coursiers de venir et partir distribuer les ordres. Mel’Ermat tailla sa route jusque là, abattant deux nouveaux civils dans sa course. Le cercle s’ouvrit pour le laisser rentrer. Il planta son épée dans le sol et se laissa tomber à côté. On lui tendit une gourde qu’il but avidement. Mel’Jul se retourna et remarqua son supérieur.

 

-Seigneur, est-ce que tout va bien ? Où est votre escorte ?

-Aucune idée, admit Mel’Ermat en éludant la réponse sur son état de santé. Nous avons été séparés.

-Restez avec moi, mes hommes nous protégeront jusqu’à ce que nous revoyions Mel’Cari.

 

C’était une bonne idée. Il avait néanmoins peur que sur ce flanc de colline, bien à découverts, un groupe de cette taille attire les tirs des ennemis.

 

-Nous sommes en train de reprendre la colline, les cavaliers ont dû mal à faire la différence, il y a trop de cadavres au sol.

-J’ai vu, répondit Mel’Ermat, si nous avons l’occasion, nous devons les redéployer. Concentrez vos efforts pour reprendre la colline. Quelqu’un a des munitions pour un pistolet ? demanda-t-il en criant.

 

Un soldat leva son épée dans le cercle. Il ne se retourna pas, gardant son attention sur les combats. Il défit une bourse à sa ceinture et la jeta au hasard en arrière. Mel’Ermat s’approcha de la bourse et récupéra les balles. Il prit son temps et termina la gourde avant de la lancer au sol. Ca allait mieux.

 

-Où sont les autres généraux ? demanda Mel’Ermat.

-Au sol ! cria quelqu’un.

 

Sans hésiter, tous s’accroupirent. Un rayon violet parcourut les kilomètres qui les séparèrent d’une araignée monstrueuse et frappa le flanc de colline avant de décrire une course erratique. Rien ne résistait à cette attaque et les malheureux touchés par ce rai en succombaient sur le champ. Le sol en noircissait sous l’impact tandis que les arbres en étaient nettement coupés en deux. Voyant que le faisceau s’éloignait, ils se remirent debout car sollicités par des soldats ennemis.

 

-Le général Mel’Surika est plus haut, rassemblant les troupes pour redescendre. Mel’Sylvano s’occupe de l’armée au sud et j’ai vu Mel’Alexan allait s’occuper du nord.

 

Le cercle de soldats se rompit sous une charge et deux ennemis tentèrent d’attaquer les deux responsables. Mel’Ermat arracha son épée du sol juste à temps pour faire sauter l’arme des mains de son adversaire. Mel’Jul gardait également de bons réflexes puisqu’il maintint son adversaire à distance jusqu’à ce qu’un de ses hommes lui portent secours. Mel’Cari passa au loin juste au moment où d’énormes sons sourds montèrent jusqu’à eux. Cela ne ressemblait pas aux cors des forts. Au loin, on voyait les ennemis faire demi-tour. Les combats continuèrent néanmoins pendant trente minutes, tous ne pouvaient pas rejoindre leur camp et vendaient chèrement leur peau.

 

-C’est fini ? demanda naïvement un jeune soldat.

-Pour aujourd’hui… oui, lui répondit son général.

 

Ils s’étaient battus pendant plusieurs heures et pourtant, Mel’Ermat aurait juré que cela faisait quelques minutes. Le soleil était proche de midi et les dardait de rayons brulants. L’intendant de Mel se refusa néanmoins de quitter son armure, on ne savait jamais… Le combat aérien cessa également et les ballons dirigés revenaient vers eux tandis que ceux de l’Air retournaient dans le ciel. La colline fut alors noire de soldats et de civils de Mel. Certains cherchaient à se battre, d’autres regardaient le retrait provisoire des envahisseurs. Tous semblaient néanmoins blessés à divers degrés de dangerosité. Ils avaient tous un point commun cependant : personne ne savait plus quoi faire.

 

-Ordonnez à tous d’aider les blessés. Séparés les en deux, ceux qui ne passeront pas la nuit et ceux qui nécessitent peu de soins. Les premiers seront envoyés aux hôpitaux, les autres restent ici. Une fois que c’est fait, je veux que tous les cadavres soient entassés au niveau des fortins. Qu’on ne s’occupe pas de ceux entre les fortins et la zone inondée, nous n’avons pas le temps. Faites-les ensuite se reposer. La journée risque d’être longue demain.

 

Le général hocha la tête et interpella simultanément trois colonels. Mel’Ermat soupira et regarda les ennemis battre en retraite. Ils semblaient avoir autant de mal qu’à l’aller pour traverser cette zone d’eau. Le peuple de l’Eau d’ailleurs chassait avec plaisir les retardataires. L’intendant nota alors les fumées qui obscurcissaient la zone. Elles provenaient à la fois des attaques des ballons dirigés qui avaient largué leurs bombes sur les renforts ennemis, des lézards géants volant qui avait embrasé des zones entières de combat, des fortins qui avaient explosé et des impacts des artilleries et de la magie. En clair, on ne voyait pas grand-chose. On voyait néanmoins assez pour voir que la belle plaine verte qui s’était étendue là le matin ne restait plus qu’un tapis noir de cadavre et une grande étendue rouge sang. Mel’Ermat était persuadé que l’eau ne changerait plus de couleur maintenant.

