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Warhammer Forum

Adoption


Petimuel

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VI

Douleur

Toute la maisonnée fut en deuil, suite à la mort de Raoul. Gaston se cloîtra dans sa chambre, et n’en sortit pas pendant des mois. Il restait toute la journée sur son lit, à lire ses parchemins d’école, ces parchemins qu’il écrivait en pensant à autre chose, afin de ne pas sentir la douleur que lui infligeait son poignet, las de virevolter sans cesse sur de la chair tannée. Il relisait ses cours, minute après minute, heure après heure, jour après jour. Il avait déjà étudié la Bretonnie, nation humaine dans laquelle il vivait. Il avait étudié son système politique, basé sur la féodalité et l’allégeance. Des cours avaient porté sur sa divinité, la Dame du Lac, une puissante déesse qui accordait à ses meilleurs chevaliers de tremper leurs lèvres dans le saint Graal ; et son histoire, principalement les 12 batailles de Gilles le Breton , qui libérèrent la Bretonnie de ses envahisseurs. Il lut que Baudouin avait effectivement rejoint les compagnons, et comprit le piège que lui avait tendu le professeur.

Il avait jeté un œil sur l’Empire, une autre nation humaine voisine, qui ne respectait ni le code de l’honneur ni celui de la chevalerie, et qui osait user des armes de tir. Ses armées partaient souvent à la bataille accompagnées de puissants canons et d’autres machines qui permettent de lâchement tuer l’ennemi, tout en restant à l’abri de ses coups.

Il avait fait quelques leçons sur le monde dans lequel il vivait. On lui avait parlé de dangereux guerriers nordiques, de terribles démons, d’elfes orgueilleux et imprévisibles, de brutes vertes qui portaient le nom d’orques, et qui envahissaient les terres impériales, et même

une leçon qu’il ne se souvenait pas avoir couché sur le papier, qui parlait d’une antique civilisation, en plein désert, composée de squelettes qui avaient le don de vie ; et qui surveillaient les pyramides qui abritaient les dépouilles de leurs anciens rois. De nombreux aventuriers impériaux y venaient afin de dérober des parchemins diaboliques. Peu en revenaient, et ceux qui avaient cette chance étaient contrôlés par les répurgateurs impériaux. Ces parchemins étaient interdits. Ils étaient brûlés avec les voleurs, sur un grand bûcher.

Ainsi passaient les journées. Parfois, Gaston se levait, et allait à la fenêtre. Il fixait les bois, qui avaient emporté son père. Suite à la mort de celui-ci, la déforestation fut abandonnée. Mais elle reprit bien vite, avec plus de fougue et d’entrain. De grands échafaudages étaient là, afin d’adoucir la descente des arbres. Gaston ignorait la cause de ce revirement. Il n’avait pas eu l’occasion de le demander à sa mère, régente du domaine. Il ne la voyait pas.

Ses repas lui étaient servi par la porte entrouverte, midi et soir. Il le mangeait lentement, dans son lit, en lisant et relisant ses cours. C’était son manque d’intérêt pour ceux-ci qui avaient provoqué la mort de son père. Il en état persuadé. Alors, il fallait lire. lire, et relire. Et il lisait. Lisait et relisait. Il lisait tellement que les phrases finissaient par ne plus avoir de sens, que chaque mot s’individualisait, que ses leçons se décousaient. Il ne comprenait plus ses lectures, mais n’avait de cesse de les parcourir.

Un jour enfin, au bout d’une année à s’être cloîtré dans sa chambre, il se décida à ouvrir sa porte. Il sortit dans le couloir, qui était baigné de lumière. Il était littéralement tapissé de merveilleux vitraux, qui laissaient passer des lumières blanches, bleues et rouges. Continuant sa route, il vit des salons resplendir de lustres, sentir la propreté, des parquets briller et refléter son image. Il vit des gardes vêtus de riches vêtements, et des marchands charrier des livres tous plus chers les uns que les autres. Il vit des tapisseries parmi les plus belles de Bretonnie, qui représentaient des licornes, des pucelles nues et des chevaliers qui chassaient dans la forêt. Enfin, sortant du château, il découvrit un immense jardin, qui s’épanouissait au soleil. Des rosiers de plusieurs mètres de haut déployaient leurs fleurs, roses, rouges et blanches. Des fontaines crachaient bruyamment leur eau, fraîche et pure. De gigantesques parterres de fleurs recouvraient plusieurs hectares de terrain. De larges allées graveleuses, où passaient quelques fauconniers, écuyers, nobles ou pages, à pied comme à cheval, bordées de massifs feuillus taillés pour représenter des fées, des anges, et des chevaux.

Gaston déambula au milieu de ce foisonnement de couleurs de feuilles, de fleurs, de plantes, au milieu de ce camaïeu de senteurs que dégageaient les fleurs, les grands arbres qui sentaient la sève, et l’allée enfin qui sentait la terre et le sable. Il se perdit dans les jardins, courait partout, s’émerveillait à chaque nouvel endroit. Il sauta dans un parterre de fleurs, et roula au milieu des pâquerettes, des violettes et des coquelicots, des roses et des géraniums, des colchiques et des jacinthes, des camélias et des lys. Il sentit une odeur forte et suave lui pénétrer les narines. Le doux murmure des abeilles qui récoltaient de pollen lui parvenait aux oreilles, dans le même temps que le roucoulement des colombes et des jeunes jouvenceaux, qui se plaisaient à flâner au milieu de ce paradis terrestre. Son cœur, ses poumons, et tous ses muscles se gonflaient d’une énergie nouvelle, d’une énergie qu’il avait perdu, pendant cette année coupée du monde. Chaque parcelle de son corps, chaque fibre de sa peau lui demandait de bondir, de sauter et de courir, de chanter et de danser.

Il se leva d’un bond puis, au milieu des fleurs, et au gré des allées, il sauta, courut, chanta et dansa un hymne à la beauté, à l’allégresse et à la joie de vivre. Galopant au milieu des haies de rosiers, renversant les passants, qui se relevaient en s’époussetant, mécontents, il riait, il chantait à tue-tête une chanson qu’il inventait au fur et à mesure.

« J’aime les fleurs, et j’aime leur senteur. »

Il courait, dérapait, se redressait, tournait, sautait, chantait et chantait.

« Les jardins, je me les fait miens. »

Il prit la direction du château, afin de remercier sa mère pour tout ce qu’elle avait fait. Pour cet étalage de grâce, de joie et de beauté.

« C’est grâce à ma mère, que cette odeur embaume l’air, cette odeur si douce, que jamais je ne tousse. »

Ses paroles n’étaient pas très hautes, les rimes se faisaient hésitantes, mais il improvisait, et en était content. Il bondit sur le pont-levis, et observa la herse, peinte en blanc, polie et vernie, refondue, sculptée à nouveau, afin de présenter une série d’entrelacs magnifiques et audacieux. Cet ouvrage de métal se souleva à sa venue. Il bondit dans le boudoir de sa mère, pour la découvrir avec stupeur en train d’embrasser Michel.

« Maman ? »

La baronne sursauta. Elle eut un rire gêné, ramena la lanière de son soutien-gorge sur son épaule, puis dit :

« Gaston ! Enfin ! Cela fait bien un an que je ne t’ai pas vu ! Oh, dame ! Tes cheveux ! »

Gaston n’avait pas fait attention à ses cheveux, qui avaient beaucoup poussés durant toute cette année, pas plus qu’il ne fit attention à la réponse de sa mère.

« Pourquoi embrasse-tu Michel? »

« Ah ! Euh… eh bien, chéri, je dois te dire… Michel n’est plus le valet de chambre. »

« Ah ? », fit Gaston, dont la gorge se nouait, alors qu’il commençait à comprendre la raison de la mort de son père.

« Non, c’est… c’est le seigneur d’Annecy. Michel d’Annecy. »

« Michel d’Annecy ? »

Le valet de chambre fit un pas vers le garçon.

« Ecoute, Gaston, je… »

Mais Gaston tourna les talons, et claqua la porte, qui fut rouvert par la baronne.

« Gaston ! »

La herse se refermait.

Gaston partit à travers champs, en évitant soigneusement le jardin d’agrément. Il leva la tête vers les remparts du château, qu’il découvrit garnis de nombreux trébuchets, faits avec le bois de la forêt d’Andrésy, qui n’avait de cesse de diminuer. Et sans cesse des animaux disparaissaient, des lieux enchanteurs étaient recouverts de terre. Un petit ruisseau, un parterre de champignons.

Il se dirigea vers le village le plus proche, comble de misère et de pauvreté. Le bois des maisons était vermoulu, et détrempé par la pluie. Les paysans, en train de déraciner les arbres d’Andrésy, n’avaient pas le temps de les réparer. Les énormes champs étaient traités par les quelques hommes qui n’étaient pas partis déboiser, et qui peinaient, qui devaient accomplir à dix la tâche de cinquante. Il vit les énormes granges qui avaient abrités les rires de son enfance vidées de toute leur paille. Il vit des familles mendier, sans rien récolter, car tous les passants étaient aussi pauvres qu’eux. Il croisait des enfants aux corps cadavériques, exposés aux maladies et au froid. Nul n’avait d’argent, mais tous devaient payer le four et le moulin, le puits et le chariot.

Des hommes, gisants, morts, étaient ramassés avec des pelles et jetés dans des fosses communes. Une épidémie de peste s’était déclarée, trois jours plus tôt, et des hommes déambulaient, couvert de bubons. Tout le monde s’écartait de leur passage, et les malheureux trouvaient toujours porte close.

Gaston marcha ainsi durant le reste de la journée, errant à travers tous les villages d’Andrésy, réduits à la misère et à la pauvreté. Ecrasés par les impôts, les paysans survivaient à grand peine, lorsqu’ils survivaient.

Il entendit des gémissements de douleur et de peine, des cris de fins et des pleurs de désespoirs. Il vit des regards se tourner vers lui, parfois avec implorance, faisant appel à sa générosité, parfois avec haine et suspicion, du fait de ses riches vêtements. Il ne supportait ni les uns ni les autres.

Voilà le prix de tout ce luxe, de cet étalage de richesse et de beauté, pensa le garçon. Sa mère et son nouveau mari vivaient sur le dos des autres, plus que de raison. Tout ce qui était produit à des lieux à la ronde finissait dans le château d’Annecy, au comte de la baronne. Et lui-même était coupable, ou du moins complice de ce crime affreux ; même enfermé dans sa chambre à longueur de journée, il était logé aux frais de la princesse, selon l’expression. Et la princesse elle-même aux frais des paysans, pensa Gaston.

Il rentra au château sous un ciel gris et lisse comme un galet. Une légère brise soufflait, lui glaçait les os, lui paralysait les muscles. Il croisa ses bras, et marcha durant une bonne heure, sur la plaine d’Annecy. Il grelottait et tremblait de froid, mais se forçait à continuer. Il voulait rentrer au château, et s’enfermer dans sa chambre une bonne fois pour toutes, jusqu’à y mourir.

En chemin, il rencontra un group de garçons, qui jouaient à se donner des coups avec un bâton. Parmi eux, Romain, toujours aussi blond, toujours aussi vif et gai. Il se tourna vers son ami, en lâchant son bâton, les yeux écarquillés, la bouche entrouverte. Les autres auraient pu le frapper, l’assommer, profiter de ce moment d’inattention pour le mettre à terre. Mais ils sentaient que le moment était important.

« Gaston ! »

Une véritable aura émanait de Romain, toujours hagard, retrouvant enfin un ami qu’il croyait perdu depuis une année. Il avait l’air du fou pris de vision, il avait l’air d’un saint, voyant le christ. Une véritable énergie se dégageait de sa personne, un mur d’amour pour ce garçon, ce garçon perdu et retrouvé.

Gaston s’en fichait. Il rentrait dans le château, d’un pas vif et déterminé. Il dépassa Romain, qui ne le quittait pas du regard, sans même un signe, sans même un geste.

Son ami resta ainsi quelques instants, sans rien faire. Etait-il possible que ce garçon ne l’ait pas reconnu, que le Saint ne voie pas son apôtre ?

Finalement, le charme qui le tenait immobile se rompit. Il se retourna, puis trotta en direction de Gaston.

« Gaston, attends moi ! Gaston !

Gaston… »

Romain suivait son idole, son roi, son Dieu, Dieu qui n’eût pas à demander l’ouverture des portes, qui l’étaient tout le temps afin de laisser passer la foule d’artistes, de penseurs, de professeurs, de nobles et de badins, cette foule qui avait enrichi Annecy, et appauvri ses propriétés et ses provinces, cette foule que Gaston haïssait et vomissait, cette foule à travers laquelle il se frayait un passage, au milieu du bruit, jusqu’à l’entrée encombrée, jusqu’aux escaliers impraticables, jusque devant la porte de sa chambre, dans laquelle enfin il trouverait un peu de repos…

Une main se posa sur son épaule.

« Gaston ! »

Il se dégagea rapidement de l’emprise de son ami, rentra dans sa chambre, et claqua la porte. Les coups ne se firent pas attendre. En trios, d’abord, comme pour signaler sa présence et sa volonté d’entrer, Gaston, ouvre-moi, puis plus fort, comme si on se demandait s’il y avait quelqu’un à l’intérieur, ouvre-moi, s’il te plaît, puis, de plus en plus rapides, comme un homme pressé d’entrer, Gaston, je t’en prie, ouvre-moi, et encore plus rapides, tonitruants, saccadés, avec des brisures de rythme, Gaston, comme si un emprisonné demandait à sortir, Gaston, ouvre moi, s’il te plaît, Gaston, Gaston, Gaston… s’il te plaît…

Non, non, non… Gaston pensait, répondait dans sa tête aux supplications de Romain, non, non, cela ne me plaît pas…

Etendu sur le lit, les bras le long du corps, le regard fixé sur le drap qui, tel un toit, recouvrait le lit à baldaquins. La tête haute, et embrumée de pensées. Le corps droit, noble. Aussi droit et noble que celui de son père, recouvert par l’eau. Gaston s’en souvenait toujours, et s’en souviendrait toujours. Il se rappelait ses pleurs, ses cris, cette vision d’horreur, ce père bercé par les flots. Et pourtant, son visage s’était détendu… il avait l’air calme et reposé, même sous le trouble de l’eau. Comme si la mort l’avait délivré.

