Avant d’attaquer le cœur de mon message, je tiens à préciser la volonté du discours que je vais tenir. Je ne suis pas contre la note de peinture dans les tournois, mais je constate qu’à l’heure actuelle, de nombreuses incohérences font, qu’à mon humble avis, elle prend trop d’importance . A ce titre, je ne cherche pas à évincer cette note en prônant la bâche pure, qui va à l’encontre de l’esprit même du hobby, mais j’essaye plutôt de proposer des mécanismes de jeu (comprendre ici au sens organisation de tournoi) permettant d’intégrer de la manière la plus juste la dite notation afin que tout le monde y trouve son compte. Enfin, je m’excuse par avance auprès des organisateurs du tournoi de Chambéry, victimes de ce piratage de sujet (à quand le split ?), en précisant que les exemples que je vais utiliser, si ils sont issu de ce règlement, n’ont pas pour vocation d’exprimer un quelconque désaccord (je viens en connaissance de cause), mais plutôt de favoriser la discussion autours d’une manifestation précise, par ailleurs reconnue pour sa qualité.
I) Peinture et idées reçues
Tous égaux face aux pinceaux ?
C’est une utopie de le croire quand bien même on ignore la notion de talent, pour la simple et bonne raison que le facteur principal est le temps. Hors personne ne le démentira, que ce soit par volonté ou par obligation, aucun d’entre nous ne gère de la même façon le temps. Si certains peuvent se contraindre à passer 20h par semaine avec un pinceau en main, c’est tout simplement impossible pour certains (ou inconcevable pour d’autres). Faut-il alors récompenser ceux qui dédient plus de temps à cette forme d’expression artistique ? Evidement OUI, on ne peut que respecter ceux qui par leur dévouement nous font rêver avec leurs figurines, d’autant plus que, généralement, le talent va de pair avec l’envie de peindre (ce qui ramène au débat de l’œuf et de la poule).
Le temps passé à peindre est inversement proportionnel à celui passé à bachoter les règles.
Qu’on me le démontre… A l’inverse, je suis facilement capable de nommer plusieurs joueurs qui font allègrement les deux avec un niveau plus que correct en peinture (Pendi, Fabio ou Solkiss en sont de bons exemples). Sans parler du fait que la compréhension et l’intégration des mécanismes de jeu n’est pas fonction du temps passé à lire les règles : certains comprennent vite, pas d’autres. Du coup, dire que les peintres sont en général moins bons joueurs relève pour moi du phantasme.
Faire peindre son armée, c’est mal…
Tant qu’on y est, et puisque l’on traite de la notation peinture de manière globale, autant aborder ce sujet également. Cette affirmation se base sur les postulats suivants : « On a pas tous les mêmes moyens, c’est dégueulasse » d’une part, et « les méchants font peindre leurs armées uniquement pour glaner des points dans les tournois » d’autre part. En version courte, la réponse est : « Bienvenu dans la perverse société capitaliste de consommation de masse »…En élaborant un peu plus, on peut dire que, comme vu au premier point, le niveau de peinture est en premier lieu fonction du temps qui lui est dédié, et nous ne sommes pas égaux devant celui-ci. Un palliatif peu alors être trouvé par l’achat d’un service peinture ; on troque un investissement en temps contre un investissement en argent. Et une fois de plus, rien ne permet de démontrer que ceux qui recourent à cette méthode le font uniquement dans l’idée des tournois (je doute que les gens achetant des pièces à 2000€ sur coolmini le fassent pour jouer avec…). Si l’on rajoute à cela le fait qu’il est impossible pour les organisateurs d’un tournoi de savoir qui a peint l’armée, sans faire appel à la bonne foi des joueurs, il semble dès lors évident que les armées peintes par des « professionnels » ne peuvent qu’être jugées à égalité sur ce plan avec les autres.