 

Le nettoyage fut plus dur qu’il n’y paraissait. Tous étaient fatigués et ne souhaitaient qu’au repos. Malheureusement, ils devaient sauver ceux qui pouvaient l’être et nettoyer au plus tôt les zones proches de leurs campements afin que les maladies ne s’y développent pas. Ce fut des heures silencieuses, entrecoupées des cris des blessés à qui ont n’avaient pas injecté assez d’anesthésiant et des pleurs de ceux qui retrouvaient une victime qu’ils connaissaient plus ou moins. Mel’Ermat eut de la peine et dans ces moments-là, on ne trouvait pas de réconfort sinon dans la vengeance. Il leur faudrait pour cela attendre le lendemain. Comme tout le monde, l’intendant aida à faire le ménage qui consistait également à récupérer toutes les armes et armures qui pouvaient encore servir pour les redistribuer.

 

Les moines passaient leurs temps à faire des bénédictions pour les morts mais ne le faisaient jamais individuellement, ce qui leur aurait pris une éternité. Mel’Ermat en entendit également beaucoup vomir. Il était très dur de voir le carnage que cette première bataille avait fait et certains corps, ou ce qu’il en restait, étaient méconnaissables. L’intendant savait que l’impact psychologique qu’allait avoir cette guerre sur les survivants serait dramatique. Beaucoup allaient changer, rien ne serait comme avant. Certains pleuraient même devant les cadavres de leurs ennemis, voyant comme ils étaient si semblables à eux et que ces enfants morts auraient pu être les leurs. Voyant avec horreur que ceux qui les envahissaient étaient en grande partie des Humains et non pas des monstres cannibales comme on les avait décrits.

 

Ils finirent deux heures plus tard à faire le ménage. Ils firent un véritable mur de cadavre à la moitié du champ de bataille. Ils n’avaient plus de place pour le reste et pas assez de bois pour brûler les restes. Mel’Ermat craignait que ces corps n’attirent les prédateurs de toute la région. Ce qui était sûr c’est que le champ de bataille venait de se rétrécir et qu’ils avaient encore un moyen de ralentir leurs adversaires. Les fortins étaient tous en mauvais état si bien que le prochain combat aurait aussi lieu sur la colline. Il leur faudrait prendre les mesures adéquates. Le repas froid qui fut distribué fut largement gâché. Ce fut plus un grignotage qu’une véritable collation. Beaucoup gardaient l’estomac noué et n’arrivaient pas à se débarrasser des images qu’ils avaient plein la tête. Mel’Ermat n’eut pas ce problème, ayant déjà participé à des guerres.

 

Sa blessure à la jambe était superficielle, remarqua-t-il quand il quitta enfin son équipement. Des mailles s’étaient rompues mais celles-ci avait quand même arrêtées dans sa majorité l’attaque de l’adolescent. Un bandage lui suffi. Mel’Cari faillit rendre l’âme quand il retrouva son supérieur aux mains des médecins. Il devint pâle comme un linge et balbutia. Mel’Ermat le rassura bien que cela ne servit à rien. Il s’en voudrait sûrement pour les dix prochaines années d’avoir failli à la seule mission qu’il avait. L’intendant ne put faire un mouvement de toute la journée sans que tous ses soldats ne le suivent à la trace. Il remarqua d’ailleurs qu’ils avaient eu quelques pertes mais cela restait acceptable. C’était de braves guerriers qui étaient tombés et Mel’Ermat leur réserverait une prière.

 

-Mel’Cari, j’ai besoin que tu ailles délivrer un message à mes généraux.

 

Le médecin était en train de resserrer le bandage autour de la jambe. L’homme était attentif à la fois aux soins et à la fois au message.

 

-Je veux qu’on essaye de faire parler les prisonniers ennemis. Demandez de l’aide aux magiciens. Je veux savoir les plans de nos adversaires ou tout ce qui pourrait nous être utile. Tuez les blessés ennemis et tout ceux qui feront de la résistance.

 

L’homme s’inclina et partir à la recherche des hauts gradés. Evidemment, il ne s’éclipsa pas sans laisser l’ordre aux gardes du corps de ne pas le quitter un seul instant. Mel’Ermat resta assis sur la colline en se passant une main songeuse sur la barbe naissante de son visage.

 

@+-

-= Inxi =-

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Salutations Inxi,

 

Un petit mot pour te dire que tu es lu par plus de monde que tu ne l'imagine. Tu n'ecris pas pour toi-meme, loin de la. Cependant, il est toujours un peu honteux de laisser un commentaire sans grande profondeur.

 

Pour ma part, j'ai ete quelque peu interpele par deux choses.

1) les indicateurs de longueur (de memoire).

"un trait de baliste de plus de deux metres de long"

le metre n'existait pas a l'epoque (dans notre univers, du moins). C'est quand meme dommage de parler en lieue pour exprimer les longues distances mais pas en coudee pour les plus petites!

 

2) les indicateurs de duree (de memoire)

"il mit quinze seconde pour traverser le sous-bois"

puis, plus loin,

"la bataille continua pendant trente minutes"

J'ai eu l'impression d'avoir une montre de precision (objet rare a l'epoque) et de pouvoir la regarder a loisir (sur un champs de bataille?).

 

En d'autres mots, l'exactitude de ces indications m'a arrache a ton univers fantastique pour me ramener devant mon pc dans le monde reel.

Personnellement, j'aurais souhaite : du chaos, de la confusion, des estimations de duree a la louche... Le narrateur omniscient, la focalisation externe, ca n'empeche pas le bordel!

 

A un de ces jours pour la suite!

Modifié par emanuel
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Merci Emanuel !!

 

Il y a pas de honte à laisser de commentaire, quelque soit le message ! Surtout pour moi où il arrive que je poste plusieurs mois sans retour ! Je me demande toujours si les gens ont décroché ou pas ! Surtout sur de longues périodes de temps !! Même pour dire : "Je suis toujours là, j'ai aimé ce passage (ou pas)" C'est suffisant !