Gaston se leva de son lit, et, très calmement, il se dirigea vers la fenêtre, comme d’habitude. Il regarda dehors. Mais il n’y voyait plus un paysage gai et verdoyant, ni même triste et grisonnant. Il y voyait une façon de mourir.

Il voulait ouvrir la fenêtre, monter sur le rebord, et crier, pour que tous les passants s’arrêtent, pour que toute cette troupe d’imposteurs indifférents, de salauds innocents, pour que tout le monde s’arrête et le regarde. Et alors, il voudrait sauter, pour s’écraser contre les graviers de l’allée, pour que son sang se répande entre les cailloux, éclabousse les passants, salisse les haies de rosiers, et souille les parterres de fleurs, pour que tout soit recouvert de rouge, d’un rouge écoeurant, pour dire, implicitement, ce qu’il avait sur le cœur, pour crier muettement qu’il ne s’était pas tué, mais qu’il avait été tué, par sa mère, qui avait déjà assassiné son père, par ces impôts qui eux-mêmes tuaient les paysans, et par eux, eux, tous ces passants qui défilaient béatement, qui s’émerveillaient devant la richesse des lieux, et qui alors seraient en train d’essuyer le sang sur leurs chemises, ces nobles qui tuaient toute une population sans pour autant avoir de sang sur les mains.

Une pulsion soudain lui insuffla l’envie de tendre sa main vers la poignée, et de le faire, de sauter, pour pleurer et rire des larmes de sang à la face du monde.

Mais il se détourna de la fenêtre, bondit dans son lit, et dormit.

Le lendemain, Il se leva à grand peine à l’heure du déjeuner. Une assiette en porcelaine remplie de bouillon avait déjà été déposée, près de la porte. Il l’avala rapidement, en reversant le liquide dans sa bouche, sans même se servir de sa cuillère, puis prit à nouveau le chemin de la fenêtre, quand trois coups retentirent. C’était Romain, qui demandait le droit d’entrer. Gaston l’ignora et s’approcha de la fenêtre. Il avait toujours envie de l’enjamber, de se tuer, de se faire tuer… cette fois-ci, il ne pût réprimander un vif mouvement de son bras vers la, poignée. Et un cycle commença.

Ainsi, tous les jours, il se levait plus où moins à midi, avalait son bouillon, puis se dirigeait vers la fenêtre. Tous les jours, Romain vint frapper à la porte. Et chaque jour, la tentation, la tentation d’ouvrir la poignée, la tentation de sauter sur les graviers se faisait plus forte. Le temps passait ainsi, loin des leçons et des professeurs, loin de tout. Proche de la mort. Gaston ne vit pas passer le temps. Les pensées s’enfilaient dans son esprit, toujours les mêmes, toujours les autres. Il se racontait les mêmes histoires, nourrissait les mêmes espoirs, attisait les mêmes pensées morbides, et pourtant, trouvait tout nouveau. Il avait perdu la mémoire, et ne se rappelait plus avoir déjà pensé. Mais il se souvenait être déjà mort, allongé dans un ruisseau. Comme dans un rêve, il voyait son fils, arriver à cheval, puis, le découvrant ainsi, reposant au fond des eaux, pleurer et crier. Mais, avait-il un fils ? Qui était-il vraiment ?

Gaston avait douze ans lorsque après avoir avalé son bol de bouillon, il alla une fois de plus rêver à la fenêtre. La tentation fut trop forte. Il tourna la poignée, et monta sur e rebord de la fenêtre. Qu’il était haut ! Les gens étaient tout petits, en bas ! Il sentait le vent mouler ses vêtements, et lui caresser le visage. Il ferma les paupières, et respira à pleins poumons. Soudain, Romain toqua à la porte, comme à son habitude. Gaston ouvrit les yeux, et les ouvrit sur une vision d’espoir. Ses yeux s’écarquillèrent. Il avait fait son choix.

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Vraiment très biennement beau...

Une erreur:

Il en état persuadé

Deux ans qui passent en une page, je dois avouer que c'est un peu rapide, mais, malgrès tout:

1- Le "suicide": On y croit pas (enfin, quoique, tu serais presque capable de nous faire 100 pages qui se terminent brusquement quand on ne s'y attend pas sur un suicide), mais, enfin, on y croit pas vraiment.

2- La misère: Là, ça fait un peu trop cliché. Le petit nobliau qui a toujours eu tout ce qu'il voulait et qui se rend un jour compte qu'il a obtenu cette richesse en exploitant de pauvres miséreux, qui souffrent.

3- Le valet. Une veuve ne se remariera pas, un an plus tard, avec un gueux. Si elle insiste, elle sera dépossédée de ses biens. un gueux qui devient duc, en épousant un fraiche veuve, qui plus est, un gueux choisi par la vueuve en question, vraiment, non, ça ne se peut pas...

D'ailleurs, je crois qu'il y avait une loi comme quoi une veuve doit épouser le frère de son défunt mari...

Allez, une suite, s'ilteplait (ouais, j'ai répondu avant Inxi ^^)

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Barf, après ces remontrances, la suite pourra attendre...

Je vais juste te dire qu'on est dans l'univers de warhammer, qui laisse une bonne part à l'imaginiaire, donc, si je veux qu'elle puisse se marier avec un gueux, elle peut. Non mais!

Quand à la misère, je te demanderai de relire tout le texte, afin que tu puisse te rendre compte qu'il avait déjà visité les villages voisins, et quecette pauvreté date de la mort de son père.. ainsi que lea luxure du château.

Quand au suicide, là, je n'ai rien à dire... mais l'image du père, allongé sous l'eau, me plaît. Donc, je garde! :crying:

Et merci pour ta critique.

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principalement les 12 batailles de Gilles
« Pourquoi embrasse-tu Michel? »
un group de garçons
En trios, d’abord, comme
monta sur e rebord de la fenêtre.

Voici toute mes remarques sur la forme :blink: La première, pas de chiffres :crying: Et le reste, c'est des fautes d'orthographes ! Bon dans l'ensemble, rien d'inquiétant ! C'est à continuer mais faudra une petite relecture ^_^.

Pour le fond, c'est interessant ! C'est du pile poile. Ca devenait long de le voir déprimé mais tu as su t'arreter, ne t'iquiete pas ... Bon, a part ça, il fait pas grand chose le coco. La mère rajoute un peu de variété et je suis sur que ta des pistes pour exploiter cet evenement ! Sinon, je me doute de ce que tu vas faire pour la suite malgré la dernière phrase ! Alors suite !

@+

-= Inxi =-

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Une suite un peu frustrante...Le texte est bien ecrit et les sentiment bien decrits mais le tout n'avance pas vraiment. Tu as fait un bon passage d'ambiance mais à mon avis on s'enlise un peu. Pas de beaucouop, mais un peu quand meme.

Je rejoindrais les autres sur les critiques de réalisme. Le coup de la veuve qui se remarie avec le palefrenier, on a beau être à Warhammer, c'est absolument irréaliste. Pire tu bascules dans le cliché facile et dans la quasi eau de rose... :crying: Bref tu fais comme tu veux mais tu devrais vraiment reconsiderer la chose. :blink:

Jorgar Heise

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  • 1 mois après...

Oui, je vais peut-être refaire le précédent chapitre.. mais j'attends d'avoir fini tout l'histoire, pour ça!

Mais je t'aientendu, jorgar!

V

Exil

Gaston sauta sur le parquet, puis courut ouvrir à son ami. Il ouvrit la porte sur un couloir plus que jamais encombré par des artistes et des petits bourgeois pompeux. Son camarade s’était déjà écarté, croyant que cette fois encore, la porte resterait close.

« Romain, attends ! »

Son ami se retourna, les yeux pleins d’espoir, puis courut dans la chambre. Gaston ferma la porte. Romain lui sauta au cou, puis le serra dans ses bras pendant un moment. Puis se recula, mais en gardant ses mains sur les épaules de Gaston.

« Ah, Gaston ! Je n’espérais plus que tu daignes ouvrir ta porte ! »

« Si, Romain. Ecoute, j’ai besoin de toi. »

« De moi ? »

« Oui, Romain… je pars. »

« Tu pars ? Où ? »

« Au château d’Andrésy. »

Loin de rester immobile et ébahi, comme le pensait Gaston, Romain sourit, sans s’emporter. Ses yeux pétillaient. Visiblement, lui aussi aurait voulu partir, et le fait d’aider à s’enfuir, c’était s’évader un peu.

« Je pars tout de suite. Va me chercher des pommes, à la cuisine »

« Entendu, Gaston. »

« Ah ! Une épée, aussi. »

« Une épée ? Pourquoi donc ? »

« A-t-on jamais vu un aventurier sans épée ? », soupira Gaston, en levant les yeux vers le plafond, vide et blanc.

Romain ouvrit la porte, sur une foule de passants qui déambulaient dans le couloir, puis sortit discrètement. Gaston referma la porte sur une vision de son ami, accroupi, tentant de se faufiler entre les gens. Il se retourna et s’affala sur son lit. Enfin un moment de quiétude… depuis des années… mmmh… quelle agréable sensation, que de se sentir enfin tranquille.. sans soucis, et sans obligations aucune… Il s’emmitoufla sous les couettes… bientôt, une famille le recueillerait, et l’hébergerait… bientôt, il serait heureux… loin de sa mère… loin de ce château… qui lui faisait horreur… loin de ce monde… loin des gens… tranquille… seul… dormir… dormir…

« Gaston ! »

Plus que la voix de Romain, un vacarme assourdissant pénétra soudain dans la pièce. Gaston se leva d’un bon, les cheveux décoiffés. Avait-il dormi ? Il se le demandait…

« Ferme la porte, Romain… on ne s’entend plus, ici… »

« Qu’est-ce que tu dis ? », demanda son ami, l’air visiblement taquin. Mais il s’empressa bien vite d’aller exécuter les ordres de Gaston avant que celui-ci ne s’énerve.

« Dis donc, ce cloître t’as fait perdre ton sens de l’humour, dirait-on. »

« Qu’y a-t-il, dans ce sac ? » demanda sèchement Gaston.

Romain ouvrit un petit sac de toile bleue, troué de partout. Il y entra la main, et en sortit une pomme.

« C’est tout ce que j’ai pu trouver. »

« Quoi ? Mais même du temps de Raoul, la cuisine débordait de nourriture. Alors, maintenant, avec cette débauche de luxe, il devrait… »

« … y avoir beaucoup de banquets, ce qui raréfie la nourriture disponible. » le coupa Romain.

« Oui… en effet.. » constata Gaston, confus, et terriblement embêté d’avoir pu se tromper.

« Bon, et pour l’épée ? »

Romain sortit un petit glaive du sac, et le présenta à Gaston, qui s’en saisit immédiatement.

« Ce n’est pas exactement ce que j’attendais, mais ça suffira pour ce petit voyage. Bon, en route ! »

Gaston arracha le sac de toile des mains de son ami, et y mit la pomme, avant de passer son glaive à sa ceinture.

« Gaston, tes cheveux. »

Le garçon reprit son glaive, puis s’appliqua à le faire passer sous la longue tignasse.

« Tu ne vas pas… »

D’un coup sec, en tenant fermement ses cheveux, Gaston les coupa au ras. Une longue bande brune s’échoua sur le sol de la pièce. Il répéta l’opération pour les cheveux qui lui masquaient le visage.

« C’est mieux, ainsi. »

« Bon, J’y vais. »

« Gaston, je voulais te dire… »

« Au revoir. Tu voulais me dire au revoir. En route ! »

Gaston marcha vivement vers la porte d’entrée, mais se ravisa. Il ne voulait pas avoir à supporter encore ce défilé interminable d’imbéciles en vêtements de luxe. Il préférait la fenêtre. Mais, après s’être approché de celle-ci, il se rendit compte que cette tentative n’aboutirait qu’à sa mort… il en avait rêvé, certes… mais cette fois-ci, il se rendait compte qu’un espoir subsistait. C’était pourtant si tentant… si facile…

Finalement, il reprit la direction de la porte, sous le regard d’un Romain à la fois intrigué par tous ces changements d’avis, mais aussi médusé par le manque d’égards que son ami de toujours lui témoignait.

Gaston ouvrit la porte, sortit de la pièce et referma immédiatement derrière lui, avant de s’élancer entre les jambes des passants. Il savait qu’il y avait une fenêtre, juste en face, qui donnait sur la cour. Il serait plus aisé de passer par ici.

Mais il fallut éviter es espadrilles des serviteurs comme les lourdes bottes des gardes, les chaussons des courtisans et les souliers des dames. C’était une folle danse qui se jouait tout autour de lui, une farandole de pantalons, de jupons et de petites culottes. Et lui, placé au milieu de la scène, esquivait, s’élançait et dérapait, se rattrapait. Il se faisait bousculer et s’excusait .Il palissait devant le regard foudroyant des serviteurs, et rougit sous les tendres yeux d’une belle demoiselle.

Et enfin, la fenêtre. C’était un vitrail. Il ignorait même s’il pouvait l’ouvrir. Au fond, il ne savait pas de quelle manière le château s’était transformé. Exception fait du jardin.

