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Waz

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Tout ce qui a été posté par Waz

  1. Waz

    Concours Croisé Inter-sections

    Allez, soyons fous, je participe, j'espère que le délai englobera les vacances de Noël
  2. J'en suis Tout de même, il faut que je défende mon titre
  3. Eh ben... Premier... J'en suis tout ému Merci et bravo à tous, très beau concours que cette édition, et si je l'ai remportée, ça n'est que d'un cheveu (coupé dans le sens de la longueur : 1 seul petit point sur Celt, désolé à lui). Bref, je vais essayer d'en être digne en pondant un petit thème mignon comme tout. (relativement en accord avec celui-ci pour le côté saga si possible ) Hmm sinon pour le groumpf du Celt, je suis pas entièrement d'accord. C'est justement ce que je préfère, lire ce que pensent les autres de mon texte, et d'autant plus s'ils ne pensent pas ce que je voulais faire passer. Par exemple, la lecture de Fandalg est assez différente de la mienne, mais j'ai été surpris en constatant qu'elle pourrait très bien être meilleure que celle d'origine. Enfin, en tout cas c'est quelque chose qui me plaît beaucoup. Même si je peux comprendre que lorsqu'on a peaufiné un texte (ce qu'il me semble, tu avais dit que tu faisais beaucoup, en particulier pour les concours) c'est difficile de voir qu'on a peaufiné dans le vide. En général mes textes sont tous des premiers jets, donc je n'ai pas ce genre de problème . Mais bon, je m'égare, encore bravo et merci pour cette première place !
  4. Si je peux me permettre une remarque, il me paraît extrêmement difficile de commenter les textes en saga, puisque la plupart n'ont pas de fin, même provisoire. Difficile de juger un texte sans en avoir la finalité et les aboutissants. Tout au plus peut-on avoir un aperçu de la façon dont c'est mené et du style. Enfin, il va bien falloir faire avec, mais j'espère que ça ne pénalisera pas ceux qui font l'effort de s'engager sur la durée Voilà, c'est tout, à plus tard et bonne lecture P.S. : 'tention Inxi le dernier texte n'est pas complet (ou alors l'auteur a pris la notion d'épisodes en saga un peu au pied de la lettre )
  5. Je sors de mon cercueil pour prévenir que j'essaierai de pondre un petit quelque chose si je trouve le temps et l'inspiration. Je ne suis pas encore mort, je guette A+
  6. Waz

    Les Couloirs de Khaine

    J'ai toujours eu un faible pour le freestyle, mais là je suis plus que conquis. Si le contenu est inégal - cela reste du freestyle - c'est une telle performance niveau style (je ne pas pourquoi, mais le tien me laisse pantois, j'accroche à chaque fois et me laisse mener en bateau sans y trouver rien à redire). Alors certes, c'est loin d'être parfait, mais je ne pense pas que ce soit le but recherché. Et puis la partie sans voyelle est juste horrible. Un moyen de consommer des caractères. On pourrait aussi être lassé par les petites touches d'auto-apitoiement qui ont un arrière goût assez désagréable de fausse modestie. Mais bon sang ! que c'est agréable à lire. On en redemanderait tous les jours. Ton style, on peut ne pas l'aimer, moi j'en suis juste dingue. Je peux que plussoyer avec un enthousiasme sans bornes tout ce qui est se trouve au-dessus (et sans doute au-dessous; qui sait?) Waz, en passant...
  7. Waz

    Les Couloirs de Khaine

    Décidément, j'accroche vraiment à ce que tu nous ponds en ce moment. Le laïus sur la structure est bigrement bien foutu, quoique facilement contrable (tiens, le hasard à une structure? et pour reprendre un de tes arguments, il n'y a pas que les gaz rares qui soient déstructurés ; tous les gaz le sont et volent au gré du hasard - encore lui). Ah, aussi : Hum, et pourquoi serait-il devenu ermite s'il n'avait pas eu de raison de le faire? et pourquoi aurait-il eu une raison de le faire s'il n'y avait pas societé? Enfin, j'ai l'impression que c'est davantage un exercice de style qu'une démonstration sérieuse et là, c'est plutôt réussi. Ca se lit très facilement, c'est fluide, ça flatte l'oreille, bref, j'aime ton style. Seul bémol (deux, en fait) : l'usage des mots thanatie, nécrie etc... (et surtout l'ajout de traduction) me gène. Ca fait fait vraiment trop pompeux, "maître de la langue". Prétentieux en quelque sorte. Enfin, peut-être est-ce parce que je n'ai fait ni latin ni grec. Le deuxième : Très stylé mais revient au même. Ou alors il faut changer la première partie pour la comprendre telle que tu veux qu'on la comprenne ( rien n'a pas de structure), auquel cas il faut aussi changer la deuxième
  8. Après enlèvement, soulèvement? Dis-moi, l'inspiration ne te ferait-elle pas défaut ces temps-ci? Bon, va falloir réfléchir à un truc potable (comprendre hors-sujet) là-dessus, autant s'y mettre tout de suite... J'ai toutefois l'impression que c'est un brin orienté, tout ça, les neurones vont devoir trimer. Sinon, trêve de mécontentement, ça s'annonce passionnant. Bonne chance à tous
  9. Hem, le sujet est pour quand, ô grand modo vénéré? Parce que là, la pression commence à monter tout doucement M'enfin, ne te presse pas non plus si attendre est nécessaire à un sujet de rêve qui convient à tout le monde... (Le mieux serait de combiner les deux, bien sûr )
  10. Waz

    La Machine infernale

    Quelques réponses en vrac : Concernant la séparation des parties, c'est le problème de poster les textes en plusieurs fois. En général, le découpage correspond à celui des posts, et il est dur de le préciser très clairement (autrement que par un "attention, nouvelle partie" assez moche à mon goût ). J'imagine que quand je remettrai le texte en un seul morceau, tout cela sera bien plus cohérent. D'ailleurs, c'est c'est qui entraine le "flou rhétorique" (en dehors d'un abus de ma part bien sûr...), puisque ce morceau est une partie à part entière suivie du tout début d'une autre. M'enfin, je vais tenter d'éclaircir. Ah, sinon : Elle est surtout volontaire Moi j'aime bien, mais je vais surement enlever. Autant pour moi, je suis parti dans un joli délire qui a échappé à mon semblant de relecture Je corrige de suite. Edit : Quoiqu'en y regardant bien, ç'aurait bien pu être ça, en accordant avec les "pistes". Hem.. non? bon tant pis, je corrige quand même ... Merci de vos commentaires, quoiqu'il en soit
  11. Waz

    Le Médaillon des Quatre

    Si je peux me permettre une petite intrusion, moi qui n'ai pas eu le courage d'aller jusqu'au bout jusqu'ici (j'y vais petit à petit, malheureusement, mais je ne désespère pas d'arriver à la fin), je ne t'encouragerai pas à continuer éternellement. Certes, sur ce que j'en ai lu jusqu'ici, cette saga est bien agréable, et il est presque logique d'en demander toujours plus. Mais à mon avis tu gagnerais à la terminer sans trop faire traîner. Pourquoi? il y a plusieurs raisons à ça : tout d'abord, il y a le risque que tout cela s'essouffle et qu'on ait plus envie de lire pour l'intrigue mais parce qu'il serait dommage d'avoir lu un pavé comme ça sans avoir la fin. (Ca n'est pas le cas, mais bon, sait-on jamais...). Ensuite, parce que finir un texte de façon satisfaisante est à mon sens extrêmement difficile, et que poursuivre un texte consiste en quelque sorte à une lâcheté (soyons fous, lâchons les grands mots ) devant une échéance qui risque de ne pas contenter les lecteurs. Bon, je grossis le trait, heing, mais j'imagine que l'idée est passée Alors, oui à une fin, que tu es libre bien sûr de faire ouverte pour éventuellement revenir sur le thème un peu plus tard Maintenant que j'ai mis mon grain de sable, je retourne à ma lecture
  12. Waz