 

Je vais essayer de rendre les choses plus floues quand je retravaillerai mes passages ! Par contre, j'aimerais bien l'avis de tout le monde quant aux indicateurs de distance !! Je pensais justement que ça serait plus facile qu'on puisse se référer à des valeurs qu'on connait plutôt que unités plutôt floues que peu connaissent au final (coudées, lieu, miles, pieds, etc...) Dites moi ce que vous en pensez les autres voir si ça a de l'importance ! En tout cas, voilà la suite et le rythme décroche pas !

 

Chapitre 16

 

 

 

L’assaut suivant fut lancé approximativement à la même heure le lendemain. Mel’Ermat était fatigué avant même d’avoir commencé. Il comptait bien sur l’adrénaline pour le sortir de cette léthargie. La fin d’après-midi ainsi que le début de soirée de la veille avait été consacrée à des réunions avec les autres dirigeants pour donner leurs ordres. Les pertes étaient gigantesques et s’élevaient à vingt pourcent de leur effectif. Il y avait au moins autant de blessés et il leur fallait prendre les bonnes décisions.

 

Le nord avait été l’endroit où l’ennemi avait concentré son attaque. Ils semblaient avoir localisé les passages où l’eau laissait place à l’herbe et avaient prévu de les utiliser. Les hommes de Syrarture avaient pris le choc de plein fouet. C’était ceux qui déploraient le plus de morts avec plus de la moitié de pertes. On disait qu’ils s’étaient battus comme des lions et en emportaient chaque fois une demi-douzaine avant de trépasser. Leurs alliés nains, elfes, scorpions et centaures avaient également été victimes de cette force de frappe et avaient aussi largement payé leur tribu. Du peu de descriptions qu’il en avait eu, chaque armée avait été frappée par des choses différentes les unes des autres. Mel’Ermat n’avait jamais entendu parler de l’existence de la moindre de ces créatures. Le résultat était cependant bien là et leurs armées en avaient pris un sacré coup.

 

Comme l’intendant de Mel l’avait anticipé, ils décidèrent de porter le combat suivant sur la colline. Il semblait chanceux que les hauts gradés avaient été épargnés et qu’ils puissent ainsi garder la cohésion de leurs troupes. Les mages s’en étaient aussi bien sortis mais épuisaient rapidement leurs réserves de magie. Beaucoup maudissaient les Dieux d’agir contre eux. De ce qu’avait compris Mel’Ermat, les seuls magiciens à être tombés l’avaient été à cause de la magie des Dieux. Il put aussi parler avec une Ondoliel encore plus grave qu’à l’accoutumée. Elle lui assura une fois de plus que ces dragons, comme elle appelait les lézards volants, n’avaient rien à faire sur cette terre. Jurant qu’ils n’abandonneront pas tant que ces créatures volantes ne seront pas toutes mortes, elle partit sans laisser Mel’Ermat articuler la moindre phrase.

 

Une fois tranquille, il essaya de prendre du repos. Les souvenirs de la journée l’assaillirent immédiatement et il revit nettement les visages de ceux qu’il avait vaincus. Ce n’était jamais un moment plaisant mais c’était la seule façon qu’il avait de ne pas banaliser les morts qu’il avait causés. Le peu de fois où il réussit à s’endormir, quelqu’un cauchemardant le réveilla. Et ça, c’était lorsque le vent ne ramenait pas les odeurs du charnier qu’il avait créé en bas de la colline. Ou encore également lorsqu’il n’entendait pas les hurlements des bêtes piochant dans le festin de cadavres. Il était donc épuisé. Entouré de ses gardes du corps, le combat fut néanmoins différent. Après l’anarchie du premier combat, les états-majors avaient passé la nuit à expliquer aux uns et aux autres la nécessité de ne pas se laisser emporter par les combats et de défendre aux côtés de ses partenaires.

 

Ce fut donc une bataille plus organisée qui frappa l’aube. Elle n’en fut tout de fois pas moins cruelle ni meurtrière. Mel’Ermat eut un aperçu de ce que les autres armées avaient dû affronter. Il put voir des hommes en toge se battre avec des bâtons de près de seize pieds de long. Ceux-ci étaient aussi souples que le vent et fracassaient des crânes avec une facilité déconcertante. Il vit également des serpents géants pourvus de bras qui semaient la mort à chacune de leurs attaques. Ils ne semblaient pas très dociles et semblaient parfois agresser les troupes qui les avaient poussés là. Il y eut aussi de gros animaux, bien plus gros qu’un cheval, et qui semblait armuré. Ils étaient gris et pourvu d’une corne acérée sur le crâne. Leurs charges avaient failli coûter la vie du régiment entier de Mel’Ermat. Mel’Trael, Mel’Uyor et Mel’Dermine n’eurent pas autant de chance et se firent piétiner comme des brindilles.

 

On notait aussi tous les Humains encore plus nombreux que la veille et toujours aussi énergiques. Mel’Ermat était persuadé que ces premières lignes étaient des renforts et que les survivants de la veille se reposaient. Ils subirent bien plus de pertes que la veille. Tous étaient courbaturés, fatigués ou blessés. Cela n’aidait en rien à bien se défendre.

 

Les armées se séparèrent plus tôt que la veille mais les bombardements continuèrent plus longtemps de part et d’autres. Cachés derrière des arbres, des boucliers ou des cadavres, chacun attendait que cela se termine. Ils perdirent autant d’hommes à ce moment là que pendant les deux heures de corps-à-corps. Seuls les médecins, les infirmières et les herboristes bravaient cette tempête de mort et beaucoup y laissèrent la vie. Mel’Ermat et son équipe s’était réfugié dans une forêt et se prirent une pluie de bois et de feuilles sans discontinuer. Un tronc faillit les écraser mais ils eurent le réflexe de s’écarter de son chemin avant de s’abriter derrière. Il fallut une demi-heure pour que le vent réapparaisse et chasse la fumée. Le spectacle était encore pire qu’hier puisque la colline était méconnaissable, véritable morceau de fromages aux innombrables trous et marques fumantes. Un pan entier de celle-ci s’était décroché en un glissement de terrain.