« Que fais-tu là, petit ? », hurla une voix derrière lui, étouffée par le bruit ambiant qui régnait, dans le couloir.

« Rien… j’observe le vitrail. »

« Ah ! Mais… je ne t’ai jamais vu, toi, ici ! »

« C’est normal… c’est normal, je viens d’arriver. Le vitrail… il peut s’ouvrir ? »

« Tu viens d’arriver, dis-tu ? Oh, tous ces gens, qui ne peuvent se taire ! Bon… et comment te nommes-tu ? »

« Le vitrail, monsieur ? »

« Le vitrail ? »

« Il peut s’ouvrir ? »

« Oui. »

Pour couper court à la discussion, qui risquait de devenir embarrassante, Gaston chercha immédiatement le loquet de bois, puis ouvrit le vitrail bleu et rouge. Il passa sur la corniche, et referma la fenêtre, sous le regard ébahi du serviteur. L’enfant espérait de tout cœur que celui-ci ne souffle pas un mot de tout cela. Mais qu’est-ce qui l’avait pris, de sortir là, bien en vue de tous les usagers du corridor ? Babille, il s’en fichait. Fichtre ! Qu’il était haut ! Il prit soudain conscience du vide au dessus duquel il était perché. La corniche était maigrelette, il faudrait bientôt descendre, s’il ne voulait pas finir par perdre l’équilibre… A ses pieds, le mur qui encadrait le potager. Par cette chaleur, seuls quelques jardiniers parcouraient ce dernier ; Seulement, suite aux récentes rénovations, tout le lierre avait été arraché, et il ne devrait compter que sur quelques pierres mal juxtaposées pour prises. Deux mètres sous lui, la fenêtre du boudoir de sa mère, d’où s’échappaient des filets de voix. Cela compliquait la tâche. Il était hors de question d’être vu par la baronne. Tudieu, il n’avait jamais fait d’escalade, et se retrouvait confronté à un défi de taille ! Pas de plantes grimpantes, de rares prises, et un obstacle à contourner. Le tout à prendre de haut en bas, de surcroît !

Courage, Gaston. Dame, ce mur est trop haut ! Songe, Gaston, songe à cette terre idyllique, songe à ce château, qui t’attend, les bras ouverts. Pense à la mort qui t’attend en bas ! Figure toi ton sang, répandu à terre en une grande flaque difforme ! Pense à ta nouvelle famille, à ta nouvelle vie… pense à ton père, à ton père, à ton père !

L’enfant serra faiblement le pommeau de son glaive pour se donner du courage, puis se retourna, s’agenouilla sur la petite corniche, et passa une jambe en dessous. Immédiatement, une vague d’angoisse lui parvint, un flot glacial de vide. Sa jambe gesticula, jusqu’à ce que son pied bute contre le mur, ce qui eut pour effet de l’apaiser un peu. Il y avait donc une issue. Lentement, son pied cherche la jointure entre deux pierres, mais n’en trouva pas. Le mortier était trop épais, et ne laissait nul sillon entre les pierres qui composaient le mur. Une nouvelle vague d’incertitude le submergea. Sa gorge se nouait lentement, l’envie lui prenait d’appeler… il fallait appeler ! Appeler qui, Qui viendrait à son secours ? Il ne le savait, mais c’était son seul espoir. Hurler, hurler ! Sa gorge était trop nouée pur émettre l’appel strident espéré, et seul un mot tremblotant sortit dans un souffle de sa bouche.

« Papa… »

Courage. Le pied gauche… peut-être que celui-ci aura plus de chance, et trouvera une prise.

Mais hélas, à gauche aussi, le mur était lisse comme du crin de cheval. Il fallait remonter. Gaston tenta de se mettre en appui sur ses coudes, sur la corniche, tout ne levant la jambe gauche. C’était difficile, la douleur était insoutenable. Ses coudes frottaient la pierre de la corniche, la peau s’arrachait, et lui tirait des larmes de douleur. Une pulsion grave, un écho d’énergie parcourut son corps, empruntant le chemin de ses veines et de ses muscles. Sa bouche était sur le point de s’ouvrir, mais il luttait de toutes ses forces pour ne point crier. Et si, en contrebas, sa mère l’entendait ? La douleur se faisait de plus en plus forte, de plus en plus vive, comme une plaie que l’on ouvre petit à petit. Tant pis. Il ne pourrait tenir plus longtemps. S’il ne voulait pas crier, il fallait que la douleur cesse.

Vivement, il leva ses bras au ciel, et se laissa choir. Immédiatement, il se sentit emporté par le vent, poussé dans sa chute. Les éléments se distordaient, il voyait le haut du château s’éloigner à une allure impressionnante... il allait se mettre à crier ! Alors, il tendit les mains en avant, et eut la chance de pouvoir s’accrocher à la corniche de la fenêtre du boudoir, dans lequel sa mère et son nouveau mari conversaient. Une vive douleur lui élança les bras. tout d’un coup. Il croyait que les os de ses coudes allaient craquer. N’y tenant plus, il lâcha prise, et atterrit dans un bruit sourd sur un plant de salades.

Ses oreilles bourdonnaient. Il avait mal au dos. Ses membres l’élançaient. Autour de lui, le paysage était flou et déformé. Des arabesques de verdures succédaient à des tourbillons de grisaille. Petit à petit, ses tempes cessèrent de bourdonner, son ouïe devint claire. Quelques mots lui parvinrent aux oreilles.

« Je crois que ça venait de dehors. »

La voix de sa mère.

« Je vais aller voir à la fenêtre. »

Que faire ? Il avait l’esprit si embrumé… sa mère , le voir… non, il ne fallait… Ooooh… trouver une cachette…

Gaston s’était mis péniblement debout. Mais sa tête lui tournait… il avait le dos courbé, et titubait de-ci de-là. Finalement, sentant le danger proche, l’horreur de sa découverte, la révélation de son départ intempestif, il se mit dos à la fenêtre, et s’efforça d’avoir la démarche d’un badaud flânant à travers les salades et les tomates.

« Alors, mon aimée ? »

« Je ne vois rien… seulement quelques jardiniers, et des promeneurs. L’un d’entre eux a l’air bien jeune… »

« Adonc, il ne s’est rien passé. Reprenons notre conversation, voulez-vous ? »

La partie était gagnée. Gaston continua son chemin vers les rangées de potirons. De là, il devrait pouvoir se mettre à quatre pattes, puis obliquer vers la porte principale, sans être vue de cette mère qu’il haïssait.

« Quand m’avez-vous dit que cela s’est passé ? »

« Deux ans avant la naissance de Gaston. »

« Et où supposez-vous que.. »

« Eh bien, dans le château d’Andrésy ! Si toutefois cette Dame n’a pas migré vers un autre endroit. »

« J’entends bien. Cela dit, puisque nous ne connaissons pas son nom, je ne pense pas qu’il soit possible de… »

« C’est vrai, je sais… cependant… »

Gaston atteint les rangées de potirons, et se mis à détaler à travers le potager. La conversation se perdit à travers les jasements des jouvenceaux las de la foule envahissant les jardins, et des interpellations des jardiniers, qui se hélaient à travers vignes et plantation de choux et carottes.

L’enfant se perdit au milieu d’un océan de nature, d’un dédale de légumes. A droite, à gauche, tout droit, qu’en savait-il ? Encore avancer. Par là… non, par ici… Dame ! Et pourquoi pas par là ? Ici, des plants de carottes, par là, des endives, des potirons ici et du maïs là. Des radis, des betteraves et des concombres, des vignes de raisin, des plants d’aubergines et de vastes pommeraies. Tourner à gauche, puis à droite, et… Dame ! Il se retrouvait face à la fenêtre du boudoir ! Il était revenu sur ses pas ! Sa mère n’était pas à la fenêtre, et la pièce semblait silencieuse.

Gaston s’avança donc, puis longea le mur, jusqu’à enfin atteindre l’entrée du potager. Il franchit donc le porche, pour se retrouver dans le tronçon de couloir qui séparait la grande porte principale de celle du potager. Il entra donc dans cette partie du château, et, une fois de plus, manqua d’être happé par la foule. Des dames, des seigneurs, des riches et des simplement aisés; des artistes, peintres, sculpteurs, poètes, des guerriers et leurs écuyers, des courtisans cherchant leurs demoiselles. Les valets du château, des balayeurs, des cuisinières, des élagueurs, des femmes de chambre. Des enfants. De voyageurs. Une vingtaine d’hommes d’armes encadraient cette foule. Du temps de son père, il eut fallu rassembler la totalité de la garnison, pour atteindre pareil nombre. Que les choses avaient changé ! Gaston dût encore se frayer un chemin entre les braies et les robes, les pantalons et les tuniques, entre les chausses et les bottes ferrées, les scandales et les souliers. Il eut encore son lot de courses et d’esquives, de trébuchements et de reculs. Que d’efforts, et que de sueur pour se traîner jusqu’à la sortie ! Cette traversée avait été un véritable enfer, ce qui conforta l’enfant dans l’idée que jamais il ne pourrait vivre en pareil endroit. Quiétude et solitude étaient désormais ses seules doctrines.

Même dehors, les routes supportaient leur lot de badauds et passants divers. Mais la circulation était plus aisée, et Gaston n’eût qu’à s’écarter du chemin pour pouvoir passer sans être gêné. Il avançait d’un pas rapide. Il entendait le bruit de ses espadrilles foulant les herbes basses. Il craignait que sa mère le voie, depuis l’une des fenêtres des hautes tours, récemment érigées.

Après quelques minutes de marche rapide, il atteint enfin la forêt. Doux contact avec la nature ! L’atmosphère lourde et pisseuse qu’il venait de quitter le faisait suffoquer. Il dépassa les premiers taillis, puis, estimant être hors de vue de sa mère, ou qu’elle soit, il s’arrêta un peu, et respira l’air pur. Dame, quel bonheur ! S’oxygéner, enfin ! Il sentait l’air investir ses poumons, il pouvait suivre le chemin qu’il empruntait, à chaque inspiration, à chaque expiration, à chaque battement de son cœur…

Il regarda autour de lui. Que la forêt était belle, en ce jour d’été ! Il courut un peu sauta une épaisse racine, et s’arrêta au bord d’un ruisseau.

« Loin de la luxure, il est une chose qui s’appelle nature… »

Un sourire illuminant son visage, Gaston regardait autour de lui, rêveur.

« Les hommes devraient s’en souvenir. Rien n’est plus beau, rien n’est plus pur que la nature. Ah, Dame ! Ces couleurs chantent dans ma tête ! »

Le garçon rit un peu.

« La clapotis de l’eau berce la forêt, les feuilles des arbres sont plus colorées que toutes les peintures du monde ! Les fleurs et les plantes sont plus vigoureuses sans la main de l’homme, les fruits sont plus juteux s’ils ne font partie d’une plantation… »

Un petit oiseau voleta doucement, se posa sur une branche, et se mit à piailler. Gaston le regarda en riant.

« Et l’oiseau sans art n’en a qu’un chant plus doux…. »

Apaisé, Gaston s’assit sur une pierre moussue, ouvrit son petit sac de toile, et croqua sa pomme, en observant le paysage qui l’entourait. Les verts de l’herbe, de la mousse et des feuilles se fondaient en un délicieux camaïeu, rehaussé par quelques fleurs sauvages, bleues, blanches et rouges. Quelques oiseaux chantaient. Non loin de lui, le petit ruisseau coulait. L’eau était claire, et l’on pouvait apercevoir les cailloux, au fond. Gaston s’approcha, sa pomme en main, pour admirer le fond du cours d’eau. Des galets de différentes teintes de gris.

Un objet, vers la droite, attira son attention. Sous les remous de l’eau, il était difficile à voir nettement. C’était un fer rouillé. L’épée, de son père.

Gaston remit sa pomme à demi croquée dans son sac de toile, puis partit immédiatement en direction de château d’Andrésy. Il voulait quitter cet endroit au plus vite.

Le crépuscule tombait. Gaston avait des cloques sur les pieds. Ses espadrilles étaient trouées. Son pantalon déchiré laissait entrevoir ses mollets couverts de marques et autres cicatrices, provoquées par les ronces et autres buissons épineux. Il suait de partout. Il gravit avec peine un gros rocher, en s’aidant de ses mains moites. Ses ongles étaient en sang. Cela faisait plusieurs heures qu’il marchait.

Encore un effort… ses genoux s’écorchèrent un peu plus sur une arrête rocheuse. Des larmes ne cessaient de couleur sur ses joues humides.

Du haut de son promontoire, il distinguait le château d’Andrésy. Peste ! Il était encore à deux heures de marche, à tout le moins…

Gaston était épuisé, exténué. Il n’en pouvait plus, et tombait de fatigue. Il s’affala sur le rocher. Son sac tomba sur le rocher, et laissa choir la pomme, qui dégringola jusque dans la boue, en contrebas.

Grégoire ouvrit les yeux. Dame, quel vacarme ! Il se leva, puis revêtit sa tunique de toile jaune, qu’il boucla avec une ceinture en cuir. Il saisit sa dague, et la coinça derrière sa ceinture. Crebleu, que le coq se taise ! Son chant devenait insupportable ! Il descendit dans la cour, puis regarda le ciel. L’aube se levait à peine. Et cette foutue bestiole hurlait encore. Grégoire s’approcha de son perchoir, l’air mauvais. Dès qu’il le vit, le coq se tut.