    La Machine infernale

    Après une absence si longue que je ne m'autoriserais même pas une excuse, voici venir la suite (toujours aussi courte, on ne se refait pas). Juste une ou deux remarques - une - avant de passer au gros du message : Moi aussi, pour le coup. Mea culpa Bonne lecture Tout allait pour le mieux, c’est le moins que l’on puisse dire. La perfection, cette idée utopique qui fascine depuis la nuit des temps, semblait lui sourire et accorder un aperçu de son infinie complexité. Oh, bien sûr, ça n’était pas vraiment elle non plus. Quiconque s’attarderait un peu sur les détails de la situation remarquerait bien vite les infimes défauts inhérents à toute entreprise un tant soit peu audacieuse. Mais si l’on savait faire abstraction, encore une fois, et ce quelques minutes durant, de son pragmatisme forcené – dicté par quelque ineptie cérébrale, inévitablement -, la beauté du moment se révélerait avec sa douceur éthérée reconnaissable, pareille à nulle autre. S’ensuivraient alors ces moments inoubliables, qui se déposent au fond de notre mémoire comme des sédiments incrustés d’argent et resurgissent parfois en une pluie d’étoiles scintillantes. Magnifique, non ? Je sens votre attention décliner, toutefois, et au risque de vous arracher à l’un de ces instants magiques, je me dois de recentrer et de vous hisser vers la surface, sans quoi les hauts-fonds auront beau jeu de vous noyer, avec toutes les irrémédiables conséquences que cela entraînerait. A moins qu’un séjour en enfer ne vous tente, maintenant que vous connaissez toutes ses merveilles ? Ne serait-ce pas une belle expérience que de tenter vous aussi le voyage vers les profondeurs ? Non ? Ah, je vois, le pragmatisme revient à la charge ; j’avoue m’y être attendu. Vous voulez en savoir plus, bien sûr. N’ai-je pas déjà dit que la pulsion première en cas de danger est d’en connaître la nature ? Soit, je m’incline ; j’imagine que je n’obtiendrai pas de repos avant d’en avoir terminé avec Naïf et ses pérégrinations. Poursuivons. Le diablotin se trouvait perché près de la rosace, hors de vue de la foule bruissante assise en dessous. Nonchalamment adossé contre la paroi de pierre massive, il laissait son regard divaguer le long de la nef, s’autorisant quelques accrocs aux niveaux de l’autel ou des ailes. Le service ne devrait plus tarder ; le prêtre laissait d’ailleurs entrevoir un pan de sa soutane dans l’entrebâillement d’une petite porte, au fond de l’église. Un sourire fit frissonner le visage de Naïf à la pensée de la messe à venir. Sûrement un joli spectacle que ce service. Il ne serait pas de tout repos. On pouvait déjà sentir des ondes de fureur glisser et se propager parmi les fidèles, explosant ci et là sous forme de vociférations incontrôlées. Plus encore, au-delà de la colère, on sentait une inquiétude palpable, sous-jacente, qui minait les fondements et la raison de la foule étalée sur le sol marbré. A chaque instant, quelqu’un lançait un regard désespéré, une supplique plaintive ou je ne sais quel cri de détresse vers le ciel, dans le fol espoir qu’une divinité de passage daigne se pencher sur l’infime poussière qu’il était. Eh bien non, tout ces débordements ne parvenaient qu’à une paire d’oreilles doublée de cornes, et Naïf se targuait de cette confiance vacillante avec l’un des ses plus beaux sourires démoniaques. « Hommes de peu de foi, pensait-il, où donc est votre belle assurance d’hier ? perdue dans les profondeurs abyssales d’un bénitier ? ». Bonne question, ceci dit, en laissant de côté les railleries. Il n’était pas évident d’y répondre, en tout cas, bien que quelques pistes, telles le loup des contes pour enfant, laissaient entrevoir l’extrémité de leur queue. Et en sachant y regarder à deux fois, celle-ci ne laissait aucun doute quant à son origine, toute bordée de pointes et de piquants qu’elle était. Oh bien, sûr… « Damned ! C’est parti !». Avec une belle démonstration de courage, le prêtre se hissa sur l’estrade supportant l’autel. Difficile de faire mine d’ignorer le grondement d’une bonne centaine de personnes lorsque celui-ci recouvre jusqu’aux accords barbares de l’orgue – pourtant joué à plein volume par un organiste des plus enthousiastes. On sentait l’ecclésiastique sur le point de craquer, sur ce simple geste accompli de si nombreuses fois ; sur le point d’abandonner la sienne pour prendre ses jambes à son cou. Toutefois, Naïf dut lui reconnaître un certain sens – si ce n’est un sens certain – du devoir, puisque le prêtre armé d’un missel et sans se démonter outre mesure, entonna son sermon habituel.
  13. Raah prem's! Après mes deux défections successives sur les dernières éditions, j'espère bien y arriver ce coup-ci ! Vivement le sujet ( puisse ma muse le trouver à son goût) Edit : ben merde, deuz en fait... Tu me le paieras Hex' Sur ce, Waz, a++
  14. Waz

    Les Couloirs de Khaine

    Ca faisait un bout de temps que je m'étais promis de le lire, ce texte-ci. Eh bien, pour le coup je n'ai pas été déçu. Si le fond très SoKien ne m'a pas cloué sur ma place, c'est suffisamment SoKien, justement, pour être captivant, et le tout est servi par un style (SoKien, encore, nondidiou) auquel j'accroche tout à fait Excepté les références mythologiques qui m'ont gêné ( trop poétique en un sens) par leur trop grand nombre, j'ai lu tout ça sans m'en apercevoir, et, arrivé à la fin, j'en demandais encore. Pas des tonnes, mais j'en demandais. Donc oui, j'aime, et oui, j'en veux d'autres, même si oui, fais gaffe au too much par endroits. Sur ce, Waz, a+
  15. Waz