 

La suite de la journée fut similaire au jour précédent. Ils aidèrent les blessés, achevèrent les mourants et leurs adversaires, rassemblèrent ce qui pouvaient être utiles puis partirent manger. La deuxième bataille avait été pire que la première pourtant, autant civils que militaires, ils semblaient s’y être résignés. Ils arrivaient à manger et ne fixaient pas le sol d’un regard perdu. C’était peut-être le pire effet qu’une guerre pouvait avoir : qu’on s’y habitue. L’heure des comptes fut un véritable choc. Leurs pertes, en y incluant tous ceux qui n’étaient plus en état de se battre, s’élevaient à soixante quinze pourcent. Cela représentait près quatre millions de morts ou de blessés graves en douze heures cumulées de combats. L’après-midi consista en une préparation du terrain pour le lendemain. Les cadavres furent descendus de la colline pour recouvrir en un tapis morbide l’intégralité du champ de bataille du premier jour. Les artilleries leur avaient fait de la place et même Mel’Ermat avait failli vomir lorsque les premiers cadavres avaient volé en éclats.

 

Cette barrière de corps freinerait la charge de la cavalerie. Mel’Ermat n’avait plus de doutes maintenant, ils allaient perdre. Les éclaireurs de l’Air étaient revenus et leur avaient annoncé que le tiers de l’armée manquante avait rejoint l’armée principale. Ils avaient autant d’effectifs que ce que l’Empire avait rassemblé au début de cette guerre. S’ils n’avaient eu aucune perte depuis le début, ils auraient eu une chance. Faire fondre l’armée ennemie jusqu’à ce point leur avait coûté tant de vies… Si seulement ils avaient vu cette invasion. Si seulement Kator n’avait pas été un traitre et Sal un lâche… Ils auraient pu doubler leurs effectifs et même à un contre quatre, ils auraient eu un espoir. Enormément étaient tombés durant le deuxième assaut. On y comptait notamment Egéa ainsi qu’Isidor et Frendlorian, leur armée complètement anéantie. Il ne restait encore debout qu’une dizaine de généraux, du côté de Mel, seul Mel’Surika était encore en vie et pour peu de temps. Il prétendait le contraire mais il avait une vilaine plaie à la poitrine qui semblait s’infecter.

 

Ils avaient évoqué l’idée de se rendre mais à la mémoire de leur façon de traiter les prisonniers de guerre et vu ce qu’ils avaient fait d’Erno, ils abandonnèrent l’idée. C’était tuer ou être tués. Mel’Ermat avait essayé de convaincre les généraux d’arrêter l’affrontement direct qui ne pouvait causer que leur défaite mais ils étaient pour eux trop tard pour fuir alors qu’ils avaient ici la meilleure position défendable qu’ils puissent trouver. Mel’Ermat essaya de leur faire entendre raison et que défendre Vitoria serait plus facile mais ceux-ci campèrent sur leur position. Ils firent malgré tout un effort lorsque Ben’Lor leur proposa de concentrer leurs tirs sur les créatures pouvant rompre un siège et d’accepter le fait que si l’ennemi leur laissait une nouvelle fois le temps de respirer après la bataille, il faudrait fuir jusqu’à Vitoria. Ils étudièrent par la suite un itinéraire de sortie. Ils trouvèrent une forêt s’étendant à dix kilomètres à l’ouest de là et il fut décider de s’y réfugier si les choses tournaient mal.

 

Mel’Ermat dormi mieux, enfin pas réellement mais la situation voulut qu’il eut plus de temps pour se reposer. Il mit autant de temps pour s’endormir que les jours précédents mais on ne le réveilla pas à l’aube pour se battre. Ils passèrent une après-midi inquiète sous un soleil de plomb. Les membres de l’Eau les approvisionnèrent tandis que quelques membres de l’Air jouaient le rôle d’éclaireur. Mel’Ermat n’avait plus signe d’Ondoliel ni des autres membres de son peuple. En revanche, il n’y avait plus de créatures volantes dans l’armée ennemie ce qui était une bonne chose. Mel’Ermat n’osait pas demander aux survivants si le prix à payer, comme ceux du Feu, avait été l’extinction de leur race. Les sorciers avaient été réduits à une dizaine et faisaient tout ce qu’ils pouvaient pour maintenir les attaques des Dieux à distance, ce qui ne marchait d’ailleurs pas très bien. Leurs alliés non-Humains quant à eux n’étaient plus qu’une dizaine de milliers. Ben’Lor et Mel’Ermat leur proposèrent de rentrer chez eux mais ceux-ci refusèrent, ils honoreraient leurs alliances.

 

Ils étaient donc en train de profiter de la fin d’après-midi lorsque les cors rugirent. C’était l’heure. Mel’Ermat regarda le ciel, il restait trois ou quatre heures jusqu’à ce que la nuit tombe. Derrière lui, les chariots continuaient de quitter le campement. Il ne restait là plus que les armées. Quoiqu’il arrive, ils ne seraient pas là le soir même. Ils seraient morts ou en route pour Vitoria. Au petit trot, les soldats rejoignirent le haut de la colline et formèrent les bataillons. Mel’Ermat regarda ses gardes du corps et leur fit signe de la tête. Pas un seul d’entre eux n’avait été épargné par les combats et tous arboraient des bandages, visibles ou non. Il était temps de faire ses adieux. Se plantant devant chacun d’entre eux, il les regarda dans les yeux et les salua militairement. Pas besoin de parler, tous étaient fiers d’avoir côtoyé des partenaires comme ils en avaient eu. Il n’y a que Mel’Eclé qu’il remercia différemment en lui froissant la chevelure, navré qu’un si jeune homme finisse ainsi. Il se permit aussi une accolade à Mel’Cari, fidèle compagnon depuis qu’il avait accédé à son poste près de vingt ans auparavant.