Une fois avoir calmé l’animal, Grégoire revint dans la cour de terre battue, parsemée d’excréments d’hommes, et d’animaux divers. Il grimpa l’escalier qui menait aux remparts. Devant lui s’étendait la forêt d’Andrésy, et, au loin, l’énorme château d’Annecy. Grégoire était un vieil homme, empli de bonté. Ses cheveux grisonnants disposés en auréole au dessus de sa tête trahissaient son âge. Son visage, lui, était encore jeune. Pas une ride n’apparaissait sur son front. Mais ses yeux étaient éteints. Il avait vu suffisamment de la vie pour ne plus rien en attendre. Rien de bon, du moins.

Il longea le mur d’enceinte, puis s’arrêta devant un homme recroquevillé contre le mur, sa cape miteuse rabattue sur lui, ne dévoilant que ses yeux clos, sous son casque grossier. Grégoire lui décrocha un puissant coup de pied.

« Debout, coquin ! »

La sentinelle se réveilla en sursaut.

« Je prends la relève. »

A ces mots, le garde se leva d’un bond, réajusta son casque, et rabattit sa cape rapiécée derrière son dos.

« Ah, enfin : Je ne vous attendez plus ! La veille de cette nuit a été épuisante… je vais enfin pouvoir dormir ! »

« C’est cela », répondit froidement Grégoire. « Que je te retrouve encore une fois au matin à ronfler devant le mur, et c’est à coups de trique je te tirerai de ta torpeur, crois-moi. »

Entendant cela, l’homme se dirigea promptement, vers les escaliers, la tête basse. Tout bonhomme qu’il fût, Grégoire détestait voir les sentinelles assoupies, surtout par les temps qui couraient. Les impôts mandés par Annecy avaient tant augmenté ces dernières années que la garnison du château se limitait à une dizaine de gardes, et les chevaliers désertaient de plus en plus les lieux, pour se rendre à Annecy.

Grégoire s’accouda à un merlon, et regarda du côté de la cour. La ville se réveillait lentement. Des enfants sortaient des chaumières, d’autre de la forteresse. Quelques serfs commençaient à investir la cour. Certains allaient chercher de l’eau, d’autres s’affairaient aux récoltes. Quatre enfants sortirent de la forteresse en courant. Deux garçons bruns et un blond, ainsi qu’une fille blonde. Grégoire les connaissait bien.

Il se retourna pour se concentrer à nouveau sur le paysage. Mais ? Que pouvait bien être cela ? Quelque chose qui se traînait sur le chemin boueux… Grégoire se pencha un peu, pour mieux distinguer ceci… Dame, un enfant ! Il semblait épuisé !

Le vieil homme dévala les escaliers, descendit dans la cour, et courut jusqu’aux portes. Il souleva le lourd battant de métal rouillé, qui fermait la porte depuis qu’ils avaient dû vendre le système de poulies. Il ouvrit ensuite l’un des grands panneaux de bois, pour découvrir le sentier détrempé, et un jeune garçon brun sale, souillé, écorché de partout, avec les doigts et les pieds en sang, les espadrilles et les vêtements déchirés, couvert de sueur.

Gaston ferma les yeux… il était bien, assis sur une chaise, dans la grand salle du château d’Andrésy. Il rouvrit les paupières. Le vieil homme qui l'avait recueilli l’appelait. L’enfant jeta un dernier coup d’œil à ses vêtements neufs : un pantalon de toile grise, et une chemise à croisillons brune, ainsi que de nouvelles chausses.

Enfin, il se leva du fauteuil, et suivit son sauveur dans la cour. Il disait s’appeler Grégoire. Une fois dans la cour, il lui présenta quatre nouveaux compagnons de jeux. Henri, un grand garçon brun, aux traits fins. Charles, un garçon, brun li aussi, mais plus petit qu’Henri. Vincent, un garçon un peu rond, mais aussi grand qu’Henri, blond, à la mine sympathique. Et Mathilde, une belle fille blonde, au visage charmant. Henri et Charles repartirent jouer avec Mathilde, pendant que Vincent s’approchait de Gaston. Grégoire, lui, repartir sur les murs.

« Alors, comme ça, tu t’appelles Gaston ? »

« Oui… toi, c’est Vincent, c’est ça ? »

« En effet. Je vais te présenter les gens du château… je connais beaucoup de monde, ici. Situ veux, je te ferais visiter ! Le baron voudra bien nous laisser faire… il est très pieux et un peu bourru, mais Dame Catherine, sa femme, est en revanche… Oh, Gaston, tu m’écoutes ? »

Gaston ne l’écoutait pas. Il regardait Mathilde.

Modifié par Guillaume de Rochebrune
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tout ne levant la jambe gauche
al douleur était insoutenable
Adonc, il ne s’est
Grégoire, lui, repartir sur les murs
Situ veux
Le vieil homme qui ‘lavait recueilli l’appelait
Que j te retrouve

Vala pour la forme...

Sinon, pour le fond, ben, en fait... C'est pas mal... (ça c'est du commentaire ^^). Un petit truc, je trouve qu'il aun langage trop...pas assez "noble". Les expressions qu'il sort à intervalles réguliers font un peu trop paysannes pour un fils de noble, qui plus est ne fréquentant personne parlant ainsi.

Bon, sinon, ce n'est pas mal (quoi je l'ai déjà dit?). Enfin, désolé, mon commentaire est très hautement inconstructif, mais je suis un peu crevé, pas trop capable de construire (si seulement j'en suis capable habituellement).

Roujio, veuillez m'excuser...

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Je vais corriger les erreurs, et je te remercie de ton commentaire, mais je me permettrait de te faire remarquer qu"adonc" est une traduction d'époque. il n'y a donc pas là d'étourderie...

sinon, merci de ton commentaire très constructif! :huh:

-Pour la Dame!-

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il fallut éviter es espadrille
al douleur était insoutenable
qui ‘lavait recueilli l’appelait.
Situ veux

Voila tout ce que j'ai vu sur la forme qui a ce jour, n'a pas été corrigé ! J'ai pas fais attention si ca avait déjà été repéré ou pas :huh: Meme si c'est long, va falloir penser à une relecture ! Parce que c'est facile à trouver ce genre de fautes.

Sinon pour le fond, tu avances vite sur ce passage. Il quitte la demeure ( avec un peu de mal :wub: ) , part sur les routes, repense à son père et est acceuilli ( peu être trop facilement ? ) au chateau :D

Ben sinon j'ai bien aimé et j'attends que l'autre partie de l'histoire se lance ! Parce que là, on voit pas ce qu'il peut faire :D ! Alors envoies la suite !!

@+

-= Inxi =-

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Invité Elgalen

Alors j'ai tout lu depuis le début, ça commence à faire long... J'ai trouvé le début génial, beaucoup de rebondissements, de jolies descriptions et un style agréable à lire. C'est un peu dommage que ton récit ait un peu commencé à s'essouffler à partir de ton avant-dernier post et encore dans la première moitié du dernier, j'avais un peu l'impression de lire une très longue description, trop longue par rapport au contenu.

Mais j'ai l'impression que là ton histoire va repartir à nouveau avec l'arrivée de Gaston au chateau d'Andrésy. Son accueil mériterait peut-être d'être plus détaillé, vu que juste avant tu détailles son départ du château d'Annecy, tu décris même deux fois de façon très semblable tous ses tracas à se faufiler parmi les gens.

Pas mal de fautes de frappe:

Gaston tenta de se mettre en appui sur ses coudes, sur la corniche, tout ne levant la jambe gauche.
en levant
C’était difficile, al douleur était insoutenable.
la douleur
il voyait le haut du château d’éloigner à une allure impressionnante...
s'éloigner
ses temps cessèrent de bourdonner, son ouïe devint clair
tempes [...] claire
Gaston avait des cloques sur les pieds les pieds
repetition
Que j te retrouve encore une fois au matin à ronfler devant le mur
je
Quelques serfs commençaient à investir la cour ?
un point a la fin
Le vieil homme qui ‘lavait recueilli l’appelait.
l'avait

Et quelques fautes de grammaire:

Gaston atteint les rangées de potirons, et se mis à détaler à travers le potager
se mit
estimant être hors de vue de sa mère, ou qu’elle soit
Je ne vous attendez plus !
attendais
Grégoire, lui, repartir sur les murs.
repartit

Elgalen, qui attend impatiemment une suite pleine d'événements

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  • 1 mois après...

VIII

JEU

Gaston regardait par la fenêtre. Il voyait la forêt, ce mélange de tons verts et rouges… au loin, les hautes tours d’Annecy. Le ciel était bleu, mais parsemé de longs nuages cotonneux, voilant la faible lumière du soleil déclinant. Il en ressortait une impression de brutalité, dans ce paysage pourtant harmonieux, un étrange sentiment que tout était figé, immuable. Nul son, nul chant d’oiseau. Tout était immobile et silencieux.

« Gaston. »

« Mh ? »

« Tu ne m’as toujours pas dit pourquoi. »

Il se retourna lentement, pour faire dos à la fenêtre. Il voyait sa chambre, à présent. Malgré la lumière émanant de l’extérieur, la pièce était sombre, et froide. Les contours d’un petit lit se dessinaient au fond, tandis qu’à sa droite, un petit buffet en bois poli constituait l’unique mobilier. Les murs étaient en pierres grises juxtaposées. Seul un bloc d’une teinte plus ou moins orangée se tenait, encastré dans le mur à sa droite.

Cette pièce était restée inoccupée des années durant. Des toiles d’araignées envahissaient les moindres recoins.

En face de Gaston se tenait son présent ami, Vincent. Ou pour mieux dire, camarade, car ils n’avaient pas encore vraiment lié connaissance. Vincent était grand et maigre, son visage était presque cadavérique, avec des pommettes saillantes, un nez allongé, et quelques cheveux blonds rebelles, qui, ne se contentant pas de sa coupe au bol graisseuse, pendaient mollement devant son nez.

« Pourquoi, pourquoi... c’est pourtant simple... mon père et mort, et ma mère s’est remariée avec un valet... et elle gère mal l’économie : tout aux riches, rien aux autres… alors, j’ai préféré partir… »

« Son système est une idée comme une autre… ne blâme pas les gens pour leurs opinions économiques, Gaston.. »

« Des sermons, des sermons, toujours des sermons ! Ne sais-tu donc faire que cela ? Peut-être que ton désir est de devenir abbé ? Car là, des sermons, tu pourras en faire, hein ! Tu seras là pour ça ! »

Gaston se retourna, et reporta son attention vers le paysage, en tous les cas bien plus intéressants que le seul mode de conversation que pouvait lui tenir son soi-disant ami. Des leçons de morale… un vrai professeur ! Il détestait les professeurs…

« Je… excuse-moi… »

« Non. »

« Non ? Que… »

« Non. »

Vincent détourna les yeux, ne sachant que répondre.

« Alors… alors ta mère, tu ne l’aimes pas… »

« Si… si, je l’aime...enfin, je l’aime bien… mais elle n’a pas choisi la bonne voie… tout cela, c’est à cause de Michel. »

« Michel ? »

« Le valet de chambre. »

Un cri retentit, au dehors. Un cri d’enfant. Un cri gai, mêlé de rires. Gaston se retourna, et bondit sur la porte, l’ouvrit prestement, et, une fois dans le couloir, se précipita à la fenêtre qui donnait sur la cour, pour la scruter. Son cœur battait la chamade. Il avait peur.

« Qu… qu’est-ce que c’était ? »

« Ils jouent. »

« Ils jouent… »

Ils jouaient… ils jouaient… ils jouaient !

C’étaient des enfants ! Quand on est enfant, on joue ! On joue ! On joue ! Lui avait oublié ce qu’était le jeu… mais il voulait bien recommencer, même s’il fallait tout rapprendre de zéro !

« Allez, viens, on va avec eux ! »

« Non… jouer n’est pas une activité très saine, et… »

« Oh, tais-toi », lança Gaston, tout en dévalant l’immense escalier de pierres, au fond du couloir.

Une marche deux marches trois marches. Il courait, courait. Jouer ! Il allait jouer ! Il avait même oublié ce que ça faisait… c’était bien, ça, il le savait. C’était l’essentiel. Etait-ce fatiguant ? Reposant ? Il ne s’en souvenait plus…

Dix-huit marches, dix-neuf…

Chacun de ses pas le rapprochait un peu plus de ce moment béni où il retrouverait les joies de l’enfance. Alors, il fallait faire vite ! Et en même temps, savourer chaque pas en avant…

Vingt-cinq, vingt-six….

Il entra dans la bien nommée grande salle du château. Il ne l’aimait pas. Elle avait quelque chose de mélancolique, elle semblait regarder son passé de richesses. Elle était gigantesque, mais vide. De ses huit lustres pendant du plafond, deux seulement étaient pourvus de bougies. Une cheminée esseulée ne laissait échapper aucune fumée, et de larges tables sans nappes n’étaient occupées que par quelques couverts en porcelaine. Une tête de cerf empaillée était accrochée au mur. C’était le seul restant, le seul parmi les animaux sauvages, ours et sangliers, seul trophée bien peu glorieux, perdu dans l’ancien prestige de la collection du seigneur. Pourquoi celui-là ? Pourquoi ce cerf ? Il n’en savait rien… il voulait quitter l’ambiance austère et mélancolique de la pièce, qui semblait tournée vers le passé... il voulait jouer !

Il s’élança en courant ! La salle était vide, il avait la place. Il courut tout droit vers la grande porte du fond. Courut, courut… il comptait les chaises de la grande table qui défilaient, à sa gauche. Pour savourer…

Onze, douze, treize…

La cour, enfin ! Un grand terrain de boue sur lequel caquetaient quelques poules rousses, entouré par des maisons sales, aux toits de chaumes ou d’ardoises bleues troués. Mais pas d’enfants… personne… pourquoi …

« Ouch ! »

Il fut projeté à terre, et roula sur un bon mètre dans la boue. Il ouvrit les yeux, hagard, et vit au dessus lui une petite tête ronde, au dessus de laquelle pendaient quelques mèches brunes.