    La Machine infernale

    Rebonjour à tous, Encore et toujours du retard (je ne me donne même plus la peine de trouver une excuse, tiens, d'ailleurs je n'en ai pas plus que Celt lorsqu'il s'occupe de l'A-M). Ca n'est toujours pas bien long, mais bon, comme dirait Noiraud, "Trop est l'ennemi de bien". Bonne lecture Il dut bien reconnaître que les premiers plis lui passèrent totalement au-dessus de la tête. Ni le cœur ni l'esprit n'y étaient, et, sans nier l'annihilation totale de son jeu, il appelait à sa défense quelque maigre excuse sensée lui sauver la mise. Difficile en effet de se concentrer sur une tâche aussi exigeante qu'une partie de carte perdue d'avance alors que le cerveau - encore lui, décidément rien ne l'arrête - refuse de coopérer. Il préférait en l'occurrence divaguer sur la raison de sa présence en ces lieux infâmes, à savoir l'espoir tout juste justifié de voir son projet agréé par l'Oracle. Un projet audacieux, mais qui avait réussi à séduire les hautes autorités de l'enfer. D'aucuns le qualifiaient de fou, en reconnaissant toutefois qu'il avait pour lui son originalité et, dans le cas peu probable où il aboutirait, une efficacité certaine. Et voilà qu'il sapait tout cela par une nonchalance boudeuse, il repoussait la chance de sa vie à cause d'une puérile aversion pour les jeux de cartes. Il était mal parti, autant le dire tout de suite, les plis s'enchaînaient sans qu'il ne parvînt à arracher aucun point. L'agaçante manie des deux vieux de deviner son jeu empêchait tout coup bas, toute subtile sournoiserie à même de renverser le cours des choses, et alors que les défaites successives s'acheminaient doucement vers une issue pour le moins fatale, Noiraud vint à sa rescousse. Tel Platon prodiguant ses absolues vérités à son auditoire béat, il rompit le silence concentré d'un éclat de sa fragile voix : - Moult dépenser, rien gagner ni acquérir, fait l'homme en son pain guérir ! En lieu et place du silence ébahi devant en toute légitimé s'installer en de telles situations, ses deux comparses renchérirent de plus belle : - De toute évidence ! - Mais oui, mon petit ! - Où il n'y a pas de blé, il n'y a pas de pain ! - Bien évidemment ! Et les trois vieux de s'exclamer dans la même veine pendant près d'une minute, minute que Naïf mit à profit pour rafler une demi-douzaine de plis sans que ses adversaires ne bronchassent. De son côté, Noiraud prenait le large et dominait tout le monde par une frénésie inexplicable que personne ne semblait en mesure de stopper : - Qui ne tente rien n'a rien ! Oncques tripière n'aima haranguère ! Méchante femme fait mauvais ménage ! Qui vole un œuf vole un boeuf ! - Très certainement. - Qui dort, dîne ! Qui sème le vent récoltera la tempête ! Au royaume des aveugles les borgnes sont rois ! Et ainsi de suite, sans interruption aucune, pendant plusieurs dizaines de secondes. Naïf se lassa assez vite de cette avalanche, toute salutaire qu'elle fût, et se permit un léger toussotement exprimant plus d'ennui que n'importe quelle interruption. Il allait à l'instant de mettre un terme à la partie en remportant l'ultime pli synonyme de victoire. - Hé ! messieurs... hem, excusez-moi, mais pourriez-vous prêter un moment attention à cette partie? Il me semble que nous en arrivons à son dénouement. Ordinarius et l'Affirmateur - appelons-le ainsi, "le troisième frère" étant à la longue un peu lassant - cessèrent immédiatement leurs exclamations enthousiastes. Ils scrutèrent les cartes d'un œil méfiant, soupçonneux, et toisèrent Naïf d'un air qui ne trompait pas sur leurs pensées. Si ce retournement de situation n'avait rien de très orthodoxe, il n'était pas non plus charitable de le dévisager avec une l'intention peu louable de l'asperger de goudron et de plumes. Après tout, Naïf n'y était pour rien, si quelqu'un devait être à blâmer, Noiraud constituait la cible la plus évidente. Pas de blague, hein, il n'y était pour rien. Il pouvait l'assurer, preuve à l'appui. C'est pas moi, m'sieur. - Bien. Finissons-en, alors, mon petit. L'air sinistre d'Ordinarius ne disait lui rien qui vaille. Il sentait venir le coup tordu, venu des tréfonds de sa prescience, suffisamment vicieux et alimenté par la rancœur pour renverser une fois de plus la situation - à son désavantage, cela va de soi. Ordinarius leva sa carte d'un geste théâtral, et je ne peux que conjecturer ce qui se passa alors. Son geste manqua sans doute de retenue, d'une maîtrise perdue dans les bas-fonds de sa rancune, mais il déclencha quelque chose d'inattendu. Peut-être avait-il coupé une corde du Destin avec le tranchant de la carte ; peut-être que cela avait à voir, sait-on jamais, avec un quelconque caprice de la Fortune ; peut-être que je subodore à côté de la plaque ; je n'en sais rien. Toujours est-il qu'à la place de l'as de Pique indispensable à sa victoire, Ordinarius joua un vulgaire deux de carreau, laissant par là la victoire à un Naïf au moins aussi surpris que lui. L'Affirmateur blanchit à vue d'œil en contemplant la carte barbouillée de deux tâches rougeâtres. Il ouvrit la bouche une ou deux fois sans rien dire, avant de lâcher comme par inadvertance : - De toute évidence... Sur ce, Waz, a+
  16. Waz

    La Machine infernale

    Encore plus long pour cette fois-ci, à ce rythme je vais finir par faire quelque chose de convenable Sinon, après relecture, il est vrai que le précédent passage fait un peu trop Lovecraftien, je corrigerai ça un de ces jours. Ah, et aussi : J'me demande bien à quoi ça sert que je torde ou que j'étire, hmm, tu trouves quand même... Ferai plus dur la prochaine fois Bonne lecture Face à face, parfaitement identiques, immobilisés par leur concentration, ils étaient insensibles au monde extérieur. Pourtant, avec la vague de froid de plus en plus intense qui traversait le pays, Naïf s’interrogeait sur leur capacité à survivre bien longtemps, habillés comme à leur habitude d’un seul pagne orné de dentelles. Peut-être leur longue barbe blanche, qui dégoulinait sur leur torse les protégeait-elle quelque peu. Ou plus vraisemblablement l’épaisse couche de crasse qui les couvrait des pieds à la tête. En tout cas, le climat ne semblait nullement les gêner et ils vivaient toujours au gré de leur routine millénaire, aussi Naïf patienta au milieu de la pièce, sachant pertinemment qu’il serait inutile de les aborder tant qu’ils n’auraient pas remarqué sa présence. Le troisième des frères, adossé à la fenêtre, celui qui logiquement aurait du être le plus à même de s’apercevoir de l’intrusion, rêvassait en bafouillant quelques mots aux carreaux ébréchés. Oh, bien sûr, il arriverait un moment où l’infernal trio émergerait de sa bulle, mais quand cela se produirait restait un mystère que des années de statistiques n’étaient pas parvenues à élucider. Cela se produisit environ un quart d’heure après son arrivée, alors qu’il avaient conclu une trêve tacite – et éphémère, chacun savait que la paix ne se ferait qu’avec la fin de leur partie, que de nombreux observateurs attendaient depuis maintenant plusieurs siècles. L’oracle se réveillait enfin, et daignait se rendre compte de la présence d’un spectateur. - Mais n’est-ce pas le petit Naïf qui vient là ? brailla le premier des triplés, Ordinarius de son état. - De toute évidence. » Le frère n’avait jamais voulu révéler son nom, mais on le reconnaissait par son style inimitable, bien qu’il s’en défendît vigoureusement. - Alors mon petit, qu’est-ce qui t’amène ? » La voix d’Ordinarius ne semblait pas pouvoir restituer de son grave. Ses stridents « mon petit » étaient réputés de par le monde pour les pulsions meurtrières immédiates qu’elles provoquaient. Les enfants atteints de timidité excessive effectuaient souvent un pèlerinage éducatif dans cette masure, dans le but de libérer leurs instincts profonds, et il fallait reconnaître que malgré l’influence parfois discutable du traitement, les résultats se révélaient probants, si ce n’est plus. Sans doute était-ce une sorte de test qui sélectionnaient les personnes dignes de recevoir l’oracle. - Une affaire de la plus haute importance, j’en ai peur, répondit Naïf. - Pierre qui roule n’amasse pas mousse ! » Et voilà le troisième qui s’éveillait. Noiraud – car tel était son nom, en total désaccord avec sa voix blanche et l’albâtre de son teint– et ses proverbes, Noiraud et ses maximes, Noiraud et ses énigmes. Impossible d'en tirer quelque chose qui n’entrât pas dans une de ces catégories, ou du moins qui n’y fût étroitement affilié. Ca n’était pas faute d’avoir essayé, pourtant, presque tous ses interlocuteurs lui avaient tendu une perche subtile, avaient tenté de stimuler ses passions ou avaient posé une question n’admettant que « oui » ou « non » comme réponse. En vain, il était l’inaltérable roc, l’invincible pilier de la langue qui, s’il répondait à côté du sujet la plupart du temps, ne tombait dans aucun piège, aucun chausse-trappe sournoisement placé. Et bien évidemment, comble de la commodité, il constituait le principal intermédiaire – l’Elu si vous voulez - de la voix Divine qui lui dictait ses oracles. Un sacré numéro, bien qu’il ne jouât pas volontiers aux cartes. - Allez, prends vite place, reprit Ordinarius, sinon on sera obligé de commencer sans toi. - Hé ! Noiraud ne joue pas ? - Ne mets pas la charrue avant les bœufs. - De toute évidence. Une vraie maison de fous. Naïf n’avait qu’une envie, finir cette corvée le plus vite possible. Toutefois, rien de tel n’était envisageable. Quel intérêt que celui d’un oracle s’il prodigue ses visions comme l’on profère des blasphèmes ? Point de vulgarisation de la divination pour ces messieurs, l’art est quelque chose qu’on se doit de défendre avec l’acharnement du chien qui a confondu l’os et le pied de chaise. Non, point de décentralisation de la prescience, jamais. « Trop est l’ennemi de bien » dirait Noiraud. Naïf s’assit lentement. Autant accomplir cela avec dignité si ce n’est avec hypocrisie, à défaut de motivation. Le rituel débuta. Il s’agissait en l’occurrence d’un partie de cartes tout ce qu’il y a de plus classique. Basée sur un système de plis d’une banalité consternante, et se contentant de la défaite d’un des participants pour tout dénouement. Le principal intérêt se situait ailleurs ; les vieux n’étaient pas oracles pour le prestige de la fonction, ils devinaient tout à l’avance, du big bang au jeu de l’adversaire, et cela, hideux favoritisme de la nature, de façon illimitée. Leurs parties s’en trouvaient rallongées en conséquence, quelque supplique ou prière qu’on lançât à diverses divinités, le Diable trouvant ces épisodes bien trop amusants pour y mettre fin. Ordinarius distribua les cartes d’une main experte en caquetant comme jamais et la partie commença, au grand désespoir de Naïf. Sur ce, Waz, a+
  17. Waz