 

L’intendant de Mel ne se formalisa pas du spectacle du champ de bataille, il était tout simplement atroce. La plaine était recouverte de cadavres et même les terres sèches étaient gorgées de sang et boueuses. La colline ne ressemblait plus à rien. Que ce soit les défenses ou les reliefs, tout avait été rasé par les combats. Ils avaient une bonne vue sur ce qui convergeait vers eux. Un front de deux ou trois kilomètres sur plusieurs centaines de mètres de profondeur. Ce n’était qu’une marée noire pour l’instant qui se rapprochait petit à petit. Mel’Ermat regarda en contrebas. Les incendies étaient presque tous éteints et avaient laissé des zones éparses et noircies. Certains feus avaient réussi à atteindre les tas de cadavres et avaient pris plaisir à les ronger. D’autres dépouilles avaient été tirées des piles par les bêtes nocturnes et gisaient à plusieurs dizaines de mètres de là à moitié dévorés. Mel’Ermat ne se serait pas approché de cette barricade de corps pour tout l’or du monde. Il était sûr d’attraper la moitié des maladies connues rien qu’en y respirant les odeurs qui s’en dégageaient. Par principe, il avait aidé à déblayer la colline des corps et avait donc approché les cadavres de la veille. Il avait vu ceux-ci déjà rongés par les insectes et dont les plaies jaunissaient sous les assauts des mouches. Il essayait de ne pas porter son regard vers ces tas même si certains visages étaient tournés vers lui, leurs yeux plein de reproches.

 

A mesure que les envahisseurs se rapprochaient, Mel’Ermat prit confiance en la bataille à venir. Certes, ils se battaient en large infériorité numérique mais ils se battaient pour leur survie, ce qui les rendait plus dangereux. S’ils arrivaient à démoraliser l’ennemi, peut-être remporteraient-ils cette guerre. Ils n’auraient même pas de quoi repeupler un royaume mais c’était toujours mieux que d’être éteints. Derrière l’armée en marche, Mel’Ermat aperçu les catapultes, les balistes, d’autres engins inconnus et la vingtaine d’araignées encore en vie. La cinquantaine de canons survivante firent feu. Les boulets s’élevèrent dans le ciel et retombèrent bien avant de pouvoir faire la moindre blessure. Les mages lancèrent un sort qui créa une bulle bleuté autour des engins de siège. Ils avaient remarqué que ceux maniant les sorts des Dieux avaient tendance à s’attaquer aux machines dès qu’ils avaient repéré d’où elles tiraient. Pour la peine, Mel’Ermat et Ben’Lor les avaient déployés sur l’autre versant de la colline afin d’effectuer des tirs en cloches par-dessus. C’était bien plus difficile pour viser mais ils étaient au moins invisibles des observateurs ennemis.

 

Mel’Ermat et sa troupe fermait la marche de leur armée. Il vit nettement les éclaireurs aller et venir entre les canons et les ingénieurs qui calculaient les trajectoires du haut de la colline. Après quelques minutes, ils lancèrent une nouvelle salve. Ce coup-ci fut parfait et ils mirent à bat cinq araignées. Quatre furent touchées entre la tête et le thorax tandis que la dernière se vit sectionner ses pattes avant. Sans hésiter, les survivantes firent feu à leur tour dans les régiments des défenseurs emportant des centaines de soldats à chaque rayon. Les premières lignes humaines avançaient avec peine dans le marécage et devaient souvent déplacer les cadavres qui flottaient là. Beaucoup se couvraient la bouche et Mel’Ermat en voyait certains vomir. Ce fut encore pire lorsqu’ils atteignirent la barrière de cadavres qui les dépassait d’une tête. Ils restèrent un moment à regarder ce tas sans savoir quoi faire. Ce qui devaient être des officiers passa alors et leur dirent de passer par-dessus, ce qu’ils firent à contrecœur. L’escalade de ces morts détruisit complètement la muraille et étala sur plusieurs dizaines de mètres les cadavres. Mel’Ermat n’aurait pas aimé faire partie des premiers qu’on avait forcé à faire ça. Ils étaient forcément contaminés par les maladies qui rongeaient les cadavres.

 

Au niveau des restes des fortins, les archers et les fusiliers firent feu. Les balles et les projectiles volèrent du haut de la colline et plurent au milieu des envahisseurs qui, après un moment de panique, reprirent leur course en avant. Mel’Ermat eut juste le temps de regarder vers le ciel pour remarquer qu’aucune aide ne viendrait de là que les combattants de la première ligne descendirent la colline en courant. Mel’Ermat, faisant partie des renforts attendaient le signal de la contre-charge. Pourtant, cela ne se passa pas comme prévu. En effet, leurs premières lignes réapparurent et commencèrent à reculer. C’était le premier symptôme d’une armée qui allait se faire pulvériser. Une charge amenait rarement à se battre contre l’ennemi à reculons. Leurs flancs devaient être submergés ce qui poussait les soldats à reculer doucement. Il fallut dix minutes pour que les envahisseurs trouvent des failles dans les lignes et attaquent les secondes lignes de réserve.