« Charles ? Que t’arrives-t-il ? »

« On joue ! », lui dit celui-ci, en se relevant pour reprendre sa course folle. Il serrait entre ses mains une balle de cuir brun.

« Attends… vous jouez ? Vraiment ? »

« Que veux-tu que je fasse, imbécile ? » lui lança Charles, tout en jetant derrière lui un œil inquiet. « Que je joue du luth ? »

« Non, non, ce n’est pas ce que je veux dire, mais… attends, Charles, attends ! »

Mais le garçon s’était mis à détaler à travers la cour, à la vue d’Henri, qui tournait au coin du château.

« Attends, je veux jouer, aussi ! »

Charles ralentit, s’arrêta soudain, et retourna sa tête, un soupçon de malice dans les yeux.

« Tu veux jouer ? Jouer…. Vraiment ? »

« Bien sûr, que je veux jouer ! »

Henri fonçait à vive allure, tête la première, vers Charles. Il se moquait de déraper, se contrefichait de la boue qui souillait sa tunique. Mais ses yeux cernés de noir ne laissaient paraître que la détermination d’atteindre sa cible. Cible qui se mit à gesticuler, et à gémir comme un goret.

« Attends, Henri, attends ! »

Mais Henri n’attendît point, et continua sa course, plus vite et plus vite encore !

« Henri ! Henri ! Le gamin veut jouer ! »

Les yeux du garçon s’écarquillèrent. Il tenta de se redresser, mais son pied glissa, et il fit une magistrale pirouette avant de s’affaler dans la boue, dans une immense gerbe du liquide visqueux et brunâtre.

Il redressa soudain la tête, les yeux hagards, la bouche grande ouverte, bavant des relents de boue. Il ressemblait à un chien sortant d’une immersion joyeuse. D’un bond, il se remit debout, les vêtements dégoulinants. Mais il semblait ne point s’en soucier.

« Il veut jouer ? Vraiment ? »

« Comme je te le dis ! »

« Alors debout ! » dit-il à Gaston, qui réalisa soudain qu’il était resté assis dans une flaque visqueuse, sur le pas de la porte. Il se releva, et se débarbouilla grossièrement, penaud.

« Tu veux commencer à avoir le ballon ? » lui demanda Charles.

« Bien entendu ! »

« Alors tiens. »

Gaston attrapa entre ses mains la boule de cuir dégoulinante que lui lança Charles, un énorme sourire aux lèvres. Enfin, il allait jouer !

« Que fait on, de présent ? »

« Le but du jeu », expliqua froidement Henri, « est de frapper celui qui a le ballon. »

« Chouette ! » s’écria Gaston, qui n’avait pas encore réalisé ce que venait de dire le jeune homme.

Mais un coup de poing dans le nez l’aida à comprendre. Un autre coup dans le ventre le fit se plier sur lui-même, et il tomba à la renverse après avoir reçu un genou dans le menton. Il s’écroula dans la boue, du sang coulait de ses narines. Et les autres se jetèrent sur lui, et le frappèrent, le frappèrent. Lui, impuissant, se tordait de douleur sous les attaques incessantes. Dans ne nez, le ventre, les côtes. Il était roué de coups, frappé, cogné. Il avait mal, du sang se mêlait à la boue, pendant que les autres ne cessaient de malmener la pauvre créature sanguinolente qui se présentait à eux, en riant, en hurlant. C’étaient des fous, des démons qui se repaissaient de la douleur humaine ! Des monstres, des abominations sans nom ! Il avait mal, il avait mal…

Soudain, le carnage cessa. Gaston se tenait par terre, recroquevillé sur lui-même. Il s’était masqué les yeux, aussi ne voyait-il pas ce qui se passait. Mais ses agresseurs avaient cessé de le battre. Il avait trop peur pour écarter ses mains. Il restait là, grelottant et pleurnichant, avec des vêtements en lambeaux qui laissaient apercevoir ses nombreuses blessures, ses ecchymoses innombrables. Il n’avait plus envie de jouer.

« Ainsi, votre décision est prise ? »

« On ne peut plus certaine, monseigneur. »

« Alors, allez au diable ! »

Gaston retira un peu ses mains, et entrouvrit les yeux juste à temps pour voir une énorme botte ferrée lui tomber dessus. Il roula sur le côté, le pied au-dessus de lui ne fit que l’éclabousser un peu plus, en retombant à l’endroit où se tenait son crâne quelques secondes avant.

« Tiens ! Tu étais là, toi ? »

L’enfant redressa la tête, et vit le visage sombre et buriné d’un chevalier en cottes de mailles, avec une tunique d’un bleu marin, penché vers lui. Une épée de fer pendait lourdement à sa ceinture de cuir.

« Avec toute cette boue, je ne t’avais pas vu… quelle idée, de se fourrer ici !»

Il se retourna pour s’adresser à une personne encore dans le château :

« Te décides tu enfin? »

« Me voici.»

Un autre chevalier apparut sur le pas de la porte. En plus d’une cote de mailles, il avait des jambières et des épaulettes en métal. Sa tunique était en damier noir et blanc. Il avait un grand visage fin et austère, surmonté d’une épaisse chevelure noire. Tous deux partirent alors en direction des écuries, dans un fracas d’armes et de métal.

Gaston releva la tête, cracha un peu de boue, de sang, et une dent. Sa tête lui tournait, il avait mal partout.

« Je suis de l’avis du comte, qu’ils aillent au diable ! C’est une catastrophe. »

« Quoi donc ? » souffla Gaston, qui avait reconnu la voix de Vincent.

« Le départ de messires De Richebois et De Couriz, voyons ! Tous les chevaliers quittent le château, c’est une hécatombe. »

« En effet, c’est terrible. », dit faussement Gaston, en tentant de se remettre sur pieds.

« Tu te rends compte que nous n’auront bientôt plus de chevaliers !? Il faudra seulement compter sur les roturiers, en cas d’attaque ! »

« J’en tremble par avance. »

« Où vas-tu ? »

« Je ne sais pas… prendre un bain… »

Au fond, se disait Gaston, en rentrant à nouveau dans la sombre grande salle, c’était Vincent, qui avait raison. Il ne voulait pas jouer, il ne voulait plus jouer. Les jeux, c’était nul…

Il lui aurait plutôt fallu... mais…

« Mathilde ? Que fais-tu ? »

« Je sors dehors, je vais jouer. »

« Non, ne va pas jouer, c’est… »

« Je ne parle pas de vos stupides jeux de garçons, mais d’un jeu calme et intelligent. Tu m’accompagnes ? »

« Euh… oui… oui, bien sûr ! »

Ainsi Gaston rebroussa chemin pour suivre une magnifique jeune fille, au visage clair et avenant que soulignaient ses grands yeux verts, et une longue chevelure d’or.

Ainsi se retrouva-t-il, assis par terre, trempé de boue, entouré de Mathilde, Vincent, Charles et Henri, qui ne semblaient guère se soucier de l’était de leurs vêtements. Tous s’étaient installés en cercle, selon la proposition de Mathilde. Le but du jeu était simple : une personne allait au centre du cercle et posait une question. Tous étaient obligés d’y répondre.

Henri avait demandé qui était d’accord pour que Gaston soit intégré au sein du groupe, seul Charles refusa de lever sa main, Vincent se demandait qui voudrait suivre plus de cours, au détriment des heures de jeu, avec peu de succès, Henri reprit la parole pour savoir qui aimait le château d’Annecy…

Mathilde, elle, se leva calmement, se plaça au centre du cercle, et pose sa question d’une voix douce et mélodieuse.

« Qui est amoureux de moi ? »

Il fallait le dire… oui, il fallait lui dire. Mais il ne pouvait pas, il ne pouvait pas ! Sa bouche s’articulait sans sortir aucun son ! Il pâlissait et rougissait à la fois ! Un démon s’était emparé de lui, il se sentait mal, si mal… il sentait son corps transir et brûler dans le même temps… sa tête lui tournait… Dame, que se passait-il ? Il… Elle… oooh, sa tête…

Décidément, Vincent avait bien raison… les jeux, c’était nul.

Il regardait. Il se regardait. Il se regardait mais ne se voyait pas. L’eau du bain était opaque, tant elle s’était mêlée au sang et à la boue. Il avait mal partout. Couvert de croûtes, d’ecchymoses et de cicatrices, il ne devait pas ressembler à grand-chose… Dame, quelle journée ! Il n’a fait que voler de déceptions en déceptions…si seulement sa mère ne s'était pas remariée... si seulement...

Des coups contre la porte.

« Non, je veux être seul ! »

La porte de bois vermoulu s’ouvrit, dans un grincement.

« Mathilde ! Mais… »

« Tu veux vraiment être seul ? »

« Non… si… en fait non… mais si... c'est-à-dire que… »

« C’est vrai, que tu m’aimes ? »

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  • 3 semaines après...

Ben c'est pas mal !!!

J'ai bien aimé ! Tu changes legerement de style par rapport à avant !! Enfin, je dis ca mais c'est surtout parce que l'histoire evolue aussi !

Les perso commencent a se melanger ! Les scenes aussi, ce qui donne forcement un nouveau melange !!! Mais tu geres très bien et je suis toujours plongé dans ton texte ! C'est très bien !

J'ai pa vu de fautes dans ce chapitre ! Je suis peut etre aveugle mais bon ... tu n'es pas quelqu'un qui en fait des masses ! Alors y a pa de souci !

Par contre, je rapelerai rapidement qui fait quoi dans un petit passage, histoire qu'on soit pas perdu !! :lol:

Voila, c'est tout, suite !!

@+

-= Inxi =-

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Merci pour cette réponse que je n'attendais plus. Et désolé à ceux à qui j'ai oublié de répondre, j'ai pris compte de vos critiques, et modifié les fautes sur le texte original.

Alors, tu pourrais m'explqiuer cette phase, s'il-te-plaît?

Par contre, je rapelerai rapidement qui fait quoi dans un petit passage, histoire qu'on soit pas perdu !!

Ah! et, au passage

J'ai pa vu de fautes dans ce chapitre !

Voui, parceque j'ai fais un gros effort. Je me suis relu! :P

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et bien je viens de lire toute l'histoire en entier,c'est tres long mais j'ai bien aimé! l'histoire me plait et j'ai vraiment accrocher!

je pense que si pas grand monde te laisse de com c'est a cause de la longueur, je peux leur dire que la lecture en vaut la chandelle, c'est tres interaissant!

alors vivement la suite!!!!(si tu comptes en faire une!)

fibz

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  • 2 semaines après...

Et bien, j'ai lu tout ton texte, et force est d'avouer que je ne m'attendais pas du tout à ça.

Bravo pour ton récit qui est totalement axé sur la psychologie des personnages, au fond l'action semble, pour l'instant, assez anecdotique (même si l'on pressent que quelque chose de mauvais se trame, déjà car les personnages principaux sont de plus en plus tristes, et ensuite car les garnisons extérieures sont vides), mais pour la psychologie, bravo, jamais je n'ai eu une impression de déjà-vu, et tous les sentiments m'ont apparu réel (cruellement réel d'ailleurs).

Je crains ne pas réussir à faire une vraie critique, car je ne vois pas en quoi améliorer ton texte, comme il n'y a pas d'action, il n'y a pas réellement d'incohérences.

Bon, je vais quand même essayer d'analyser le schéma des actions (par contre, comme ça fait trois jours que j'ai lu le texte, j'aurais peut-être un peu de mal :lol: ).

Attention pour ceux qui lisent les critiques avant de lire le texte, l'histoire sera résumée dans les lignes suivantes, donc je vous déconseille fortement de lire ceci.

Première action: la trouvaille du bébé.

==> aucun problème, même si j'espère qu'il sera expliqué pourquoi, ou qu'au moins l'on croise les méchants et pas beaux :wub: parents

Deuxième action: l'abandon du bébé pour éviter la honte

==> on ne s'attendait pas à une telle réaction, et pourtant celle-ci semble assez rationnelle, même si le Duc est au début dépeint d'une manière positive. On comprend qu'il a agi par folie, et lui-même se rendra compte après que cela ne lui correspondait pas. Donc cela passe très bien, ça m'a même surpris que cela passe aussi bien.

Troisième action: regret du père

==> la mère devient distante, quelque chose de mauvais se trame. Très bien annoncé.

Quatrième action: apprentissage du fils

==> Déjà on sent qu'il déteste l'école. Et l'amitié est bien décrite.

Cinquième action: balade guillerette dans la forêt et rencontre brutale avec une branche

==> On est étonné que le bébé ait pu survivre. Cela lance le récit en voilant le garçon d'une aura de mystère.

Problème: comment des gens auraient pu savoir que ce bébé était l'ex-futur héritier du trône? J'espère des explications.

Sixième action: le prof part

==> la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Mais ce n'est qu'une impression, et l'on ne s'attend pas vraiment à la suite. Merveilleuse introspection du Duc, un de mes passages préférés.

Septième action: suicide du père

==> suite logique

Problème: bizarre qu'il n'ait été emporté par le courant, car un corps mort remonte généralement à la surface en gonflant.

Huitième action: long enfermement

==> on découvre mieux Gaston. Cela aidera pour la suite à l'apprécier

Neuvième action: rencontre avec son ancien ami Martin

==> permettra d'amener la suite

Problèmes: Martin semble beaucoup trop l'apprécier, je ne pense pas qu'il pourrait être aussi amical, mais c'est mineur.

Légèrement plus grave: au tout début il fait lever la herse pour sortir, et les gardes hésitent, puis en rerentrant il dit que la herse est toujours ouverte.