    La Machine infernale

    Tout d'abord merci aux nombreux commentaires, auquel je vais brièvement répondre, avant de vous livrer la suite @ Inxi, c'était indépendant de ma volonté, tu verras avec ce morceau là que je me devais de faire une coupure nette avec les parties précédentes. J'aurais pu faire plus long, mais j'ai préféré laisser macérer et assurer la continuité Pour ce coup-ci, j'ai augmenté la taille de 1000 signes, je ferai encore mieux la prochaine fois. Peut-être un peu moins franc que ça, mais il ne saurait tarder J'espère bien arranger ça dès aujourd'hui Bon, trêve de private jokes et consorts, la voici la voilà, la suite ! Bonne lecture Eh bien. Vous qui, l’esprit en éveil et les oreilles tendues, suivez ce récit depuis sa naissance, en arrivez à son tournant. Je pourrais, bien sûr, vous livrer la suite comme l’on nourrit des caïmans de bouts de chair sanguinolents ; je le pourrais. Mais ne serait-ce pas trop facile ? Oubliez votre cerveau qui vous dicte une véhémente négation, rejetez son irresponsabilité et pensez par vous-mêmes. Rien qu’un effort, certes inhabituel mais je gage qu’il vous apportera plus qu’une simple fatigue. Ah, voilà que la vérité se dévoile. Pas si difficile, n’est-ce pas, pour peu qu’on le veuille. La volonté est maîtresse de vos pensées, bien plus dominatrice que tous les cerveaux du monde, et aussi peu nombreux soient les gens qui vous l’affirmeront, eux seuls seront dans le vrai – étrange paradoxe que celui-ci. Aussi comprendrez vous sans doute plus aisément les doutes qui me tiraillent, ainsi que ma soumission forcée à des forces supérieures qui vous dirigent tout autant qu’elles me torturent. Ce que j’ai nommé « forces » tendraient plutôt à être des facettes spirituelles de notre « nous », et sans sombrer dans des délibérations sans fin de métaphysique - allons, je vois bien que le rationnel vous convient mieux, ne le niez pas – je résumerai leur rôle à celui de tourmenter tout un chacun. Ce sont d’ailleurs elles qui vous font doucement glisser vers l’ennui alors même que je vous conte tout cela, elles qui détournent votre oreille et votre œil de la vérité, malgré mes efforts pour les en empêcher. Et, par une chaîne de causalité que je ne saurais détailler, me forcent à continuer de narrer les aventures de Naïf à mon corps défendant. Je ne céderai toutefois pas sans combattre! Ce serait bien le diable si je ne parvenais pas à manifester mon désaccord, ma liberté par un acte de résistance tout futile qu’il fût. Oui, le Diable ! Quel que soit son nom, beau ou repoussant, c’est le Diable dont je cherche à me détacher ! Je serai libre ! * * * * * * Naïf était perché sur le promontoire surplombant la vallée du Styx. Il s’abandonnait depuis un moment à la contemplation de l’activité frénétique de ses congénères, s’agitant vainement à des dizaines de mètres sous ses pieds. Il savait très bien qu’aucun d’entre eux n’aurait jamais la chance, ni même l’espoir de parvenir à ce qui était désormais sa position. Plutôt reluisante, ceci dit, et porteuse d’une foultitude d’avantages. Cela était en un sens normal, puisqu’il leur avait été supérieur – dans le cas contraire, leurs rôles n’auraient-ils pas été inversés ? Mais tout de même, une telle différence… Naïf s’arracha à sa béatitude distraite. Cela ne lui ressemblait pas de regretter quoique ce soit. Il ne savait même pas ce qu’il regrettait. D’ailleurs, regrettait-il vraiment quelque chose ? A quoi bon se poser toutes ces questions ? Cela non plus ne lui ressemblait pas. Jamais il n’avait eu cette impression de se noyer dans des questions sans but, ou sans signification – le choix est libre. Le premier intermédiaire à cette inexplicable mélancolie qui lui vint à l’esprit fut de retourner à des préoccupations plus matérielles, autrement dit le travail. Les vieux l’attendaient. Son travail, outre le fait qu’il ait changé du tout au tout, s’était logiquement accompagné d’une augmentation sensible de son salaire. Sans doute pourrait-il bientôt se payer un voyage à la surface. Un court séjour parmi les vivants le ravigoterait et avec un peu de chance, il en ramènerait un ou deux en souvenir. En attendant, le boulot l’appelait de son cri de sirène, modulé en conséquence de sa nouvelle fonction. Celui-ci lui paraissait plus suave, plus masculin que l’ancien, peut-être un peu déformé, un peu factice. Enfin, il avait horreur de se répéter, mais les vieux l’attendaient. Leur cabane se situait à deux pas de là, à flanc de montagne – cliché oblige. Naturellement, elle était salement décrépie. On se demandait comment ses murs de bois rongé jusqu’au cœur tenaient encore debout, et de plus solidairement avec la porte. Toujours est-il que Naïf se dirigea droit vers elle, un sentiment d’héroïsme bien difficilement réprimé au fond du crâne. Il savait à quoi s’attendre lorsqu’il entra, il était déjà venu à maintes reprises, mais il n’arrivait pas à s’habituer à l’état franchement miteux de l’ensemble. Le seul qualificatif qui lui venait à l’esprit pour décrire ce genre de foutoir empoussiéré se dérobait par peur de ne pas être à la hauteur ; il se rabattait donc sur un dérivé non moins représentatif : « pire que l’extérieur ». C’était certes un supplice visuel, auditif, en bref, sensoriel, mais au moins les vieux étaient là, perdus dans une de leur fameuses parties de cartes sans fin. Sur ce, Waz, a+
  18. Waz