 

Ils apparaissaient par poignée et allaient rarement bien loin, courant à en perdre haleine, ils se faisaient faucher par les tireurs qui les alignaient méthodologiquement. Mel’Ermat trouvait cette technique de bataille un peu particulière. Ils auraient mieux fait de vaincre entièrement les premières lignes plutôt que d’essayer faire le concours de celui qui irait le plus loin. Tous n’étaient pas militaires mais rien n’empêchait d’établir une once de stratégie. Mel’Ermat jeta un coup d’œil sur les flancs de l’armée se laissant s’apercevoir au loin. Ils ne semblaient pas reculer plus vite que la normale si bien qu’ils devaient tenir le choc. C’était bon signe. L’ennemi avait beau avoir une armée gigantesque, il ne pouvait pas non plus la déployer comme il le voulait. Il aurait pu l’étaler sur cinquante kilomètres qu’ils n’auraient pas senti la différence. Il était obligé de la garder compacte sous peine d’en perdre le contrôle et donc sa réactivité.

 

Mis à part les quelques échappées, l’intendant de Mel n’avait aucune idée de la façon dont se déroulait la bataille. Les canons et les araignées continuaient de s’échanger des tirs et il restait peu des bêtes debout. L’objectif était atteint. Maintenant, les artilleries allaient juste tenter de cause le plus de dommage. Il paraissait peu probable qu’ils puissent emporter tous les canons dans leur fuite et ça serait embêtant. Les archers et arbalétriers avaient pour consigne de tirer sur les renforts ennemis plutôt que tirer dans le tas en espérant toucher une cible adéquate. Ils tiraient donc en cloche à l’aveuglette, comme les canons, en espérant que le projectile touche quelqu’un dans sa retombée.

 

Ils auraient pu tenir des années de sièges avec toutes les flèches et les carreaux qu’ils avaient ramassés dans leur nettoyage du champ de bataille. Mel’Ermat était sûr que la majorité des projectiles devait être encore tâchée de sang. Ils avaient aussi un nombre incalculables d’armes et d’armures. Une grande partie était en chemin vers Vitoria mais ils en avaient aussi abandonné un grand nombre que l’ennemi s’empresserait d’utiliser contre eux. Mel’Ermat et Ben’Lor avaient aussi remarqué qu’ils avaient un problème avec leur gestion des vivres. Avec tous ces morts et ces blessés, il avait maintenant de quoi tenir plusieurs années et beaucoup de denrées périssables risquaient d’être jetées sans que personne ne les mange. C’était cependant mieux que de nourrir l’ennemi, quitte à abandonner de la nourriture bien en vue. Ca démoraliserait peut-être les envahisseurs. Mel’Ermat s’intéressa à ce qui se passait autour de lui au moment où quelqu’un leva un bouclier au-dessus de sa tête. Une flèche transperça le pavois mais resta coincée dans le métal. Quelques centimètres plus bas et elle se serait partiellement enfoncée dans le bras de son garde. Mel’Ermat se concentra sur la bataille, ce n’était pas le moment de penser à des trivialités. Il remarqua alors qu’ils continuaient de reculer, inlassablement sous la pression d’attaquants au moins cinq fois plus nombreux.

 

@+

-= Inxi =-

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  • 4 semaines après...

Désolé du retard !!! Voici la conclusion de la bataille !

 

 

 

Les fuites au travers des lignes passèrent de quelques individus à des bandes entières et les secondes lignes, dont il faisait partie, s’engagèrent dans la bataille. Les premières vingt minutes furent assez faciles puisque les régiments tenaient bons et les pertes étaient acceptables. Chacun se battait à côté d’un confrère et faisait tout ce qu’il pouvait pour ne rien lâcher. Pourtant, inexorablement, l’ennemi continuait d’arriver par vagues entières alors que les défenseurs ne comptaient plus que sur eux-mêmes. Mel’Ermat para un coup et frappa de taille coupant mollement la chair de son adversaire. Quelqu’un para un coup d’épée qui allait l’atteindre à la tête et l’intendant sectionna le bras tendu. Il trébucha sur un corps et mit son bouclier devant son thorax au moment où une lance tenta de l’embrocher. La pique remonta le long de la paroi métallique et bien qu’il bascula la tête en arrière, il sentit une douleur au front. Le sang coula le long de son visage et il en sentit le goût ferreux sur ses lèvres.

 

Qu’un cria à sa droite et il vit un de ses hommes transpercé par une hallebarde. L’homme qui la maniait semblait bien embêté de l’avoir plantée si profondément. Mal lui en prit puisqu’il vit un Mel’Cari vengeur qui lui coupa la tête juste en dessous de son casque. Quelque chose lui tapa fort sur le crâne à ce moment et Mel’Ermat se retrouva en position assise, juste à côté d’un corps qui se reposait dans la boue sanguine. Mel’Reflor, celui qui aurait pu le vaincre dans à l’entraînement une éternité de ça auparavant, l’attrapa par le col et le releva.

 

-Ca va ? s’inquiéta le géant.

 

Mel’Ermat hocha la tête. Aucune idée de ce qui était venu le heurter mais le casque lui avait sauvé la vie.

 

-A couvert ! hurla quelqu’un.