Problème plus grave: malgré toute son introspection, jamais Gaston explique pourquoi il ne pense pas à son ami. cela m'a apparu être un peu trop de la fiction (seul endroit de tout le texte). Je veux dire, qu'il devrait penser au moins une fois que ce Martin ne peut le comprendre après tout ce qu'il a vécu.

Dixième action: mère parfaitement chaste avec le majordome duc

==> on s'y attendait, donc bien

Problème: la mère n'est aps très docte avec son fils. Elle l'annonce un peu brutalement. le duc ne parle pas assez, il devrait tenter de l'apaiser (à moins que par la suite on découvre que ce soit un homme méprisable...)

Onzième action: fuite

==> enfin il passe à l'action :wink:

Problèmes: quand on prépare des festions chaque jour, on a toujours des restes, pas qu'une pomme ^_^ (au moins un morceau de viande entamé et autre, surtout qu'au final cela ne sert à rien, sa faim ne l'empêchera en rien dans sa fuite, donc il peut dire qu'il n'y a plus la même profusion, là c'est trop exagéré et assez irréel à mon goût)

Ensuite Martin est un peu naïf, enfin, comme il l'est avant ça ne jure que peu (même enfin absolument pas)

Douzième action: arrivée au chateau d'Andrésy

==> un peu d'action est appréciable

Problème: le fer. Je pense qu'un bretonnien est brûlé ou enterré avec son arme, donc ce fer n'a rien à faire ici. Par contre un bout de tissu arraché resté accroché à une pierre, oui. Mais pas l'épée qui a été ramassée en même temps que le corps (si tu as vu SdA, un peu comme Boromir, on prenait l'épée, qui véhiculait tout un symbole de force, de suprématie (surtout pour un Duc). Donc cette épée doit brûler avec son maître, mais un bout de cape peut rester sans problème.

Au passage une épée même dans l'eau ne rouille pas aussi facilement, du moins pas une épée de Duc. Elle peut un peu s'oxyder, mais de là à perdre quasiment toute sa taille, non.

Treizième action: c'est nul le jeu

==> changement de pensée auquel l'on s'attendait presque: il garde un ancien souvenir, mais le monde a changé, et cela le symbolise bien.

problème: pourquoi les gamins ne lui piquent pas cette balle, et je pense qu'il aurait au moins pû la lacher.

Deuxième problème légèrement plus gênant: ils sont bien calmes juste après avec le jeu de la fille, même beaucoup trop :wub:

Quatorzième action: ahh l'amour

==> parfait :P

Fin du spoiler

En un mot ton texte est bien bâti, les sentiments bien décrits, bref que du bonheur :D

Iliaron

PS: si jamais j'ai le temps j'ai recopié tout en lisant le texte toutes les fautes d'étourderies, coquilles et autres répétitions... Donc qui sait par mail. Mais je ne promets rien, comme mon emploi du temps risque d'être chargé (c'est un monde quand même, même en vacances ne aps avoir le temps de se reposer, et le seul moment où l'on a beaucoup de temps, ne pas avoir accès à l'ordinateur (c'est peut-être aussi pour ça que l'on a du temps ^_^ ))

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Invité Elgalen

Enfin aussi une réponse de ma part après cette brève absence. Mais je n'avais pas oublié ton récit, qui d'ailleurs se poursuit très bien, tu arrives toujours à me surprendre, à trouver énormément d'éléments à exploiter pour faire avancer ton récit.

J'aime beaucoup tes descriptions de petits événements quotidiens qui en réalité ont une grande symbolique. Comme là le jeu, sa brutalité, sa différence avec les souvenirs de Gaston, tout ceci montre à quel point le monde a changé pour Gaston et non seulement pour lui.

Sinon pour la forme, Inxi, je te rassure, tu n'est pas aveugle :D, je n'ai vu qu'une faute:

Dans ne nez, le ventre, les côtes.

le nez

Donc Bravo ^_^ Guillaume! Et merci, cette lecture a été un vrai plaisir pour moi :P

Elgalen, qui n'a rien d'autre à ajouter, tellement c'est parfait :wink:

Modifié par Elgalen
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un rapide passage, dans un club internet en Irlqnde. Merci beaucoup pour vos reponses, j' y repondrqi plus tqrd a mon tour... mais je n' ai pas le temps, le prix a la minute est eleve...

guygui

"pas facile, le qwerty... :wink: "

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  • 1 mois après...

Merci beaucoup, Iliaron, pour ta critique. Concernant tes questions :

-Le garçon a survécu pour une très bonne raison, que vous découvrirez plus tard.

-En fait, le baron est maillé, voilà pourquoi il ne remonte pas: le poids de son haubert l'en empêche. Ais-je oublié de le préciser?

-Je changerait le coupe de la herse.

Quant à Romain, j'expliquerai pourquoi Gaston se détache du monde.

-Pour la pomme... bon, ej changerai pour un morceau de viande si tu veux. Ensuite, Gaston n'est jamais allé jusqu'à Andrésy, il peut penser avoir besoin de manger beaucoup.

-Je changerai l'épée pour... pour autre chose! :rolleyes:

-Pour le calme, je ferai intervenir le comte.

Voilà, merci encore, à toi et à fibz!

IX

Incident

Les mandibules claquaient. Coups de fourchettes, grincements de dents qui mastiquaient. Les grands murs de l’immense grande salle du château faisaient écho aux tintements des couverts de l’immense banquet. Cependant, nul son autre que ceux-ci ne se faisaient entendre. Pas de rires, pas de chants. Nul troubadour, aucun ménestrel pour égayer ce lugubre repas. La sinistre grande salle résonnait des discrets coups de fourchettes, sous les grands yeux, tristes et luisants, du cerf dont le corps fut jadis servi dans ces assiettes.

Tous les invités mangeaient timidement, découpaient leurs carrés de viande les plus petits possibles, mâchaient longuement, buvaient beaucoup.

Les pommettes saillantes, le visage carré, le nez fin et pointu, les rides marquées et les yeux vifs, le comte d’Andrésy sirotait sa coupe de vin, pensif. Ses cheveux étaient coupés courts, et près du crâne. Une balafre sur sa joue droite marquait encore plus l’aspect sombre et rude du personnage. Tout le monde le regardait en coin, surveillant ses humeurs.

Finalement, il reposa sa coupe de vin devant son assiette, et s’appliqua à découper un carré de viande.

À peine l’eût-il fourré dans sa bouche qu’il le recracha violemment dans son assiette. À cet instant, un fracas de couvert se fit entendre, chacun reposant son couteau, heureux de pouvoir échapper au goût de la viande sèche. Le sel était trop cher, les aliments ne se conservaient plus.

Les pierres des murs tremblèrent lorsque le comte hurla son mécontentement à pleins poumons. Sacrebleu, la nourriture même venait à manquer ! Que faire, Dame, que faire ?

Gaston s’arrêta dans son mouvement. Le dos courbé, les jambes écartées, et les bras tendus. Il empestait la sueur. Il était en train de faire ses exercices, quand le cri le plus puissant qu’il ait jamais entendu retentit, faisant trembler le sol de sa chambre à coucher, qui était aussi le plafond de la grande salle. Le cri s’arrêta soudain. Derrière lui, il entendit le bougeoir osciller sur la table de chevet. Dame, quel hurlement ! Le Seigneur était encore d’humeur. Tudieu, quelle maisonnée !

Ceci dit, le seigneur avait ses raisons. Lorsque sa mère démarra son règne, Andrésy mit des vivres à reposer dans ses caves, une poire pour la soif qu’il voulait sortir quand les temps seraient gris. De présent, le temps des finances était nuageux, le moment était venu de sortir les réserves.

Il n’y avait plus de sel depuis un mois

Il n’y avait plus de réserves depuis trois semaines.

Il était vrai que la situation était difficilement supportable. Le quartier de viande que Gaston avait avalé une heure auparavant était sec et racorni, sans goût, et dur comme de la pierre.

Ahi ! Il tiendrait bien… il se sentait robuste… il se savait robuste.

Si seulement sa mère…. Non, il ne pouvait pas lui en vouloir… toutefois… Michel… Quel bêtise que de l’aimer… de l’épouser… de…

…tuer son père…

Il décida soudain qu’il avait fait assez d’exercices pour ce jour, et descendit en larmes par l’escalier de service, préférant éviter de se montrer torse nu devant tous les invités à la table du comte.

Après avoir descendu en courant un long escalier en colimaçon qui s’enfonçait dans les ténèbres, il poussa une petite porte de bois vermoulure, cerclée de fer, pour se retrouver dans l’annexe du château destinée aux serviteurs. Une petite cour de terre battue détrempée était cerclée par trois bâtisses tassées contre elles-mêmes, qui reposaient contre un muret d’enceinte en pierre. Quelques poules caquetaient, recouvrant le sol de leurs crottes. Ces volatiles mis à part, la cour était vide, tous les serviteurs étaient en train de servir le repas, leurs femmes restaient cloîtrées dans les petites maisons de chaux, dont les toits de chaume laissaient goutter le lendemain d’un jour de pluie à l’intérieur.

Gaston, lugubre, dépassa rapidement cet enclos de crasse, pour sortir dans l’herbe fraîche et humide qui bordait le nord de la forêt. Il fit quelque pas, et s’assit sur une branche, regardant la nature. Nul château, de ce côté-ci. Nulle luxure, seule la beauté simple de la nature. Nul courtisan, nul ménestrel, mais de jolis oiseaux au chant doux. Nul mort. Il n’y avait pas de ruisseau.

Père…

Père…

Pourquoi, mère ?

Pourquoi avez-vous…

« Pourquoi traînes-tu là, gamin ? »

Gaston soupira. Ne sera-t-il jamais tranquille ? Cet être démoniaque viendra-t-il le hanter chaque midi ? Déjà deux mois, que cela durait, et Gaston ne s’était toujours pas habitué.

Comme chaque fois, il se contenta de ne pas répondre.

« Tu sais, ta maison est de l’autre côté. »

« Je sais », aurais voulu répondre Gaston en criant. Ou non. « Ce n’est pas plus ma maison que la tienne. ». Non, qu’aurait-il répondu… ? Adonc, il restait la solution de la violence. Il était un solide gaillard, à présent, et saurait bien tenir tête à cette brute.

« Tu ne veux pas y aller ? Tu ne veux pas aller voir le cadavre de ton père ? Tu sais, cet idiot qui s’est donné la mort par lui-même. Faut-il être sot ! Moi, je l’aurais tué, le courtisan de ta vieille mère. Elle aussi a été sotte, d’ailleurs. »

Gaston se retourna lentement, puis dévisagea son interlocuteur. Les pommettes saillantes, le visage carré, le nez fin et pointu, il avait des cheveux noirs coupés courts.

« Laisse-moi, veux-tu ? »

« Je crains de ne pas vouloir », répondit Henri d’une voix sifflante.

« Quoi ça !? » s’exclama Gaston, interloqué.

« Je t’ai laissé paisible toutes les autre fois, mais à en juger par ton comportement, ma clémence excessive n’est pas bonne donneuse de leçon. »

« Qu’entends-tu par « mon comportement » ? »

« Vois, fils d’assassine. Passant outre mes avertissements, tu t’obstines à t’asseoir ici pour rêvasser, au lieu d’aller filer du lin, comme toutes les autres filles de ce palais. Adonc cette fois-ci, je crains de ne pouvoir être aussi permissif que par le passé. »

Gaston soupira, et s’en retourna à la contemplation de la forêt.

« Dégage, morveux », siffla Henri. « Fils d’assassins ! »

Gaston bondit, écarlate, et leva son poing.

« Je t’interdit ! »

« C’est cela. Que m’interdit-tu, ô, enfant rejeté ? Tu n’as aucun pouvoir sur moi ici, et ma foi, tu devrais bien savoir pourquoi. Mon père ne mets pas de temps à s’échauffer, et les conséquences de tant d’insolences de ta part pourraient pourraient être malheureuses. Te vois-tu dormir sous les branches ? »

Gaston n’y tint plus, et sauta sur Henri, lui assénant un puissant coup de poing sur la figure. Son adversaire tomba à la renverse sur une branche noueuse émergeant du sol. Il leva la tête, un léger sourire se dessinait sur ses lèvres en sang.

« Parfait. Apprête toi à souffrir, gamin. »

Gaston avança lentement vers lui, ses muscles saillants luisants au soleil. Sa puissante poitrine luisait de sueur.

Il n’avait pas peur.

Henri se releva lentement, la méchanceté brillait dans son regard.

Le reste ne fut que violence, coups, sang et cris.

« Quels imbéciles vous faites ! » s’exclama Mathilde. Elle se tourna, pleine de pitié, vers le garçon gisant à terre, contre le mur, du sang tachant sa tunique. « Je n’aurais jamais cru ça de toi, Gaston ! ».

« Petit crétin orgueilleux. Il croyait pouvoir me battre. »

Mathilde explosa.

« Henri, crois-tu vraiment que ce soit le moment de l’insulter ? » Elle fit une grimace en regardant à nouveau Gaston. « Le pauvre est dans un triste état… »

Le porte-parole avait de longs cheveux blond, une petite tête ronde, et un grand corps maigre et athlétique. Il était vêtu d’une large tunique jaune, par dessus sa chemise. Il regardait avec anxiété le seigneur d’Andrésy, assis sur son fauteuil.