    La Machine infernale

    Me revoilà après quelques semaines (trois, si je ne m'abuse) d'absence, dues à une coupure internet impromptue et magnifiquement organisée par Notre Maître à Tous, Free. Bref, je me rattrape avec une courte suite. Courte, oui, même avec trois semaines de battement, car cela m'est dicté par le découpage du texte. La bonne nouvelle, si tant est que la précédente ait été mauvaise, est que la suite est par conséquent presque finie. Bref, bref, je m'arrête de causer et je vous livre la bête. Bonne lecture « Des idées ?» Un lourd silence tomba sur l’assemblée. Un silence affreux, de ceux que l’on n’apprécie pas chez les humains comme ailleurs, portant sa part – large, je n’en doute pas – de doutes et de soucis. L’absence de son est pourtant en général liée à un sentiment de paix et de sérénité : le cerveau serait-il sélectif en ce qui concerne le calme ? capricieux organe que celui-là, qui aime à jouer avec nos nerfs comme sur un piano mal accordé. A ceci près qu’il a sa place sur le bateau, et que la joie d’avoir provoqué un naufrage se noiera à coup sûr dans des tourbillons de regrets, autrement plus mortels. Quoiqu’on en dise, le cerveau est inconscient. Le cerveau est irresponsable. Et c’est pour cela qu’on l’aime en enfer, pour cela qu’on le laisse mener la barque vers les cataractes du profit. Enfin, je m’égare, revenons à notre sujet, sinon je crains de vous occuper quelques heures supplémentaires. « - Pourquoi ne pas déclencher l’Apocalypse ? » Ah, un puriste, pensa Naïf. Un amateur de faits clairs et efficaces. - Nous avons évoqué cette possibilité, mais Ils pensent que le moment n’est pas venu. La situation est certes critique mais pas encore désespérée », répondit le Luciférion sans ciller. C’est déjà çà de pris, se dit Naïf. L’Apocalypse lui paraissait être une solution vraiment expéditive et par là trop précipitée. Certes, les Plaies garantiraient un afflux important d’âmes fraîches, et le nombre de fidèles s’accrochant à la religion comme ultime espoir de survie s’accroîtrait, mais ce plan avait ses inconvénients. Non seulement le Paradis profiterait autant des nombreux décès, mais c’était même certain qu’il en tirerait une influence non négligeable. En effet, il était prévu que les fidèles auraient davantage tendance à se tourner vers le Paradis et son parterre de Saints plutôt que vers Satan et sa légitime puissance. Une décision qui aurait pu être inversée, si un vulgaire espion industriel n’avait pas divulgué, sur un coup d’éclat tout aussi vulgaire, le projet Apocalypse à Saint-Pierre alors qu’il était encore en gestation. Ce qui promettait d’être le coup de grâce porté au Paradis s’était métamorphosé en une lame à double tranchant, dont le fil émoussé se tournait vers le ciel. Par la faute d’un insignifiant sous-fifre, Jean de son prénom et canonisé pour l’occasion. Non, ce genre de solution ne résoudrait rien, c’était tout au plus une arme inutile aux accents ampoulés, plus à même de tuer le mouton que de le tondre. Il y avait des alternatives bien plus aguichantes, et si elles ne daignaient pas encore se dévoiler au regard avide de son esprit, cela ne saurait tarder. Peu importe, il avait un peu de temps. L’enfer n’avait pas été créé par un idiot, des mécanismes de secours se déclenchaient en cas de crise. Incroyablement bien conçus, qui plus est. L’un des plus marquants, et dans une moindre mesure, des plus amusants : l’enfoncement progressif de l’enfer provoquait des séismes un peu partout à la surface de la Terre, livrant par voie indirecte quelques proies faciles, qui elles-mêmes déclencheraient destructions et calamités lorsque la chaleur infernale remonterait. Machiavélique à souhait, l’œuvre d’un esprit supérieur à n’en pas douter. Cependant, Naïf avait la conviction que la solution « miracle » - aussi antinomique que cela pût paraître – devait provoquer davantage que quelques morts violentes. Un embryon germait peu à peu, et, dans l’espoir que l’irresponsabilité cérébrale n’atteignît pas le fringuant bourgeon, il se fit immédiatement remarquer. Sur ce, Waz, a+
  19. Waz

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    Allez, je cède à la tentation (raaah même la peur des lycanomorphes ne suffit pas à me retenir), affaibli par tant de compliments, et je réponds à mes lecteurs avant mon prochain épisode. Certes, mais avant qu'il n'atteigne un point suffisamment chaud pour compenser la perte d'énergie (je n'ai plus les chiffres en tête, mais je crois qu'il s'agit plus ou moins de quelques degrés tout les 100 mètres de profondeur ; ma prof de S.V.T. ne serait pas contente) l'enfer sera tout de même parvenu à un point difficile d'accès... ce qui empêchera les dernières âmes "fidèles" d'y aller, et donc de forcer encore le refroidissement. Bon bien sûr, il arrivera un point où l'enfer ne descendra pas plus, mais il risque d'y faire trop chaud (le comble), et surtout il sera isolé du monde, donc inutile voire oublié. Ce qui n'est pas le cas du Paradis, qui lui au pire heurtera le sol mais restera en course pour la chasse aux âmes humaines. Il fait plus chaud à la surface que dans le ciel, mais j'imagine que ça ne fait pas grande différence comparé au contraste surface/noyau terrestre. Oui, dans le sens où les âmes ne vont pas sur un marché, dans lequel diablotins et angelots font leurs emplettes . Ce sera ptêt développé plus tard, mais les âmes sont reparties entre Enfer et Paradis selon leur "qualité" : des aficionados de Jésus ont peu de chance d'aller voir Satan, au contraire d'un sataniste accompli (excepté cas exceptionnel comme la peste noire). Donc les fidèles sataniques font "remonter" l'enfer car ils sont des valeurs sûres qui gonfleront le "chiffre d'affaires infernal", au contraire du péquenot lambda, dont le sort est indécis. Voilà, j'espère que j'ai été clair, sinon merci encore pour vos encouragements, et à bientôt pour un prochain épisode Edit : Lib, ceux-d'en-haut désignent les hommes, pas les anges Ceci dit, merci pour les infos, ça peut toujours servir, et considérant que le péquenot lambda (encore lui) n'est pas plus calé que moi dans les appellations du Diable, j'imagine que tout est justifié (il l'appelle comme il le veux). Un peu facile mais pas si faux, non? Sur ce, Waz, a+
  20. Waz