 

Malgré les combats, tous les défenseurs eurent le même réflexe en s’accroupissant et revêtant par-dessus eux leurs boucliers. Une pluie de flèches, telle une envolée d’oiseaux migratoires en plein automne, s’abattit sur la bataille tuant aussi bien attaquants que défenseurs. Mel’Ermat tournait la tête vers Mel’Cari qui n’avait pas pu se cacher et qui, au dernier moment, réussit à attraper son attaquant et à tomber avec lui pour se protéger. Il ne fallut qu’une seconde pour que l’affrontement reprenne et les coups ne s’échangent de nouveau. Il était persuadé que son adversaire suivant était un gradé ennemi. Il était vêtu d’une toge rouge immaculée, serrée à la taille et aux chevilles. Il portait une lourde armure de plaques qui ne le gênait pas dans ses mouvements et maniait une épée sertie d’un diamant. Repérant également son aura naturelle de commandant et voyant comment ses hommes le protégeaient, il le désigna de son épée. Mel’Ermat était sûr qu’il le demandait en duel. L’intendant leva son pistolet et tira deux coups. Le premier l’atteignit en pleine gorge et le deuxième dans le bras. Il n’avait pas de temps à perdre en futilité. Il ne s’attarda même pas pour le regarder mourir.

 

Mel’Ermat regardait derrière lui. Ils étaient au sommet de la colline. Encore quelques mètres en arrière et ils allaient amorcer la descente ce qui jouerait en faveur des envahisseurs. Ils avaient perdu près de cinq cent mètres dans l’affrontement et cela allait de mal en pis. Perché sur son cheval, Ben’Lor apparut. C’était d’ailleurs étonnant puisqu’il commandait les troupes à deux kilomètres de là au nord. Il taillait à droite et à gauche et faisait mouche à chaque fois que son sabre s’abattait. C’était un des rares cavaliers à la ronde. Ceux-ci se battaient plutôt au nord, où la plaine leur permettait de prendre de l’élan. Sur ces flancs de colline jonchés de trous et de cadavres, ils étaient voués à être inefficaces. L’homme s’approcha de lui et un cercle se forma pour les protéger.

 

-Que se passe-t-il ? s’inquiéta Mel’Ermat en criant.

 

Il allait devenir fou avec tous ces bruits.

 

-Il faut battre en retraite, les flancs sont tombés ! annonça le roi de Syrarture en descendant de la monture pour ne pas être pris pour cible.

 

Mel’Ermat sentit son cœur s’arrêter et regarda à gauche puis à droite sans pouvoir voir ce que les combats donnaient dans ces directions là.

 

-Où sont les généraux ? les chercha l’intendant du regard.

-Tous morts pratiquement, lui rétorqua Ben’Lor en criant alors qu’un boulet siffla au-dessus de leurs têtes.

-Il faut battre en retraite ! comprit Mel’Ermat.

 

Ben’Lor hocha la tête et utilisa un sifflet qu’un magicien lui avait donné. Il était lié à d’autres sifflets détenus par des sonneurs de corps situés derrière eux le long de leur retraite. Mel’Ermat vit que des guerriers commençaient à tourner talons et à s’enfuir. C’était sporadique mais le mouvement se généraliserait bientôt. Ben’Lor souffla de toutes ses forces dans l’instrument mais l’intendant ne perçut aucun son. Le roi regardait son appareil en fronçant les sourcils quand ils entendirent le son long des cors. C’était le signal pour battre en retraite. Mel’Ermat et ses dirigeants avaient été clairs. Le but n’était pas de fuir en courant mais de continuer de se battre en reculant. Un peu comme ce qu’ils avaient involontairement fait depuis le début de la bataille mais en accéléré. C’était également le signal pour que tout ce qui n’avait pas été évacué de leur ancien camp soit évacué. Les matelas seraient laissés et les tentes qui n’avaient pas été chargées seraient abandonnées. Les dernières charrettes avaient pour ordre d’embarquer les canons et le plus loin d’ici avant que leurs adversaires ne mettent la main dessus.

 

Le signal de retraite, qui sonnait par ailleurs leur défaite, permit au moins de stopper l’hémorragie de déserteurs. Ce n’était pas la même chose d’avoir l’impression de se battre pour mourir que de se battre pour s’enfuir. Ils réussissaient à reculer plus vite mais l’ennemi ne les laissait pas faire. Ils n’avaient visiblement pas eu pour consigne de les laisser s’enfuir. Plus vite ils reculaient, plus vite on se jetait sur eux avec hargne. Ils développèrent rapidement une technique de combat. Une ligne se formait pour retenir les ennemis tandis qu’une deuxième reculait d’une dizaine de mètres. Une fois en place, la première courait former une ligne dix mètres derrière la nouvelle tandis que la seconde encaissait le choc tandis que tout ce qui tirait déversait ses projectiles sur les attaquants.

 

Ce saut de puce marcha correctement sur deux cent mètres, juste assez pour qu’ils atteignent le flanc de colline. Ce fut quelque chose de peu naturel qui mit fin au combat. Mel’Ermat se repliait pour former une nouvelle ligne lorsqu’il entendit un petit impact sur son casque. Suivi un autre, et immédiatement d’un nouveau. Il leva les yeux et sentit un petit caillou le frapper sur la joue. Il ouvrit les yeux en grand. Un rocher de la taille d’une charrette s’écrasa entre les deux lignes. Un autre atterrit sur un couple de guerriers. La fuite fut alors généralisée dans un camp comme d’un autre. Mel’Ermat courut sans savoir s’il pouvait échapper à ce qui tombait. Les rochers étaient de toutes tailles même si le plus gros atteignit la taille d’une petite cabane. Les vrombissements sifflaient dans le ciel et l’intendant levait les yeux pour essayer d’éviter les suivants. C’était étrange car le ciel était d’un bleu parfait, il n’avait aucune idée de la provenance de ces boulets. Ce ne pouvait qu’être que magique donc divin. Les magiciens avaient dû finir par lâcher et les Dieux libéraient leur puissance. Ils ne semblaient pas non plus très préoccupés par les victimes qu’ils faisaient dans leur nouveau camp.