« Les seigneurs de Clairecour, d’Hivernat et de Permenanne ont répondu à votre appel, seigneur. Ils disent être près dans deux à trois mois… »

« Bien… »

« Mais, si je puis me permettre, seigneur… » sa voix se fit hésitante… il craignait la réaction de son suzerain. « …au risque de me répéter… ceci va contre tous les codes de l’honneur. »

« Peste, je vous répète que de l’honneur, ils en ont bien peu ! » tonna d’Andrésy d’une voix forte. « Et, sangbleu, croyez-vous vraiment que nous ayons le choix ? »

« Non… non, seigneur. »

« Adonc, nous nous entendons. Faites donc passer l’ordre. Et laissez-moi, de présent. »

« Bien, sire. »

Le jeune soldat s’inclina respectueusement, puis tourna les talons. Au moment de pousser la porte de la salle du conseil, il se ravisa, puis se retourna.

« Seigneur ? »

« Qu’y a-t-il ? »

« Que faisons nous de l’enfant ? »

« Je donnerais mes ordres au moment voulu. Vous pouvez vous retirez. »

Le porte-parole fit la révérence une nouvelle fois, puis se retourne, poussa la porte, et se dirigea prestement vers la sortie, à travers la grand salle. Les serviteurs terminaient de débarrasser la table. Qui, portant une pile d’assiette, qui, retirant la nappe. Ils étaient une dizaine à s’activer, à ramener, ranger, et nettoyer. Ils auraient été vingt à peine six mois auparavant.

Dans un coin, assis sur une chaise, entouré d’un grand linge blanc tâché de sang, Gaston le regardait. Comme il paraissait grand, fort, droit et noble ! Lui n’aurait fait d’une bouchée de ce mauvais garçon d’Henri… cette brute avait osé insulté sa mère…

« Fils d’assassine »

Fils d’assassine….

Assassine…

Père….

Assassine…

Oh, père !

Il leva vers la tête de cerf accrochée aux murs de grands yeux pleins de larmes.

Au fond, il avait raison…

Modifié par Guillaume de Rochebrune
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murs de l’immense grand salle du château

Il y a un pléonasme et une faute d'ortho :rolleyes:

IL empestait la sueur. Il était en train de faire ses exercices, quand le cri le plus puissant qu’il ait jamais entendu retentit, faisant trembler le sol de sa chambre à coucher, qui était aussi je plafond

Et la, y a un probleme de majuscule au debut et un c'est incomprehenseible à la fin -_- Donc je te laisse corriger tout ca !

Sinon dans le fond, c'est pas mauvais ! On s'attendait a la deconfiture du heros et meme quand ca se passe, on s'attends a un renversement de situation !! Mais bon, c'est pas le cas ! Maintenant, c'est l'heure des punitions !!

J'ata donc la suite !!

@+

-= Inxi =-

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Alors:

Les grands murs de l’immense grande salle du château

La répétition de grand crée un effet de style, mais par contre l'immense m'apparaît de trop ^_^ .

fit la révérence une nouvelle fois, puis se retourne, poussa la porte

retourna

Sinon, le passage est pas mal, bien que j'ai eu du mal à reprendre mes marques.

Le mystère s'épaissit légèrement, par exemple avec la famine que l'on ne sait même pas d'où elle vient (des chevaliers qui partent???) et du code d'hnneur bafoué pour une raison inconnue.

Il y a aussi une cassure avec le précédent passage: Mathilde est du côté d'Henry cette fois-ci.

Et maintenant: punition -_- .

Sinon:

-Le garçon a survécu pour une très bonne raison, que vous découvrirez plus tard.

ok

-En fait, le baron est maillé, voilà pourquoi il ne remonte pas: le poids de son haubert l'en empêche. Ais-je oublié de le préciser?

Précise-le quand il le voit, par exemple il veut le retirer mais la lourde armure l'en empêche...

-Je changerait le coupe de la herse.

Oui, il vaut mieux :rolleyes:

Quant à Romain, j'expliquerai pourquoi Gaston se détache du monde.

ok

-Pour la pomme... bon, ej changerai pour un morceau de viande si tu veux. Ensuite, Gaston n'est jamais allé jusqu'à Andrésy, il peut penser avoir besoin de manger beaucoup.

ok

-Je changerai l'épée pour... pour autre chose! 

ok (encore ^_^ )

-Pour le calme, je ferai intervenir le comte.

Une grande personne, mais pas le comte (qui n'a cure de jeunes comme ça, j'imagine ^_^ )

Iliaron

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salut a toi,

content d'un retour!

je ne suis pas le roi de la critique comme Ilarion ou Inxi, mais je t'ecris quand même pour t'encourager car ton histoire me plait vraiment!

Je trouve ce passage avec Henry tres interessant, on sent la colère de Gaston, j'ai hate de voir ce qui va se passer par la suite!

Il y a aussi une cassure avec le précédent passage: Mathilde est du côté d'Henry cette fois-ci.

je ne pense pas qu'elle est du coté d'Henry c'est juste quelle ne pensait pas que Gaston pouvait s'emporter comme ça! elle n'est pas au courant de la discussion avant le combat!

fibz qui attend une suite!

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  • 4 semaines après...

Merci pour vos critiques! Voici enfin la suite! En fait, ce n'est là qu'une partie du chapitre, mais comme il promet d'être long, je m'autorise pour la première fois à tronçonner mon texte.

X

Bataille

Gaston referma doucement la porte derrière lui. Il pénétra à pas feutrés dans son salon. Les murs en pierre étaient recouverts de tapisseries, représentant des scènes bucoliques, une femme nue en train de caresser une licorne ou encore une chasse aux loups. Deux petits fauteuils de cuir brun trônaient au milieu de la pièce, près d’un grand chevalet.

Gaston s’en approcha.

Sur le chevalet reposait un ouvrage en cours, une fine dentelle, avec des motifs de roses et de fleurs de lys. Elle n’était pas tout à fait achevée, aussi quelques fils pendaient à son extrémité. Le jeune homme s’agenouilla, puis la caressa doucement. Le fil était fin et magnifiquement brodé, sa caresse était agréable…

Elle filait merveilleusement bien le lin…

Elle le tissait encore mieux…

Gaston se releva lentement. Il resta immobile quelques instants, profitant du silence, de la sensation de plénitude qui l’envahissait… Dame, l’on se sentait bien, en cet endroit !

Il respira profondément, oublia la vie, ses ennuis, ne gardant qu’une pensée en tête.

Il respira profondément, sentant ses poumons se remplir de l’air qui embaumait cette pièce…

Il se sentait bien…

Un petit vitrail était dans le fond de la pièce, renvoyant l’éclat de la lune. A la lumière de sa chandelle, Gaston ne le voyait pas bien, mais il semblait représenter la Dame….

Il tourna lentement la tête, et découvrit une porte, dans le mur de gauche. Elle devait mener à la chambre. Il tendit la main vers la poignée de fer, mais une voix douce qui retentit derrière lui l’arrêta dans son mouvement.

« Plutôt que de pénétrer sans bruit dans leurs appartements, les vrais courtisans jettent un caillou à la fenêtre de leur dame, puis leurs jouent de la musique, ne le savais-tu point ? »

Gaston se retourna en souriant, pour découvrir un visage fin et blanc, un petit nez busqué, de grands yeux au vert avenant.

« Ma foi, je ne l’ignorais pas, mais je ne sais jouer ni du luth, ni de la cithare… ni du flûtiau par ailleurs… »

Mathilde sourit doucement, ses yeux s’illuminèrent. Elle était heureuse au quotidien, joyeuse en ce moment. Son plaisir de vivre était si fort qu’il en était palpable, si puissant qu’il gagnait ceux qui l’entouraient.

« Quant au caillou, la peur de briser ton beau vitrail m’étreint trop pour que je puisse me permettre de telles folies… »

La belle jeune fille partit d’un rire gai, referma délicatement la porte, et rejoignit Gaston en deux enjambées. Elle se planta devant lui, l’air faussement sérieux et colérique.

« Moqueries, moqueries et encore moqueries… voilà tout ce qui sort de ta bouche, c’est cela ? »

« Oh non » souffla Gaston, « cette liste est incomplète… »

« Quoi d’autre, alors ? » demanda Mathilde avec curiosité.

« De l’amour, principalement… »

Elle se tut. Il n’osa rien dire pendant un moment. Il la contemplait, si jolie, si fragile, dans sa grande robe bleue, avec à la hanche une ceinture de cuir. Elle en avait en or, avant, mais elle avait été obligée de la vendre.

« Mathilde… »

« Gaston ? »

« Tu sais la raison de ma venue, n’est-ce pas… ? »

« Pour me dire au revoir, sans doute… j’ai entendu le comte… »

« Je reviendrais, Mathilde. Je vous promets que je reviendrais… »

« Dans un mois, à tout le moins… pardi, crois-tu qu’un siège soit aisé à mener ? »

« Le seigneur m’a dit avoir un plan… je pense que… »

« Peste, Gaston, tu penses mal ! Même le meilleur des plans ne permet pas de prendre un château en une heure, encore moins celui-ci ! »

Gaston pestait. Dame ! Quand donc son fer accepterait de rentrer dans son satané fourreau ? De toute évidence, l’étui avait été conçu par une autre épée que la sienne. Andrésy avait-il été réduit à vendre ses armes ? Ou cette épée avait-elle été forgé par la main maladroite d’un mauvais forgeron, sur la commande d’un soldat ayant perdu la sienne au combat, qui aurait conservé son fourreau ?

Connaître l’origine de cette étrangeté n’arrangerait en rien la situation présente, se dit Gaston, chassant ces idées de sa tête. Finalement, il se résolut à mettre l’épée directement entre sa ceinture et sa tunique.

« On embarque, monsieur ! » le héla un soldat, assis sur le dernier chariot de la file.

Gaston se retourna vivement, et se précipita vers la charrette. Ses mailles étaient horriblement lourdes ! L’épée sans fourreau lui battait les flancs, et lui lacérait la chair !

Il bondit dans la charrette, qui se mettait en branle.

« De justesse », lui dit le soldat, devant lui.

Il était grand et jeune, le visage fin. Il n’avait pas de mailles, mais une épaisse armure de cuire, recouverte de la tunique damée argent et azur, avec une chouette de sable en son centre. C’était le blason d’hivernant. Le bleu clair, le blanc et le motif noir donnaient une impression de froide douceur.

Gaston se retourna, et regarda le château d’Andrésy s’éloigner peu à peu, à mesure que le convoi s’enfonçait dans la forêt. Il y avait des dizaines et des dizaines de chariots, tous remplis de soldats armées jusqu’au dents, à l’exception du dernier, uniquement occupé par Gaston et son compagnon. Quatre armées rassemblées pour mener une guerre qui n’a pas eu lieu depuis un temps très reculé…

Permenanne, Clairecour, Hivernat et Andrésy allaient mener une guerre civile, combattre leur frère de sang, attaquer Annecy. Malgré la crise provoquée par Annecy, ces quatre factions réunies représentaient plusieurs centaines d’hommes, chevaliers et soldats comme roturiers.

« Que pensez-vous de cette guerre ? » demanda Gaston à son compagnon, ne sachant que dire d’autre pour entamer la conversation.

« Ma foi, nous devrions la gagner bientôt. C’est d’ailleurs pour cela que les troupes ne partent au front qu’aujourd’hui, alors que la guerre a commencé voilà deux mois. »

« Ce n’est pas cela que je demandais », dit Gaston en soupirant. « Je parlais de ses enjeux, de sa cause… regardons les choses en face : ce que nous faisons est contraire à tous les codes de l’honneur. Cette entreprise est digne des Impériaux : entachée de honte et de traîtrise. »

« Ne dites pas cela ! » répliqua vivement le soldat d’Hivernat. « Ceux que nous combattons ne sont plus qu’à demi Bretonniens ! Et leurs chefs encore moins ! Savez-vous seulement les agissements de la baronne d’Annecy ? Cette furie tient plus du démon que de l’être humain ! On dit d’elle que… »

« Et donc, vous dites que la guerre a débuté voilà quelques mois ? J’ignorais ce détail ! » mentit Gaston, afin de changer de conversation. Celle que lui tenait le soldat l’indisposait fortement…

Le guerrier d’Hivernat le dévisagea étrangement. Pourquoi donc ce jeune soldat d’Andrésy l’avait-il ainsi coupé dans son discours ? Il semblait mal en point… ses pommettes étaient rouges, et de la sueur coulait de son front… Peut-être qu’évoquer cette femme l’indisposait… après tout, d’après les dires de certains, Andrésy avait souffert plus que tout autre de la montée en puissance d’Annecy… Il se résolut donc à changer le sujet de leur conversation.

.

« Oui… oui, en effet. Votre seigneur avait mis au point un plan parfait… cela m’étonne d’ailleurs que vous n’en ayez ouï parler… »

Il semblait attendre une réponse de la part de Gaston, qui ne savait trop que dire. Un grand silence tomba alors. Les deux hommes prirent conscience du bruit assourdissant de la colonne de chariots en branle, et de l’inconfort qu’apportaient les nombreux cahots, tout au long de la route.

Gaston se détourna du regard inquisiteur du soldat d’Hivernat, et s’occupa à regarder défiler les arbres et les rochers.

« Votre seigneur, donc… » hasarda l’Hivernan… « Votre seigneur a fait placer des roturiers armés dans la forêt d’Andrésy, et ce, dans le plus grand secret. Jour après jours, ces hommes ont pillé les caravanes de marchandises, qui se dirigeaient vers Annecy. Ce dernier mit quelques semaines avant de s’alarmer, et, pendant tout le temps durant lequel elle ne remarquât point la traîtrise, elle continua son train de vie quotidien : de somptueux banquet à toute heure du jour et de la nuit… »

Il se tut à nouveau, et le bruyant silence retomba. Gaston s’attacha aux arbres qui défilaient. Aux fleurs… A la rivière… la rivière…

De grosses larmes roulèrent sur ses joues rougies par la colère, la honte et la tristesse… Son père… son père était mort… mort… tué…

Sa mère… tué… tuer… tuer… tuer sa mère…

« Si je puis me permettre, monsieur… »

Gaston se retourna, les yeux, bouffis par ses pleurs, lançant des éclairs de dissuasion. Le soldat d’Hivernat se renfrogna, et se tassa contre la rambarde du chariot. La réponse silencieuse lancée par Gaston lui suffisait. Tudieu, quel tempérament ! Pour quelqu’un de son âge… de son âge… oh, baste ! Il allait le lui dire ! Ce marmot ne serait d’aucune façon de taille à le contredire, quoiqu’en disant ces yeux.