II) Faits relatifs aux tournois
Jeu, Pinceau et match
La base même d’un tournoi est de donner une échelle de valeur en classant ses participants. Dans le cas contraire, on parlera de manifestation ou de convention. La méthode classique actuelle pour ranger (au sens statistique) les participant consiste à les faire jouer en poules puis rondes suisses (arrangées ou pas) pour donner un étalonnage puis à rajouter les notes annexes (y compris la peinture) afin de donner un classement final. C’est une a-be-rra-tion ! En effet, cela revient à dire que les affrontements entre joueurs se font sur un classement à un temps T qui occulte en moyenne 25% de la note finale du joueur !! En dernière partie du tournoi en « table 1 » on retrouve les meilleurs joueurs… qui ne sont pas nécessairement les prétendants les plus sérieux au titre !!! Et cela entraîne de fait une autre dérive…
Un jour un peintre a décoré un navire de guerre en jaune…
La peinture, par sa place prépondérante dans les notes annexes est en quelque sorte le moyen le plus sûr de « faire un sous-marin ». Sur un tournoi ou la peinture est importante, un bon peintre qui fini sa première journée dans le second quart des joueurs (ce qui correspond à une défaite) est toujours en course pour le podium !!! Et il est certain qu’évitant le premier quart des joueurs, sa journée du dimanche sera plus aisée…
La note en elle-même
C’est une évidence, mais je la répète pour les besoins de l’argumentation, la note de peinture reste un élément subjectif. Cela ne pose généralement aucun problème aux extrémités du classement : celui qui a 19 a avec certitude un élément sur lequel il a été meilleur que celui qui a 18. Le souci se pose dans le ventre mou du classement. Quel juge peinture est capable d’affirmer sans aucun doute que les quatorze armées qui ont 10 sont à coup sûr moins bien peintes que les seize qui ont 11 ? De même, l’échelle relative est très contestable : par rapport à ceux qui ont dix, le meilleur mérite-t-il 18 ou 20 ? Quid du moins bon : 1 ou 6 ? Ce dernier exemple est particulièrement parlant car il est souvent décourageant pour une personne avec un niveau moyen de voir qu’elle ne gagne que 2 ou 3 points sur un joueur ayant manifestement (on me souffle wyrd ) fait l’impasse sur la peinture.
La peinture est-elle réellement rentable ?
Si le bon joueur n’est jamais à l’abri d’une contre performance (nemesis et autres facteurs dés), le bon peintre (pour peu qu’il « entretienne » régulièrement ses figurines) a l’assurance de ramener des points avec sa peinture… Cela est en mesure gênant lorsque, couplés avec les points précédents, on constate que les podiums généraux et peinture ont souvent des joueurs en commun, qui raflent la mise à la remise des prix. C’est à mon avis un élément dommageable pour le hobby. (Je le répète encore une fois, je n’y vois pas une intention malsaine de la part de ces concurrents, mais je fais le constat d’une réalité). Dans une moindre mesure (ou du moins de manière bien plus compréhensible), on constate évidement que la plupart des podiums peinture sont attribués à un groupe restreint de happy few, que l’on retrouve d’un tournoi sur l’autre.
III) Des solutions
De l’intégration de la note de peinture
En intégrant la note de peinture dans la composition des rondes, on évite pas mal de ces écueils. La question reste de quand et comment intégrer facilement cet élément en fonction de toutes les autres contraintes d’organisation. Idéalement, cela devrait être fait le plus tard possible, donc à la dernière partie pour garantir le plus longtemps possible des parties le plus équitables possible (notamment dans le cas des rondes suisses prenant en compte les poules de niveau). Dans la pratique, il peut être plus facile de le faire dès le dimanche matin, particulièrement dans le cas d’un système à arborescences. Certains diront qu’il est illusoire d’avoir une note de peinture définitive dès le samedi, surtout pour les gros tournois. Qu’importe, il est sûrement possible d’avoir déjà au moins les groupes de niveau (0-4,5 -9, 10-14, 15-19, 20-25) qui peuvent déjà très honnêtement pondérer l’organisation des arborescences (de respectivement 0-5-10-15 et 20pts). On élimine de cette façon le problème de la non prise en compte de la peinture avant la fin mais également en partie celui lié à la notation elle-même puisque le joueur assume déjà pendant les parties sa future note de peinture.
Le commerce équitable des lots
Bien qu’en mettant en place l’intégration de la note de peinture dans la composition des rondes, on limite fortement l’effet peinture, il peut être bon de d’organiser (et pour d’autres prix également) un système permettant de multiplier les personnes primées. Prenons l’exemple d’une personne finissant premier au général et à la peinture, celui-ci repartirais avec le prix accordé par sa place au général, alors que ses lots « peinture » (à l’exception d’un éventuel trophée s’entend) seraient automatiquement transférés au second. Cela demande juste de bien hiérarchiser les lots de manière à n’avoir aucun doute lors de la remise des prix. De même, il serait peut être bon de déclarer « hors-concours » le gagnant du prix peinture de l’année précédente, uniquement dans le but de faire tourner les podiums (et permettant par la même occasion à ce joueur de jouer des unités qu’il n’aurait pas employés en visant le prix peinture).
Je commence à fatiguer, il est donc temps d’arrêter, mais je pense au moins avoir posé des bases sérieuses de discussion. En espérant que les pro et les anti ne se déchirent pas les tripes sur ce qui n’est, après tout, qu’un jeu…
Edit : message posté avant lecture des sujets postés depuis ce matin...