 

Une pierre d’un mètre cube s’écrasa en roulant et arracha l’herbe juste devant lui en lui coupant la route. Mel’Ermat ne la vit qu’au dernier moment et se fit faucher dans sa course. Heureusement, c’était lui qui était rentré dedans et non pas l’inverse. Ses tibias étaient douloureux mais ce n’était pas handicapant. Vautré dans la terre comme il l’était, il fallut une pierre à quelques centimètres de son visage pour qu’il se relève. Il sentait les tremblements de la terre qui amortissait les tirs rocheux. Des milliers de personnes cavalaient vers l’ouest. Il n’y avait aucune organisation. Certains couraient en soutenant leurs proches, d’autres faisaient abstraction du reste et ne se concentrait que sur leur propre personne. Mel’Ermat aperçut un bois non loin et courut dans sa direction, il y serait peut-être en sécurité. Mal lui en prit puisque juste avant de l’atteindre, alors qu’il suivit un groupe de soldats, plusieurs rochers aussi gros que des menhirs tombèrent sur la forêt, arrachant arbres, végétation et êtres humains pris dans le tir. Ni le bois ni la chair humaine ne résista à la vitesse de ces missiles qui tuaient sur le coup. Mel’Ermat n’avait pas encore vu un seul blessé, il n’y avait que des morts.

 

L’intendant regardait autour de lui, la tempête ne semblait pas cesser. Il avisa un cratère à l’orée du bois et se jeta dedans. Il se mit en fœtus et pria très fort, ironiquement, pour que cela s’arrête. Le déluge continua pendant dix bonnes minutes supplémentaires. Plusieurs rochers tombèrent non loin de lui mais peu furent vraiment menaçant. Son trou faisait un bon mètre de profondeur et le rocher dépassait toujours du fond. Accroupi là-dedans, il fut presque recouvert par la terre qu’une météorite retira du sol. Ce fut sûrement les pires dix minutes qu’il passa dans sa vie, là, seul, au milieu des bruits sourds d’impacts et des traînées rocheuses dans l’air. Ayant l’impression à chaque seconde qu’il allait mourir. Pourtant, le calme finit par reprendre ses droits et Mel’Ermat s’extirpa de là, faisant tomber toute la terre qu’il avait accumulée. Le soleil semblait se presser de se cacher du spectacle et il disparaissait déjà derrière les collines de la région. Autour de lui, les blessés étaient légions. Ils ne pouvaient être dus qu’à la bataille car Mel’Ermat ne voyait pas comment on pouvait sortir blessé d’un cataclysme comme celui-là. Au loin, il voyait des centaines de silhouettes continuer de courir vers l’ouest.

 

Les envahisseurs devaient être également retournés dans leur campement car ils étaient pour l’instant seuls. Ils devaient néanmoins se dépêcher car les éclaireurs viendraient bientôt prendre possession de la zone. Le point de ralliement était à moins de dix kilomètres de là mais il ne fallait pas perdre de temps. Une fois la nuit tombée, il serait impossible de se diriger. En marchant vite, il y serait à peine. Aucune chance pour ceux blessés d’y être à temps. Un capitaine de l’armée de Sal passa par là.

 

-Ca va ? l’interrogea-t-il.

-Oui, répondit Mel’Ermat, juste déboussolé.

-Marche vers l’ouest, une longue route nous attend, conclut-il voyant qu’il n’avait pas besoin d’aide.

 

Mel’Ermat se regarda de la tête au pied. Avec les projections de terre, il devait être méconnaissable. Il eut envie de gravir la colline pour voir ce que l’ennemi faisait. Il conclut rapidement que c’était trop dangereux et qu’il ne valait pas la peine de mettre sa vie en danger ainsi. Il fit demi-tour et évita la forêt pour ne pas y découvrir le spectacle qu’il pouvait y avoir dedans. Il se dit finalement que ça devait être la même chose que le chemin qu’il prit qui était couvert de rochers. On voyait nettement les trajectoires qu’avaient eues ceux-ci grâce aux tranchées tracées dans le sol. On voyait aussi où les malheureux avaient été fauchés. Autour de lui, Mel’Ermat voyait des milliers de cadavres. Il n’y avait pas eu de différenciation sur les victimes. Pas de considération de sexe, d’âge ou d’expériences militaires. Des convois de ravitaillement avaient aussi été touchés et les morceaux de charrettes étaient éparpillés autour des impacts.

 

Une colonne de réfugiés se créa rapidement et on pouvait aussi y voir avec tristesse des gens porter des mourants dans l’espoir qu’ils tiendraient le coup jusqu’aux hôpitaux. En réalité, les hospices avaient reçu pour consigne d’être déplacés vers Vitoria. Si jamais les blessés survivaient jusqu’aux hôpitaux, ils les trouveraient avec le service minimum, juste là pour accompagner ceux qui devaient bientôt mourir. Pire, si jamais les envahisseurs se lançaient à leur poursuite, ils devraient abandonner les blessés là et s’enfuir. Les cavaliers ennemis étaient assez nombreux pour les vaincre et il fallait mettre au plus tôt une grande distance entre eux. La colonne se coupa rapidement en deux, les civils au centre et des soldats de part et d’autres. Certains de ceux-ci faisaient preuve d’un détachement pratique qui leur permettait d’organiser la retraite tout en restant organisés. Il entendit plusieurs fois des lieutenants envoyer ses hommes sonder la région afin de retrouver des personnes perdues et éloignées des principaux groupes. Mel’Ermat ne se manifesta pas en tant que dirigeant de royaume. Cela ne rimait plus vraiment à rien. Leurs armées étaient en déroute, il ne restait même plus assez de survivants pour créer un royaume. Silencieux, il suivit le mouvement.

 

@+

-= Inxi =-

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