« Vous êtes un peu jeune pour partir au combat… »

Gaston sentit monter en lui une bouffée de rage et de colère. Comment osait-il ? Cet étranger ! Il se retourna vivement, et voulut lui lancer une réplique cinglante, mais les mots s’étranglèrent dans sa bouche pleine de larmes, et sa colère tomba bien vite, laissant place à la honte et à la tristesse.

« Oui, c’est vrai », répondit-il d’une voix lointaine… « Mais mon seigneur, le comte d’Andrésy, a insisté pour que je prenne part à la bataille. »

Il se tut, par peur de fondre en larmes. « Son seigneur, le comte d’Andrésy… » quelle ironie… ce même pantin qu’il aurait dû, lui, Gaston d’Annecy, gouverner et diriger ! Ce sous-fifre borné et colérique, sombre et assoiffé de pouvoir ! Son seigneur n’était point le comte d’Andrésy, mais bel et bien le baron d’Annecy, le vrai. Raoul d’Annecy… son père… oh, père ! Pourquoi m’avez-vous quitté ? Et vous, mère, pourquoi vous êtes-vous entichée de ce traître de Michel, ce moins que rien de valet de chambre ? Michel… il payerait…

Un sourire canin grandit sur son visage. Ses sombres yeux n’étaient plus que violence et méchanceté. Cette attitude agressive sembla faire impression sur son voisin soldat, qui blêmit d’un coup. Tant de férocité, chez un jeun garçon ! Tant de haine, tant d’aspects sombres !

Les gens d’Andrésy resteraient donc toujours les mêmes ? Leur attitude agressive avait déjà fait ses preuves, des années auparavant…

« Quelle est le plan d’attaque ? » demanda Gaston avec délectation, voulant tout connaître du moyen de faire payer le sinistre individu qui avait tué son père.

« La troupaille des comtes d’Andrésy et de Clairecour avancera en bon ordre dans le premier rang », expliqua le soldat, hésitant…

« Pendant ce temps, Hivernat tentera de prendre le fort par son aile sénestre, et Permenanne tentera de s’occuper des travaux de sape. »

« Mais il est une chose que j’ignore encore de présent. Pourquoi lancer l’attaque dès aujourd’hui, plutôt que de laisser ces porcs d’Annecy crever de faim dans l’ancien fort de mon père. »

Le soldat sursauta, pas tant à cause du langage vulgaire qu’employait le garçon qu’à cause de l’évocation du baron d’Annecy en tant que… père ! Il en resta bouche bée, n’osant articuler quoi que ce soit. Fort heureusement, Gaston ne se souciait guère de son attitude, et développait seul ses pensées.

« Pour éviter que plus de chevaliers quittent leur demeure pour rejoindre Annecy… et aussi par problèmes de manger, je suppose. D’ici peu, les seigneurs eux-mêmes n’auront plus de pitance, il leur fallait passer à l’assaut dès maintenant. Ce qui n’est pas le pire… par la Dame, quelle tuerie cela va être ! Tu seras vengé, père… enfin vengé… »

Il s’arrêta, d’un coup. Dame ! Comment ? Comment avait-il pu… en si peu de temps… se transformer ainsi ? Une heure plus tôt, il était triste, mélancolique, regrettant Mathilde, regrettant son père… oui, c’est cela… c’est cela, qui l‘avait changé… sa mère… toujours elle… elle, ELLE !

Ô, mère honnie, quand cessera-tu de m’importuner ? Quand quitterez-vous le dernier refuge qu’il me reste, celui de la pensée ? Quand vous lasserez-vous enfin de me rendre fou, de me persécuter sans rien faire ? Ô, mère haïe, pourquoi avoir tué mon père, l’homme de votre vie ? L’homme de ma vie…

Sans vous, mère abhorrée, je n’aurais jamais connu Andrésy, Andrésy n’aurait jamais connu tant de misères…

Je n’aurais jamais connu Mathilde…

Mais si, je l’aurai connue ! En me promenant, aux alentours de MON domaine, mon domaine d’Annecy ! Et de toute façon, Mathilde… si vous ne lui aviez pas fait subir le même sort qu’à ma pauvre personne… Père ? C’est père qui as décidé ? Que nenni! C’est vous ! J’en suis assuré ! Comment auriez-vous pu, autrement, le persécuter au point qu’il rende son âme à la Dame avant que celle-ci l’ait appelé ? Comment auriez-vous pu vous jouer de lui à ce point ! Il avait des remords, et cela, je ne l’ignore point ! Je me souviens, quand il se lamentait auprès de vous, se reprochant d’avoir perdu un enfant ! Elle me l‘a raconté, mère ! Mathilde m’a tout dit ! Je devine que c’était vous ! Deux ans avant que je n’arrive au monde ! Comment avez-vous pu, mère !

Je me vengerais aujourd’hui, au nom de ma bien aimée Mathilde ! Mère, apprêtez-vous à rejoindre les démons du chaos dans les ténébreuses abîmes de la mort ! Mère…

Oh, mère… je vous aime !

Oui, au fond… au fond, vous êtes ma mère… vous m’avez donné la vie… même si vous n’étiez jamais là… Nous n’avions pas beaucoup de serviteurs, alors vous deviez être avec moi… vous ne l‘avez jamais été ! Vous m’avez toujours ignoré, vous contentant de m’offrir ma pitance à contrecoeur ! Vous n’avez jamais été là pour moi, pour me soutenir ! Vous êtes une mère indigne de l’être !

Mais c’est Michel, au fond… Michel qui vous a perverti… Michel qui vous a incité à ne plus avoir le moindre geste pour votre mari, le moindre geste pour votre enfant… Michel, ce traître… Michel que vous avez décidé d’aimer…

Traîtresse…

Il vous a ensorcelée, vous l’avez suivi… vous êtes de présent une âme damnée… Traîtresse… démone…

« Nous y voici », déclara le soldat d’Hivernat, coupant Gaston dans ses sombres pensées.

Le jeune homme releva la tête, et immédiatement aperçut une énorme masse. Des centaines de pierres, des douzaines de vitraux, plusieurs meurtrières, une quantité colossale de merlons. Une dizaine de tours, et un donjon grimpant jusqu’aux cieux. Le château d’Annecy tel qu’il l’avait connu était bel et bien disparu, laissant place à une gigantesque forteresse, une place forte comme on n’en avait jamais vu…

Sur la plaine s’étendaient des cohortes de soldats, plusieurs centaines de combattants rassemblés ici mettre fin au règne tyrannique d’Annecy. Les soldats n’avaient été que très peu payés, pour ce combat, car tous étaient heureux d’en finir. Ces légions de tueurs rassemblés là étaient un spectacle frappant, toutes les livrées mélangées, un sombre festival de couleurs. Tous les hommes étaient dominés par d’énormes machines de sièges, d’imposants trébuchets. Une douzaine de ces engins étaient répartis sur toute la plaine, semblant défier la forteresse d’Annecy. De nombreux drapeaux flottaient aux vents, au milieu de cette fourmilière de combattants, certains plantés au sol, d’autres portés par de robustes bras.

Le charrette de Gaston progressa au milieu de la foule, le fils d’Annecy se sentit happé par tous ces gens d’armes, recouverts qui de mailles, qui de cuir, tenant à la main une épée, un fléau ou, pour les gueux, les roturiers équipés à l’occasion, des armes d’hasts, de longs morceaux de bois au bout desquels étaient fixés des lames de métal grossièrement forgées, provenant souvent de socs de charrue ou de divers outils agricoles. Gaston voyait défiler ces corps, ces bras, ces fers, ces casques et ces étendards. La vue de tous ces soldats l’excitait, le rendait confiant. Avec autant d’hommes, comment pourraient-ils échouer ?

Le chariot s’arrêta finalement au beau milieu de la foule, arrêté par des soldats qui lui tenaient les rennes. L’Hivernan sauta par-dessus la rambarde, et se rétablit de l’autre côté. Puis, il se laissa emporter par la foule.

Gaston se résolut à en faire de même. Il se mit debout au milieu de la charrette, puis bondit au sol. Mais il se rétablit mal, part en avant et bouscula un soldat, qui tomba à la renverse pour se laisser choir sur un roturier derrière lui. Ce remue-ménage ne sembla pas déranger les guerriers alentours, qui continuèrent leur route, allant même jusqu’à marcher sur les corps à terre. Gaston sentit une horrible douleur dans son dos lorsqu’un soldat posa son pied sur lui.

Il se hâta de se relever avant de se faire piétiner par des régiments entiers. Une fois sur pieds, il ne sut trop que faire, et, à force d’hésiter, fut emporté par le flot de la foule. Poussé de ci, bousculé de là, il était toujours déménagé, ne pouvant rester à sa place. Transbahuté dans tous les coins par une foule désordonnée, mû par une force qu’il ne pouvait maîtriser, il parcourut ainsi une large part du champ de bataille, parfois se retrouvant à la limite de la portée des arcs ennemis. Il crût d’ailleurs apercevoir quelques corps de pauvres gens allés un peu trop avant, étendus sur le sol, quelques flèches fichées dans les côtes, le ventre ou le front.

Au bout d’un long moment, le chant clair d’une trompette retentit. Puis celui d’une autre, puis de quatre autres. Quelques dizaines d’instruments appelaient les guerriers à se préparer à l’assaut. Un long cantique guerrier indiquant que les seigneurs avaient mis au point leur plan d’attaque, et que les roturiers avaient fini de monter les armes de siège. Alors, tout le monde, les soldats, les chevaliers et les paysans si dirigèrent vers le haut de la colline, tout le flot humain se dirigeant vers le même point. Toujours happé par la foule, Gaston dût suivre le mouvement, remonter vers la colline. Au bout de quelques minutes de mouvement, tout s’arrêta. Gaston repris son souffle, au milieu de guerriers immobiles. Les traits tirés, les yeux fixes et les muscles tendus, tous attendaient le moment de l’assaut. L’instant où il faudrait bondir vers l’ennemi, courir vers sa mort, l’arme au poing, faire couler le sang et répandre le sien. Gaston lui-même ressentait une certaine tension. Lui aussi allait devoir enfoncer son arme dans le ventre d’un autre, lui aussi ressentirait la douleur… Mais il était prêt ! Quel que soit, l’ennemi, il…

« Monsieur ! » le héla quelqu’un tout en lui tapant l’épaule. « Vous êtes ici dans les rangs des soldats d’Hivernat, monsieur. Vous devriez aller rejoindre vos lignes. »

Gaston se rendit compte que tous les soldats qui l’entouraient arboraient en effet la chouette de sable, d’un noir oppresseur. Il sortit donc des rangs Hivernans, afin d ‘aller rejoindre les soldats d’Andrésy. Et c’est là qu’il les vit…

Il vit d’abord quatre armes de sièges qui achevaient d’être montées au sommet des tours d’Annecy. Quatre engins capables de catapulter des rochers gros comme des bœufs sur les rangs serrés des assaillants.

Puis, il vit les soldats. Les murs d’Annecy, ces immenses murs s’étirant sur d’énormes distances, ces colossaux cordons de défense, ces énormes remparts étaient remplis d’archer. Il y en avait tant, amassés contre les merlons, qu’ils avaient à peine la place de bouger. Ils s’étendaient en une grande ligne noire, une véritable armée à eux seuls. Ils devaient déjà être aussi nombreux que leurs assaillants. Et Gaston savait que ce n’étaient là que les archers, des roturiers sommairement équipés. Il devait y avoir tout autant de gens d’armes à l’intérieur même du château, mais cette fois-ci, de véritables chevaliers, la fine fleur de la Bretonnie, cavaliers qui faisaient défaut aux armées de siège. Il y avait bien plus d’hommes qu’il n’en fallait pour mettre en pièces la coalition…

Modifié par Guillaume de Rochebrune
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les nombreux cahots, tut au long de la route
Sa mère… tué… tuer… tuer… tuer sa mère…
n’étaient plu que violence et méchanceté.
Il avais des remords, et cela, je ne l’ignore point !
vous ne ‘lavez jamais été !
Vous êtes une mère indigne de l’être !
Michel que vous avez décider d’aimer…

Voila tout les faute que j'ai noté ! Pour la "mère indigne" il y en a pas, c'est juste pour dire que le "de l'être" est inutile !! ^_^ Bon c'est pas trop mal vu la taille du texte mais je sais qu'il y en reste d'autre ! Je les ai vu mais pas noté au debut ( et meme après )

Enfin dans le fond c'est pas mal ! Tu joues avec la personalité de ton personnage : un coup aimant envers sa mere, un coup la destant. L'accusant, lui trouvant des excuses. Ca montre le trouble qui habite ton perso.

Sinon, j'envie de voir comment va se passer la bataille avant de juger !! :) Alors, c'est bon, tu peux envoyer la suite !!

@+

-= Inxi, mare d'la vigne =-

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Merci beaucoup pour cette réponse et ton relevé de fautes que je m'en vais corriger, al conscience désormais tranquille.

Par contre, la seconde, à savoir :

Sa mère… tué… tuer… tuer… tuer sa mère…

est voulue.

Voilà, encore merci, et la suite arrive!

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