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    Allez, une suite pour la route. On avance un peu plus dans l'intrigue, une fois n'est pas coutume. Merci encore de vos commentaires positifs (pour ne pas dire dithyrambiques pour certains d'entre eux ), ça fait réellement plaisir. Certaines transitions sont peut-être perfectibles, et les changement de temps déroutant, mais bon, j'attends de voir ce que vous en pensez. En espérant maintenir la qualité et ne décevoir personne. Bonne lecture Avant tout, je tiens à préciser que je me permettrai sans doute d’émailler ce discours de quelques précisions, les jugeant indispensables pour la compréhension des mortels. Il n’a jamais été aisé de saisir les allocutions des différents Luciférions, et celle-ci ne fait pas exception. Maintenant, puisque vous êtes prêts, allons-y. En préambule, le Luciférion débuta par la présentation de rigueur, rituel immuable s’il en est. « - Moi, Luciférion le soixante-et-onzième, mandaté en bonne et due forme par la présente et selon Leur volonté ; que Leur volonté soit faite, que grâce Leur soit rendue ; Leur justice est toute puissante. » Une interruption, déjà. Qui est ce « Leur » me demanderez-vous. Eh bien, pour faire court, rien moins que le diable ne personne, certains l’auront certainement deviné. Pourquoi « Leur », à présent ? c’est une vieille question, et plus simple qu’il n’y paraît. En réalité, cela est dû à ceux-d’en-haut, qui, dans leur enthousiasme et leur précipitation, nommèrent le Malin de différents noms, plus charismatiques les uns que les autres, sans se concerter. Méphistophélès, Belzébuth ou Lucifer n’en sont qu’un échantillon – représentatif, certes, mais minime. Quoiqu’il en soit, à cette époque fort ancienne, le Diable ne savait lequel choisir, tous lui plaisaient, et, pour trancher définitivement, il dut faire appel à son Ego, instance suprême en toute matière. Mon Dieu ! Quel dilemme ! Cependant, à la hauteur de sa réputation, son Ego lui conseilla non pas de porter son choix sur l’un de ces patronymes, mais de les garder tous, ce qui en outre lui permettait de s’attribuer en tout légitimité le « Nous » royal, écho flatteur dont il ne se priva pas. Et depuis lors, on l’appelle ainsi, ce qu’il estime être à sa mesure et que personne ne conteste. Bien, poursuivons (je ferai plus concis à l’avenir, par souci de votre bien-être, mais ce point devait être clarifié). Je pourrais, bien sûr, vous offrir un compte-rendu exhaustif du reste de l’allocution, mais cela me semble par trop fastidieux et je propose plutôt un résumé, tout aussi complet sans pour autant tomber dans l’ampoulé et l’apostrophe à outrance. Oui ? très bien, tant mieux. Cela donnait donc plus ou moins : « - Vous qui êtes assis devant moi, l’élite de ces terres, n’avez sûrement pas manqué de remarquer les variations climatiques qui se font actuellement ressentir. » Naïf hocha la tête de concert avec l’assemblée, mais fut certainement le seul à maudire Charon pour son extravagante lucidité. Le vieux avait tapé dans le mille, autant le reconnaître. Plus fiable qu’une grenouille en ce qui concerne la météo de l’avenir, apparemment ; il avait de l’avenir dans la météo. « - Rassurez-vous tout de suite, ces dérèglements n’ont rien de mystique, ils sont tout à fait naturels et là se situe d’ailleurs le problème. En effet, messieurs, la cause de tout cela est vérifiable, tangible dirais-je même, et je vous la donne en mille. - La diminution de l’affluence des âmes damnées, marmonna quelqu’un au fond de la salle (ne dit-on pas que la vérité vient du fond des choses ?) - Bingo ! (pardonnez cette trivialité, aussi irrésistible qu’intraduisible) Vous n’êtes sans doute pas sans savoir que nous ne devons notre célèbre chaleur qu’à l’afflux constant d’âmes « fraîches ». Leur activité, plus ou moins forcée, dégage une considérable quantité d’énergie, à la base de notre climat torride. Leur seule présence garantit une certaine stabilité par la chaleur qu’elles émettent même au repos. Elles sont donc indispensables, vous l’avez compris. Une baisse significative de ces deux facteurs, activité et quantité, provoquerait une phénoménale baisse de température, peut-être notre mort à tous – spirituelle tout du moins – en plus de celle de Nos maîtres, et en outre l’enfoncement progressif de l’enfer vers le centre de la terre. Eh oui, qui dit plus froid dit plus dense, si ce n’est plus lourd. Or, toutes ces joyeuses perspectives (ironie ajoutée par mes soins, ce n’est vraiment pas le style de notre ami Luciférion) ne sont plus si lointaines que ça. Notre Bureau Administratif Dominant a recensé une chute de l’afflux d’âmes de l’ordre de 25,54%, qui a entraîné une baisse de près de 17,92% de l’activité. Si l’on ajoute à cela l’imminente dégringolade de productivité de nos équipes de supervision, due à des conditions plus difficiles, on obtient des chiffres tournant autour de 30-31% de bénéfice en moins. Autant dire que c’en est fini de nous. Des solutions rapides s’imposent. - N’avons-nous pas déjà eu affaire à ce cas de figure dans le passé ? demanda l’un des voisins de Naïf, particulièrement calé en histoire économique. - Si en effet. Lors des accords d’Eden avec Saint-Pierre il y a quelques siècles. Nous avions choisi de regonfler le nombre de morts en chute en lançant la Peste Noire dans les rues. Une bonne affaire pour nous, qui avions négocié 60% des recettes au Paradis. - D’ailleurs, qu’en est-il du Paradis ? a-t-il les mêmes problèmes que nous ? - Inévitablement, ils en sont au même point si ce n’est pire. » Naïf s’imagina que la situation devait être cocasse chez leurs concurrents. Ils fonctionnaient sur un principe assez proche, mais devaient faire face à une contrainte supplémentaire : le sol. En effet, si le Paradis perdait de l’altitude à cause du froid, le moment où les cupidons iraient faire leurs courses à la supérette du coin ne se ferait pas attendre bien longtemps. A moins que Saint-Pierre n’utilise son domaine en tant que parc d’attraction nouvelle génération… « - En résumé, conclut le Luciférion, nous avons deux priorités. Tout d’abord renouer les contacts avec Saint-Pierre, pour discuter de tout cela ensemble. Vous n’avez pas à vous soucier de ce point, Notre maître s’en occupera incessamment. Votre objectif est plutôt de trouver un échappatoire aux calamités imminentes. Là encore, deux alternatives principales : ou gonfler le nombre de fidèles, ou faire exploser le taux de mortalité » Sur ce, Waz ,a+
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    L'Hypnophobe

    Le dilemme : ou mettre des dialogues pour accrocher le dernier carré des lecteurs, ou alors respecter le style Lovecraft (c'est-à-dire être lourd et affreusement indigeste) et continuer sur ta lancée A toi de voir, toujours est-il que sur le point formel, tu as le mérite de maintenir le rythme et de nous pondre une merveille de complexité sans cesse plus fastidieuse à lire que les précédentes parties. Tout cela, à prendre, bien sûr, comme un compliment Edit : autant pour moi concernant le fhtagn, je n'ai jamais été un inconditionnel de Lovecraft Sur ce, Waz, a++
  22. Waz

    L'Hypnophobe

    Coucou, Un texte très pur au sens lovecraftien du terme au programme... Le tour de force n'est pas d'écrire comme les plus grands, puisqu'il s'agit de l'imitation du pourtant inimitable style de Lovecraft, mais là c'est pari réussi : on s'y croirait vraiment, de l'ambiance aux tournures, très bien foutu. Le scénario aussi est dans la veine du maître, le type d'intrigue qui commence de façon banale (personne ne croit un personnage très bizarre, etc...) et j'imagine que ca va finir à coup de Ftaghn Cthulhu Bref, j'ai fait court par manque de temps, mais une suite ne serait pas de refus Sur ce, Waz, a++
  23. Waz

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    Je suis de retour de vacances, avec une suite à la clé (courte malheureusement, je n'ai pas été aussi productif que prévu). Je dois dire que ce n'est pas sans une certaine appréhension, étant donné le retour que j'ai eu sur l'intro, j'ai essayé de garder la même qualité Sinon concernant la réponse de Turgon, n'ayant jusqu'ici pas lu de Pratchett, c'est bien possible mais inconscient. Ah, Celt, Juger la finalité d'un texte sur son introduction me paraît un peu hâtif, non? Bonne lecture Naïf était un diablotin diablement banal ; le teint rougeaud, rehaussé par l’ivoire de deux courtes cornes purement décoratives, l’inaltérable expression blasée du cadre d’entreprise anonyme qui aime diriger sans être dirigé. Cela, bien évidemment, sans attirer le regard, sans faire de bruit, tout du moins au-delà de l’enceinte de son personnel. Affligeant de banalité, n’est-ce pas ? Allons, cessez de soupirer, la flatterie ne prend pas. Il était toutefois parvenu à un échelon respectablement élevé dans la hiérarchie infernale et, si l’on peut dire, occupait l’un des maillons directeurs de la chaîne alimentaire. Aussi, quand il se voyait convoqué à une réunion de prime importance, Naïf pouvait se permettre une certaine décontraction, due autant à l’influence de la routine qu’à celle, plus perverse, de la supériorité. Cela ne l’autorisait pas pour autant à négliger son apparence, et c’était dans une tenue impeccable – depuis l’immaculée chemise ignifugée jusqu’aux lunettes fumées – qu’il se dirigeait vers son lieu de travail. Les fameuses cinq minutes d’avance, celles qui différencient le compétent de l’incapable, auxquelles il s’astreignait avec un zèle motivé par l’ambition, lui permirent un petit détour sur les berges du Styx. Là, il patienta quelques instants, allumant une cigarette d’un geste désinvolte à partir de la lave qui gargouillait à ses pieds. Il savait savourer à leur juste mesure ces instants qu'il ne devait qu'à son propre mérite. Le bac accosta peu après dans un bruit peu engageant. Charon à la barre, l’éternel cancaneur affligé d’une pilosité aussi fournie qu’inflammable. Sacrifiant son mégot au cours tumultueux du fleuve, Naïf s’avança sur le radeau. - « Hé, Charon ! comment va ? - Mal, petit, très mal. - Ah tiens ? Qu’est-ce qui ne va pas ? - Tout, petit. Mes vieux os me font souffrir, et ça, je te l’assure, ça ne présage rien de bon. Jamais eu aussi froid depuis belle lurette. - Hé ! ça passera d’ici une ou deux semaines. - Que tu dis, petit ; je ne suis pas né de la dernière pluie, moi, bien que celle-ci remonte à des temps immémoriaux. Quelque chose de pas clair se prépare, c’est le vieux Charon qui te le dit. Et ce froid polaire n’en est que l’introduction. - Sans doute le réchauffement climatique, hein ? » Le vieux ne sembla pas goûter le trait d’humour. Bien au contraire, il se mit à ramer avec une énergie propre à faire tanguer l’embarcation. - « Tu parles ! Tout ça c’est bon pour les bonnes femmes d’en haut. » Il jeta un regard suspicieux sur Naïf qui faisait mine de ne pas le remarquer. « Toi, fais attention. Moque-toi si ça te chante. Vous aurais tous prévenus, qu’on se le dise. Dans le temps, ça n’aurait pas été la même chose, on me devait du respect ! » Naïf le laissa pérorer sur le passé pendant le reste du trajet, sa politesse naturelle l’obligeant à l’écouter d’une oreille, sans grande conviction. Prendre congé du vieillard fut un soulagement qu’il s’efforça à peine de dissimuler. Ben tiens ! il avait mieux à faire que d’assommer les gens avec le bon vieux temps et ses responsabilités envolées. Lui, il avait du travail, du travail sérieux, qu’on se le dise ! A vouloir le sauver, et par là même le monde entier, Charon n’allait parvenir qu’à le mettre en retard. Parfois, le vieux savait s'y prendre pour se rendre insupportable, cela tenait de l'exploit. Bref, mieux valait oublier tout cela et se reconcentrer sur ce qui importait. Moins de trois minutes plus tard, il entrait, le port altier et la mine fière, dans la salle de réunion. Eh, bigre ! tout le gratin se tenait là, debout ou assis, expansif ou silencieux selon ses convenances. Un effet des plus immédiats sur l’assurance de Naïf : il modifia sa posture en conséquence, gageant davantage sur l’obséquieux et les courbettes que l’arrogance et ses penchants naturels. Il louvoya entre chaises, bancs et supérieurs, distribuant flatteries et compliments à droite à gauche, la plupart du temps insouciant du destinataire. Sans doute liées à une longue expérience, ses manigances firent des merveilles, et il se vit octroyer une place de choix, au deuxième rang, bien en face de l’orateur, qui jusqu’alors brillait par son absence. Juste quand Naïf commençait à sérieusement espérer qu’il n’arriverait jamais, tout à son désir de retourner auprès des inférieurs, un nouvel arrivant fit son entrée – théâtrale pour le moins. Taille impressionnante, rictus grimaçant, cornes massives, en somme le Luciférion dans un de ses grands jours. Ah oui, c’est bien, le Luciférion, car contrairement à ce que l’on pourrait croire, le poste d’adjoint au diable n’est pas si fixe qu’il n’y paraît. Rien n’est plus éphémère que l’infernale médaille d’argent ; elle fond comme neige au soleil, ou comme gloire en enfer. Or, la brûlure de l'argent est indélébile et marque le corps et l'esprit. Quoiqu'il en soit, l'individu alors en place n’était pas vraiment réputé par sa bonté d’âme (ne serait-ce que car, à l’instar de beaucoup de ses spectateurs, il n’en possédait plus), sa réputation était des plus diaboliques – ne cherchez pas le pléonasme, voyons, alors que la perfection vous tend les bras. Toujours est-il que, machiavélique comme à son habitude, le Luciférion entra directement dans le vif du sujet. Edit : rooh y avait une répétition plus grosse que moi et tout le monde l'a laissée passer Edit 2:En effet, le "d'ailleurs" a été rajouté ultérieurement et apparemment, ca se voit. Comme quoi faut pas toujours se relire . J'enlève de suite Sur ce, Waz, a+
  24. Waz

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    Je transgresse la sacro-sainte règle qui m'empêche de répondre aux commentaires, mais me tapez pas, m'sieur Inxi, j'ai une bonne excuse. Tout d'abord c'est pour la bonne cause (pas mal celle-là, hein, avouez que vous l'aviez pas vue venir), et ensuite je n'aurai pas le loisir de le faire avant un petit bout de temps, vacances obligent, donc je bats le fer tant qu'il est chaud. Une petite erreur de temps il me semble: ton introduction est au futur hormis cette phrase. Je pense qu'il faudrait dire: "l'un parce qu'il aura tenu son adversaire en échec". Hm en effet, mais c'est voulu . A prendre comme un présent de vérité générale, car c'est ce qui se passe toujours (enfin, tout du moins toujours dans ce texte ) dans cette situation. Hm oui, j'avais pensé que c'était peut-être pas la meilleure idée de faire une sorte de double introduction. Parce que c'est de ça dont il s'agit. En gros, le "je" du début du texte introduit le cadre, l'enfer, avec son petit laïus, et ce cadre n'est lui-même que l'introduction à l'intrigue elle-même ( je sais pas si c'est très clair ) Enfin, en tout cas ce n'est pas une erreur. Il faut voir toute le passage de l'arrivée en enfer comme l'introduction de l'histoire que le narrateur est censé raconter. Certes, le petit passage du départ n'est pas tout à fait indispensable, mais je pense que c'était une bonne manière de plonger dans l'ambiance. Bon, sinon, pour les deux dernières remarques, auto-flagellation doublée puisqu'elles sont essentiellement dues à une absence de relecture Merci en tout cas de ton commentaire EDIT : Oui, la répétition était volontaire, en partie pour souligner que ce qui se trouvait avant n'était qu'une seconde intro. Sinon, je vais voir pour clarifier tout ça Sur ce, Waz, a+
  25. Waz

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    Je suis de retour avec un petit quelque chose pour vous, sous forme de texte Avant tout, quelques conseils d'utilisation : Ceci est donc l'un de mes textes*, et comme souvent, il y a peu (pas) de baston. Tout personne dépassant les 3/10 sur la Très Sainte et Très Belle Echelle du Bourrinisme du Vénéré Maitre Feurnard, s'abstenir. Pour changer aussi, c'est essentiellement de la description, bien que sur ce coup-ci ( qui sera plus long que mes précédentes nouvelles, conformément aux souhaits de Celt, et contre l'avis de son médecin) je promets un peu plus d'action dès le prochain épisode. Ah, à propos, pour cause de vacances imminentes, l'épisode en question risque de trainer un peu, ne désespérez pas Ah, encore, j'ai aussi cédé à la mode en passant sur le site de Petimuel pour faire péter la 'zik ( étrangement je l'avais jamais vue jusque là, faut croire que je suis un peu bigleux). C'est aussi pas mal différent de ce que j'ai l'habitude d'écouter, mais j'ai eu la surprise de reconnaitre quelque chose, Jan Garbarek ( désolé si j'écorche, c'est pas Dupont/d). Enfin, mes excuses à Hex' pour harcèlement récidivé *Produit dangereux. Veuillez respecter les précautions d'emploi. La Machine infernale Il y a des endroits où personne ne veut aller, ne serait-ce que pour la bonne raison que son emplacement demeure inconnu de tous. Mais pas seulement. C’est le genre de lieu qui hante les esprits alors même qu’on le sait inaccessible ; une menace latente qui plane sans cesse au-dessus de nos têtes, quelle que soit la distance, et qui n’a que faire des barrières naturelles. C’est la part immatérielle de l’endroit physique, infernal mécanisme que bien peu d’entre nous peuvent se targuer d’enrayer. « Infernal », oui. Le mot semble juste comme nul autre. Sûrement parce que l’enfer constitue l’exemple le plus évident de ces mystifications du tangible. Pourquoi l’enfer ? Sa présence permanente est irréfutable. On le sent toujours, ici ou là, hors de portée de bras, parfois de pensée, mais attentif. On l’oublie souvent, pas pour longtemps ; on aperçoit son spectre malicieux, dansant et narguant le monde depuis les sombres recoins de l’esprit collectif. Aussi fugitive soit-elle, sa pesante omniprésence se trouve difficilement contestable, et, de fait, rarement contestée. « Mais… », me direz-vous, et à cet instant je ne m’opposerai pas à cette objection naissante, pour la simple raison que tuer dans l’œuf une rébellion que l’on avait prévue prive de la gloire obtenue en la réprimant, « mais cette théorie ne tient pas debout ! ». (sans doute un discret sourire de triomphe anticipé de ma part à ce moment précis, la modestie ne figurant pas en tête de la liste de mes vertus) « Si l’enfer possède en effet une emprise bien réelle sur l’aspect spirituel de la chose, qu’en est-il de sa dimension physique ? » Sourire satisfait de part et d’autre de la lice, l’un parce qu’il a tenu son adversaire en échec, et l’autre car il sait que les rôles vont s’inverser dans les secondes suivantes. Inutile de préciser que bien souvent, le plus sournois est le gagnant. « - Vraiment ? », répondrais-je alors, avant de poursuivre de mon meilleur ton de conteur. « Alors, laissez-moi vous narrer une petite histoire qui fera sans nul doute changer votre façon de voir les choses. » Et je m’exécuterais de bonne grâce. Prenez comme point de départ le point que vous désirez. A partir de là, marchez dans la direction que vous voulez à la vitesse que vous voulez. De toute façon, et quels que soient vos choix, vous parviendrez un jour ou l’autre à un obstacle auquel vous vous heurterez sans échappatoire possible : l’océan. Que faire ? Eh bien, moquez-vous-en. Marchez depuis la marge vers les plaines abyssales – sans doute l’occasion d’admirer le paysage, mais s’éterniser ne sert à rien. Viendront ensuite les contreforts des montagnes enserrant la dorsale océanique, qu’il vous faudra franchir d’une manière ou d’une autre. Puis la descente dans le rift et l’arrivée au but : la dorsale elle-même. Il suffit alors de trouver un point de descente adéquat et de pénétrer dans les entrailles de la Terre. A noter qu’il est à cet instant fort probable que vous soyez morts, si ce n’est déjà le cas depuis longtemps, mais, rassurez-vous, cela n’entrave en rien la suite du voyage. Donc, une fois suffisamment descendu, vous aboutirez à un lieu communément appelé « chambre magmatique ». Cela n’est pas tout à fait exact, il serait plus juste de qualifier tout cela d’antichambre, terme plus à même de refléter son utilité. En effet, c’est ici que s’effectuent toutes les démarches administratives nécessaires à l’entrée en enfer, en plus de sa fonction supplémentaire de salle d’attente. En somme, c’est l’endroit rêvé pour faire connaissance avec la faune locale, avec qui vous traiterez sans doute pour quelque temps encore. Ames, en peine ou non, bien qu’il soit rare que les morts fraîchement décédés ne se ravissent d’aller en enfer ; diablotins, tous les clichés y passeront, et bien d’autres moins connus encore. Peut-être croiserez-vous la célébrité du site, Cerbère, que plus de deux millénaires de bons et loyaux services n’ont pas érodé. Enfin, peu importe, vous serez de toute manière amené à passer outre l’antichambre, que ce soit en guise de pensionnaire ou de simple visiteur, et alors vous déboucherez sur votre dernière étape, l’enfer proprement dit. Dans un lent mouvement de descente, une nouvelle terre se dévoile peu à peu. On raconte que les impressions ressenties lors de cette entrée sont mitigées. D’une part, on y observe l’enfer tel qu’on se le représente mentalement : de grandes plaines basaltiques striées de larges fleuves de lave, un territoire mort et inhospitalier, habité par toutes sortes d’entités maléfiques, depuis la vulgaire chauve-souris jusqu'à Lucifer en personne, en passant par Charon. Bref, une image infernale appropriée au lieu. On ressentirait même du soulagement à cet instant, finalement on pourrait presque se croire en terrain connu. On sait à quoi s’attendre. Et puis on regarde l’autre côté, et c’est là que la désorientation refait surface. Une terre recouverte de bureaux, de complexes, voilà ce qui se découvre à nos yeux. En s’en approchant jusqu’à rôder entre ces géants de basalte grouillants de vie, on constate que c’est à cet endroit qu’est le véritable cœur de l’enfer. Un cœur industriel, bureaucratique. On y travaille sans relâche, fixé sur on ne sait quel machiavélique objectif, on y trime ou on s’y repose selon son importance hiérarchique. On rédige des rapports, on demande que des rapports soient rédigés. Un système administratif dans toute son infernale splendeur. Une fois passée la surprise, on a très envie de regarder tout cela de plus près, partagé entre deux émotions. La première, pareille à celle qu’on éprouve devant les premiers pas d’un nouveau né : l’émerveillement ravi, prolongé de pensées attendries. Comment cela est-ce possible de la part d’un organisme que l’on croyait faible et inapte à tout exercice ? Tant mieux, tant mieux… Et alors vient la deuxième émotion, nettement plus désagréable. Tout cela, cette magnifique entreprise superbement organisée, que rien ne semble pouvoir arrêter ; tout cela manigance contre moi. Eh oui, c’est l’évidence même, quel autre but pourrait poursuivre pareille chose, excepté ma mort prochaine ou plutôt celle de mes proches, de mes semblables, étant déjà moi-même décédé ? Sur ces réflexions, on assiste à un changement de comportement assez étrange mais somme toute logique. On s’approche encore davantage de tout cela malgré notre dégoût. On veut connaître son fonctionnement dans les moindres détails, on a besoin, ô combien besoin de cette connaissance pour notre survie. Il faut être capable de contrecarrer l’horrible machination. Or, il est impossible de contrer l’inconnu. On part donc à la chasse du faible en quête du salvateur interrogatoire, qui déversera sa part de vérités porteuses de vie. Tout ce beau verbe pour exprimer la mort et le sang. Cependant lorsqu’on se rapproche suffisamment, jusqu’à isoler un unique individu, et ce dans l’inavouable but de le disséquer dans son intégralité, on voit apparaître devant nos yeux rougis l’histoire de ce petit être recroquevillé sur la terre consumée. Et c’est cette histoire que je vais maintenant vous conter, qui éclairera davantage votre esprit et votre âme que tout le sang recelé dans ce corps pourpré. Sur ce, Waz, a+
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